Séance du vendredi 1 novembre 2024 à 16h10
3e législature - 2e année - 6e session - 35e séance

PL 13475-A
Rapport de la commission de la santé chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le rapport annuel d'activité de l'Institution genevoise de maintien à domicile (IMAD) pour l'année 2023
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 31 octobre et 1er novembre 2024.
Rapport de majorité de Mme Jacklean Kalibala (S)
Rapport de minorité de M. François Baertschi (MCG)

Premier débat

Le président. Nous passons aux urgences avec le PL 13475-A, classé en catégorie II, trente minutes. La rapporteure de majorité, Mme Jacklean Kalibala, n'étant pas là, je cède la parole à M. François Baertschi, rapporteur de minorité.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Je pense que la rapporteuse de majorité est en retard, elle va arriver, mais en attendant, je vais commencer. Notre minorité a refusé le rapport d'activité de l'IMAD pour l'année 2023, parce que la directrice de l'IMAD s'est vu attribuer une indemnité d'un montant exorbitant. Cela a fait l'objet d'une grande polémique dans la presse, la présidente du Conseil d'Etat a dénoncé cette pratique.

Au moment du passage de témoin entre le conseiller d'Etat Poggia et le magistrat Maudet, le conseil d'administration de l'IMAD a octroyé cette indemnité en usant d'une ruse tout à fait inacceptable. Ce sont 170 000 francs d'indemnité qui ont été accordés de manière scandaleuse à la directrice de l'IMAD en 2023, somme qui avait pourtant été retenue pendant plusieurs années par le Conseil d'Etat, lequel y avait opposé son veto.

Profitant de la situation, le conseil d'administration de l'IMAD est intervenu de cette manière. On ne peut pas accepter pareil procédé; indépendamment de la gestion générale de l'IMAD, on ne peut pas prendre en otage une institution avec ce genre de pratique. C'est la raison pour laquelle notre minorité refuse le rapport d'activité 2023.

Mme Jacklean Kalibala (S), rapporteuse de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi traite du rapport d'activité de l'IMAD pour l'année 2023. L'activité de l'IMAD est essentielle pour notre société, particulièrement dans un contexte où les soins à domicile se complexifient, en raison d'une part du vieillissement de la population, d'autre part de la pénurie de soignantes et de soignants.

Malgré la grande capacité d'adaptation de l'IMAD, des défis importants attendent l'institution ces prochaines années pour répondre aux besoins de la population. Le développement d'outils modernes de coordination des soins et de communication interprofessionnelle sera fondamental pour le maintien de la qualité des prestations, et nous devons y être particulièrement attentives et attentifs.

Les objections soulevées par la minorité ne concernent pas l'activité de l'IMAD, mais sa gestion, et ne devraient donc pas donner lieu à un refus du texte. La majorité de la commission vous invite à adopter ce projet de loi en guise de soutien et de remerciement au personnel de l'IMAD pour la qualité de son travail et pour son investissement. Merci.

M. Pierre Conne (PLR). Chers collègues, pour que vous vous représentiez le travail qu'accomplit l'IMAD, je rappelle qu'en 2023, ce sont 18 000 personnes qui ont bénéficié des prestations de cette institution. Sur ces 18 000 personnes, 9000 avaient plus de 80 ans, 49% moins de 80 ans, et la moitié de ces 49% - c'est-à-dire le quart du total - avaient un âge inférieur à 64 ans. Cela vous donne une idée du spectre d'âge de la population concernée.

Ces dix dernières années, on a vu à la fois une population bénéficiant de soins à domicile vieillir, avec tous les problèmes liés à ce vieillissement - polymorbidité, difficultés dues à la maladie d'Alzheimer -, et un rajeunissement des personnes soignées à domicile en raison d'une augmentation des maladies chroniques comme le diabète, l'obésité, les troubles vasculaires et leurs conséquences à long terme. Ce contexte complexifie considérablement la prise en charge.

On observe que 10% de la population nécessite plus de quarante heures de soins par semaine, ce qui correspond traditionnellement à une hospitalisation, donc on peut affirmer aujourd'hui que l'IMAD offre des services quasi équivalents - pas pour des situations aiguës, mais pour des états chroniques - à l'hospitalisation, et ni les assureurs ni l'IMAD n'ont attendu une réforme du financement des soins pour délivrer ces soins à domicile avec un niveau de qualité tout à fait remarquable.

La limite de prise en soins pour la population âgée est clairement relative aux troubles cognitifs. Dès lors qu'une personne se met en danger ou met en danger les soignants, cette limite est atteinte, et là, il faut la plupart du temps procéder à des hospitalisations en psychiatrie gériatrique, mais pas forcément pour des séjours définitifs, dirons-nous.

Le défi pour les soignants, vous l'avez compris, c'est de suivre des situations extrêmement complexes telles que je viens de les décrire, qui combinent les effets à la fois du vieillissement et des maladies chroniques. Ces cinq dernières années, l'IMAD a mis en place un enseignement thérapeutique à domicile pour les personnes souffrant de maladies chroniques de manière à prévenir les décompensations et éviter des hospitalisations.

Le dernier point - et je terminerai là-dessus -, c'est que parmi la population plus jeune prise en charge à domicile, on voit de plus en plus de cas en lien avec des maladies oncologiques. Car oui, Mesdames et Messieurs, les pathologies cancéreuses augmentent, mais on vit de plus en plus longtemps et on guérit de mieux en mieux, tout en continuant malheureusement à souffrir d'une fatigue qui nécessite un maintien à domicile. Là aussi, l'IMAD a su s'adapter à cette évolution pour offrir les prestations nécessaires. Le PLR acceptera ce rapport d'activité et vous invite à faire de même. Je vous remercie de votre attention.

Mme Louise Trottet (Ve). Le groupe Vert votera également ce projet de loi pour manifester, une fois de plus, son soutien au travail essentiel accompli par l'IMAD. Cette mission est menée dans un canton faisant face à des défis qui ont déjà été bien exposés par mes préopinants. Je voudrais y ajouter le recul de l'âge d'entrée en EMS ainsi que la transition des soins médicaux vers l'ambulatoire. A cet égard, l'IMAD joue un rôle fondamental de rempart pour préserver les places à l'hôpital à destination des personnes qui en ont le plus besoin.

Voici un chiffre touchant issu de ce rapport que nous avons analysé en commission et que je voulais partager avec vous, Mesdames et Messieurs: en 2023, l'IMAD s'est occupée de près d'une centaine de centenaires.

Pour toutes ces raisons ainsi que celles évoquées par mes préopinants, il s'agit de soutenir le travail de l'IMAD, je vous invite donc à voter le présent rapport.

M. Marc Saudan (LJS). Le groupe LJS votera ce projet de loi approuvant le rapport d'activité de l'IMAD pour l'année 2023. En effet, le travail de l'IMAD est fondamental dans notre canton pour le maintien à domicile de nos aînés, et nous remercions d'ailleurs le personnel pour son dévouement. Cette institution sera d'autant plus indispensable à l'avenir en raison du vieillissement de la population et surtout de la bascule du stationnaire vers l'ambulatoire, tant pour les soins postopératoires que pour les nouvelles formules de l'hôpital à la maison, ce qui sera probablement source d'économies pour notre système de santé. Merci.

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Chères et chers collègues, je tiens à remercier la rapporteure de majorité ainsi que les orateurs qui m'ont précédé pour le soutien qu'ils manifestent à l'IMAD, laquelle remplit une fonction essentielle pour maintenir à domicile le plus longtemps possible et dans un environnement sécurisé tous les patients dont elle s'occupe.

Quelques mots afin d'expliquer la demande d'urgence. Il n'y avait pas de raison particulière, si ce n'est que les membres de la commission ont souhaité que ce rapport, qui porte sur 2023, soit traité en 2024, et non pas, comme nous en avons la détestable habitude, trois ou quatre ans après. Je pense que cet exemple pourrait être suivi par les autres commissions qui étudient les rapports des établissements publics autonomes.

La dimension salariale a été, semble-t-il, le seul point ayant hérissé les cheveux du rapporteur de minorité - bon, j'ai un petit peu de peine à les voir, mais je peux me permettre ce commentaire, puisque je suis dans la même situation ! Cette question a été posée par le groupe MCG à la présidence et à la direction de l'IMAD, ce qui a provoqué quelques haut-le-coeur chez certains députés, qui ont ensuite dit: «Il n'est pas normal de traiter des questions salariales dans un rapport d'activité.» J'ai répondu - et cela figure d'ailleurs au procès-verbal consigné dans le rapport, si vous l'avez lu - que lorsqu'on examinait le rapport d'activité d'un établissement public autonome, il n'y avait pas de tabous et que toutes les questions pouvaient être soulevées sans aucun détour.

Cela étant, cette question salariale a maintenant été réglée, et il est assez curieux de constater que le rapport de minorité a été déposé par le MCG, parce que si on peut reprocher au Conseil d'Etat certains dysfonctionnements à l'époque, une partie d'entre eux étaient dus au prédécesseur du responsable actuel du département de la santé.

Je terminerai en exprimant, une fois encore, tout l'attachement et l'admiration que je porte au personnel et à la direction de l'IMAD pour le travail remarquable qu'ils accomplissent année après année dans des circonstances difficiles et je vous recommande, au nom du Centre, d'accepter ce projet de loi. Je vous remercie.

M. Patrick Lussi (UDC), député suppléant. Qu'ajouter après les propos éloquents du président de la commission ? L'Union démocratique du centre est très attachée à l'IMAD et aux services qu'elle offre à la population, surtout à notre population vieillissante, à travers son soutien et les déplacements qu'elle effectue au quotidien. Le rapport 2023 que nous avons étudié sur le moment méritait, comme l'a relevé le président, d'être traité en urgence. Il ne faut pas mélanger l'activité de l'IMAD et tous les bienfaits apportés à la population avec une affaire dont la justice - ou la commission sur le personnel de l'Etat - s'occupe encore. Ce n'est pas à nous de trancher. C'est la raison pour laquelle l'Union démocratique du centre, dans sa majorité, votera le rapport 2023 de l'IMAD.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Certains pratiquent la politique de l'autruche, c'est-à-dire qu'ils préfèrent mettre la tête dans le sable pour ne pas voir la réalité, pour ne pas voir certaines choses qui dérangent. D'autres, notamment un préopinant - qui, pour le coup, me déçoit beaucoup -, déforment complètement une réalité qui, malheureusement, est très embarrassante pour le magistrat actuel, M. Maudet, parce que son prédécesseur, M. Poggia, avait refusé cette augmentation scandaleuse de l'indemnité de la directrice. Pour des raisons complètement fallacieuses qui sont couvertes par l'actuel conseiller d'Etat - hélas, je le déplore fortement -, cette hausse choquante a été ratifiée après coup.

Je pense qu'il faut un petit peu de bonne gestion dans notre Etat de Genève, gestion qui laisse malheureusement à désirer aujourd'hui. Ce genre de procédé n'est pas tolérable, et je maintiens mes éléments de critique, je les réitère, je les exprime de manière encore plus vive et avec encore plus d'inquiétude pour le fonctionnement futur de l'IMAD et celui de l'Etat de Genève. Je recommande le refus de ce rapport, parce qu'il ne faut pas cautionner des pratiques inacceptables. Merci, Monsieur le président.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, par rapport à ce qui vient d'être dit, à savoir qu'il ne faut pas cautionner des pratiques inacceptables, on aurait pu imaginer qu'il s'agissait d'une forme d'autocritique de la part du rapporteur de minorité, mais à bien le connaître, je crains que ce ne soit malheureusement pas cette finesse qu'il ait voulu exprimer.

Pour être très clair, Mesdames et Messieurs, j'ai hérité d'une situation non réglée de mon prédécesseur. Il appartenait au Conseil d'Etat, et pas à un seul magistrat, de la régler. Celui qui se trouve devant vous aujourd'hui, représenté par trois de ses membres, a assumé ses responsabilités et l'a réglée. Il ne revient qu'au Conseil d'Etat de fixer la rémunération. L'affaire traînait depuis des années, elle a maintenant été résolue. Vous considérez que c'est une augmentation, Monsieur le député, eh bien il s'agit en réalité d'une diminution, puisque le conseil d'administration précédent envisageait un traitement de 350 000 francs par année; le Conseil d'Etat l'a évalué à 310 000 francs. Point final.

Pour le reste, Mesdames et Messieurs les députés, il vous incombe, au sein des diverses commissions saisies du dossier LOIDP (loi sur l'organisation des institutions de droit public), de trancher définitivement la question de la rémunération des dirigeants. Je crois que la commission législative s'en occupe, tout comme celle sur le personnel de l'Etat. Le Grand Conseil devra un jour, sur la base des projets de lois sur son bureau, décider de cette question touchant le directeur général des HUG, celui de l'aéroport, et ce dans un esprit d'égalité de traitement qui a peut-être un peu manqué par le passé.

Ici, la situation est réglée. Au final, il y a eu un trop-versé non pas de 170 000 francs, mais d'un peu plus de 100 000 francs, qui doit faire l'objet de compensations de créances d'ici la fin de l'année et qui sera dès lors définitivement clos, on le souhaite. Cela ne doit pas occuper la majeure partie du bilan de l'institution - les députés qui se sont exprimés précédemment l'ont montré.

A mon tour, je remercie la rapporteure de majorité, le président de la commission de même que les députés qui ont pris la parole, parce que ce qui doit nous occuper, c'est la bonne gestion - et vous l'avez toutes et tous mise en avant - de l'IMAD, qui, année après année, permet de préserver un élément essentiel pour notre population, et pas seulement la population vieillissante, mais l'ensemble de celle-ci, à savoir l'autonomie. Permettre aux personnes de demeurer autonomes le plus longtemps possible a un impact également sur les coûts, comme le député Saudan l'a rappelé à juste titre. C'est la mission de l'IMAD, et celle-ci la remplit bien.

Cette mission est assurée par sa directrice générale, que je remercie et dont je salue l'engagement sans faille depuis plus de dix ans, ainsi que par ses collaboratrices et collaborateurs. On parle ici de plus de 2300 personnes, ce sont elles qu'il faut saluer, parce qu'elles sont confrontées au quotidien à des publics - le député Conne l'a souligné - qui, de plus en plus, sont touchés par des maladies neurodégénératives, par des problèmes complexes, par des situations de précarité. Voilà ce qui doit nous occuper, c'est ce débat-là; c'est cette situation que nous constatons avec vous, nous, le Conseil d'Etat, qui est gérée de façon plus que satisfaisante année après année, qui doit mobiliser nos forces et notre énergie. Merci de votre attention.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous procédons au vote.

Mis aux voix, le projet de loi 13475 est adopté en premier débat par 77 oui contre 13 non.

L'article unique du projet de loi 13475 est adopté en deuxième débat.

Mise aux voix, la loi 13475 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 76 oui contre 13 non (vote nominal).

Loi 13475 Vote nominal