Séance du
jeudi 31 octobre 2024 à
20h30
3e
législature -
2e
année -
6e
session -
33e
séance
RD 1591-A et objet(s) lié(s)
Débat
Le président. Nous passons à l'urgence suivante, à savoir le RD 1591-A et la R 1049. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.
M. Matthieu Jotterand (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Quand j'ai entendu les propos de l'excellent député du Centre Souheil Sayegh, les chaussettes m'en sont tombées. Il disait que le report modal serait une sinistre obsession. Je pense que c'est une bonne introduction pour ce rapport consacré au plan d'actions du réseau routier, car justement, il ne s'agit pas de sinistre obsession quand la question est de savoir comment nous organisons notamment notre réseau routier, qui est l'espace entre les immeubles et qui du coup englobe évidemment le réseau cyclable, le réseau piéton ainsi que le réseau de transports publics.
C'est l'espace où on circule entre deux bâtiments, si on veut. Je pense que cela illustre exactement ce qui s'est passé dans cette commission, dans le sens où c'est vraiment le plan qui a cristallisé le plus d'oppositions, puisque j'ai en face de moi non plus un seul rapporteur de minorité, mais deux, les deux étant certainement aussi vent debout l'un que l'autre contre ce plan; nous nous en réjouissons ! Ce plan découle de la LMCE, un compromis datant d'il y a une décennie et qui doit sûrement ne pas être si mauvais puisqu'il ne convainc complètement personne.
Ce plan d'actions contient surtout quelques adaptations à ce principe, notamment à l'intérieur de la ceinture urbaine, avec certains axes qui passent de primaire à secondaire ainsi qu'une extension de la zone 2, pour mieux correspondre à la zone urbaine. Se basant sur d'autres volontés politiques, il confirme aussi le bouclement de la ceinture urbaine et souhaite renforcer la fluidité en réduisant le trafic pendulaire, notamment au bénéfice du transport professionnel, dont on a parlé juste avant.
Evidemment, le point qui concentre beaucoup de débats, c'est la vitesse. Parce que justement, pour certains, apaiser le trafic, réduire les risques d'accidents graves, réduire les externalités négatives sur la santé, etc., c'est probablement une sinistre obsession ! Mais c'est simplement prendre soin de la santé des Genevoises et des Genevois; c'est en tout cas un élément qui semblait assez important à une partie de la commission.
Et puis, ce plan est aussi connecté aux routes nationales. Il acte le fait qu'on va continuer à oeuvrer, enfin, que certains ici vont continuer à oeuvrer pour la traversée de la rade - qui est complètement anachronique, mais qui permettra de densifier assez massivement la rive gauche, et ça, d'un côté, on ne peut que s'en réjouir ! - afin de permettre des financements fédéraux pour que ce projet soit réalisé. Nous nous réjouissons donc également de voir où débouchera cette traversée de la rade et quelle commune de la rive gauche se retrouvera avec une entrée d'autoroute à la place de son bord de lac !
Cela dit, on constate qu'un autre axe de route nationale cristallise actuellement les passions. Au début de cette séance plénière, nous avons vu que certains ici, notamment une partie du Conseil d'Etat, sont en faveur de l'extension des autoroutes. Par rapport à ce plan d'actions du réseau routier, qui doit permettre une diminution du trafic, notamment eu égard au plan climat cantonal, on peut s'étonner d'un soutien aussi fort de la part de certains à l'extension des autoroutes, alors même qu'on sait que ça créera du trafic induit, que ça amènera beaucoup plus de voitures...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Matthieu Jotterand. ...sur le réseau routier genevois. Du coup, les velléités de réduire le trafic pendulaire vont complètement voler en éclats si on vote oui le 24 novembre à l'extension des autoroutes. Il faut donc évidemment voter non à cette proposition néfaste, qui induira beaucoup plus de trafic. Voilà, je terminerai comme ça, en ayant moi aussi fait campagne pour le 24 novembre ! Je peux ainsi passer la parole au suivant. (Applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de première minorité. Tout comme pour le RD 1590, il faut relever que l'ASTAG, l'association suisse des transports routiers, est également totalement opposée au RD 1591. Globalement, ce qui est surprenant dans la consultation qui a été menée et l'acceptation de ces plans d'actions - je parle ici de manière un peu plus générale, mais cela s'applique spécifiquement autant au plan d'actions précédent qu'à celui qu'on traite maintenant -, c'est qu'à nouveau, en ce qui concerne le réseau routier, les principaux concernés n'ont pas été entendus. C'est tout juste s'ils se sont sentis écoutés, mais on ne les a surtout pas entendus !
On apprend qu'environ 180 personnes ont été consultées, issues de milieux différents, et qu'elles sont toutes venues donner leur avis sur comment rouler en ville, comment faire du transport professionnel ou comment faire du transport de personnes, alors qu'elles ne sont pas directement concernées par ces plans d'actions: c'est juste, encore une fois, une aberration ! Je le mentionne dans mon rapport, c'est comme si vous alliez demander son avis à la FMB dans le cadre d'une consultation sur la pêche; c'est juste ridicule ! C'est un mélange des genres et des compétences qui ne devrait surtout pas exister quand on parle de mobilité à Genève.
En ce qui concerne spécifiquement ce plan d'actions du réseau routier, il ne permet tout simplement pas l'application de l'article 190 de notre constitution, à savoir le libre choix du mode de transport. On devient de plus en plus restrictif. Ce plan d'actions ne va finalement servir qu'à une seule chose: verrouiller encore un peu plus le centre-ville. Il va faire qu'on pourra encore un peu moins circuler dans ce canton. Et par rapport à ça, je suis désolé de le dire ici, les principaux partis ici présents, qui se disent défenseurs de l'économie et du transport, font clairement le jeu de la gauche aujourd'hui puisqu'ils sont vent debout, on va dire, pour accepter ces plans d'actions, qui vont avoir pour seule conséquence que le transport, la mobilité dans sa globalité vont encore se détériorer.
Parce que finalement, la seule chose qui a été faite en commission - et on a perdu des heures là-dessus -, c'est que certains partis dont le PLR sont venus avec une multitude d'amendements, qui ne servent à rien, puisqu'ils ne nous ont fait que perdre du temps, tout ça pour remplacer un mot par un autre. Finalement, même eux n'ont proposé aucune action qui tendrait à améliorer la mobilité en ville. Non, ils ont clairement fait le jeu de la fermeture de la ville. En fin de compte, c'est à se demander s'ils sont encore en faveur d'une mobilité quelconque dans notre canton.
On peut également déplorer le fait qu'il n'y ait aucune mention de la traversée du lac - et ça, les milieux professionnels l'ont aussi déploré. Nous le déplorons également, puisque quand on parle de bouclement du réseau routier...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Stéphane Florey. Oui, merci, Monsieur le président. ...quand on parle du bouclement du réseau routier, principalement, c'est quoi ? C'est l'autoroute de contournement. (Remarque.) Je parlerai bien comme je veux, Monsieur Mizrahi; si ça ne vous plaît pas, vous pouvez aller dehors ! (Commentaires.) Je disais, si on veut boucler le réseau routier, quand on parle de l'autoroute de contournement, ou depuis la douane de Thônex-Vallard, il manque quoi ? Il manque justement la traversée de la rade. En plus, ce bouclement du réseau autoroutier, il est complètement sclérosé. Et là, je ferai aussi ma petite campagne en faveur de l'élargissement de l'autoroute... (Exclamations.) ...le 24 novembre, qui est absolument nécessaire pour la viabilité de notre économie et de notre canton.
Voilà, tout ça pour dire qu'à ce stade - et je reprendrai très certainement la parole après avoir écouté les élucubrations de chacun d'entre vous ! -, je vous recommande de refuser la résolution 1049 et de ne pas prendre acte du rapport 1591. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, j'aimerais que vous respectiez les prises de parole des rapporteurs; vous pouvez ne pas être d'accord et demander la parole pour vous exprimer, mais laissez les personnes parler ! La parole est à M. François Baertschi.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je serai respectueux vis-à-vis de mon collègue ainsi que de l'ensemble des députés; c'est vrai que chacun peut avoir ses opinions, mais je pense qu'il faut qu'on se respecte les uns et les autres. Je ne parlerai pas d'élucubrations ou de délires, même si je ne suis pas d'accord avec vous et que vous n'êtes pas d'accord avec moi sur certains sujets.
S'agissant des sujets sur lesquels nous ne sommes pas d'accord, le MCG a identifié ce qui constitue l'un des problèmes principaux, voire le problème numéro un à Genève dans le domaine de la circulation. Le problème principal qui perturbe la circulation est le trafic pendulaire frontalier. (Commentaires.) Le plan d'actions RD 1591 dédié au réseau routier passe à côté de cette question fondamentale en matière de transport à Genève, à savoir le fait qu'en France, c'est «open bar» pour la voiture, alors qu'en Suisse, c'est le régime sec. On est donc dans un déséquilibre total, qui crée justement cette crise dans le domaine du transport, due au problème frontalier. Ne pas vouloir le voir, c'est se cacher la tête dans le sable comme une autruche - j'ai beaucoup de respect pour les autruches... (Rires.) ...mais disons, ce n'est peut-être pas la meilleure manière d'agir en matière de circulation ou dans un autre domaine. Mais ce problème des frontaliers, il est central, il doit véritablement être l'objet de toute notre attention, afin qu'il soit réglé à la source.
Trouver véritablement la cause du problème, la cibler, la nommer, ce sont des choses importantes, autrement on passe à côté. Alors il est certain qu'à l'office des transports, plusieurs employés permis G frontaliers ont malheureusement été choisis, le MCG le déplore. Genève a une politique de l'emploi qui n'est pas celle que nous voudrions. Nous ne formons pas comme cela devrait se faire les habitants de notre canton, raison pour laquelle les jeunes cherchent désespérément du travail. Et qu'est-ce que nous avons ? Des gens qui viennent ici avec des concepts hors sol et qui créent des problèmes qui sont véritablement des problèmes culturels, parce qu'il n'y a pas de réelle intégration à la culture genevoise. Nous le voyons notamment dans ce tabou énorme qu'il faut à tout prix rejeter.
Alors bien évidemment, comme j'ai vu que tout le monde s'y mettait, notre minorité fera elle aussi un petit couplet sur la troisième voie autoroutière, en disant que celle-ci va en direction de la Suisse, alors que la France développe de manière agressive avec l'argent des Genevois, à savoir notre rétrocession, soit 300 millions annuels... Qu'est-ce qu'ils font ? Ils créent une autoroute dans le Chablais. Et toute la gauche et la droite votent et soutiennent cette rétrocession ! Alors on veut construire des autoroutes en France, mais sur la Côte vaudoise, on ne peut pas ! Mais c'est complètement absurde ! (Remarque.)
C'est pour ça qu'il faudra voter oui à la troisième voie, parce que nous voulons défendre les intérêts de Genève. (Commentaires.) C'est véritablement l'intention de notre troisième... euh, deuxième minorité - je commence à l'élargir... (Rires.) ...peut-être de manière un peu visionnaire. Mais pour l'heure, j'invite le Grand Conseil à refuser ce plan d'actions.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, l'objet de ce plan d'actions du réseau routier - c'est écrit noir sur blanc sur la première page -, c'est l'organisation, l'exploitation et le développement d'infrastructures routières. Cela lui confère un rôle absolument central, puisque c'est évidemment sur les routes que circulent l'ensemble des véhicules, que ce soient les transports publics, les voitures, les vélos ou autres. C'est sur les routes que sont stationnés ces véhicules, c'est sur ces routes qu'on peut créer ici une voie de bus pour améliorer la vitesse commerciale des transports publics, là une piste cyclable pour renforcer la sécurité des cyclistes. C'est encore par l'organisation de ce réseau routier que l'on peut inciter à l'usage de certains modes de transport plutôt que d'autres.
Ainsi, des choix qui seront opérés dans le cadre de ce plan d'actions dépendra la réalisation des mesures comprises dans les autres plans d'actions que nous avons commencé à traiter ce soir. Il est donc important à ce stade de rappeler un élément absolument central du débat sur la mobilité, si on se place dans une perspective d'avenir, à savoir le plan climat cantonal, qui prévoit la réduction de 40% des déplacements en transports individuels motorisés d'ici à 2030. 2030, Mesdames et Messieurs les députés, c'est deux ans à peine après l'échéance du plan d'actions dont nous débattons actuellement. Par conséquent, l'essentiel du chemin qui doit nous amener à une réduction de 40% du transport individuel motorisé doit être fait dans le cadre de ce plan d'actions.
La question centrale est donc de savoir, que ce soit pour ce plan d'actions ou pour les autres que nous étudions ce soir, s'ils permettent de réaliser cet objectif du plan climat cantonal. Alors si on s'attarde sur la stratégie générale, qui nous dit qu'on doit réduire la part du trafic individuel motorisé, offrir des alternatives à la voiture, accompagner les évolutions technologiques ou induire, motiver et accompagner les changements de comportement, on est complètement dans la cible d'une réduction du transport individuel motorisé. Mais ce que nous regrettons, au parti socialiste, c'est qu'il n'y a dans ce plan d'actions aucun objectif chiffré de réduction des déplacements en transport individuel motorisé, aucun objectif chiffré de report modal et aucune évaluation concrète des mesures pour savoir si oui ou non elles nous permettront d'aller dans cette direction.
Si on en vient maintenant aux mesures plus précises, notre groupe relève l'extension de la zone 2 LMCE, qui va permettre de modifier la hiérarchie du réseau routier; une série d'axes qui sont aujourd'hui en axe primaire passeront en axe secondaire, de manière à pouvoir mieux partager la voirie entre les différents usagers.
Mais aux yeux du parti socialiste, si on fait le bilan global de ce plan d'actions, on se rend compte qu'il n'est pas suffisant pour répondre aux objectifs du plan climat. C'est dans ce but que nous avons déposé une série d'amendements, notamment celui visant à mettre en oeuvre le contreprojet à l'initiative climat urbain, qui a été voté à la quasi-unanimité de ce Grand Conseil et qui propose de réattribuer l'espace urbain en en donnant un peu moins à la voiture et un peu plus aux autres modes de transport. Cet amendement a été malheureusement refusé.
Cependant, parce que nous avons besoin d'un plan d'actions du réseau routier, le dernier étant échu en 2018, et parce que c'est un élément absolument nécessaire pour pouvoir construire...
Le président. Merci, Madame la députée.
Mme Caroline Marti. ...une politique de mobilité d'avenir et respectueuse de l'environnement...
Le président. Merci.
Mme Caroline Marti. ...nous vous invitons à accepter cette résolution. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Murat-Julian Alder (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, c'est mon tour de vous faire part, au nom du PLR, de nos élucubrations ! (L'orateur prononce ce terme à la manière de l'un de ses préopinants. Rires.) Plus sérieusement, j'aimerais rassurer Mme Marti, nous n'allons pas demander le renvoi en commission ni l'audition du commandant du bataillon d'infanterie 19, mais nous allons simplement rappeler les principes généraux de ce plan d'actions du réseau routier 2024-2028, puisque c'est de cela que nous parlons.
Il s'agit de structurer la circulation automobile en concentrant les flux majeurs sur les axes tangentiels, donc l'autoroute, la ceinture urbaine, de sorte à réduire le trafic automobile, en particulier les pendulaires, dans les centres urbains. On parle d'améliorer la sécurité routière pour les usagers, d'améliorer la fluidité des déplacements, en particulier celle des transports professionnels et des transports collectifs, de lutter contre le bruit routier et de promouvoir le covoiturage ainsi que la mobilité partagée.
J'avoue qu'en entendant les rapporteurs de minorité, pour lesquels j'ai évidemment le plus grand respect, je peine à comprendre comment on peut s'opposer à un plan d'actions dont les principes de base devraient nous rassembler. Alors oui, je vais aussi saisir cette opportunité pour inviter celles et ceux qui ont le courage, la patience et le dévouement de nous regarder à soutenir la création d'une troisième voie d'autoroute, pas seulement entre Genève et Lausanne, mais aussi dans le reste de la Suisse, comme ce sera soumis au vote le 24 novembre prochain.
Mais au-delà de ça, si on prend ces différents plans d'actions en matière de mobilité, qui ont des liens évidents les uns avec les autres, pas seulement par leur contenu, c'est une politique globale des transports qu'il s'agit de soutenir. Et cette politique globale des transports, qui n'est pas le fait d'un membre du Conseil d'Etat, fût-il le chef du département, ce n'est rien d'autre que la mise en oeuvre concrète des principes constitutionnels que le peuple a approuvés il y a déjà plus de vingt ans ! Cela signifie le libre choix du mode de transport, le principe de complémentarité des différents modes de transport, le fait que finalement, à chaque mode de transport correspondent des besoins spécifiques; on ne peut pas traiter de la même manière une personne qui se déplace à titre individuel, qui n'a pas besoin de transporter beaucoup de matériel, et une famille, par exemple une famille recomposée, où l'on doit amener un enfant à la crèche, un enfant à l'école primaire, un enfant à son cours de violon et un autre à son entraînement de football, dans la perspective qu'il rejoigne peut-être un jour le prestigieux FC Grand Conseil !
Mesdames et Messieurs, ces plans d'actions, ce sont des lignes directrices, qui, évidemment, ne sont pas aussi contraignantes qu'une législation. Il n'y a objectivement pas de raison de s'écharper là-dessus. Je vous invite donc, au nom du PLR, à approuver ce rapport divers. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Ecoutez, Mesdames et Messieurs, vous devez vous exprimer sur les objets qui vous sont soumis. On ne vous donne pas la parole pour que vous fassiez une campagne électorale, quelle qu'elle soit. Cela vaut pour les uns et les autres. Alors limitez-vous s'il vous plaît à l'objet sur lequel on débat, je vous remercie beaucoup. La parole est à Mme Marjorie de Chastonay.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais juste rebondir sur les propos de mon collègue, qui cite régulièrement le droit ou la liberté de choisir son mode de transport. Je répondrai que dans notre constitution, nous avons aussi un article qui prévoit le droit à un environnement sain.
Nous, les Verts et les Vertes, nous voterons ce plan d'actions, malgré quelques nuances que j'aimerais apporter ici. Ce texte est censé articuler les actions de mobilité de manière générale. Il est structuré autour d'actions thématiques, avec plus d'une trentaine de projets. J'aimerais quand même apporter ces nuances Vertes, notamment en ce qui concerne le déploiement de la ceinture urbaine, autrement dit la moyenne ceinture. Je précise que cette moyenne ceinture fait le tour de Genève en passant maintenant vraiment au centre-ville. Effectivement, depuis la votation de la LMCE en 2016, la ville s'est densifiée, et cette moyenne ceinture traverse à présent des quartiers extrêmement denses, où il y a de nombreuses écoles, de nombreuses crèches, de nombreuses infrastructures publiques. Et c'est vrai que c'est aussi une question de sécurité pour les enfants, pour les familles, pour les habitants, ainsi qu'une question de qualité de vie.
Il y a donc vraiment des questions qui se posent quant à la volonté de renforcer cette moyenne ceinture ou plutôt d'essayer de la déplacer. Et comme c'est maintenant compliqué avec la densification, on nous indique dans ce plan d'actions - et là, je cite - que «l'élargissement de l'autoroute a vocation à accueillir une partie du trafic qui passe aujourd'hui sur cette ceinture urbaine faute de passer sur l'autoroute qui est saturée». Donc effectivement, s'agissant de l'élargissement de l'autoroute, je ne sais pas si c'est une bonne solution d'élargir les autoroutes ou d'en construire - évidemment, il faudra voter non le 24 novembre ! (Rires.) -, mais cela crée des problèmes qui se reportent au centre-ville (je ne fais que citer le rapport), mais aussi des problèmes de sécurité et de santé, parce qu'il y a également toute la problématique des nuisances sonores.
Juste pour donner un exemple concret en prenant un tout petit bout de la moyenne ceinture: si on part de la place des Nations et qu'on va jusqu'à la Servette, ce sont des dizaines de milliers d'habitants qui sont concernés. Si je vais maintenant jusqu'à Saint-Jean, c'est 80 000 habitants, donc quatre fois Carouge, mais ça ne va pas jusque-là, ça va jusqu'à la Servette et ensuite ça monte sur la route de Meyrin. Mais il y a au moins une dizaine d'écoles sur ce parcours, il y en a vraiment beaucoup, c'est extrêmement dense. Ce sont donc véritablement des choses à améliorer.
Pour revenir au plan d'actions, je dois avouer que nous sommes aussi sceptiques quant à l'élargissement de cette autoroute - ça, je l'ai déjà dit. La question centrale que pose cette augmentation du trafic - parce qu'on finit quand même toujours par avoir une augmentation du trafic -, c'est de savoir comment on va atteindre la diminution du trafic individuel motorisé, qui figure dans le plan climat cantonal et qui en est l'un des objectifs principaux, comme l'a dit ma collègue précédemment.
Et j'aimerais aussi mentionner la cinquième action thématique, qui consiste à modérer la vitesse en la diminuant pour lutter contre le bruit. Cette stratégie a été renvoyée en commission, on va donc encore en discuter. Et puis on souhaite quand même saluer la proposition d'aménagement de sites propres pour les transports collectifs. Ça, c'est quelque chose d'excellent, que nous soutenons.
Donc voilà, malgré ces nuances, et parce que certaines mesures sont indispensables à la mise en place d'actions en faveur de la qualité de vie des habitants, nous dirons oui ! Merci. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie. Ecoutez, Mesdames et Messieurs, je vous rappelle qu'ici, nous ne pouvons pas faire campagne. Elle doit se faire à l'extérieur. Je vous avertis: la prochaine fois que quelqu'un évoquera le vote qui aura lieu en novembre, je lui coupe la parole ! C'est clair, je vous le dis, et je le ferai ! (Applaudissements.) Vous le savez maintenant, d'accord ? Vous pouvez faire campagne et parler du vote qui aura lieu à l'extérieur, mais ici, vous prenez la parole sur le sujet duquel nous débattons; c'est la raison pour laquelle vous siégez ici. Je passe maintenant la parole à M. Nidegger.
M. Yves Nidegger (UDC). Merci, Monsieur le président. J'ai eu beaucoup d'émotion à écouter avec attention ce long débat parce que ça m'a fait une espèce de cure de jouvence, j'ai cru me retrouver dans mes toutes premières années de vie, à la fin des années 50, au début des années 60, à l'époque des plans. Vous vous souvenez, les plans quinquennaux de l'Union soviétique ! (Rires.) C'était une belle époque, non ?
Une voix. T'étais déjà né ?
M. Yves Nidegger. Oui, je suis né en 57 ! Et là, on a un plan climat, on a un plan mobilité, on a un plan... Et plus on rajoute de plans, plus on va à fins contraires. C'est comme ça ! Vous pourriez vous inspirer de l'histoire. Ça me rappelle cette époque où il y avait une pénurie de casseroles dans les magasins et les ménagères moscovites s'en plaignaient. Alors le Politburo a pris un plan casseroles et a fixé des objectifs de production à l'industrie des casseroles. Pour les atteindre, les usines de l'Union soviétique ont produit des casseroles de grande taille, parce que les objectifs avaient été fixés en tonnes. Le résultat est que d'immenses casseroles pour bateaux ont inondé le marché, que personne n'en a voulu et que les ménagères soviétiques ont continué à se plaindre de ne pouvoir cuisiner, faute de casseroles véritablement utilisables.
Ici, on parle de mobilité, et chaque fois qu'on rajoute une couche, on a moins de mobilité dans ce canton pathétiquement paralysé, dont l'économie va probablement finir par en crever ! Et on nous parle du plan climat ! La question, ce n'est pas de savoir si on va pouvoir circuler, se déplacer, accomplir ce qui doit l'être pour qu'une économie fonctionne, que des familles, qu'une société puissent vivre, non, la question est de savoir si ce plan fixé en CO2 et en climat, comme le plan casseroles de l'Union soviétique, est respecté ou ne l'est pas ! On marche complètement sur la Terre... sur la tête, pardon ! (Rires.) Sur la Terre, malheureusement assez peu !
Et tout ça, je le vois en revenant de Berne... (Exclamations.) ...où je trouvais qu'on circulait très bien puisque je ne me déplaçais qu'à pied, ceci explique cela. Il y a un certain nombre de fonctionnaires ici qui probablement n'utilisent que leurs pieds pour se déplacer et qui vivent en dehors de la ville, mais qui par contre ne connaissent pas la ville à l'intérieur. Je terminerai en vous disant: «Votez pour l'élargissement des autoroutes !» (Exclamations. Commentaires.) Il ne peut plus me la couper ! (Rires.)
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Sans continuer la digression sur les casseroles de mon préopinant... (Rires.) Genève ne doit pas être un entonnoir qui accueille tout le trafic frontalier ! (Exclamations. Rires.) Même si c'est vrai que Genève ne doit pas non plus être une casserole ! (Rires. Remarque.) Mais je sens que... Le rapporteur de majorité est en train de me donner un peu de...
Une voix. Il n'a plus de temps !
M. François Baertschi. Non, non, mais je vais reprendre mes esprits ! (Rires.) Voilà, calmement. Il faut donc à tout prix refuser ce plan parce qu'il est incomplet et ne tient pas compte de la question fondamentale qu'est le trafic pendulaire frontalier. (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Florey.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de première minorité. Pour ?
Le président. Vingt-quatre secondes.
M. Stéphane Florey. Je veux juste vous rappeler qu'il faut refuser la résolution inhérente à ce RD 1591, pour la simple et bonne raison que ces plans d'actions sont relativement inutiles, puisqu'on pourrait très bien se contenter des lois existantes pour appliquer ne serait-ce qu'un minimum de mesures. Refusez donc avec l'UDC ce plan d'actions ! Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Jotterand, vous n'avez plus de temps de parole. Je cède donc le micro au conseiller d'Etat.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Bon, en vous écoutant attentivement, Mesdames et Messieurs les députés, on décèle quand même quelques contradictions. Je retiens le propos du rapporteur de première minorité, qui défendait en cette enceinte il y a quelques semaines l'abrogation pure et simple des lois. On se réfère maintenant aux lois existantes.
On peut effectivement se poser la question de l'opportunité de l'existence de plans... (Remarque.) ...mais, on l'a rappelé tout à l'heure, dans le domaine du réseau routier, depuis 2018, on n'a plus de plan, le précédent s'étant achevé cette année-là.
Est-ce qu'on circule mieux depuis six ans alors qu'il n'y a plus de plan ? Pas sûr, je laisse la question ouverte. Est-ce qu'on circulera mieux avec ce plan ? Pas sûr non plus, mais c'est certain que si on ne planifie pas, en particulier dans le domaine routier, où l'on sait que les ouvrages doivent aujourd'hui être orientés vers une multimodalité, Mme Marti l'a rappelé à juste titre, c'est-à-dire se tourner ici vers les vélos - et on doit aussi bétonner pour les vélos -, là vers les transports publics et là encore vers les transports professionnels, eh bien il est sûr qu'on n'arrivera pas à relever les défis de notre canton, où l'espace est contraint et où, vous l'avez dit à la faveur d'un débat précédent, Mesdames et Messieurs les députés, l'on souhaite économiser le terrain, et en particulier ne plus empiéter sur la zone agricole.
La vertu de ce plan d'actions du réseau routier est donc d'indiquer très précisément, de façon très concrète, et de phaser dans le temps les endroits où nous allons encore nous autoriser des développements et surtout pourquoi nous voulons le faire. Je salue le propos du député Alder qui remettait l'église au milieu du village s'agissant des objectifs de sécurité: nous devons investir dans l'infrastructure - je ne parlerai pas ici du vote du 24 novembre sur l'autoroute - de sécurité des routes et des autoroutes de notre canton. Ces dernières nécessitent un regain de sécurité, un regain également d'aménagement, pour la fluidité de ces ouvrages, et c'est ce que permet ce plan d'actions. Le corollaire de ça, Mesdames et Messieurs, ce sont des crédits importants, que vous avez déjà votés pour une partie; l'autre vous sera soumise par le Conseil d'Etat, puisqu'il s'agit de mettre à niveau cette infrastructure.
Un mot enfin sur la traversée du lac, qui fait partie des missions assignées à mon département et que le Conseil d'Etat prend très au sérieux. Mais vous l'avez bien compris, ce n'est pas pour un horizon 2024-2028. C'est l'occasion de rappeler ici que nous travaillons sur des plans d'actions qui se déploient sur cinq ans et qui sont la vision de la mobilité et sa transcription à court terme, ce qui n'exclut pas de poursuivre le travail; nous aurons l'occasion d'en reparler l'année prochaine avec des propositions du Conseil d'Etat, Monsieur le rapporteur de minorité, sur la traversée du lac, sur le contournement autoroutier potentiel du canton et sur les infrastructures qui devront être développées à plus long terme.
Tout cela afin de concrétiser - là, je rejoins la préopinante Verte - l'idée centrale pour le Conseil d'Etat et voulue par la LMCE que le périphérique, ce qui permet de diffuser le trafic automobile, constitue à terme le pourtour idéalement complet du canton sur la base de l'autoroute, et non pas de cette ceinture urbaine, qui, vous le relevez avec pertinence, connaît quelques maillons manquants ou quelques difficultés de conception.
Par conséquent, soutenir ce plan d'actions du réseau routier, c'est véritablement soutenir une perspective voulue par la population dans le canton de Genève, avec un vrai périphérique qui permette de diffuser le trafic, de le gérer et de le fluidifier. (Remarque.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.
Mise aux voix, la résolution 1049 est adoptée par 66 oui contre 20 non (vote nominal).
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat RD 1591.