Séance du vendredi 27 septembre 2024 à 14h
3e législature - 2e année - 5e session - 24e séance

M 2903-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Adrien Genecand, Patrick Malek-Asghar, Helena Rigotti, Pierre Nicollier, Yvan Zweifel, Alexandre de Senarclens, Jean Romain, Murat-Julian Alder, Beatriz de Candolle, Diane Barbier-Mueller, Rémy Burri, Serge Hiltpold, Jacques Béné, Véronique Kämpfen, Boris Calame, Jean-Pierre Pasquier, Jean-Marc Guinchard, Claude Bocquet : Soyons pragmatiques : pour le maintien d'une production hydroélectrique locale et renouvelable sur la Versoix, favorable aux objectifs énergétiques cantonaux
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session V des 26, 27 septembre, 3 et 4 octobre 2024.
P 2160-C
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la pétition pour le maintien d'une production hydroélectrique locale et renouvelable sur la Versoix jusqu'en 2060
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session V des 26, 27 septembre, 3 et 4 octobre 2024.

Débat

Le président. A présent, nous nous penchons sur les deux objets liés suivants: la M 2903-B et la P 2160-C (catégorie III). Je rappelle que la lecture du courrier de l'entreprise Environnement 2000 SA a été requise hier. Avant d'ouvrir le débat, je prie donc Mme Francine de Planta de bien vouloir lire le courrier 4141.

Courrier 4141

Le président. Madame de Planta, je vous remercie pour cette excellente lecture ! La parole est à M. Stéphane Florey.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Je me joins aux remerciements que vous avez adressés à Mme de Planta; elle a effectivement lu ce courrier de manière claire, ce qui fait plaisir.

Mesdames et Messieurs les députés, j'espère que vous avez tous pris connaissance de la réponse du Conseil d'Etat formulée dans le rapport sur ces deux objets; elle fait suite au refus de ce Grand Conseil de prendre acte de la P 2160-B, qui faisait office de première réponse à la pétition. Malheureusement, à la lecture du nouveau rapport, on s'aperçoit que la réponse donnée est encore pire que la première. Elle contient en plus un élément qui ne correspond pas à la réalité, comme ce courrier l'a décrit. On peut en effet y lire qu'«aujourd'hui, les centrales hydroélectriques Baumgartner et Jean Estier SA ont pris acte de la situation et en ont chacune tiré les conséquences qui s'imposaient à elles». Or ce n'est absolument pas le cas, comme il est dit dans ce courrier. Les exploitants n'ont toujours pas envie d'arrêter, et de nouveaux éléments sont entrés en ligne de compte. Du reste, si on regarde un peu l'historique, on remarque qu'ils n'ont jamais été auditionnés; c'est vrai que c'est étonnant, on se demande pourquoi.

Je vous invite donc à renvoyer cette triste réponse en commission et non pas au Conseil d'Etat: si c'est pour obtenir une troisième réponse qui ne vaut rien du tout, cela n'en vaut peut-être pas la peine. Par contre, j'estime qu'il vaudrait fortement la peine de s'intéresser encore une fois à ce dossier et de ne pas baisser les bras; il s'agit dès lors de renvoyer ce rapport à la commission de l'énergie avec le soutien de la majorité de la dernière fois, de demander l'audition de l'entreprise qui nous a écrit ce courrier et de l'entendre sur ces nouveaux éléments. Ça me paraît primordial. L'UDC n'a pas du tout l'intention de laisser tomber cette affaire et de fermer deux centrales hydroélectriques qui alimentent 300 ménages - il faut quand même le rappeler - et des entreprises, dont Environnement 2000. Maintenir cette production locale me semble aujourd'hui important, pour toutes les raisons évoquées. Je vous remercie.

Mme Christina Meissner (LC). Malheureusement, je crois qu'on se trompe complètement de destinataire. Monsieur le président, je vous prie de dire à mon préopinant, qui n'a pas la même opinion que moi, qu'il lui faut relire la réponse du Conseil d'Etat: elle est très claire. La décision de fermer cette centrale hydroélectrique a été jugée; je le répète: elle a été jugée, et elle a acquis force de chose jugée suite à l'arrêt de la Chambre administrative de la Cour de justice rendu le 30 mai 2023. Cette décision est définitive et exécutoire à défaut de recours auprès du Tribunal fédéral. C'est terminé, Mesdames et Messieurs ! Vous pouvez renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat, vous pouvez renvoyer en commission tout ce que vous voulez, la réponse sera toujours la même: la justice a tranché !

M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste ira dans le même sens que ma préopinante Mme Christina Meissner: les tribunaux ont tranché, le Conseil d'Etat a décidé. Il y a une espèce d'acharnement, une bataille d'arrière-garde sur un sujet qui a été arbitré avec une juste pondération - M. le conseiller d'Etat Hodgers l'avait relevé - entre la production d'électricité de ces petites centrales et le respect et la défense de la biodiversité.

M. Florey - vous transmettrez, Monsieur le président - a rappelé que de l'électricité était fournie à 300 ménages: c'est à peu près la production des panneaux solaires installés sur le Stade de Genève. L'avenir réside évidemment dans la pose de ces panneaux solaires et non pas dans le maintien de ces petites centrales: avec le réchauffement climatique, les rivières ont un étiage toujours plus bas, et les petites centrales produisent toujours moins et mettent en péril la faune qui s'y trouve. Selon nous, il n'y a pas à renvoyer ces objets et nous vous invitons à prendre acte de la réponse, qui est bonne. On demande au Conseil d'Etat d'avoir des positions politiques. Il en a eu une, la justice est passée par là et ce n'est pas le moment d'ouvrir un nouveau volet. Merci.

Mme Céline Bartolomucci (Ve), députée suppléante. Mesdames et Messieurs les députés, nous voilà à discuter à nouveau de ce sujet, de la fermeture de ces barrages hydroélectriques. Je trouve très touchant qu'on nous ait lu ce courrier. Celui-ci nous parle de biodiversité, de sauvegarde du barrage au nom de la biodiversité et de sauvegarde de l'écosystème, pour nous dire ensuite que de toute façon l'initiative en faveur de la biodiversité a été rejetée, comme si du coup, on pouvait tout laisser tomber. Sauf que, pour mémoire, elle a quand même été acceptée à Genève - et nous sommes bien à Genève -, ce qui prouve que les Genevois ont à coeur de préserver leur biodiversité.

Cela fait maintenant plus de deux ans que le Conseil d'Etat a décidé de ne pas renouveler ces concessions, et nous en sommes encore à perdre notre temps et celui des offices de l'Etat à négocier cette décision. Celle-ci, comme on l'a dit, a été appuyée par la justice. En outre, elle s'inscrit dans une logique non seulement environnementale mais aussi économique car, pour rappel, les mesures d'assainissement requises par la Confédération s'élèvent à 1,5 million de francs au minimum, et ce pour seulement 300 foyers. Je vous rappelle également un autre chiffre: le programme éco21 des SIG permet, à lui seul, d'économiser l'équivalent de la consommation de 80 000 ménages. La proportion est vraiment hallucinante: on fait preuve d'acharnement pour 300 foyers alors que des mesures d'économie et de sensibilisation des habitants touchent 80 000 ménages. Vous êtes inquiets de l'approvisionnement énergétique ? Alors soutenez ce type de mesures plutôt que de vous accrocher à un barrage qui, au passage, détruit un des derniers cours d'eau à peu près intacts du canton.

On nous parle très souvent de perte de temps pour les fonctionnaires et le Grand Conseil. Aussi, comme le stipule la motion, soyons pragmatiques ! Arrêtons ce dogmatisme et cet acharnement ! Je pense que l'Etat aimerait pouvoir passer à autre chose, et nous aussi. Nous allons prendre acte du présent rapport et vous remercions de faire de même.

M. Christian Steiner (MCG). J'aimerais ajouter un élément suite à l'intervention de ma préopinante: on ne met pas en doute le jugement du tribunal (d'ailleurs, les intéressés ne sont pas allés au Tribunal fédéral), mais la décision prise il y a un peu plus de deux ans et par qui elle l'a été. A défaut d'un nouveau traitement en commission, on remet sérieusement en doute la valeur pour la biodiversité de la fermeture de ces barrages qui, dans leur forme actuelle, ont plus de 150 ans. En ce qui concerne l'énergie, on produit là 1 gigawatt par année, soit la consommation de 322 ménages. On peut comparer avec le Stade de Genève, mais aussi avec les projets de la Ville de Genève sur vingt ans. Comme je l'ai déjà signalé lors d'une précédente intervention, cela représente le double. On émet 1000 tonnes de CO2 si cette électricité est importée la nuit ou pendant l'hiver; 1000 tonnes si on importe de l'électricité produite avec du charbon ! Pour faire le point sur la biodiversité, on pourrait déjà entendre les principaux intéressés; un retour en commission est donc tout à fait adéquat, et je vous encourage, Mesdames et Messieurs les députés, à voter cette demande de renvoi. Merci.

M. Stefan Balaban (LJS). Je vous avoue que ce qui m'a le plus surpris, c'est que la décision de mettre fin à l'exploitation de ce barrage - et il en va de même des débats qui l'ont suivie - a été prise lors d'une période assez trouble: on parlait de black-out, on disait qu'un quartier sur deux risquait de ne pas avoir d'électricité, on évoquait l'alternance de l'approvisionnement énergétique. Ce barrage est certes petit, mais il s'agit quand même de 300 foyers; symboliquement et, je dirais, au-delà du symbole, sur le principe, il faudrait garder une production locale comme plan B. Rien que pour cette raison pragmatique, on devrait maintenir l'exploitation de ce barrage.

M. Alexis Barbey (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, face au dilemme consistant à décider s'il vaut la peine ou non de maintenir un barrage sur la Versoix compte tenu des autres options qui sont les nôtres pour promouvoir l'énergie solaire ou renouvelable, le groupe PLR soutiendra le renvoi en commission demandé. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, je soumets à vos votes la demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2903 et la pétition 2160 à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève est adopté par 44 oui contre 28 non. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)