Séance du
vendredi 30 août 2024 à
16h05
3e
législature -
2e
année -
4e
session -
20e
séance
PL 13101-A
Premier débat
Le président. Voici le prochain objet figurant à l'ordre du jour, que nous traitons en catégorie II, trente minutes: le PL 13101-A. Monsieur Grégoire Carasso, la parole vous revient.
M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, le meilleur moyen de contextualiser ce projet de loi qui vise à modifier la loi sur les eaux, c'est de partir de 2019. 2019, c'est la première ouverture, le début de la belle histoire de la plage des Eaux-Vives; 2019, c'est aussi la décision de la commune de Collonge-Bellerive - la bien nommée Collonge-Bellerive - d'interdire l'accès à ses plages publiques aux non-résidents de la commune. On trouve là, entre une démarche de libre accès et une pratique restrictive et discriminatoire, l'origine et la raison d'être de ce texte.
Il repose sur des principes que je vais brièvement rappeler. Tout d'abord, l'accès public au lac. Ensuite, la gratuité; on parle d'une gratuité de principe, c'est-à-dire que, à l'instar des bains des Pâquis, s'il y a des infrastructures à disposition ou des prestations fournies, alors il est possible d'établir un prix d'entrée modeste et non discriminatoire. Enfin, chers collègues, le dernier axe, je viens de l'évoquer, c'est le principe de non-discrimination: non-discrimination quant à l'accès aux rives du lac, non-discrimination quant au prix. Pour toutes ces raisons, au nom de la majorité de la commission, je vous invite à adopter ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. Adrien Genecand (PLR), rapporteur de minorité. Comme vous l'avez lu dans mon rapport de minorité, Mesdames et Messieurs, les objections formulées par la minorité ne sont pas tellement liées au fond du projet de loi que le Conseil d'Etat a déposé. Pour resituer le contexte à l'intention de ceux qui ne sont pas au fait du dossier, en résumé, on a traité de cette question parce qu'une commune voulait facturer l'entrée de ses plages de façon différenciée entre ses résidents et les autres. De là a découlé un texte de loi.
Cette nouvelle loi que le Conseil d'Etat propose est construite sur l'idée qu'il n'est pas possible pour les communes d'établir des tarifs différenciés entre leurs résidents et les personnes qui viendraient sur leur territoire, voilà ce qui nous est soumis aujourd'hui. Or, selon moi - et on verra si une majorité pense de la même façon -, il y a quelques petites phrases importantes: avec ce dispositif, quelqu'un qui veut entrer aux bains des Pâquis ou à Genève-Plage et qui n'a pas un sou peut légitimement saisir la justice en arguant: «Je n'ai pas les moyens, j'ai droit à un accès gratuit.»
La réalité, c'est que si on vote cet objet tel quel ce soir, sans les amendements, Mesdames et Messieurs, tous les aménagements que les collectivités, quelles qu'elles soient - Ville, canton, communes -, réalisent en matière d'accès au lac seront remis en cause. On ne pourra plus les rendre payants, on ne pourra plus permettre à Genève-Plage ou aux bains des Pâquis de faire payer l'entrée, puisqu'il y a quelque part une notion de capacité financière en jeu.
C'est pourquoi il faut voter quelques amendements qui vous sont présentés dans le rapport de minorité: il s'agit de supprimer les mentions «en principe gratuitement» à l'alinéa 1 et «La tarification ne doit pas constituer une mesure excluant de l'accès aux secteurs de baignade certaines catégories de la population» à l'alinéa 2 de l'article 27A.
Donc pour tous ceux qui ont encore la capacité de digérer cette question, vous comprenez bien que philosophiquement - c'est ce que je vous expliquais -, soit les collectivités publiques peuvent facturer un prix d'entrée, soit elles ne le peuvent pas. A aucun moment on ne peut envisager que le gardien des bains des Pâquis commence à effectuer un «assessment» financier de la personne qui doit payer 2 francs pour entrer après 11h. De la même manière, si Genève-Plage a décidé que l'entrée coûte 7 francs pour les services mis en place, ce qui permet de...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Adrien Genecand. Merci, Monsieur le président. J'aurais bien voulu que vous me donniez ce temps avant, mais peu importe. Voilà la réalité, Mesdames et Messieurs les députés, et je m'en tiendrai à cela. Si nous n'acceptons pas les deux amendements que je vous soumets, Genève-Plage et les bains des Pâquis n'existeront plus. (Rires.)
M. Florian Dugerdil (UDC). Chers collègues, notre parti est attaché à l'égalité de traitement entre nos concitoyens, de quelque classe qu'ils soient issus et peu importe leur lieu de domiciliation. Selon nous, bien que le fond du projet de loi soit louable sur trois aspects - il permet l'accès au lac au plus grand nombre de Genevois et de Genevoises, assure une équité de traitement dans l'accès à la trentaine de sites lacustres à disposition et maîtrise le prix d'entrée de ces lieux qui, en principe, doivent être gratuits, mais peuvent devenir payants si la commune justifie des charges importantes -, les différentes auditions et les nombreuses discussions qui ont suivi ont déclenché bon nombre d'interrogations, de craintes et de points de suspension.
Premièrement, comme évoqué par Mme le maire de Collonge-Bellerive, l'uniformisation du coût d'entrée aurait pour effet de déclencher le mécontentement des communiers; a contrario, pour le reste de la population qui ne réside pas au bord du lac, un sentiment de discrimination pourrait se faire ressentir. Secondement, nous pourrions valider le principe selon lequel lorsqu'une commune construit des infrastructures et met un service à disposition de la population, elle souhaite rentabiliser cet investissement; a contrario, une distorsion du prix pourrait naître entre les différents sites et ainsi créer une forme d'exclusion d'une certaine frange de la population.
Finalement, malgré les nombreuses séances dédiées au traitement de ce texte, l'Union démocratique du centre estime malheureusement que celui-ci est mal rédigé et provoque plus de problèmes qu'il n'en solutionne. Mesdames et Messieurs les députés, au vu de tous les éléments précédemment mentionnés, notre groupe vous invite à renvoyer ce projet à la commission d'aménagement du canton afin d'essayer d'y apporter des modifications et de le rendre efficient, pertinent et impactant. A défaut, notre groupe le refusera. Merci.
Une voix. Très bien.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je mets aux voix la proposition de renvoi en commission qui nous a été soumise... (Commentaires.) Non, Mesdames et Messieurs, vous ne pouvez pas demander la parole au moment où je lance le vote, ce n'est pas possible ! En tant que président qui gère cette assemblée, je ne peux pas prendre le micro pour un vote et ensuite vous donner la parole, ça ne va pas. Il faut la solliciter avant, votre collègue a proposé un renvoi en commission et vous l'avez entendu. Mais bon, exceptionnellement, Monsieur Carasso, je vous laisse intervenir.
M. Grégoire Carasso. Je renonce, Monsieur le président.
Le président. Alors c'est le tour de M. Genecand.
M. Adrien Genecand. Je renonce également.
Le président. C'est très gentil ! (Commentaires.) Mesdames et Messieurs les députés, j'en appelle au sérieux de notre travail: lorsqu'une demande de renvoi en commission est formulée, si les rapporteurs à la table ne se manifestent pas, ils ne peuvent plus le faire après. Voilà, et maintenant nous passons au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13101 à la commission d'aménagement du canton est rejeté par 54 non contre 35 oui.
Le président. Nous poursuivons la discussion. Je donne la parole à Mme Bayrak.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, j'ai entendu dans la bouche de l'UDC que ce projet de loi était louable; il est plus que louable, il est nécessaire ! En effet, vous l'avez vu, il fait chaud, et quand il fait chaud, les gens ont envie de se baigner, et quand les gens ont envie de se baigner, il leur faut des endroits à disposition. J'imagine qu'hier soir, vu la chaleur dans cette salle, nous n'aurions pas dit non à un petit plouf dans le lac.
Cela étant, on a constaté que certaines communes ne jouaient pas le jeu, préféraient limiter l'accès au lac à leurs seuls communiers, et ça ne fonctionne pas. Non, ça crée une inégalité entre les différents habitants des communes genevoises, ce qui n'est tout bonnement pas acceptable. Lorsqu'il fait chaud, nous devons offrir, surtout aux personnes qui ne peuvent pas se permettre de voyager à l'étranger, celles qui subissent de plein fouet le réchauffement climatique, des lieux de baignade, toutes les communes doivent jouer le jeu. Et s'il y a des infrastructures à disposition - c'est prévu dans la loi -, un prix raisonnable peut être fixé.
Non, Monsieur Genecand - vous transmettrez, Monsieur le président -, les dispositions qui figurent dans le texte - l'article 27A - ne signent pas la fin des bains des Pâquis ni des établissements qui existent déjà. Si les notions juridiques vous semblent indéterminées, s'il devait y avoir un quelconque doute quant à l'application qui peut être faite de ces modalités, il est possible pour le Conseil d'Etat de préciser ces éléments par le biais d'un règlement.
En tout état de cause, il n'est pas très compliqué de comprendre ce qui est signifié ici: il n'y a pas de différence de prix pour accéder aux rives du lac selon le fait que la personne habite dans la commune ou pas, il n'est pas possible de fixer des tarifs prohibitifs. Ce n'est pas bien complexe. Il me semble, dans cette logique qui relève tout simplement du bon sens, que tout le monde peut se permettre une dépense de 2 francs; en tout cas, ce n'est pas un prix discriminatoire, contrairement à certains tarifs qu'on pourrait imaginer - 35 francs, peut-être 50 francs pour un accès au lac sans infrastructures, ce sont des choses qui ne sont pas acceptables, qui devront être déterminées avec l'usage.
Ce projet de loi est nécessaire, il faut que toutes les communes jouent le jeu, il faut que toutes les communes se serrent les coudes pour que les Genevoises et les Genevois, peu importe leur commune de résidence, puissent accéder aux sites lacustres, surtout quand il fait chaud. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)
M. Sébastien Desfayes (LC). Pour Le Centre, ce sera la liberté de vote. Certains de nos membres sont sensibles à l'autonomie communale et estiment que qui paie commande et que ce n'est pas à l'Etat jacobin de fixer les règles. Au demeurant, les événements de 2019 sont derrière nous; aujourd'hui, il semblerait que la commune gère très bien l'entrée aux plages de la Nymphe et de la Savonnière.
D'autres considèrent qu'en cette période de réchauffement climatique, il est évident que les Genevois doivent avoir accès à l'eau, surtout au sein des collectivités publiques, et qu'il s'agit d'un bon projet de loi, puisqu'il offre une marge de manoeuvre aux communes s'il existe certaines installations qui justifieraient le prélèvement d'un prix d'entrée. Enfin, ce qui est également important pour ces députés, c'est qu'il n'y ait pas de discrimination selon le lieu de domicile, parce que cela reviendrait à ouvrir la boîte de Pandore. Merci.
M. Marc Falquet (UDC). Concernant la plage de la Savonnière, je voudrais dire qu'il y a quand même une certaine logique à différencier le prix selon les gens. Pourquoi ? Déjà, il y a un gardien qui est payé par les contribuables de la commune, qui officie carrément à plein temps sur place. L'endroit est magnifique, il a été aménagé à coups de millions par la municipalité, uniquement grâce aux impôts des communiers.
Ensuite, des agents municipaux sont dédiés à la protection et à la sécurité du lieu tandis que des agents de sécurité privés rémunérés par la commune passent encore le soir. L'entretien est parfait, on ne trouve jamais un papier par terre, donc il y a un réel investissement par la commune des impôts des résidents, ce qui justifie une différence de prix, parce que c'est nous qui finançons - enfin, ce sont les habitants de Collonge-Bellerive qui financent - cette plage à 100%, on peut le dire, et elle est superbe, c'est vrai.
De plus, si vous observez les plaques d'immatriculation des voitures, vous voyez que deux tiers des visiteurs sont des Français. Alors c'est très bien, on les accueille avec plaisir, ils viennent profiter des plages ici et ils ont raison, mais c'est normal qu'ils participent un minimum aux frais d'entretien et aux coûts que représente cette magnifique plage. D'où la justification d'une différenciation des tarifs. Voilà ce que je voulais dire. Merci beaucoup.
M. Raphaël Dunand (LJS). Je vais éviter de répéter tout ce que mes préopinants ont indiqué ce soir par rapport à ce projet de loi. Je tenais juste à préciser que suite à la polémique à Collonge-Bellerive qu'a évoquée le rapporteur de majorité, le Conseil d'Etat a décidé de se saisir de la question de l'accessibilité des rives du lac. Je pense, et mon groupe se joint à moi, qu'il est fondamental de garantir l'accès au lac à toute la population.
Oui, il fait chaud aujourd'hui, mais peu importe, qu'il fasse chaud ou froid, les rives du lac sont propriété publique et, de ce fait, tout un chacun peut - devrait pouvoir - se baigner sans être discriminé de quelque manière que ce soit, par exemple quant au prix proposé - même si des infrastructures sont installées par les communes - ou par des dispositions communales liées au lieu de domicile.
En résumé, pour Libertés et Justice sociale et moi-même, ce projet de loi est clair comme de l'eau de roche - enfin, comme de l'eau du lac: il vise purement et simplement à garantir l'accès aux secteurs de baignade publics à la population. C'est pour cela que mon groupe et moi-même vous invitons à le soutenir - je ne sais pas si les amendements ont été déposés, mais en tout cas à le soutenir sans les amendements proposés.
M. Patrick Dimier (MCG). Pour rappel, notre constitution stipule que l'eau est un bien universel. Or si c'est un bien universel, il est évident que son accessibilité est essentielle. Merci.
M. Adrien Genecand (PLR), rapporteur de minorité. Manifestement, les gens n'ont pas exactement compris l'essence du sujet, c'est-à-dire que la gratuité de l'accès au lac... On ne remet pas en cause, personne ne remet en cause l'accès aux rives du lac. La question philosophique est la suivante: que permet-on de faire à ceux qui opèrent autour du lac ? Historiquement, ce projet de loi vient du fait qu'une commune a décidé de facturer un prix d'entrée à ses plages plus élevé à ceux qui ne sont pas ses communiers.
Moi, je vous le dis, Mesdames et Messieurs: cette loi n'ira nulle part si elle n'est pas amendée, parce qu'à aucun moment, «en principe gratuitement»... Monsieur le président, je serais le premier citoyen, j'irais à Genève-Plage, puis aux bains des Pâquis et j'exigerais la gratuité. Si on vote ce texte ce soir, après-demain, je me rends aux bains des Pâquis et à Genève-Plage, c'est gratuit ! Il n'y a aucun lien entre l'accès au lac et les infrastructures à disposition, donc sauf à voter mes quelques amendements, on ne permet absolument rien.
L'étape d'après, Mesdames et Messieurs, c'est que je vais dire que le nécessaire n'a pas été fait dans le Rhône pour me permettre de me baigner «en principe gratuitement». En effet, j'adorerais sauter depuis le pont de la Jonction et nager jusqu'à la pointe, d'accord ? De toute façon, si les deux amendements qui sortent de commission - l'un qui supprime «en principe gratuitement» et l'autre - ne sont pas acceptés ce soir, cet objet n'aura aucune portée.
C'est dommage, parce que l'idée de base était de souligner que l'accès à l'eau est important et que les communes ne peuvent pas le restreindre en décidant de faire des choses diverses et variées. Là, on va se retrouver dans une situation où à la fois les bains des Pâquis et Genève-Plage ne pourront plus faire ce qu'ils font extrêmement bien aujourd'hui. Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, cette loi votée telle quelle punira Genève-Plage et les bains des Pâquis. Je vous remercie.
M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de majorité. Monsieur le président, combien de temps de parole me reste-t-il ?
Une voix. Zéro.
M. Grégoire Carasso. Zéro ? Alors deux mots pour dire que... (Le chronomètre s'affiche.) Ah, il m'en reste largement assez !
Le président. Mais oui !
M. Grégoire Carasso. C'est bien ce qu'il me semblait, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le rapporteur de minorité est en train de boire la tasse et tout le monde l'a bien compris. Les amendements du PLR, pour celles et ceux qui les ont lus, sont les suivants: ils consistent à supprimer de la loi toute référence à la gratuité. Par ailleurs, si on écoute notre collègue de l'UDC, il faudrait non seulement abolir la gratuité, mais encore réintroduire la discrimination !
Une voix. Ça n'a rien à voir.
M. Grégoire Carasso. Onze communes ont un accès aux rives du lac, onze communes ! Cela signifie, si on suit les quelques voix égarées du Centre qui souhaitent leur laisser la possibilité de restreindre l'accès aux plages, que ces onze communes pourraient interdire leurs lieux de baignade à tous les résidents du canton qui ne sont pas leurs communiers. C'est un véritable scandale ! Ça, c'est pour nos camarades du Centre qui hésitent encore un petit peu, sous couvert d'une autonomie communale pour le coup spécialement mal placée, par rapport à celles et ceux qui ont bien compris l'intérêt, réchauffement climatique oblige - vous avez vu l'été qu'on vient de passer -, de favoriser l'accès à l'eau.
Pourquoi le PLR propose-t-il de supprimer la mention «en principe gratuitement» ? Parce qu'il veut pouvoir permettre, par exemple à Collonge-Bellerive ou pourquoi pas aux bains des Pâquis, de facturer une entrée à 100 francs.
Une voix. Mais non !
M. Grégoire Carasso. Eh oui, c'est ça ! En théorie, si vous votez les amendements du PLR, c'est ce qui pourrait se passer. On n'a aucun doute sur le fait que cela ne se produira pas en ville de Genève, que cela ne se produira pas au Vengeron, que cela ne se produira pas à Versoix, car il s'agit d'infrastructures financées tantôt par le canton, tantôt par les communes avec, de manière générale, le principe du libre accès; cela ne se produira pas non plus à la plage des Eaux-Vives, cela ne se produira pas pour les infrastructures équipées par la Ville de Genève aux bains des Pâquis ou à Genève-Plage.
Supprimer toute référence à la gratuité, c'est ouvrir la voie à une entrée à 100 francs. Voilà ce que notre collègue, avec supercherie et un brin de mauvaise foi, essaie de vous vendre. J'en veux pour preuve l'alinéa 2; prenez le soin de le lire, il propose de supprimer la phrase «La tarification ne doit pas constituer une mesure excluant de l'accès aux secteurs de baignade certaines catégories de la population.» Ce serait prétendument un problème, parce que si on n'a pas les moyens de payer 2 francs, alors on pourrait faire tomber la loi; c'est l'argument fumeux qu'on avance ici.
Je conclurai ainsi: si on veut la gratuité pure et simple, à ce moment-là, on la garantit en supprimant «en principe», et c'est gratuit partout. Mais cela signifie que les collectivités publiques, typiquement aux bains des Pâquis ou à Genève-Plage, devront compenser le manque à gagner. Un équilibre a été trouvé ici avec les onze communes concernées, soutenu par une écrasante majorité de la commission. Je vous invite dès lors à réprimer cette agitation et à adopter le projet de loi tel que sorti de commission. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci. Monsieur Genecand, vous avez la parole pour quinze secondes.
M. Adrien Genecand (PLR), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. «Les secteurs de baignade des rives du lac, propriété des collectivités publiques, sont accessibles au public en principe gratuitement. Un accès différencié en fonction du domicile est prohibé.» Quand on supprime le principe de gratuité, on ne supprime pas tout le reste que vient de citer M. Carasso; on supprime juste le fait que par exemple les bains des Pâquis, qui sont historiquement une grande conquête de la gauche, peuvent facturer une entrée à 2 francs. Demain, Monsieur le président, les bains des Pâquis ne pourront plus le faire. (Commentaires.) La réalité, c'est que la gauche, à travers ce texte, veut permettre l'accès aux rives du lac sur toutes les propriétés de la rive gauche comme de la rive droite. (Commentaires.)
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ainsi que cela a été souligné, ce projet de loi pose un principe, et un principe fort, à savoir l'universalité de l'accès aux rives du lac. A qui appartient le lac ? Aux Genevoises et aux Genevois, et pas aux communiers. Je pense qu'il faut le dire et le réaffirmer ici, parce que c'est le dessous de l'affaire, c'est le non-dit de ce débat.
Dans cette salle, certains et certaines continuent à soutenir que chaque commune devrait pouvoir différencier le prix d'entrée à ses lieux de baignade. Mais quid si demain, la Ville de Genève décide de limiter l'accès aux bains des Pâquis à ses seuls résidents ? Genève-Plage, Baby-Plage ? Qu'en penseraient les habitantes et habitants du reste du canton ? S'agit-il vraiment d'une option envisageable ? Non, absolument pas, parce que Genève est une ville-centre, une ville d'ouverture. Mais pourquoi ce principe, qui semble si évident pour la Ville de Genève, ne le serait-il pas pour les dix autres communes riveraines du lac ? Je vous invite vraiment, Mesdames et Messieurs les députés, à vous montrer très clairs quant au message adressé à l'égard des communes.
Ensuite, on peut toujours débattre de la question de la gratuité. Ce compromis - cela a été relevé par le rapporteur de majorité - a été trouvé avec les onze communes. Une chose est sûre, Mesdames et Messieurs les députés: on ne peut pas arguer, sur la base de l'énoncé selon lequel «la tarification ne doit pas constituer une mesure excluant de l'accès aux secteurs de baignade certaines catégories de la population», qu'il existe un droit d'accès individuel. Ce genre de formulation juridique figure dans bon nombre de nos lois: pour les transports publics, pour l'accès à la santé, pour certaines prestations culturelles. Il est normal d'exiger tout de même un certain prix.
Alors nous nous réjouissons du recours de M. Genecand une fois que cette loi aura été votée, mais juridiquement, selon tous les avis pris tant au sein qu'à l'extérieur du département, rien ne permet de croire que ce texte fragilise l'équilibre qui est celui déjà trouvé aux bains des Pâquis ou à Genève-Plage. Si d'autres communes, par exemple du côté de Collonge-Bellerive, offrent une prestation conséquente aux baigneurs, elles peuvent, elles aussi, instaurer une tarification que l'on entend modeste.
Quelle est l'idée là derrière ? C'est qu'il s'agit d'un espace public, comme un parc, comme un lieu où on se balade. A partir de là, on peut facturer l'entrée 2 francs, mais si on passe à 5 francs, si on passe à 10 francs, cela devient exclusif, surtout vis-à-vis des familles. La portée de cet article est juste là. Tarification, oui, mais tarification modeste. C'est exactement l'équilibre qui a été validé par les communes. Aussi, Mesdames et Messieurs, ne vous cachez pas derrière des prétextes pour refuser ce projet de loi et permettez à tout le monde d'accéder au lac. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous procédons au vote d'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 13101 est adopté en premier débat par 59 oui contre 33 non et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 1, al. 1, lettre e (nouvelle, les lettres e et f anciennes devenant les lettres f et g).
Le président. Nous sommes saisis de deux amendements de la minorité à l'article 27A. Le premier vise à supprimer la mention «en principe gratuitement» à l'alinéa 1.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 34 oui et 1 abstention.
Le président. La seconde modification consiste à retirer de l'alinéa 2 la phrase suivante: «La tarification ne doit pas constituer une mesure excluant de l'accès aux secteurs de baignade certaines catégories de la population.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 58 non contre 35 oui.
Mis aux voix, l'art. 27A (nouveau) est adopté.
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 13101 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 57 oui contre 36 non et 1 abstention (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)