Séance du
jeudi 2 mai 2024 à
20h45
3e
législature -
2e
année -
1re
session -
2e
séance
IN 193-B
Débat
Le président. Nous passons au point fixe suivant, soit l'IN 193-B, traitée en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole au rapporteur, M. Pierre Nicollier.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais tout d'abord vous féliciter, Monsieur le président, pour votre élection.
L'initiative 193 remet sur le devant de la scène la problématique des soins dentaires et plus particulièrement celle de la difficulté d'accès aux soins pour une partie de la population. Cette problématique a été abordée quelques fois, par exemple au travers d'une initiative sur laquelle nous avons voté en 2019, d'une motion en 2013, d'un projet de loi constitutionnelle en 2016 et du contreprojet à l'IN 160 en 2018. C'est donc la cinquième fois que cette question est traitée par le Grand Conseil en un peu plus de dix ans.
La commission et les initiants constatent que les maladies bucco-dentaires sont encore trop fréquentes et que les dispositifs de prévention en place pourraient être améliorés, en particulier auprès des groupes de population ayant une prévalence importante de ces affections. Tous les auditionnés ont par ailleurs partagé la conclusion qu'il était nécessaire d'agir pour améliorer la situation de ces groupes.
L'initiative 193 exige trois actions: la première est un renforcement de la prévention par des campagnes de dépistage et d'information, la deuxième est la création d'un poste de médecin-dentiste cantonal chargé de mettre en place un plan d'action pour promouvoir la santé bucco-dentaire et la troisième est l'octroi d'un chèque annuel de 300 francs à tous les bénéficiaires de subsides d'assurance-maladie, chèque à faire valoir auprès d'un médecin-dentiste ou d'un hygiéniste.
Si l'initiative met en avant une problématique reconnue, la majorité de la commission est d'avis qu'elle n'apporte pas de bonnes réponses, en particulier la création d'un poste de médecin-dentiste cantonal ainsi que la distribution de chèques de 300 francs à une très grande partie de la population. Concernant le premier point, la majorité de la commission estime que porter un plan d'action ne nécessite pas la création d'un poste de médecin-dentiste cantonal. Il est d'ailleurs étrange d'évoquer un poste dans une initiative. En outre, l'élément important est le travail de fond qui doit être mené par un groupe interdépartemental, avec le DIP en particulier, qui pourrait sans aucun doute fournir sous ces conditions de très bons résultats.
Le dispositif des chèques annuels serait, quant à lui, coûteux à mettre en oeuvre et aurait, au final, un impact certainement très limité: la faible utilisation des bons, envoyés par courrier postal à tous les parents des élèves du cycle d'orientation, en est un bon exemple. Nous pouvons également questionner la pertinence de distribuer 300 francs à presque la moitié de la population. Cette mesure onéreuse ne permettrait pas de proposer des soins complets à ceux qui en ont besoin. Avec 300 francs, vous distribuez de l'argent largement à la population au lieu d'attribuer les sommes nécessaires spécifiquement à ceux qui en ont besoin.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Pierre Nicollier. Merci, Monsieur le président. Avec 300 francs, vous faites un dépistage, mais si vous avez besoin de soins plus onéreux, vous n'êtes plus en mesure de les assumer.
Quelques pistes ont été évoquées pour pallier ces faiblesses grâce à un contreprojet, comme renforcer l'accès au dispositif de soin en s'appuyant sur des professionnels de terrain mieux formés. Le département de l'instruction publique suggère d'explorer la pertinence d'une révision des barèmes d'accès pour les rabais proposés par le service dentaire scolaire. Une commission interdépartementale de coordination des affaires bucco-dentaires pourrait être créée, notamment pour coordonner les différents acteurs, leur transmettre les bonnes pratiques, s'assurer de la mise en oeuvre de ces actions dans le domaine de la santé ou encore émettre un préavis sur les divers projets déposés. Pour ces raisons, la majorité de la commission vous invite à refuser l'initiative 193, et la commission à l'unanimité vous recommande d'accepter l'élaboration d'un contreprojet cohérent qui permette de renforcer les moyens là où ils seront nécessaires. Merci.
M. Marc Saudan (LJS). Comme vous le savez, le groupe LJS est soucieux des problèmes de santé, et nous sommes conscients qu'il n'y a pas assez de prévention dans ce domaine. Nous remercions les personnes qui ont lancé cette initiative: elles ont soulevé la question de l'hygiène dentaire, qui représente un problème de santé publique majeur auquel il convient de remédier. Cependant, l'initiative n'est pas suffisante pour combattre le fléau du sucre; durant les travaux de commission, le département a montré sa volonté de revenir avec un projet ambitieux contre le sucre - qui est nocif -, envisageant notamment une taxe sur le sucre. Ces mesures sont efficaces pour diminuer la consommation, la lutte contre le tabac l'a démontré. Dès lors, le groupe LJS soutient le contreprojet proposé par le département et rejettera l'initiative. Merci.
M. Léo Peterschmitt (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, la question de la santé buccale représente un problème de santé publique. En effet, les atteintes bucco-dentaires sont trop fréquentes et suivent un gradient social. La prévention et la promotion de comportements sains en matière dentaire sont actuellement insuffisantes et ne permettent ni de soutenir ni d'assurer des comportements protecteurs de la santé buccale pour toutes et tous. Concernant les facteurs de risque, je peux prendre pour exemple la nocivité de l'alcool ou du tabac sur les dents, qui n'est presque jamais abordée dans le débat public. La première demande de l'initiative est ainsi justifiée.
Une bonne santé buccale ne dépend pas seulement de la responsabilité individuelle, mais elle est influencée par la situation socio-économique d'une personne, ce que les études populationnelles démontrent. Notre approche doit s'attacher à réduire les inégalités en matière de santé dentaire, et, bien qu'ils ne couvrent qu'une partie de la facture en cas de gros problèmes de dentition, les chèques annuels constituent un petit pas bienvenu. N'oublions cependant pas que l'assurance dentaire, malheureusement pas encore assez populaire parmi les Genevois, est la seule solution garantissant un système de financement solidaire pour un vrai problème de santé.
L'esquisse d'un contreprojet, qui nous a été présentée en commission par le Conseil d'Etat, est fortement intéressante: on propose d'agir sur la racine des maux, notamment le sucre. Ce dernier constitue une calamité pour les dents et est aussi à l'origine de nombreuses maladies non transmissibles qui pèsent grandement sur l'état de santé de la population. Les Verts soutiendront cette initiative, car elle renforce la prévention et la promotion de la santé dentaire. Au vu des discussions et de la majorité qui s'est dessinée en commission, nous soutiendrons également le principe d'un contreprojet. Nous espérons qu'il sera ambitieux et qu'il présentera des solutions globales à un problème que nous ne pouvons plus ignorer. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
Mme Jacklean Kalibala (S). L'initiative des soins dentaires vise à aborder le problème avec une solution pragmatique. Les maladies bucco-dentaires constituent la troisième cause de dépenses sanitaires. En Suisse, la quasi-totalité des coûts est assumée par les patientes et patients. Or, on le sait, en Suisse, le manque de couverture des soins dentaires engendre un nombre de renonciations à ces soins pour des raisons financières bien plus élevé que pour les autres soins.
L'outil principal de la lutte contre les maladies bucco-dentaires est la prévention, qui doit être améliorée et coordonnée afin de mieux atteindre les populations les plus vulnérables. Avec le chèque dentaire, le parti socialiste veut offrir une aide directe à la population dite «working poor», qui a de plus en plus de difficultés à boucler les fins de mois. Cette aide ciblée a pour but de donner accès à des consultations régulières auprès de professionnels et d'éviter une dégradation de la santé bucco-dentaire. Les travaux en commission ont en effet permis de confirmer la nécessité d'améliorer l'accès aux soins et à la prévention bucco-dentaires.
Contrairement à ce qu'a indiqué le rapporteur, le besoin d'un médecin-dentiste cantonal pour coordonner ces actions a aussi été relevé à plusieurs reprises par des auditionnés. Cette initiative est tout à fait pertinente, mais les auditions en commission ont élargi les horizons. C'est pour cette raison que nous soutenons également le principe d'un contreprojet; nous voulons une politique de santé publique forte et englobante.
Cependant, ce contreprojet devra respecter le principe d'une aide directe aux personnes «working poor», à qui il ne reste pas suffisamment pour une consultation dentaire. Il doit aussi intégrer plusieurs éléments: la possibilité d'un fonds commun pour les soins plus onéreux, l'élargissement des tarifs sociaux pratiqués notamment dans la permanence dentaire de la Croix-Rouge genevoise, la taxe sur les boissons sucrées. La consommation de sucre est un des facteurs majeurs dans le développement des maladies bucco-dentaires ainsi que du diabète et des maladies cardio-vasculaires, et doit être combattue fortement. Un médecin-dentiste cantonal, ou en tout cas un équivalent, est également nécessaire pour la coordination et la surveillance des traitements dentaires. On a aussi relevé la nécessité d'une réorientation de l'enseignement de la médecine dentaire afin que l'on mette davantage l'accent sur la prévention des risques et l'accompagnement des patients et moins sur la technicité des gestes. Pour ces raisons, nous vous demandons de soutenir l'initiative et le principe du contreprojet. (Applaudissements.)
M. Jean-Marc Guinchard (LC). Ce n'est pas la première fois - le rapporteur l'a rappelé, je le félicite d'ailleurs pour la qualité de son rapport - que notre Grand Conseil est saisi d'un texte concernant l'hygiène bucco-dentaire. Cela indique bien l'importance de ce problème, qui peut avoir des conséquences sur d'autres questions de santé. Nous avons eu l'occasion d'assister à des auditions très intéressantes, notamment de médecins-dentistes bénévoles qui s'occupent de populations précarisées; ils nous ont montré les difficultés que des gens de cette population précarisée rencontrent dans le cadre de la recherche d'emploi ou dans un contexte de problèmes de nutrition, en raison de problèmes bucco-dentaires extrêmement graves.
Cela étant, ces auditions ont dans leur majorité aussi démontré que l'engagement d'un médecin-dentiste cantonal n'était pas nécessaire, dans la mesure où le médecin cantonal, ou en tout cas celui qui va revêtir cette fonction prochainement, a les moyens de mettre en oeuvre des campagnes sur la base du programme de prévention et de promotion de la santé qui a été accepté et présenté récemment. Il a donc en main toutes les données nécessaires pour agir.
Le chèque de 300 francs, au-delà du coût assez important qu'il représente, ne constitue pas une solution non plus. Le rapporteur a rappelé le peu de succès du chèque ou du bon que reçoivent des parents d'élèves du cycle d'orientation: on a appris, lors de ces auditions, que seuls 5% des parents qui recevaient ces bons pour une première consultation chez une hygiéniste dentaire ou chez un dentiste les utilisaient. Donc 95% ne les emploient pas. De l'avis de certains auditionnés d'ailleurs, il s'agit d'un effet pervers de la mesure: les parents considèrent que les coûts engendrés par un premier examen ou un premier détartrage seraient par la suite absolument insupportables.
J'ai bien aimé les quelques interventions qui ont eu lieu ce soir concernant le sucre. Je rappelle que plusieurs textes déposés (des résolutions, des motions), notamment par notre ancien collègue Bertrand Buchs, ont été refusés par la majorité de ce Grand Conseil, alors que cela constitue un problème grave et touche également au diabète et à l'obésité des jeunes ados. Cela dit, Le Centre vous recommande de refuser cette initiative et, à l'instar de l'unanimité de la commission, d'accepter le principe d'un contreprojet. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG). Cette initiative pose de bonnes questions, mais apporte de mauvaises réponses, de très, très mauvaises réponses, devrait-on ajouter. En effet, une partie importante des habitants de notre canton se retrouve exclue des soins dentaires ou rencontre les plus grandes difficultés à faire face à ces problèmes, mais la réponse de l'initiative est très largement insuffisante, celle-ci proposant un dispositif simpliste - les préopinants l'ont dit -, à savoir ce fameux chèque de 300 francs. 300 francs ! Où voulez-vous aller ? Quels soins intelligents voulez-vous avec un tel dispositif ? C'est presque une caricature ! Je m'étonne qu'on ait même pu lancer cette idée, qui est insensée et mal étudiée. Il est évident que cette initiative ne peut pas atteindre son but: lors des travaux en commission, nous avons pu constater les lacunes actuelles et la nécessité de fournir des solutions efficaces qui tiennent compte des réalités.
Dès lors, le groupe MCG soutient la proposition du contreprojet; nous devons soumettre des solutions innovantes, qui atteignent leur but. En commission, le groupe MCG veillera à ce que des progrès utiles puissent être apportés à la population. Nous serons là, et si besoin, si cela ne va pas dans la bonne direction, nous nous opposerons. Nous espérons que la raison et l'intelligence l'emporteront.
M. Michael Andersen (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, l'UDC aussi est très soucieuse de la santé bucco-dentaire dans notre société. En revanche - mes préopinants l'ont rappelé -, cette initiative rate complètement sa cible. Non seulement les préopinants mais également tous les spécialistes que nous avons reçus en commission l'ont rappelé, à l'exception d'une seule spécialité qui serait la grande bénéficiaire de ce chèque, dont le coût représente à peu près 40 millions de francs, sachant qu'il toucherait environ 120 000 personnes, soit ceux qui reçoivent des subsides d'assurance-maladie.
Concernant ces derniers, la commission a longuement discuté pour savoir si on retient comme critère les bénéficiaires de subsides d'assurance-maladie - Monsieur le président, vous transmettrez à ma collègue Mme Kalibala, qui parlait de «working poor». Je suis tout à fait d'accord de choisir ce critère, mais cette initiative prévoit très clairement de donner 300 francs à tous les bénéficiaires de subsides d'assurance-maladie. On ne vise pas forcément ainsi les «working poor», dont une définition très claire nous a été donnée en commission.
Par ailleurs, les spécialistes ont clairement mis en avant le fait qu'avec ces 300 francs, on n'atteint absolument pas l'objectif: quelques problèmes seront peut-être détectés, mais quid de la suite ? On connaît en effet le coût des soins dentaires; on ne résout pas du tout le problème et on n'agit absolument pas en amont, sur la prévention.
Pour toutes ces raisons, l'UDC vous invite à refuser cette initiative, est ouverte à l'idée d'un contreprojet et à son élaboration, mais je vous indique d'ores et déjà que nous serons totalement fermés à l'idée d'introduire une quelconque nouvelle taxe pour financer ce contreprojet. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Nidegger pour une minute.
M. Yves Nidegger (UDC). Merci, Monsieur le président. Il y a un paradoxe apparent: en comparaison internationale, la santé bucco-dentaire des Suisses est plutôt meilleure que celle des autres Européens - toutes les statistiques le montrent -, alors même que le système de santé suisse ne rembourse pas les frais dentaires. Il faut partir de là; cela peut paraître paradoxal, mais c'est une réalité. Brosser ses propres dents est une responsabilité payante... (Rire.) ...car lorsque c'est cher, on brosse mieux, et lorsqu'on brosse mieux et qu'on indique à ses enfants qu'il faut mieux brosser, le résultat général est une bonne santé bucco-dentaire. C'est le but ! C'est le but de tout ce dont on discute: la santé bucco-dentaire de la population.
Il est donc évident que cette initiative prend le faux chemin, puisqu'elle incite à être moins responsable et conduit à avoir une moins bonne santé bucco-dentaire et à rejoindre le peloton européen, qui est plus mauvais que la Suisse de ce point de vue là. Ce soir, on a entendu toutes sortes d'arguments disant que l'initiative est mauvaise.
Le président. Monsieur Nidegger, votre temps de parole est fini.
M. Yves Nidegger. Ayons le courage de combattre l'initiative et l'idée même que l'on fasse un... (Le micro de l'orateur est coupé. L'orateur continue à s'exprimer hors micro.)
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur. Je souhaite seulement souligner que le département a en effet évoqué la volonté farfelue d'introduire une nouvelle taxe dans notre canton. Cette nouvelle taxe, unique, serait prélevée dans les commerces, chez les cafetiers et les restaurateurs et pourrait se monter à un franc par litre de boisson sucrée. La commission ne s'est pas prononcée sur cette idée farfelue du conseiller d'Etat, mais sur la pertinence d'un contreprojet. Néanmoins, le PLR peut déjà annoncer que concernant cette thématique-là, il se rangera derrière les cafetiers, les restaurateurs et les commerçants et s'opposera à une augmentation de la bureaucratie et à de nouvelles taxes. Non à l'initiative et oui à un contreprojet qui reste encore à définir !
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je m'excuse, Madame Magnin; je vous donne la parole, puisque vous l'aviez demandée précédemment.
Mme Danièle Magnin (MCG). Merci, Monsieur le président. Je voulais apporter une information. Ce sujet a été abordé en 2013 ou 2014 dans ce Grand Conseil et à la commission de la santé; nous y avions auditionné les professeurs qui enseignent à la clinique universitaire de médecine dentaire. Ceux-ci nous avaient expliqué que, depuis tout petits, nous avons une sorte de film biologique dans la bouche qui contribue très fortement à abîmer les dents. On peut brosser aussi fort que possible ces dernières, il y a des films biologiques dont on ne se débarrasse malheureusement pas.
Ensuite, oui, le sucre est une addiction, au même titre que beaucoup d'autres que je ne vais pas citer ici. Le problème du sucre est un grave problème auquel il faut s'attaquer frontalement et pas seulement sous l'angle des dents.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je ne vais pas répéter ce que beaucoup de députés ont dit, j'insisterai sur le fait que la problématique abordée par les initiants est une vraie question de santé publique. Ce point a été assez largement reconnu, mais il est important de le souligner, parce que - et je fais écho au préopinant de l'UDC - la détérioration de l'hygiène bucco-dentaire est statistiquement établie. Cette hygiène se détériore moins peut-être que dans les pays voisins, mais elle se détériore quand même, et, s'agissant de la prise en charge par les établissements médicaux, on voit augmenter le volume de personnes qui, par renonciation à un contrôle, renonciation aux soins, arrivent à un moment ou à un autre dans ces établissements avec une situation bucco-dentaire extrêmement détériorée. C'est une préoccupation de santé publique !
C'est aussi une préoccupation à dimension sociale, et les initiants le mentionnent dans leur exposé des motifs; le Conseil d'Etat partage ce constat, cette analyse, en revanche, il n'est pas d'accord avec la cible proposée, puisqu'elle est manquée. Vous l'avez dit à plusieurs reprises: nous sommes à côté de l'objectif si nous appliquons les recettes que propose l'initiative. Pour une fois, il semble que celle-ci met la quasi-totalité du plénum d'accord sur l'idée de reporter les efforts sur d'autres cibles. A ce propos, du point de vue du Conseil d'Etat, il faut souligner la préoccupation relative au sucre. Les deux chocolatiers présents dans la salle ne le prendront pas personnellement, car il y a le bon et le mauvais sucre. Je mentionne également - comme le député Guinchard - à propos de la progression des maladies chroniques le phénomène du diabète et celui du surpoids, qui sont aussi une préoccupation de santé publique.
Si l'initiative, en déviant certes un peu de son assiette, permet que soient considérées ces problématiques, nous en serions ravis, parce que, je le rappelle au préopinant PLR, c'est dans cette enceinte qu'une motion a été votée demandant précisément - et pour une fois le PLR aurait dû être favorable à cette approche - qu'on accorde des moyens supplémentaires, contrebalancés par une ponction sur le principe du consommateur-payeur. On en discutera en commission, mais je crois qu'on ne peut pas simplement l'évacuer d'un revers de main ou, comme d'aucuns dans cette salle qui ont visiblement une dent contre les taxes, partir de l'idée que, par principe, nous ne pourrions pas l'envisager.
En résumé, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat se réjouit de travailler avec la commission de la santé dans l'esprit qui a prévalu lors de cette première phase, de travailler à un projet ambitieux: ambitieux dans le temps, parce que nous souhaiterions pouvoir le déployer en 2025 déjà, ambitieux quant à la responsabilisation sur la prévention - et je rejoins ici les propos de certains préopinants -, ambitieux également dans le ciblage précis des personnes dans notre canton qui doivent pouvoir bénéficier rapidement de soins dentaires, et ambitieux enfin quant à son déploiement dans une architecture de santé publique qui aujourd'hui - je fais écho au préopinant Vert - n'intègre pas dans l'assurance de base cette problématique particulière. Si vous deviez décider du principe du contreprojet ce soir, Mesdames et Messieurs les députés, on se réjouit de rediscuter rapidement en commission et de venir en 2025 avec une proposition claire, carrée et ambitieuse. Merci de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons nous prononcer d'abord sur l'initiative, puis sur le contreprojet.
Mise aux voix, l'initiative 193 est refusée par 51 non contre 31 oui (vote nominal).
Mis aux voix, le principe d'un contreprojet est accepté par 83 oui contre 1 non (vote nominal).
Le rapport IN 193-B est renvoyé à la commission de la santé.