Séance du
vendredi 22 mars 2024 à
16h
3e
législature -
1re
année -
10e
session -
65e
séance
M 2602-A
Débat
La présidente. Nous passons à la M 2602-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Monsieur Pierre Nicollier, vous avez la parole.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de majorité. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport s'est réunie quatre fois pour traiter de la proposition de motion 2602, du 22 janvier au 6 mai 2020. Ce texte invite le Conseil d'Etat à faciliter l'apprentissage à travers trois mesures: la première consiste à clarifier auprès des entreprises les possibilités et limites concernant les stagiaires mineurs qui ne sont pas encore dans une formation professionnelle; la deuxième, à accompagner les entreprises dans les procédures administratives afin de faciliter l'accès aux stages pour les mineurs; la troisième, à mettre en place un permis «santé et sécurité au travail» pour les moins de 18 ans, avec l'objectif de faciliter l'accès à des stages.
Nous avons observé durant nos travaux que depuis 2014, les exigences se sont durcies au niveau fédéral pour permettre aux jeunes de travailler en toute sécurité, cela suite à des statistiques ayant démontré que les accidents étaient beaucoup plus nombreux chez les mineurs. Le SEFRI a décidé, suite à ces accidents, qu'une entreprise qui voulait engager de jeunes travailleurs en formation professionnelle dès l'âge de 15 ans devait respecter des normes de sécurité accrues. Les associations professionnelles ont défini des mesures d'accompagnement pour former les apprentis de moins de 18 ans. Il peut s'agir de chaussures de protection, de lunettes ou de dispositifs qui empêchent de se couper les membres sur les machines. Chaque ordonnance de formation définit ces mesures de protection.
L'entreprise qui souhaite accueillir des jeunes doit s'adresser à l'OFPC, qui va l'autoriser à former si l'encadrant possède le titre qui le permet ainsi que le personnel qualifié - pour rappel, il faut quarante heures de formation pour pouvoir encadrer un jeune. Le rôle de l'OCIRT, quant à lui, est de veiller à ce que les équipements et installations correspondent aux mesures de protection. L'OCIRT fait donc une visite dans l'entreprise et, si tout est conforme, celle-ci peut engager un jeune dès 15 ans.
L'ordonnance 5 sur la protection des jeunes travailleurs interdit d'employer des jeunes entre 15 et 18 ans pour des travaux dangereux, sauf s'ils les effectuent dans le cadre d'une formation. Les stages doivent faire l'objet d'une convention avec l'école ou l'organisme responsable, ils ne peuvent pas excéder quatre mois et, pour les emplois d'été, les jeunes doivent avoir entre 15 et 25 ans et être en formation scolaire ou post-grade. Ces emplois rémunérés ne peuvent pas durer plus de deux mois. Les jeunes de 15 ans qui n'ont pas signé de contrat d'apprentissage ne peuvent donc pas toucher des machines, alors que s'ils sont dans une école professionnelle, ils auraient pu avoir accès à ces machines.
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Pierre Nicollier. Merci beaucoup, Madame la présidente. Cette situation est problématique. Je reformule au cas où la situation ne serait pas claire pour vous: un jeune qui est en formation peut effectuer certaines tâches dans un environnement bien entendu sécurisé, mais si ce jeune souhaite faire un stage pour pouvoir entrer en formation, il ne pourra pas toucher aux équipements dangereux.
Revenons à la motion elle-même. La première invite demande de clarifier auprès des entreprises les possibilités et limites concernant les stagiaires mineurs. Les choses sont très claires, raison pour laquelle cette première invite n'a pas lieu d'être. La deuxième demande d'accompagner les entreprises dans les procédures administratives. Le feedback que nous avons reçu de la FMB et du département de l'instruction publique à l'époque était que l'accompagnement est en place, qu'il existe; la FMB disait que c'était relativement simple.
Il reste la troisième invite, dont je n'ai pas encore parlé, qui consiste en la mise en place de ce permis «santé et sécurité au travail». Cette invite est contradictoire: si on souhaite d'un côté faciliter l'accès au stage, le fait de créer une nouvelle formation qui mène à un test et ensuite à un permis pour pouvoir accueillir des jeunes va dans le sens complètement contraire à l'objectif de la deuxième invite. En effet, on ne simplifie pas la partie administrative, on la complexifie. Cette formation ne serait pas reconnue par la loi fédérale ni par la SUVA ou les autres assurances accident. La CGAS nous a indiqué qu'elle ne soutenait pas non plus ce permis, donc personne n'y est favorable.
En résumé, cette motion soulève la problématique du pont pour les jeunes vers l'apprentissage au travers de stages. Malheureusement, les invites ne permettent pas d'y répondre. Les règles sont clairement définies au niveau fédéral et le canton ne peut que les appliquer - c'est ce qu'il fait. Enfin, comme je l'ai déjà mentionné, la mise en place d'un permis ajouterait une démarche additionnelle pour le stage, ce qui va à l'encontre de l'objectif de la motion. Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission vous invite à la refuser.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion date un petit peu, mais je pense qu'elle a toujours du sens. Elle est très pragmatique et basée sur le bon sens. Comme l'a dit le rapporteur de majorité, elle concerne des jeunes entre 15 et 18 ans qui seraient peu intéressés par des études, qui seraient peu scolaires, qui auraient plutôt envie d'être à l'extérieur, de bouger, de toucher, de manipuler des choses. Cela concerne donc des mineurs davantage intéressés par des expériences professionnelles en vue d'un éventuel apprentissage dans des métiers autres que le secteur tertiaire, pour lequel on est très fort à Genève. Il s'agit de métiers plus manuels et agricoles - c'est vrai que c'est là que le bât blesse, puisque effectivement, dans ces métiers, il y a des risques. Ceux-ci sont connus et doivent absolument être neutralisés - c'est un élément essentiel que nous ne remettons pas du tout en question -, mais ils ont pour conséquence que ces jeunes sont d'office mis de côté, alors qu'ils auraient justement besoin d'expérimenter ces métiers pour éviter le décrochage scolaire, de perdre des années, du temps.
Ce texte propose tout simplement de mettre tout le monde autour de la table et de trouver des alternatives. Le cadre légal a été bien expliqué; on ne le remet pas du tout en question. Mais l'idée est justement de trouver des alternatives, des partenariats, notamment via un permis de santé et de sécurité, afin d'accompagner ces jeunes dans ces métiers qui sont parfois à risque. Il ne faut absolument pas mettre ces jeunes en danger, mais il ne faut pas non plus aboutir à une situation où ils ne se dirigent jamais vers ces métiers parce qu'ils sont exclus et finiront de toute façon par choisir une autre voie, ou décrocheront complètement puis se retrouveront marginalisés. C'est vraiment ça l'idée: accueillir tous les élèves, en l'occurrence spécifiquement ceux qui ont envie d'être à la tâche, de ne pas être sur les bancs d'école. Comme au sein du reste de la population, il y a des jeunes qui sont plus scolaires et d'autres qui le sont moins. Cette motion était d'ailleurs signée par une grande majorité des partis de ce parlement, notamment par le PLR, Le Centre et des membres de l'UDC, soit une grande diversité de partis, c'était un texte interpartis.
Au sein de la commission de l'enseignement, il y a eu un rappel des lois. Alors évidemment que le cadre légal doit être rappelé, mais après, c'est à nous, parlementaires, de travailler pour trouver une solution alternative adéquate pour ces jeunes ! On ne va pas se dire: «Ah, c'est la loi, alors on ne fait rien; on les laisse vaquer, zoner, être en échec scolaire et endurer psychologiquement à l'école !» L'idée est de trouver des solutions pragmatiques et de bon sens, de se mettre autour de la table, pour que ces jeunes puissent bénéficier de stages dans des métiers manuels et agricoles, qui sont de facto à risque, en les accompagnant, sans surcharger une fois de plus les employeurs avec des lourdeurs administratives comme on les connaît - c'est la spécificité genevoise.
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Marjorie de Chastonay. Merci, Madame la présidente. Ainsi, nous pourrions les accompagner de façon très simple et pragmatique, mais sécurisée - c'était ça, l'idée de cette motion. Nous déplorons le revirement de situation, on n'a pas compris pourquoi toutes les personnes qui avaient signé ce texte ont tout d'un coup retourné leur veste lors du rappel des lois, qui pourtant étaient évidemment connues. En l'occurrence, le but était justement de trouver des alternatives à ces lois. Merci.
M. Jean-Louis Fazio (LJS). Chers collègues, le groupe LJS soutiendra le rapport de minorité de Mme de Chastonay et demande le renvoi à la commission de l'enseignement pour que ce texte soit à nouveau étudié. En effet, même si les solutions préconisées dans le rapport sont perfectibles - les conclusions dudit rapport en attestent -, il est impératif que l'apprentissage soit mieux considéré dans ce canton et que les jeunes puissent accéder plus facilement à des places de travail. Je regrette que ma motion sur l'apprentissage ait été refusée par la commission de l'économie.
Nombre de députés semblent bien éloignés des préoccupations des apprentis. Le découragement rencontré par les entrepreneurs... Madame la conseillère d'Etat... (Un instant s'écoule.) S'il vous plaît, Madame, je parle aussi pour vous. La problématique des apprentis n'est pas entendue dans ce parlement. Le découragement rencontré par les entrepreneurs, les complications administratives ainsi que l'information déficiente et peu attractive font qu'on ne doit plus tarder pour chercher des solutions. (Un instant s'écoule.) Madame la présidente, si vous pouviez demander à Mme Anne Hiltpold d'écouter et de poser son natel, s'il vous plaît. (Rires. Applaudissements.)
La présidente. Monsieur Fazio, vous avez le droit de vous exprimer... (Commentaires.)
M. Jean-Louis Fazio. Madame la présidente, moi j'ai beaucoup de jeunes de 14 ou 15 ans qui viennent chercher des places d'apprentissage et qui souffrent !
La présidente. Monsieur Fazio, excusez-moi, vous avez le droit de vous exprimer, mais cela ne vous donne pas encore le droit que tout le monde vous écoute ou que je m'assure que tout le monde ait votre attention. Vous n'êtes pas non plus la personne qui écoute le mieux durant tous les débats ! (Rires. Exclamations. Huées.)
M. Jean-Louis Fazio. Ça prouve qu'on n'aime pas les jeunes !
La présidente. Je vous invite à continuer à parler.
M. Jean-Louis Fazio. Ce dossier est souvent peu considéré par les élus ou par les pouvoirs publics. C'est comme pour l'agriculture, ceux qui ne vont jamais sur le terrain ne se rendent pas compte de la situation et ont une vision bureaucratique. La direction de l'OFPC, la FER, la FMB et d'autres faîtières sont axées essentiellement sur les grandes entreprises, les multinationales et celles qui paient de grosses contributions - je l'ai déjà dit ici -, et oublient souvent les artisans et PME, c'est regrettable.
Il en va de la survie de certains métiers, du savoir-faire qui les caractérise. Il en va également de l'utilisation de dizaines de places de travail. L'OFPC, la FER, la FMB et d'autres faîtières doivent enfin se secouer et tirer à la même corde que les PME et artisans, afin de donner à l'apprentissage proposé par les PME et artisans la place qu'il doit avoir. Vous l'aurez compris, nous soutiendrons ce rapport de minorité en demandant donc le renvoi de cet objet à la commission de l'enseignement. Je vous remercie.
La présidente. Merci. Les rapporteurs ne semblent pas vouloir s'exprimer sur cette demande de renvoi. J'ouvre donc la procédure de vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2602 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 61 non contre 24 oui et 1 abstention.
La présidente. Nous poursuivons le débat, je passe la parole à M. Christo Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC). Merci beaucoup, Madame la présidente. Vous transmettrez à M. Fazio que je m'inscris en faux contre ce qu'il a dit. En effet, tout est déjà mis en place au niveau du département, dès l'école primaire, avec des stages dans les entreprises dès la huitième, puis au secondaire, durant les trois années de cycle d'orientation, les orientations se font avec les faîtières. Il y a également la Cité des métiers. Enfin, le canton est quand même assez dynamique sur la question.
Là où je rejoins mon collègue Fazio - vous transmettrez, Madame la présidente -, c'est qu'il manque effectivement des places d'apprentissage et surtout des places de stage - on a souvent des jeunes qui finissent leur CFC et qui malheureusement ne trouvent pas de travail après avoir obtenu ce diplôme.
Lors des auditions, tout le monde a montré un vif intérêt pour cette motion, qui, je le rappelle, date d'il y a quatre ans, mais tout le monde a été négatif, à commencer par les syndicats, la FMB et également l'OCIRT. Je rappelle que le cadre légal est d'abord un cadre fédéral, qui contient des lois et des obligations. Genève n'a donc pas besoin de se substituer à ce qui se fait à Berne.
Comme l'a dit le rapporteur de majorité, cette motion est axée sur les jeunes entre 15 et 18 ans. La problématique de ceux qui n'ont pas de contrat de travail et qui ne pouvaient pas utiliser lors de leur stage un certain nombre de machines ou d'instruments qui auraient pu les blesser est liée à l'assurance accident, en l'occurrence à la CNA.
Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission avait refusé ce texte par 12 voix, contre 2 pour et 1 abstention, et je vous demande de bien vouloir faire de même. Je vous remercie, Madame la présidente.
Mme Ana Roch (MCG). J'avais préparé un texte qui relevait tous les aspects légaux, mais je crois que le rapporteur de majorité a bien exprimé le pourquoi du refus de cette motion. Le SEFRI avait en son temps renforcé ces mesures parce qu'un nombre important d'accidents avait eu lieu, et je pense que nous devons avant tout garantir la sécurité de nos jeunes.
Maintenant, pour la petite histoire, j'ai moi-même pris des stagiaires mineurs avec le consentement de l'OFPC, cela s'est fait assez facilement, j'avoue que je m'attendais à plus de réticences, mais en expliquant... J'ai une entreprise qui a le droit de former, je suis donc connue pour ça à l'OFPC. Je n'ai eu aucune difficulté à prendre un jeune mineur en stage. Je pense qu'on peut donc le faire, évidemment dans un cadre garantissant la sécurité du stagiaire.
Pour toutes ces raisons, nous ne soutiendrons pas ce texte, mais cela ne veut pas dire que nous ne soutenons pas l'apprentissage; nous nous devons de garantir en primauté la sécurité des jeunes. Merci.
M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion va dans la bonne direction. C'est certain qu'aujourd'hui, à Genève, tout objet qui viserait à faciliter l'apprentissage et le recrutement de jeunes apprentis est une bonne chose, notamment pour la formation duale. On sait que malgré toute la bonne volonté, notamment de l'OFPC, notre canton reste à la traîne et connaît un secteur industriel et primaire relativement faible. Par conséquent, par rapport à d'autres cantons, Genève a un taux d'apprentis et d'entreprises formatrices beaucoup plus bas. Il est aussi vrai qu'on assiste à une surenchère problématique en matière d'âge et de recrutement des apprentis. On constate que finalement la solution de l'apprentissage n'est pas un premier choix et intervient plus tard, avec une certification qui a lieu à Genève en moyenne à 23 ans, ce qui est en effet un âge trop avancé, alors que les jeunes pourraient commencer ces formations duales dès 15 ans.
Ce texte va en effet dans la bonne direction, celle de faciliter ces choix et la pratique de stages pour pouvoir plus facilement s'orienter vers des apprentissages. Mais il veut rendre trop facile, trop accessible cette pratique de stages, eu égard aux conditions de travail, de formation, qui sont essentielles et qui sont en effet - comme plusieurs l'ont très bien expliqué - régies par le droit fédéral. Si les normes pour les jeunes de 15 à 18 ans en matière de travail dangereux sont aujourd'hui plus restrictives qu'autrefois, c'est qu'il y a une raison. La raison, c'est qu'il y a quand même trois fois plus d'accidents dans ces types de travaux chez les jeunes de moins de 20 ans.
Par conséquent, il y a aussi une responsabilité pour l'Etat en tant que, je dirais, tuteur de formation, consistant à apporter toutes les garanties nécessaires aux employeurs qui assureraient ces formations et ainsi à faire en sorte que ces entreprises soient accompagnées, permettant un apprentissage dans les meilleures conditions.
Ce que propose la motion quant à la diminution des normes et la facilitation de l'accès aux stages est quelque peu précipité. Ce serait finalement péjorer les conditions de formation, de travail et surtout mettre ces jeunes dans des situations potentiellement dangereuses, comme cela a été prouvé au niveau fédéral, raison pour laquelle le groupe socialiste, malheureusement, je dirais, s'opposera à ce texte - mais il sera toujours enclin à favoriser l'apprentissage. (Applaudissements.)
Mme Uzma Khamis Vannini (Ve), députée suppléante. Le constat est clair, il y a moins d'apprentis. Le constat est clair, il y a des apprentissages qui se terminent très tard. Un autre constat aussi très clair, c'est que l'apprentissage est un des fleurons de notre système de formation suisse; nous avons eu des personnes qui ont suivi des apprentissages et qui ont continué dans des entreprises, qui les ont reprises dans certains cas, ou qui ont continué dans des formations plus importantes lorsqu'elles se sentaient prêtes.
Qu'est-ce que l'on constate aujourd'hui ? On constate qu'avec la scolarité jusqu'à 18 ans, au lieu de laisser à ces jeunes la possibilité de commencer un apprentissage plus tôt parce qu'on y faciliterait l'accès en les accompagnant - non pas en les mettant en danger, mais en les accompagnant -, on ferme cette porte-là pour la simple et bonne raison que tout le monde ne peut pas avoir le même référentiel qu'une grande entreprise comme Rolex ou la Migros, pour en citer quelques-unes.
Pour les petits entrepreneurs, qui - je vous le rappelle - représentent quand même presque un tiers des employeurs, je peux vous dire, pour avoir moi-même engagé des stagiaires et des apprentis - je reconnais que dans une étude d'avocats, les dangers sont quand même limités -, que savoir comment les suivre et les former, à savoir l'accompagnement en tant que tel du maître d'apprentissage et de l'entreprise plus familiale, plus petite, qui a moins le temps de faire toute cette paperasse, etc., représente une porte ouverte pour ramener l'apprentissage sur le devant de la scène, apprentissage qui est vraiment un fleuron de notre économie, comme je vous le disais. Nous soutiendrons ce texte et le rapport de minorité. Je vous remercie de votre attention.
M. Xavier Magnin (LC). Mesdames et Messieurs les députés, j'espère que vous êtes bien tous à l'écoute ! Le groupe Le Centre est en accord avec les préoccupations de cette motion, mais ne valide pas les solutions proposées. Vous savez l'attachement de notre groupe à la formation et à la promotion de l'apprentissage - en cela, la formation duale est fondamentale dans la transmission du savoir-faire et son accessibilité doit être facilitée, quand on sait que seuls 4% des élèves sortant du cycle entrent directement en apprentissage.
Néanmoins, il n'y a pas d'impossibilité d'engager des jeunes de 15 ans. Les centres de formation professionnelle, les entreprises et leurs faîtières se sont adaptés aux normes pour garantir la sécurité, particulièrement pour les moins de 18 ans - cela nous a été démontré. Si tout est aux normes, l'engagement ne pose aucun problème. Il est vrai que cela est contraignant, mais entrer en apprentissage avec l'assurance de la sécurité devrait plutôt attirer que repousser.
Il faut toutefois raison garder pour ne pas empêcher qui que ce soit d'entrer en apprentissage. Ah, placer le curseur au bon endroit ! L'objectif est tout de même d'avoir des apprentis, pas de décourager tout le monde, et c'est bien entendu un appel aussi bien à l'OCIRT qu'au SECO, qu'à l'OFPC, qu'au SEFRI, qu'aux entreprises, pour permettre cela.
Passer de l'école au stage puis à l'apprentissage est un parcours à renforcer et à valoriser en précisant bien les missions, les buts et objectifs de chacun, ce qui finalement existe déjà. Quant au permis de santé proposé, je crois qu'il n'y a pas besoin de faire un long discours pour comprendre que le remède est pire que le mal et qu'il retardera plus qu'il n'aidera à augmenter le nombre d'apprentis et de formateurs.
Concernant les invites, la première demande de clarifier un dialogue qui, en réalité, est déjà établi entre les partenaires; la deuxième vise un accompagnement déjà pris en compte par l'OFPC et qui fait partie de ses prérogatives; et la troisième, le permis de santé, n'est pas réaliste et constitue finalement une excellente fausse bonne idée, qui contreviendra aux objectifs mêmes de cette motion. Le groupe Le Centre recommande donc de refuser ce texte.
La présidente. Je vous remercie. La parole est à Mme Ana Roch pour une minute quarante-cinq.
Mme Ana Roch (MCG). Merci, Madame la présidente. On est en train de laisser penser que ce texte peut augmenter l'accès à l'apprentissage; je pense que c'est avant tout le discours qu'on doit changer. J'entends de certains députés que seuls les mauvais élèves ou ceux qui ont des difficultés à l'école sont destinés à faire un apprentissage: c'est peut-être là qu'il faut changer de paradigme.
On peut être très bon élève et avoir envie de faire un apprentissage, de rentrer en menuiserie ou dans l'agriculture. Changeons déjà nos discours, arrêtons les stéréotypes sur les apprentis et peut-être qu'alors on aura un peu plus d'élèves qui entreront en apprentissage au moment de sortir du cycle ! Merci. (Applaudissements.)
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de majorité. Pour clarifier certains des propos tenus précédemment, je précise que la motion ne demande pas de se mettre autour de la table, ce qui est d'ailleurs bien dommage, car nous avons sans aucun doute tous un grand plaisir à partager des moments conviviaux. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Ce que demande la motion, c'est de clarifier un cadre qui est déjà clarifié, d'accompagner des entreprises qui sont déjà accompagnées et de mettre en place un permis qui ajoute des tâches administratives. Pour rappel, en commission, seuls deux commissaires avaient décidé de soutenir ce projet à la fin des travaux.
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Pierre Nicollier. Une bonne nouvelle: le 14 février, le Conseil fédéral a décidé de revoir l'ordonnance 5 pour essayer de favoriser l'accès au marché du travail et l'insertion... (Le micro de l'orateur est coupé.)
La présidente. Merci. La parole est à Mme Anne Hiltpold.
Mme Anne Hiltpold, conseillère d'Etat. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je tiens tout d'abord à vous dire que je peux être sur mon téléphone tout en vous entendant et en vous écoutant ! Je tiens également à vous rassurer sur le fait que je suis très préoccupée par la question de l'apprentissage; j'espère que vous avez lu la feuille de route du département, où il est beaucoup question de renforcer la formation professionnelle, d'augmenter le nombre de places d'apprentissage, notamment pour les jeunes à partir de 15 ans, à savoir des jeunes qui sortent du cycle. Effectivement, aujourd'hui il est problématique de voir que les jeunes rentrent en moyenne en apprentissage à passé 19 ans, alors que l'apprentissage est à la base destiné à des jeunes de 15 ans.
Je pense qu'on pourrait débattre de ces questions pendant des heures. Je suis venue à la commission de l'économie vous dire que nous étions à disposition des entreprises, des grandes comme des petites, et qu'il ne suffisait pas de nous demander de modifier la loi ou le règlement, que nous étions à l'écoute et que tout ce que nous pouvons faire pour favoriser l'apprentissage pour les petites entreprises, nous le ferons.
Cette motion mettait en avant la problématique de ces stages, de ces préapprentissages, pour certains métiers avec des travaux dangereux pour les jeunes. Dans l'intervalle, l'ordonnance a en effet été modifiée. A partir du 1er avril, pour certains jeunes et dans certains métiers, il sera quand même possible de faire un stage; cela vise l'insertion professionnelle, les préapprentissages d'insertion pour les jeunes migrants ainsi que les semestres de motivation. C'est exactement ce qui était pointé du doigt par cette motion. Le Conseil d'Etat a pris position, bien entendu de manière favorable, en demandant de respecter la sécurité des jeunes - c'est une préoccupation que nous avons toutes et tous. Des adaptations ont pu être apportées à cette ordonnance, raison pour laquelle vous pouvez refuser ou accepter cette motion, en l'occurrence la problématique me semble être réglée. Je vous remercie de votre attention.
La présidente. Merci. Je lance la procédure de vote sur cet objet.
Mise aux voix, la proposition de motion 2602 est rejetée par 66 non contre 20 oui (vote nominal).