Séance du vendredi 22 mars 2024 à 14h
3e législature - 1re année - 10e session - 64e séance

P 2188-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : Non à l'abattage des arbres au parc Lullin !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session X des 21 et 22 mars 2024.
Rapport de Mme Christina Meissner (LC)

Débat

Le président. J'appelle maintenant la P 2188-A. Il y a une seule rapporteuse, Mme Christina Meissner, qui préconise le renvoi au Conseil d'Etat, c'est bien cela ?

Mme Christina Meissner (LC), rapporteuse. Tout à fait, Monsieur le président de séance, merci. Pour rappel, les habitants de Genthod ont été choqués par un projet d'abattage de 45 arbres et ont lancé cette pétition, soutenue par quasi toute la population de la commune. Interpellée, la municipalité a manifesté sa bienveillance, mais n'est pas compétente en la matière. Ces arbres se situent à Genthod, mais le parc Lullin a été donné à l'Etat en 1973 par Jean Lullin. La zone boisée où se situent les arbres est considérée par le canton comme un espace forestier, même si le périmètre se trouve dans un parc. Les principes de coupe en futaie irrégulière y sont appliqués comme en forêt pour favoriser les jeunes pousses.

Les arbres voués à l'abattage sont des marronniers majestueux et pour la plupart centenaires; ils ne sont pas malades, mais ne sont pas considérés comme des espèces indigènes, et le canton veut les remplacer par des espèces de chênes locales. Les pétitionnaires soulignent très justement que les marronniers existent à Genève depuis le XVIIe siècle et se demandent combien de temps il faut pour que le statut d'une espèce soit considéré comme indigène. Selon les habitants, en plus de l'oasis de fraîcheur qu'ils offrent, ces arbres appartiennent au patrimoine de Genthod et, quel que soit leur statut, les promeneurs en profitent et utilisent les lieux comme un parc compte tenu de l'ombre qu'ils procurent. Il est aberrant de couper des arbres adultes pour les remplacer par de plus jeunes.

La pétition a eu le mérite d'ouvrir le dialogue, et le service cantonal des forêts a organisé une séance publique afin de récolter l'avis de la population sur les valeurs paysagères. Le paysage relève essentiellement d'un avis subjectif et le service avait besoin de recueillir cette information pour pouvoir prendre une décision. Cet échange, Mesdames et Messieurs, a mis en lumière l'appréciation du public quant à la forêt actuelle.

Au final et selon la position du parlement sur cette pétition, le canton a confirmé qu'il pourrait maintenir une grande partie de ces arbres et n'abattre que ceux posant de réels problèmes de sécurité pour la voie ferrée ou routière. Force est de constater que si ce texte n'avait pas été déposé, le dialogue n'aurait pas été engagé pour prendre en compte la position des habitants, l'Etat ne se serait pas posé de questions et n'aurait pas modéré les abattages. Il faut donc saluer la démarche citoyenne et la soutenir. Le canton attend la décision du Grand Conseil, raison pour laquelle la commission vous demande de renvoyer la pétition au Conseil d'Etat. Je vous remercie.

Présidence de Mme Céline Zuber-Roy, présidente

Mme Céline Bartolomucci (Ve), députée suppléante. Mesdames et Messieurs les députés, le parc Lullin est connu par ses promeneurs et usagers pour la beauté de ses arbres, notamment de ses grands marronniers qui constituent un lieu de délassement ainsi qu'une source d'ombre et de fraîcheur, essentielles dans le contexte actuel du réchauffement climatique.

Ces arbres sont également le refuge de la plus importante population du canton d'une espèce de chauves-souris appelée murin de Daubenton. En 2006, près de 1200 individus avaient pu y être observés, mais depuis lors, les effectifs n'ont cessé de décroître pour atteindre environ 500 individus en 2014. L'une des hypothèses de cette brutale diminution pourrait être entre autres la gestion forestière du parc qui implique l'abattage régulier de grands arbres, et avec lui le dérangement de la faune et la disparition de son habitat.

La pétition 2188 s'oppose au projet d'abattage de 42 arbres, dont 18 marronniers adultes et onze dotés d'un diamètre de plus de 50 centimètres. Le but est de remplacer ces arbres anciens et en excellente santé par de jeunes chênes censés mieux supporter le dérèglement climatique. Cependant, le climat actuel change tellement rapidement qu'il n'est pas possible de garantir la survie des espèces plantées aujourd'hui, même si elles sont indigènes. Ainsi, non seulement les arbres anciens sont bien plus susceptibles de supporter la hausse des températures que de jeunes arbustes, mais la perte de l'habitat et de la fraîcheur causée par la coupe de ces grands arbres aurait un impact tout à fait regrettable, tant du point de vue de la biodiversité qu'auprès de la population.

Comme les auditions en commission l'ont montré, le dialogue ouvert avec la population a mis en lumière le lien important du public avec les arbres de ce parc. Grâce à cet échange, le plan d'abattage s'oriente désormais vers la sécurisation du marronnier le plus imposant ainsi que le maintien de douze autres. Aujourd'hui, le service lui-même reconnaît que le projet peut être modifié et reste dans l'attente de l'issue de cette pétition. Pour toutes ces raisons, le groupe des Vertes et des Verts vous demande d'accepter le renvoi de celle-ci au Conseil d'Etat. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Geoffray Sirolli (PLR). Mesdames et Messieurs, le groupe PLR a entendu les pétitionnaires manifester leur attachement à ces arbres qui, pour eux, sont extrêmement importants dans cette forêt. L'OCAN, quant à lui, s'est montré ouvert à maintenir les marronniers en place à partir du moment où la forêt continue à bien se porter. Le groupe PLR va donc soutenir la pétition en vous invitant à la renvoyer au Conseil d'Etat. Merci beaucoup.

M. Jacques Jeannerat (LJS). Nous avons bien compris le problème lors des auditions, mais comme l'a indiqué Mme la rapporteure elle-même, il s'agit certes d'un parc, mais surtout d'une zone dite forestière. On n'est pas au parc Bertrand où il y a un arbre tous les cinquante mètres, on est bien dans un espace forestier.

Un certain nombre d'arbres dans ce périmètre doivent, pour des questions de sécurité, être abattus et remplacés. J'entends bien les arguments sur le poumon de verdure, la promenade des gens de Genthod, tout ça, c'est magnifique; moi aussi j'adore les petits oiseaux, c'est super, mais on est dans un espace forestier ! Si on commence à gérer les forêts de notre canton comme des parcs du centre-ville, Mesdames et Messieurs, on est bientôt foutus.

Le groupe LJS vous demande de voter le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Nous avons fait le boulot en commission, le service concerné a saisi le problème, mais je crois qu'il faut garder les pieds sur terre: il est question d'une zone forestière, pas d'un petit jardin d'agrément.

M. Marc Falquet (UDC). Tout le monde dit la même chose, c'est bien, sauf M. Jeannerat qui adore les petits oiseaux ! Alors je précise que les arbres constituent justement l'habitat des petits oiseaux, il faut se le rappeler: les oiseaux vivent dans les arbres. Merci.

La présidente. Je vous remercie. C'est le moment de voter sur les conclusions de la commission des pétitions, laquelle recommande le renvoi au Conseil d'Etat.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2188 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 64 oui contre 9 non (vote nominal).

Vote nominal