Séance du
vendredi 1 mars 2024 à
14h
3e
législature -
1re
année -
9e
session -
59e
séance
P 2173-A et objet(s) lié(s)
Débat
La présidente. Nous traitons maintenant les pétitions (catégorie II, trente minutes). Le premier point en réunit trois: les P 2173-A, P 2176-A et P 2182-A. Je passe la parole à Mme Christina Meissner.
Mme Christina Meissner (LC), rapporteuse. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs, plusieurs pétitions relatives au trafic transfrontalier ont été traitées en parallèle par notre commission. Pour chacune d'entre elles, nous avons auditionné les pétitionnaires et, en date du 13 novembre 2023, le conseiller d'Etat Pierre Maudet, responsable du département de la santé et des mobilités, afin qu'il s'exprime sur l'ensemble des textes. Le 27 novembre, la commission a conclu ses travaux par le vote des pétitions.
En résumé, ces objets font tous état d'une péjoration de la situation sur le plan du trafic motorisé et de la qualité de vie. Qu'il s'agisse de passages de douanes ou de villages, la circulation ne cesse d'augmenter, et avec elle les nuisances liées au bruit. Les heures de pointe durant lesquelles les bouchons se forment durent de plus en plus longtemps. Si les pétitions déposées concernent la partie sud-ouest du canton, la hausse du trafic touche certainement toute la ceinture transfrontalière.
Les habitants qui subissent les nuisances demandent toutes et tous un assainissement de la situation dans les quartiers traversés de part et d'autre de la frontière. Les propositions vont, selon les textes, de la fermeture de certaines douanes certains jours ou à certaines heures à la mise en place d'alternatives non seulement efficaces - telles que des lignes de bus, des chemins de fer revitalisés ou de nouvelles lignes de train -, mais surtout vraiment attractives.
La concertation avec les associations et les autorités est jugée insatisfaisante de chaque côté de la frontière. La mise en oeuvre d'une gestion véritablement transfrontalière de la mobilité est demandée pour améliorer la qualité de vie de tous dans la région. Sur le champ de la mobilité aussi, la colère gronde dans les campagnes. A l'unanimité ou à la majorité, la commission vous invite à soutenir ces pétitions.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, le MCG a toujours dénoncé la problématique de la circulation transfrontalière et des bouchons créés dans les petites communes proches de la frontière française; il l'a fait à travers différents textes demandant que le Conseil d'Etat se détermine et fasse quelque chose. Aujourd'hui, il n'est plus normal de devoir subir le trafic transfrontalier. Je vous rappelle que Genève, c'est plus de 120 voies, 130 000 frontaliers qui traversent la frontière le matin pour venir dans notre canton et le soir pour rentrer chez eux.
Bien que Genève ait investi plusieurs millions dans le CEVA et les transports en commun, toutes celles et ceux qui viennent travailler sur notre territoire n'ont pas encore franchi le pas d'emprunter les transports publics, notamment le CEVA. Résultat des courses, les Genevoises et les Genevois sont dérangés, entravés dans leurs déplacements.
Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG soutiendra les deux premières pétitions; j'ai cru comprendre que le Conseil d'Etat n'allait pas entreprendre grand-chose, mais nous espérons tout de même obtenir un retour sur la question des bouchons.
Quant à la dernière pétition, le MCG l'a refusée. Pourquoi ? Celle-ci demande à notre Conseil d'Etat, à nos autorités politiques de s'adresser à la France sur la question de l'échangeur autoroutier de Viry. Mais enfin, Mesdames et Messieurs, chaque pays est autonome, ce n'est pas au gouvernement genevois d'aller dire aux Français ce qu'ils doivent faire !
Par contre, il est de notre devoir, en tant qu'élus de ce parlement, de donner un signe fort en ce qui concerne l'immobilité de notre canton et l'afflux de frontaliers au quotidien. Je dis bien «au quotidien», parce que les seuls moments où Genève est en paix, c'est durant les périodes de vacances, notamment en juillet et août. Autrement, nous subissons ces nuisances à longueur de journée.
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, je pense avoir fait le tour de ces trois pétitions. Le groupe MCG vous invite à soutenir les deux premières et à refuser la dernière, c'est-à-dire la P 2182 qui demande au gouvernement genevois de s'adresser aux autorités françaises en ce qui concerne l'autoroute de Viry. Nous n'avons pas à faire la morale à d'autres pays; en revanche, nous nous devons, nous, Genevois, élus, députés au Grand Conseil, de défendre les intérêts de notre canton.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, concernant la pétition 2182 émanant des Vertes et des Verts transfrontaliers ainsi que de dix associations comme le WWF, l'ATE, actif-trafiC, Noé21, mais aussi des organisations françaises telles que France Nature Environnement, l'ACPAT, la Confédération paysanne et Apollon 74, nous, les Vertes et les Verts genevois, ne pouvons bien sûr que la soutenir, mais surtout saluer les travaux de la commission des pétitions. En effet, la commission a approuvé la pétition pour marquer son soutien aux habitantes et habitants.
Même si, lors des auditions, nous avons appris que les autorités françaises avaient renoncé au projet d'échangeur à Viry, il était important de soutenir cette pétition dans l'esprit d'une meilleure gouvernance sur le territoire du Grand Genève de même qu'à des fins environnementales, puisqu'une invite du texte propose de protéger le corridor biologique - auquel Genève a d'ailleurs contribué.
Cette pétition qui, je le répète, a été portée par dix organisations des deux côtés de la frontière - puisque nous partageons un même territoire - s'oppose au projet d'échangeur autoroutier de Viry, un projet en contradiction avec les engagements climatiques du Grand Genève, un projet qui menace la qualité de vie de part et d'autre de la frontière, un projet qui représente une menace pour la biodiversité et les terres agricoles. Il s'agit ici de protéger le dernier corridor biologique entre le Rhône et le Salève, de surcroît récemment restauré, au niveau du vallon de la Laire.
Les Vertes et les Verts vous recommandent de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat afin que le projet d'échangeur à Viry, qui était complètement surréaliste et suranné, soit définitivement abandonné, afin de protéger les terres agricoles face à de nouveaux projets routiers, de sauvegarder les corridors biologiques et de préserver le vallon de la Laire.
Surtout, il convient de mettre en place un véritable plan Marshall, c'est-à-dire d'investir massivement pour développer les transports publics et la mobilité douce, privilégier des déplacements durables dans le sud de l'agglomération genevoise, protéger l'environnement, décongestionner les villages des deux côtés de la frontière et améliorer la qualité de vie des résidentes et résidents. Dans ce sens, nous soutiendrons aussi les deux pétitions liées afin de défendre les habitantes et habitants du Grand Genève. Merci.
Une voix. Bravo !
M. Stéphane Florey (UDC). Tout d'abord, je signale que ces pétitions sont le fruit du travail catastrophique effectué par l'ancien magistrat, il faut quand même le souligner: s'il avait mené une politique un peu plus active et intelligente, on n'aurait sans doute pas été saisis d'autant de pétitions et de contestations relatives à la mobilité.
Concernant ces trois pétitions, la première propose un certain nombre d'éléments; on peut adhérer à l'ensemble d'entre eux ou pas complètement. Au final, nous allons la soutenir, puisque de toute façon, la solution consiste à apporter un bol d'air aux populations du sud du canton, lesquelles sont assaillies de toute part par une forte circulation pendulaire.
Quant à la deuxième, c'est-à-dire la P 2176, nous y sommes entièrement favorables, d'autant plus que plusieurs motions sur ce sujet sont également inscrites à notre ordre du jour.
Par contre, nous nous abstiendrons sur la dernière pour la simple et bonne raison qu'aujourd'hui - et il est dommage que la commission n'ait pas attiré l'attention des pétitionnaires à ce sujet -, elle se retrouve sans objet, elle ne sert plus à rien. Si le Conseil d'Etat reçoit ce texte, que va-t-il répondre ? Il répondra dans le vide, ce sera un rapport pour rien. Les autorités françaises ont déjà annoncé avoir purement et simplement renoncé à cet échangeur, ce qui veut dire que la question est réglée. Ce serait de l'acharnement thérapeutique que de renvoyer la pétition au Conseil d'Etat pour obtenir une réponse qui tombe dans le vide.
De manière plus globale, aujourd'hui - et malheureusement toujours à cause des erreurs du passé -, le Grand Conseil doit et se doit d'apporter de vraies solutions à la population. Ces pétitions vont dans ce sens-là, et on aura de toute façon d'autres débats de ce type sur les motions que j'ai mentionnées tout à l'heure, puisque le sujet est loin d'être terminé malgré la bonne volonté du nouveau conseiller d'Etat et sa politique qui va dans le bon sens. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG). On marche un peu sur la tête, notamment avec la pétition des Verts transfrontaliers - des 25 Verts transfrontaliers, ils ne sont pas nombreux, c'est la seule chose qui est réjouissante dans cette histoire. Ils veulent que Genève donne des ordres à la France, dise aux Français ce qu'ils doivent faire de manière impérialiste et, à notre sens, tout à fait déplacée.
Après avoir bloqué les rues de Genève, voilà que les Verts affichent de plus grandes ambitions, des ambitions à l'échelle transfrontalière, c'est-à-dire paralyser la circulation dans toute la région de manière beaucoup plus large, c'est leur but. Heureusement, leur proposition et leurs intentions sont condamnées à disparaître ou à être inefficaces, ce qui n'est malheureusement pas le cas dans les rues de Genève, comme on le voit notamment à la rue de Carouge ou dans de nombreux quartiers qui vont être immobilisés par une suppression massive des places de parc, on ne pourra plus y accéder. Les populations concernées - nous avons beaucoup de retours - souffrent de cette situation.
Non, par pitié, ne partageons pas ces mauvais concepts, ces mauvaises idées avec nos voisins de l'autre côté de la frontière, menons une politique équilibrée ! C'est cette politique que défend et continuera à défendre le MCG, une politique d'équité, aussi. Arrêtons de verser de l'argent et de donner des ordres à la France, cessons de nous prendre pour le centre du monde et recentrons-nous sur les intérêts des Genevois.
Les Genevois en ont besoin, nombre d'entre eux souffrent d'une manière ou d'une autre, la vie est compliquée pour beaucoup de monde dans notre canton. Occupons-nous d'abord de nos affaires ici, il faut s'en charger, faire notre travail. Aussi, nous demanderons le classement, comme l'a indiqué le rapporteur de minorité, de cette pétition verdâtre. Merci, Madame la présidente.
M. Pierre Conne (PLR). Chers collègues, en ce qui concerne la P 2176 «pour une fermeture partielle en semaine de la douane de Fossard et totale tous les week-ends», le PLR ne soutiendra pas son renvoi au Conseil d'Etat alors qu'il votera celui des deux autres pétitions. Pourquoi ?
Premièrement, Mesdames et Messieurs, lorsque l'on vient de France, la douane de Fossard ne donne pas du tout sur une localité, on ne traverse aucun village; passé la frontière, on arrive directement sur la route de Sous-Moulin, donc il n'y a aucune nuisance pour des riverains à cet endroit.
Deuxièmement, en cinq ans, le trafic a été réduit de 44% à la douane de Fossard, parce que du côté français où il y a une zone résidentielle, les autorités ont mis en place un système de circulation avec ralentisseurs et voie unique pour les transports individuels et publics de manière à préserver la qualité de vie de leurs habitants. Aussi, si on veut fermer des douanes, faisons-le, mais avec discernement ! Ici, ce serait le faire sans discernement.
Pourquoi avons-nous été saisis de cette pétition ? Parce qu'une personne qui vit dans un petit ensemble résidentiel à proximité de la douane de Fossard - mais à plusieurs centaines de mètres, puisque la route en elle-même ne donne pas sur ce lotissement, auquel on accède par la route de Sous-Moulin - considère que le trafic est dérangeant le week-end pour les personnes qui habitent dans ce groupe de petits immeubles. Il y a la route, une grande haie, des arbres, et dans ce parc arborisé, il y a effectivement un ensemble résidentiel.
Mesdames et Messieurs, c'est un abus de considérer que la circulation qui, comme je vous l'ai dit, est déjà très réduite sur cette portion de route constitue une nuisance pour les habitants de ce petit groupement résidentiel. Faisons preuve de discernement: ne renvoyons pas cette pétition au Conseil d'Etat et déposons-la sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie de votre attention.
M. Jacques Jeannerat (LJS). La commission des pétitions, c'est magique ! On y reçoit des gens, parfois individuellement, parfois en groupes, parfois en groupes binationaux. En ce qui concerne la P 2176 sur la douane de Fossard, je rejoins les propos de mon préopinant: le groupe LJS ne renverra pas non plus cette pétition au Conseil d'Etat - je ne reviendrai pas sur les excellents arguments de Pierre Conne.
S'agissant de l'histoire de l'échangeur autoroutier de Viry, j'ai entendu les propos du MCG et c'est comme si des députés avaient lancé cette pétition. Mais c'est un groupement franco-suisse qui l'a déposée ! Le ton que vous employez, Messieurs les représentants du MCG, est insultant vis-à-vis de notre parlement !
Vous dites que ce sont des écolos des deux côtés de la frontière... Respectons les personnes qui déposent des pétitions, arrêtez avec ce ton moralisateur. C'est comme si des députés avaient présenté un objet, une motion ou une résolution. Je n'admets pas ce discours, Madame la présidente, et j'en suis offusqué. Voilà, j'ai terminé. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
La présidente. Merci. La parole est à M. François Baertschi pour quarante-sept secondes.
M. François Baertschi (MCG). Sans polémiquer... (Exclamations.) ...ce qui est choquant, c'est ce mélange des genres qu'opère mon excellent collègue - habituellement... (Rires.) ...pas cette fois-ci - de LJS, comme de nombreuses personnes dans ce parlement, malheureusement. Cessons ce mélange des genres, ayons... (L'orateur prononce «aillons».)
Des voix. «Ayons» !
M. François Baertschi. ...la fierté d'être Genevois, arrêtons ces... (Commentaires. Des voix entonnent le «Cé qu'è lainô».)
La présidente. S'il vous plaît, s'il vous plaît !
M. François Baertschi. Ayons cette fierté, soyons logiques et cohérents ! Merci, Madame la présidente. (Applaudissements.)
La présidente. Merci. (Brouhaha.) S'il vous plaît ! (La présidente agite la cloche.) Monsieur Sandro Pistis, il vous reste vingt-quatre secondes.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Non, ce qui est scandaleux, c'est de ne pas être à l'écoute de celles et ceux qui déposent des pétitions. Prenons celle en lien avec la douane de Fossard: eh bien oui, Messieurs du PLR - vous transmettrez, Madame la présidente -, ces gens vivent dans la souffrance, ils subissent au quotidien le passage des véhicules, et vous minimisez cette souffrance. Voilà ce qui est scandaleux, c'est la minimisation de leur souffrance. Mesdames et Messieurs, le MCG vous invite à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Merci, Madame la présidente.
La présidente. Je vous remercie. La parole retourne à Mme Christina Meissner pour presque quatre minutes.
Mme Christina Meissner (LC), rapporteuse. Merci, Madame la présidente. Je poursuivrai dans le même sens que le rapporteur de minorité pour souligner qu'effectivement, certaines personnes ont les capacités de déposer des pétitions, d'autres moins, mais cela ne signifie pas qu'elles ne sont pas en souffrance. Nous devrions apporter notre soutien aux habitants en renvoyant toutes ces pétitions au Conseil d'Etat pour qu'il trouve des réponses spécifiques en fonction du type de problèmes que ces gens rencontrent et surtout pour préserver la qualité de vie de nos résidents qui ne cesse de se dégrader. Je vous remercie.
La présidente. Merci, Madame. Nous procédons aux trois votes successifs.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2173 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 84 oui (unanimité des votants) (vote nominal).
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2176 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 59 oui contre 26 non et 1 abstention (vote nominal).
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2182 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 67 oui contre 13 non et 9 abstentions (vote nominal).