Séance du vendredi 2 février 2024 à 16h
3e législature - 1re année - 8e session - 55e séance

R 957-A
Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier la proposition de résolution de Mmes et MM. Jean Batou, Jean Burgermeister, Pablo Cruchon, Rémy Pagani, Pierre Vanek, Salika Wenger, Jocelyne Haller : Face à la crise et au nouveau contexte politique international, un changement de cap fiscal s'impose ! (Résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonale)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VIII des 24 et 25 février 2022.
Rapport de majorité de M. Alexandre de Senarclens (PLR)
Rapport de première minorité de M. Jean Batou (EAG)
Rapport de deuxième minorité de M. Pierre Eckert (Ve)

Débat

La présidente. Nous continuons avec la R 957-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Je remercie les quelques personnes qui ont décidé de revenir dans la salle et les invite à ne pas poursuivre leurs discussions. Etant donné que le groupe Ensemble à Gauche ne siège plus parmi nous, le rapport de première minorité de M. Jean Batou ne sera pas présenté. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.

M. Alexandre de Senarclens (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Un projet de Jean Batou peut en cacher un autre. Plusieurs autres ! En quittant le Grand Conseil il y a quelques mois, Jean nous a laissé une oeuvre composée de textes comme autant de cadeaux empoisonnés. Député prolifique, joueur, parfois taquin, Jean aimait les impôts. Il les aimait tellement qu'il nous a laissé beaucoup d'objets qui visent à les augmenter: il a parlé de l'impôt sur les successions et donations, de revenir sur la diminution de 12% adoptée dans les années 2000, de la RIE III, qui le passionnait, de la RFFA. Ses textes étaient parfois inspirés par l'actualité internationale, comme cette proposition de résolution.

Ce texte invite le Conseil d'Etat à augmenter le taux d'imposition des entreprises, le faisant passer de 13,99% à 18,5%, et propose qu'une partie des recettes reste dans les caisses de l'Etat et que l'autre revienne à «un vaste plan d'investissements cantonal dans des infrastructures à finalité sociale et écologique, créatrices d'emplois locaux». Une autre partie de cette résolution demande à l'Assemblée fédérale de donner une suite favorable à une proposition de la secrétaire au Trésor des Etats-Unis, Janet Yellen, en fixant un taux plancher de 21% pour les entreprises en Suisse, de relever de 2,5 points l'IFD pour financer l'AVS et d'avoir un taux plancher de 10% minimum pour l'imposition des cantons dans la LHID.

Evidemment, ce projet va complètement à contre-courant de ce qui a été fait, de la politique fiscale de Genève à l'égard des entreprises, une politique saine et importante pour nos conditions-cadres et pour la préservation, le maintien des emplois; celle qu'on a appliquée avec la réforme RIE III - qui s'est finalement appelée RFFA -, et aussi avec l'adoption d'une réforme pour mettre en oeuvre le projet BEPS de l'OCDE. Toutes ces réformes sont essentielles pour que Genève soit compétitive face aux autres cantons, que la Suisse soit compétitive face aux autres pays. Cela a permis de créer de la croissance, des emplois et une Suisse dynamique. C'est pour ces motifs qu'il faut refuser cette résolution. Je vous remercie, Madame la présidente.

M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de deuxième minorité. Je vais essayer de représenter les deux minorités, tout en m'appuyant essentiellement sur mon rapport et non sur celui de Jean Batou. Comme on l'a dit, la fiscalité des entreprises a été un centre d'intérêt de l'OCDE depuis un certain temps. On a demandé notamment d'harmoniser les taux d'imposition entre des pays membres de l'OCDE. Comme le rapporteur de majorité l'a dit, cela a conduit aux diverses réformes, RIE III et RFFA. Signalons également cette initiative prise par les Etats-Unis, le rapporteur a mentionné Mme Janet Yellen: celle-ci proposait que l'ensemble des sociétés soient imposées sur le bénéfice à hauteur de 21%, ce qui a fini par être réduit à 15%. C'est d'ailleurs ce taux qui a récemment été adopté au niveau de la Confédération.

De notre côté, celui des Verts, nous avons toujours considéré que le taux de 13,99% qui a cours actuellement, depuis la RFFA, est bien trop bas. Premièrement, il génère d'importantes pertes de recettes pour l'Etat, environ 250 millions. Cette estimation figure dans l'exposé des motifs du projet du budget 2022; malheureusement, ce texte a été écrit il y a un certain temps.

L'argument que j'amène est plus un argument des Verts: avec des taux d'imposition relativement bas, on compte toujours augmenter l'attractivité économique du canton. Je suis conscient que différents paramètres influent sur l'attractivité du canton de Genève - la fiscalité en est un. Néanmoins, on a un problème: on attire les entreprises, mais il faut aussi loger les personnes qui y travaillent et la construction des infrastructures nécessaires aux personnes attirées par ces entreprises (logements, écoles, EMS ou ce que vous voulez) doit suivre. En l'absence de ces capacités-là, on finit par devoir exporter une grande partie de la population qui travaille à Genève dans les régions frontalières du canton de Vaud ou de la France voisine.

Nous soutenons le principe de cette résolution avec un taux de 21%. Mais comme le taux de 15% a été mis en place, nous ne soutiendrons pas d'amendement. Je pense qu'il faut soutenir un taux de 21%, mais il faut que ce soit harmonisé internationalement, je le concède. Je ne proposerai donc pas d'amendement...

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Pierre Eckert. ...ne soutiendrai pas l'amendement du rapporteur de minorité Jean Batou et resterai à ce taux de 21%. Après, on pourrait procéder de plusieurs manières, bien entendu: on pourrait fixer des taux d'imposition plus élevés pour les entreprises avec des abattements possibles pour celles qui seraient plus responsables d'un point de vue social ou environnemental. Tout ça, ce sont des propositions qu'on pourrait émettre, qu'on avait émises dans le cadre de la RFFA, mais qui n'avaient pas été retenues.

Dans un monde d'échanges globalisés, la sous-enchère fiscale est un poison pour les recettes de l'Etat: les entreprises qui le peuvent, les multinationales surtout, déplacent régulièrement leur siège financier dans l'un ou l'autre des paradis fiscaux. Merci donc de soutenir cette proposition de résolution qui permettra à Genève et à la Suisse de se replacer à niveau dans le concert des nations tout en soulageant quelque peu les budgets publics. Je vous remercie, Madame la présidente.

M. Michael Andersen (UDC). Il est vrai que cette résolution a nécessité de mon côté un certain dépoussiérage, et il est vrai aussi que tant les considérants que les invites et la dernière demande ne sont absolument plus d'actualité. Pourquoi ? La majorité des considérants se réfère notamment à la crise sanitaire que nous avons traversée; fort heureusement, cette dernière est derrière nous et nous n'espérons pas la revivre de sitôt. Un autre considérant mentionne cette majorité rose-verte qui n'est plus là aujourd'hui. Fort heureusement ! Alléluia ! Enfin, un nouveau considérant met en avant l'opposition des partis alors majoritaires au gouvernement (la majorité rose-verte, à nouveau) à la réforme fiscale des entreprises. Encore quelque chose de complètement dépassé ! Rappelons cette réforme fiscale qui, accessoirement, a rapporté des centaines de millions supplémentaires à l'Etat de Genève et qui permet aujourd'hui de financer de nombreuses prestations.

Si on regarde les invites, on voit qu'elles sont aussi complètement dépassées. Prenons la deuxième: elle demande d'augmenter, d'ici à 2024, l'impôt des entreprises pour combler le manque à gagner causé par la mise en oeuvre de la RFFA. Or actuellement, on sait - et les comptes nous l'ont du reste montré - que la réforme fiscale des entreprises a déjà été absorbée. Cette invite est, elle aussi, complètement dépassée. Par ailleurs, l'augmentation des impôts des entreprises à 14,7% a été votée à l'unanimité de cette plénière. Enfin, la dernière demande à l'Assemblée fédérale... Il est assez étonnant de voir que les signataires viennent des bancs de l'extrême gauche et qu'ils se réfèrent au grand capitaliste américain dans cette résolution.

Mesdames et Messieurs les députés, j'ai dû dépoussiérer cette résolution pour vous exposer notre opposition à celle-ci. Je vous invite à la renvoyer aux archives le plus rapidement possible afin qu'elle prenne la poussière, tout comme les signataires, qui ne sont plus dans ce parlement aujourd'hui. Merci.

M. Vincent Subilia (PLR). Dans le sillage des débats qui ont eu lieu hier, je voudrais appeler de mes voeux, des voeux très certainement pieux, à ce que cette scorie de l'histoire qui nous est présentée signe le requiem de la litanie que la gauche et l'extrême gauche, ou ce qu'il en reste, nous servaient en matière fiscale. J'ai eu l'occasion de le dire: à l'instar d'autres textes dont s'est saisi notre parlement, qui, à mon sens, a d'autres priorités à traiter, cette résolution est marquée du double sceau de l'idéologie - ça, on le savait, ça n'est pas une surprise - et surtout d'une méconnaissance crasse des enjeux fiscaux. Je m'étonne - vous transmettrez, Madame la présidente - que l'excellent député Eckert, fin connaisseur de la chose fiscale, qu'il pratique notamment à la Chambre de commerce, institution qui m'est familière, tienne des propos irresponsables en appelant à une augmentation du taux de fiscalité à 21%.

Mesdames et Messieurs, on l'a dit et répété, et j'espère que c'est la dernière fois que nous aurons à nous manifester à ce propos, la Suisse, et Genève en particulier, n'est pas un paradis fiscal ! Des chiffres vous ont été encore fournis hier par notre excellente conseillère d'Etat, grande argentière de son état. La Suisse dispose d'une fiscalité marquée du double R: elle est raisonnable et responsable.

Raisonnable, parce qu'elle s'inscrit dans les moyennes basses de ce qui se pratique dans un certain nombre d'autres juridictions. Responsable, parce qu'il est, Mesdames et Messieurs, de notre responsabilité - c'est l'objectif de la fiscalité, et manifestement cette dimension semble constamment échapper à nos contradicteurs - d'associer des mécanismes de répartition, répartition dont on a dit et répété dans cette enceinte depuis des années - c'est pour ça que je nous invite à enfin changer de logiciel - qu'elle est particulièrement adaptée. (Je vois des adeptes de la fiscalité se joindre à nous et je leur souhaite la bienvenue !) La répartition est particulièrement responsable en ce sens qu'elle distribue les richesses selon la pyramide que vous savez.

Alors que ces réformes ont été faites, alors que - et M. Eckert le sait pertinemment bien - des multinationales, qu'il voue aux gémonies, ont connu une première hausse de fiscalité avec l'abolition des statuts qui les a fait basculer de 9% à 13,99%, qu'à la faveur de la réforme BEPS de l'OCDE, de ce big bang qui a été insufflé, certains groupes connaissent aujourd'hui une fiscalité de 15% dans d'autres pays de l'Union européenne qui sont nos concurrents, appeler aujourd'hui à une fiscalité de 21% est proprement irresponsable, ça n'est pas raisonnable. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) C'est un signal désastreux, on l'a rappelé hier aussi, qui est donné à ces opérateurs économiques; ceux-ci génèrent de l'emploi et font confiance à la stabilité qui est la marque de fabrique du «Swiss made» et du «Geneva made». Revenir systématiquement à la charge avec ce type de projet...

La présidente. Il vous faut conclure.

M. Vincent Subilia. ...quand bien même il s'agirait d'une erreur de l'histoire imputable à un député aussi baroque que folklorique, quoique sympathique, eh bien...

La présidente. Vous avez terminé.

M. Vincent Subilia. ...tout ça est particulièrement désagréable... (Le micro de l'orateur est coupé. L'orateur continue à s'exprimer hors micro.)

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve). Je tiens à saluer les excès de langage auxquels nous avons dû assister; ils traduisent peut-être une certaine fébrilité des rangs d'en face, ou une fatigue, ou une forme d'hybris, parce que quand on est fatigué d'entendre la vérité, d'entendre parler de faits, de constater que le moins-disant fiscal qui a marqué les dernières décennies a débouché sur des détresses sociales incontestables, lorsque les faits sont là, Mesdames et Messieurs, les contester par des excès de langage démontre bien qu'en définitive, on est parfaitement conscient de ne pas avoir d'arguments pertinents pour les combattre.

De notre côté, nous constatons dans les débats budgétaires - nous l'avons vu lorsque nous avons élaboré le budget de l'Etat et lorsque vous nous avez présenté deux lois, de ces fameuses lois «corset» visant en effet à corseter l'Etat - qu'il y a une sorte de «geignardise» à dire que l'Etat n'a pas les moyens d'offrir des prestations auxquelles les citoyennes et les citoyens ont droit et que ceux-ci requièrent par leurs votes réitérés. Eh bien, Mesdames et Messieurs, nous souhaitons que l'Etat se donne les moyens de fournir ces prestations.

Nous avons proposé des textes sur l'imposition sur le revenu. Ils ont été refusés avec un certain nombre d'arguments; effectivement, les gens méritent leur revenu et il ne faut peut-être pas les imposer de façon trop importante. Alors on s'est dit qu'on allait se tourner vers les successions, parce que le mérite d'être bien né et d'avoir des parents riches est peut-être moins évident. Vous avez également refusé. On se tourne à présent vers les entreprises: on sait (c'est la direction prise ces dernières décennies et le sens des réformes néolibérales) que le taux d'imposition des entreprises a dramatiquement baissé dans toutes les démocraties occidentales et que cela a des effets néfastes. Dans le sillage du projet BEPS et de Janet Yellen - on ne parle pas de cryptomarxistes, pour reprendre les termes excessifs qui sont proférés -, il faut qu'à l'échelle internationale nous nous entendions pour refuser la concurrence fiscale et rehausser les taux d'imposition sur le bénéfice des entreprises. C'est dans ce sens-là que va cette résolution et c'est pour cela que nous allons la soutenir. Je vous remercie.

M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, pour éclairer notre débat, j'amène quelques chiffres qui, d'une manière significative, étaient manquants. Ces données nous ont été transmises par l'OCSTAT. En 2010, nous avons à Genève 27 300 personnes morales, nous en avons 38 341 en 2020, soit pratiquement un doublement de personnes morales à Genève. Des personnes morales avec un bénéfice de plus d'un million, nous en avons 852 en 2010, 1146 en 2020, soit une augmentation certes moins forte, mais d'environ 300.

Je cite un autre chiffre assez éclairant pour que l'on comprenne bien dans quelle situation nous sommes. Pour le capital propre, donc l'accumulation de capital, en 2010, nous avons 18 milliards déclarés à Genève, et en 2020, 33 milliards. Là aussi, nous constatons pratiquement un doublement du capital global, avec une explosion entre 2019 et 2020: on passe de 22 milliards de capital déclaré, de fortune, à 33 milliards.

Concernant le bénéfice net - j'espère ne pas vous perdre, ces chiffres de l'OCSTAT sont intéressants -, 27 milliards ont été déclarés en 2010, 48 milliards en 2020. On remarque à nouveau un doublement des bénéfices, et je rejoins complètement une voix venant, je pense, de la droite, qui dit «tant mieux». Nous disons tant mieux.

Maintenant, je vais vous citer les chiffres de l'impôt cantonal, communal et fédéral des personnes morales: en 2010, 1,6 milliard, en 2019, 2,3 milliards - vous voyez, vous qui aimez les chiffres, il n'y a pas du tout un doublement de l'impôt - et en 2020, on chute à 2 milliards.

Avec ces chiffres assez simples qu'il aurait fallu exposer, vous comprendrez que la fortune accumulée a doublé, que le nombre des personnes morales et leurs bénéfices aussi, mais qu'on a des pertes fiscales d'environ 300 millions entre 2019 et 2020. L'équation est là, Mesdames et Messieurs ! Elle montre l'injustice crasse: une situation économique en croissance, des entreprises qui vont bien - tant mieux, il faut s'en réjouir -, mais moins de rentrées fiscales qu'en 2019 et 400 millions seulement en plus depuis 2010, alors que... Je ne vais pas vous tenir le discours sur l'augmentation du coût de la vie, de la précarité et des charges de l'Etat, car vous le connaissez. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)

Quelque chose ne joue pas ! Ce n'est pas la poussière du logiciel qu'il faut enlever - vous transmettrez à la droite -, c'est la poussière dans les yeux du PLR ! Ce n'est pas un signal désobligeant pour les acteurs économiques, comme le dit M. Subilia, vous lui transmettrez, c'est un signal absolument clair pour la population qui dit: «Mais attendez ! Les acteurs économiques font des super bénéfices, et nous, nous n'arrivons plus à boucler les fins de mois !»

La présidente. Il vous faut conclure.

M. Sylvain Thévoz. Mesdames et Messieurs, il faut voter ce projet: il est bon, et grâce à une imposition rééquilibrée, permettra que la situation économique extraordinaire de Genève...

La présidente. Je vous remercie.

M. Sylvain Thévoz. ...bénéficie à toutes et tous et pas seulement... (Le micro de l'orateur est coupé. L'orateur continue à s'exprimer hors micro.)

M. Stefan Balaban (LJS). Voici un énième objet qui provient d'une dystopie orwellienne - petit clin d'oeil à M. Nidegger. Je pense qu'il est temps de passer à autre chose. Ce sont des objets qui n'ont pas de sens, qui ne sont pas cohérents avec notre réalité fiscale. Je vous propose donc qu'on arrête de perdre notre temps et qu'on traite de questions un peu plus utiles pour notre république. Merci.

La présidente. Je vous remercie. Monsieur de Rougemont, les Verts n'ont plus de temps de parole. Le temps de parole pour les rapporteurs étant également épuisé, je cède le micro à Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Je vous remercie, Madame la présidente. Nous parlions hier de prévisibilité; ce mot en avait fait sourire certains qui estimaient que, finalement, ce n'était pas nécessaire. Or, c'est justement un texte de ce type et le fait qu'il soit traité aussi longtemps après son dépôt qui remettent en question toute la prévisibilité et toutes les réformes intervenues depuis lors: RFFA en 2019, BEPS au 1er janvier 2024.

Je reviens sur certains des éléments repris par les auteurs, notamment le fait de vouloir une moins grosse concurrence entre les différents pays. Cette volonté est aujourd'hui réalisée avec la réforme BEPS, appliquée aux entreprises qui font plus de 750 millions d'euros de chiffre d'affaires et qui seront toutes et tous imposés, toutes imposées plutôt, pardon - j'ai tellement l'habitude de parler correctement ! -, qui seront toutes imposées au même taux. Proposer à nouveau aujourd'hui de modifier ces taux, qui viennent d'être fixés, est tout simplement ahurissant, ce d'autant que notre canton n'a pas besoin de ces revenus supplémentaires.

Oui, Mesdames et Messieurs, j'ai aussi des chiffres sur l'augmentation des revenus fiscaux - si je les retrouve -, des personnes physiques, mais surtout des personnes morales durant les onze dernières années: ces revenus fiscaux sont en augmentation majeure ! Nous n'avons pas de pertes fiscales ! Alors on n'a peut-être pas exactement le même rapport entre l'augmentation du nombre d'entreprises et l'augmentation des revenus fiscaux, mais on ne peut pas dire que nous faisons des pertes fiscales. Ce mot est totalement usurpé dans ce contexte. Au contraire ! Nous le voyons d'année en année, nos revenus fiscaux sont exceptionnels, nos entreprises ont une résilience phénoménale, dont nous ne pouvons que nous féliciter. Ce sont ces revenus fiscaux, ces revenus fiscaux d'entreprises, qu'elles soient grosses ou petites, qui nous permettent de financer les politiques publiques que nous menons au sein de l'Etat de Genève.

Je souligne un dernier point, Mesdames et Messieurs les députés: toute une série d'entreprises ne paient pas d'impôts sur le bénéfice, parce qu'elles n'en font tout simplement pas. Ce n'est pas une question de taux: 63% des entreprises ne paient pas d'impôts sur le bénéfice parce qu'elles n'en font pas. Elles créent quand même de l'emploi, et ça, c'est un élément rassurant; elles paient - je vous rassure les uns et les autres - des impôts sur le capital. Elles n'existent donc pas sans payer d'impôts, ce qui répond aussi à une demande. Finalement, très peu d'entreprises paient des impôts sur le bénéfice, et comme nous avions déjà eu l'occasion de le dire dans le cadre de la réforme RFFA, nous avons utilisé de façon très parcimonieuse les possibilités de réduire le taux, de 13,99% à l'époque. Et puis, j'aimerais rappeler que ce taux a été augmenté à la suite de la suppression de la taxe professionnelle communale et que nous ne sommes plus à 13,99% mais à 14,7%. Nous sommes donc très proches de ces 15% qui s'appliquent aux très grosses entreprises.

Mesdames et Messieurs, nous pouvons nous réjouir de ces revenus fiscaux importants et surtout, surtout, nous devons prendre garde de ne pas déstabiliser les entreprises et de conserver les acquis que ces réformes nous ont apportés et vont encore nous apporter. Je vous recommande de rejeter cette résolution. Merci.

La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons d'abord voter sur l'amendement général du rapport de première minorité. Il consiste à modifier la première invite au Conseil d'Etat comme suit: «à déposer un projet de loi pour le relèvement du taux d'imposition des bénéfices des personnes morales de 13,9 à 15%» et à supprimer toutes les autres invites.

Mis aux voix, cet amendement général est rejeté par 62 non contre 27 oui.

Mise aux voix, la proposition de résolution 957 est rejetée par 61 non contre 27 oui (vote nominal).

Vote nominal