Séance du
vendredi 17 novembre 2023 à
18h
3e
législature -
1re
année -
6e
session -
34e
séance
La séance est ouverte à 18h, sous la présidence de Mme Céline Zuber-Roy, présidente.
Assistent à la séance: Mme Carole-Anne Kast et M. Pierre Maudet, conseillers d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Nathalie Fontanet, Thierry Apothéloz, Anne Hiltpold et Delphine Bachmann, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Murat-Julian Alder, Vincent Canonica, Grégoire Carasso, Jennifer Conti, Florian Dugerdil, Marc Falquet, Adrien Genecand, Angèle-Marie Habiyakare, Christina Meissner, Charles Poncet et Pascal Uehlinger, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Darius Azarpey, Céline Bartolomucci, Rémy Burri, Monika Ducret, Patrick Lussi et Philippe Meyer.
Annonces et dépôts
Néant.
Débat
La présidente. Nous reprenons le traitement de l'ordre du jour avec la M 2685-A, classée en catégorie II, trente minutes. La parole va à M. Jean-Marc Guinchard.
M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames les députées, Messieurs les députés, chères et chers collègues, la proposition de motion qui nous est soumise vise à lancer une opération sous le nom de Reditus afin de renvoyer les sans-papiers chez eux ou à les expulser s'ils ne collaborent pas. En latin, «reditus» signifie bien «retour», mais dans le sens de revenir chez soi, et non de repartir ailleurs.
De l'avis de la majorité des commissaires qui se sont exprimés, l'objectif de ce texte n'est pas le bon. Les auteurs évoquent l'opération Papyrus qu'ils considèrent comme un échec, opération qui, je le rappelle, consistait à régulariser des travailleurs en situation illégale - au noir ou au gris - pour leur assurer une situation régulière et, par là même, une couverture sociale adéquate ainsi que des conditions de travail respectueuses des dispositions légales. Ils se basent seulement sur un reportage diffusé sur les ondes de la RTS, ce qui fait qu'il est impossible de déterminer si les situations rapportées étaient une généralité ou des cas isolés.
Le travail au noir, c'est vrai, constitue une véritable plaie, une catastrophe tant sur le plan économique que social, et qui touche autant les intérêts des travailleurs que des employeurs; il est traqué de façon efficace par les partenaires sociaux dans les secteurs soumis à des conventions collectives de travail, mais la situation est moins claire dans des secteurs peu ou pas organisés, comme les services de maison et le travail domestique.
Partant du principe que l'opération Papyrus a été un succès, fait rappelé et souligné par la conseillère d'Etat, la majorité de la commission a estimé que la proposition de motion se trompait de cible et qu'elle aurait dû présenter des solutions pour éradiquer le travail au noir en cherchant à débusquer tant les employeurs que les travailleurs. Le texte n'a finalement obtenu qu'un seul vote, celui de son auteur - c'est bien normal. Nous vous recommandons dès lors de le rejeter avec la même majorité. Je vous remercie.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de minorité. A en croire certains d'entre vous, Mesdames et Messieurs, l'immigration représente une chance pour Genève. Telle est depuis des années la devise d'une classe politique qui a tendance à tout renier, jusqu'à la propre identité du peuple genevois. Regroupement familial, effacement des frontières, discrimination positive à l'embauche, assistanat social, droit d'asile, faux mineurs mais vrais clandestins majeurs: vous avez créé toutes les conditions d'une véritable submersion migratoire.
Vous affirmez que l'immigration est une chance, mais pour qui ? Assurément pas pour nos concitoyens. Pour une caste politique, elle a permis de sauver quelques élections, notamment dans les communes grâce au vote des étrangers; pour d'autres, elle a permis de libérer des subventions publiques, favorisant ainsi l'aide des clandestins. Les chiffres sont éloquents: en 2020, d'après l'office cantonal de la statistique, le taux de personnes à l'aide sociale était de 54% supérieur chez les étrangers que chez les Suisses. L'immigration n'est plus, et depuis longtemps, celle à laquelle on est en droit de s'attendre, mais une immigration économique pour assistés sociaux.
Pour nos contribuables, la facture est exorbitante. Votre politique d'immigration illégale, mes chers collègues, a un coût, un coût social. Sur ce plan, vos manoeuvres relèvent de la provocation. Alors que, chaque jour, des sacrifices sont exigés des Genevois, l'immigration reste un tonneau des Danaïdes. En 2020, l'Hospice général a consacré 447 millions à des prestations: 349 millions pour l'action sociale, un chiffre en hausse de 62% par rapport à 2010, et 98 millions pour l'asile, une augmentation de 94% par rapport à 2010. Or, dans le domaine de l'asile, les migrants suivis étaient 4476 en 2020 contre 4146 en 2010.
Les Genevois ne s'y trompent plus - ou, plutôt, vous ne les trompez plus; ils sont de plus en plus à refuser ce suicide cantonal. Les Genevois en ont marre, les Genevois en ont assez ! Trop d'années qu'ils se poussent, qu'ils consentent des sacrifices, qu'ils accueillent l'autre, et qu'ont-ils obtenu en retour ? Le développement d'une insupportable injustice à leur égard. Nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à refuser la submersion, ayant l'impression de devenir des étrangers dans leur propre canton, qui en compte déjà plus de 40%. En agissant comme vous le faites, en demeurant permissifs, vous préférez ignorer un vrai problème. Comment pouvez-vous rester les yeux aussi grands fermés devant ce phénomène qu'est la clandestinité et l'immigration subie ?
Par ailleurs, il faut tenir compte des milliards qui partent à l'étranger, échappant ainsi complètement à notre économie, mais également au fisc, car issus principalement du travail au noir. En 2010, l'ancien conseiller national Dominique Baettig dénonçait cela au travers d'une interpellation; la réponse était éloquente ! D'après la Banque nationale suisse, ce sont plus de 5 milliards qui ont totalement échappé à notre économie, avec toutes les conséquences que cela implique.
Quand on fait la balance des points positifs et négatifs, on s'aperçoit aisément que les impacts négatifs sont nettement supérieurs aux impacts positifs. L'idéologie du vivre-ensemble s'écroule sous le poids de la réalité d'une immigration illégale chaque jour plus importante et met en danger notre unité cantonale. Aider les autres, oui, mais pas plus que les nôtres et uniquement ceux qui en ont réellement besoin - voilà un principe qui devrait être appliqué depuis bien longtemps.
Dans cette société que vous définissez comme idéale, seuls ceux qui en ont les moyens passent au travers de tout cela - et parmi eux, vous tous ou presque, mes chers collègues. Car si la classe politique est favorable au vivre-ensemble, elle ne s'inflige pas le vivre-avec. L'immigration, c'est comme les éoliennes: ceux qui en défendent l'installation refusent d'en voir à côté de chez eux.
Tout cela représente une provocation que la minorité continuera à dénoncer, comme c'est le cas depuis longtemps, et il en sera toujours ainsi aussi longtemps que la gauche idéologique de même que la fausse droite continueront à nier le problème. Dans notre beau canton de Genève, un parlementaire qui dénonce l'immigration illégale, la pression exercée sur le logement - car oui, chers collègues, ces illégaux, il faut les loger ! -, le trafic d'êtres humains - oui, derrière tout cela, il y a aussi des gens qui en profitent ! -, c'est quelqu'un qui ose encore se regarder dans la glace tous les matins. Dès lors, personne ne nous fera taire.
La seule question qui devrait vous animer est celle-ci: avons-nous, nous, Genevois qui sommes dans le besoin, qui cherchons un emploi, un appartement, etc., le droit de vivre à Genève dans des conditions décentes ? Pour toutes les victimes de votre folle politique d'immigration, pour les victimes sociales et économiques, jamais nous ne capitulerons !
En conclusion, osez dire stop à l'immigration illégale, à cet assistanat malsain. Hier face à face, aujourd'hui côte à côte, levons-nous comme un seul homme pour dire haut et fort: nous sommes chez nous, rentrez chez vous ! Et osez vous affranchir de cette politique migratoire non voulue en renvoyant la proposition de motion 2685 au Conseil d'Etat.
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames et Messieurs, chers collègues, je me lève très volontiers pour contredire les propos qui viennent d'être tenus ! On retrouve ici l'UDC dans ses grandes oeuvres. Rien que la liste des considérants constitue un catalogue de clichés haineux et discriminants, et le texte n'en est pas à une généralisation près.
Il est tout d'abord faux de prétendre que le projet Papyrus a été un échec: le dispositif a permis de régulariser la situation de 2390 personnes. Certes, sur la fin de l'opération et sous la pression du temps, certaines malversations ont été constatées et dénoncées à la justice. Il faut relever à ce stade que le plus souvent, les faux documents qui ont été produits étaient le fait de mandataires peu scrupuleux, dont certains avocats, qui se sont goinfrés financièrement sur le dos de personnes vulnérables en leur faisant courir un risque d'expulsion plutôt qu'en leur offrant une possibilité de régularisation. Mesdames et Messieurs les députés, voilà où se trouve le vrai scandale, auprès de ces mandataires sans scrupules, et pas chez les sans-papiers qui sont stigmatisés dans cette proposition de motion.
Soutenir sans vergogne que les sans-papiers ne servent pas à l'économie locale est également un abus de langage que je préfère ne pas commenter ici. Ils ne paient certes pas d'impôts, mais s'acquittent souvent de cotisations sociales à l'aide du chèque service ou d'autres types de dispositions. L'objectif de l'opération Papyrus était précisément de sortir les personnes de cette noire situation en leur attribuant un permis B, ce qui leur permet de payer des impôts et ne peut qu'être salué. Le renvoi systématique de tous les illégaux demandé par le texte n'est clairement pas acceptable pour notre groupe, si bien que nous le refuserons.
J'aimerais conclure avec un dernier mot: le travail au noir ne doit pas être encouragé, mais au contraire combattu. Lors de la précédente législature, divers textes à ce sujet ont été adoptés par ce Grand Conseil avec le soutien de notre groupe, et le Conseil d'Etat a également engagé des actions dans cette direction. C'est cette voie qui doit être suivie, et une large majorité de la commission va dans ce sens. Dès lors, je vous recommande très vivement de refuser cette proposition de motion. Merci. (Applaudissements.)
M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, je fais suite à la lecture du rapport de minorité: on ne peut qu'être stupéfait des propos tenus et de la haine contre les étrangers manifestée par le rapporteur de minorité. D'ailleurs, je trouve que cela fait tache dans le contexte de notre session, eu égard notamment aux différents discours prononcés et à certains textes que nous avons votés hier, eu égard au fait que Genève est un lieu d'accueil et de respect des droits humains. Oui, cette proposition de motion de l'UDC fait véritablement tache par rapport aux principes et valeurs qui fondent notre canton. Je le répète: Genève constitue une terre d'accueil où les droits humains sont respectés.
J'ai entendu le rapporteur de minorité dire tout à l'heure, lors de la lecture de son rapport: «Les Genevois ne s'y trompent plus» en parlant d'immigration. Alors, Madame la présidente, vous transmettrez à M. Florey que cela doit faire des siècles que les Genevois se trompent, puisque cela fait des siècles que notre canton accueille des étrangers: Genève a accueilli, en différentes vagues successives, des personnes qui ont dû fuir des persécutions, des situations économiques catastrophiques et qui ont trouvé soit asile, soit un travail à Genève. Le canton s'est précisément construit autour de cette diversité culturelle, de ces migrations. Aujourd'hui, Monsieur Florey - vous transmettrez, Madame la présidente -, votre texte entache les valeurs de notre canton.
Maintenant, l'opération Papyrus a été une réussite, puisqu'elle a lutté contre plusieurs fléaux qui touchent une véritable main-d'oeuvre, une part de notre économie qui fait Genève également. Cette économie de l'ombre, on a vu qu'elle souffre d'une réelle précarité. Rappelez-vous, lors de la crise covid, de toutes les personnes qui, du jour au lendemain, n'ont plus eu accès au moindre travail, n'avaient aucune assurance; elles se sont retrouvées sans le moindre sou, à devoir faire la queue pour obtenir de quoi manger. Des projets comme Papyrus permettent précisément de donner à ces travailleuses et travailleurs un accès aux assurances sociales, de lutter contre la traite d'êtres humains dont ils peuvent être les victimes. Vous transmettrez encore, Madame la présidente, à M. Florey: le programme Papyrus a été une réussite !
Vouloir renvoyer les personnes sans papiers est une honte, car celles-ci ont leur place à Genève, elles font partie de l'économie. Mesdames et Messieurs, je lis - et je trouve cela d'ailleurs particulièrement limite - dans le rapport de minorité: «L'immigration, c'est comme les éoliennes: ceux qui en défendent l'installation refusent d'en voir à côté de chez eux.» Je dois dire que c'est exactement l'inverse qui se passe avec l'UDC: personne ne veut la voir à côté, mais malheureusement, on doit faire avec dans ce parlement. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Mme Ana Roch (MCG). Il est crucial d'aborder les sujets délicats tels que le travail au noir et l'application de la loi fédérale sur les étrangers avec une conscience aiguisée. L'opération Papyrus a été conçue dans cette optique précise. Nous ne pouvons tolérer le travail au noir ou les situations qui contreviennent à la loi sur les étrangers. Ce dispositif visait à régulariser les sans-papiers dans des conditions spécifiques, offrant ainsi une solution aux problèmes soulevés par de nombreuses voix ici présentes. Une fois régularisées, ces personnes ont obtenu un permis de séjour et sont devenues contribuables à part entière en participant activement à l'effort collectif; elles ne sont plus contraintes de se cacher ni de subir les conséquences de leur statut illégal.
Je tiens à dénoncer certains propos énoncés dans le rapport de minorité, notamment concernant ceux qui quittent leur pays, laissant derrière eux famille, parents, conjoint, enfants pour vivre dans l'ombre, silencieux, dans des pays aux us et coutumes inconnus, prétendument pour des avantages économiques, sans payer d'impôts; je souhaite ardemment aux personnes qui pensent cela de ne jamais avoir à vivre ce genre d'expérience.
Cela dit, il est impératif de respecter la loi sur les étrangers. Nous ne pouvons accueillir tout le monde, malheureusement, et je concède que l'immigration a des répercussions sur l'ensemble de notre société. Par ailleurs, je souligne l'importance de condamner fermement les employeurs qui engagent des individus dans des situations de travail au noir.
Nous devons trouver un équilibre entre compassion et respect des lois. Cette équation délicate nécessite une approche nuancée où nous reconnaissons la dignité de chacun tout en préservant l'intégralité de notre système juridique. C'est dans cette voie que nous devons avancer afin de créer une société juste et équitable pour tous. Pour ces raisons, le MCG ne soutiendra pas cette proposition de motion. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de majorité. Je ne répondrai pas point par point aux propos du rapporteur de minorité, mais j'aimerais rappeler que tout ce qui est excessif finit par devenir insignifiant. D'autre part, je pense que la majorité des membres de ce Grand Conseil sont des immigrés ou des descendants d'immigrés. Je vous remercie. (Applaudissements.)
La présidente. Merci. Mesdames et Messieurs, c'est le moment de vous prononcer sur cet objet.
Mise aux voix, la proposition de motion 2685 est rejetée par 66 non contre 9 oui (vote nominal).
Débat
La présidente. L'ordre du jour appelle la M 2757-A, classée en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité est de M. Jean Romain. Il est repris par M. Thierry Oppikofer, à qui je passe la parole.
M. Thierry Oppikofer (PLR), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, j'ai effectivement l'honneur de reprendre le rapport de majorité de notre ancien collègue - et ancien président - Jean Romain sur cette proposition de motion qui date d'il y a plus de deux ans et qui entendait dénoncer les conditions de détention «spartiates et difficiles» dans les cellules provisoires des postes de police, communément appelées violons. L'invite unique de cette motion demande au Conseil d'Etat de mettre en place, à titre expérimental, des cellules destinées, je cite, à la «détention nocturne», avec matelas, draps, oreiller, couverture, douche, linge et savon, accès à la lumière du jour, contrôle par la personne incarcérée de la lumière et de la température, ainsi que bien entendu radio ou télévision. La commission des visiteurs officiels, dont je ne faisais pas partie à l'époque, s'est penchée à trois reprises sur cette proposition de motion et a entendu notre ancien collègue M. Bayenet, premier signataire, qui a expliqué souhaiter que ces violons expérimentaux offrent des conditions comparables à une chambre d'hôtel.
Au cours des auditions et des débats, quatre points - parmi d'autres - ont été soulignés. Premièrement, la configuration de chaque poste de police est différente; seuls six sur onze, en tout cas en 2021, ont des violons, ainsi que l'Hôtel de police. Deuxième point: les personnes retenues - ou prévenues et non pas détenues - ne sont que 3% à 5% à passer la nuit au poste, ce qui a été confirmé par l'une des personnes auditionnées. Les violons - c'est le troisième point - ont des toilettes, un banc en béton, un matelas en mousse et une couverture; la plupart des gens n'y passent que quelques heures, en général trois ou quatre, le temps que leur identité soit établie ou leur transfert décidé. Lors de leur séjour au poste - c'est le quatrième point - une bonne partie du temps est passée en auditions ou en interactions avec les fonctionnaires; des repas sont servis selon un horaire usuel; la personne retenue peut, dans presque tous les violons, choisir de laisser la lumière allumée ou non, et elle peut en tout temps appeler un fonctionnaire, si nécessaire, pour une urgence, un besoin important, etc.
Après des débats nourris, la majorité de la commission a voté, par 5 voix contre 3, le rejet de cette proposition de motion qui ne tient aucun compte des aspects sécuritaires de la rétention de suspects ou de délinquants dont la dangerosité n'a pas toujours été établie mais est souvent bien réelle. Le texte mélange allégrement détenus et prévenus et entend transformer un lieu où on n'arrive quand même pas par hasard en quasi-chambre d'hôtel, finalement plus confortable que les locaux réservés aux policiers.
Mesdames et Messieurs les députés, ce Grand Conseil est doté d'une commission des visiteurs officiels; ses suggestions et son rapport annuel sont étudiés de très près. Cet objet entend régler un problème qui n'existe pas: les violons - pour celles et ceux que ça intéresse, ils se nomment ainsi en mémoire d'une sorte de carcan en bois qu'on installait autrefois au pied des suspects pour les entraver et qu'on appelait également cep, ce qui n'a rien à voir avec une académie bien connue - n'ont pas besoin de devenir des Stradivarius hors de prix et de proportion ! Le groupe PLR vous propose donc de rejeter cette proposition de motion et le fera pour sa part.
Bien entendu, je n'ai pas manqué de remarquer l'amendement de la minorité, qui est arrivé hier soir relativement tard. Cet amendement vise à remplacer l'invite initiale par quatre nouvelles. La première d'entre elles ne mentionne plus la télévision et la radio, le duvet et le coussin, si je vois bien... Non, l'oreiller y est toujours, pardon ! En fin de compte, elle revient à peu près à ce que demandait l'invite initiale. Ensuite, les deux autres parlent d'«interrupteurs permettant aux personnes détenues d'éteindre ou d'allumer la lumière de manière autonome» et de «trouver des solutions sécures pour que les personnes détenues puissent avoir accès à l'heure». Or, ces deux propositions ont été faites au cours des débats et retenues, semble-t-il, par les responsables de la logistique de la police. Et puis la dernière invite, que vous avez peut-être lue, propose de poursuivre l'expérience consistant à peindre en rose des murs des cellules pour désarmer l'agressivité des gens, ce qui est déjà en cours. Je pense donc que l'amendement, malheureusement, n'apporte rien et aurait probablement dû intervenir bien plus tôt dans les débats si on voulait vraiment faire passer ces idées. J'ai terminé.
Mme Léna Strasser (S), rapporteuse de minorité. Les auditions au sujet de cette motion ont montré que les réflexions qu'elle contient soulèvent un certain nombre de questionnements - vous l'avez relevé -, notamment s'agissant d'avoir l'heure ou de pouvoir gérer la lumière de manière autonome; cela a peut-être été noté, mais pour l'instant rien n'a changé dans les violons des postes de police. L'invite unique de cette motion, bien que très large, propose un test: il ne s'agit pas de transformer tous les violons en chambres d'hôtel, comme semble l'évoquer le rapporteur de majorité. Elle vise à tester de nouvelles pratiques pour essayer de faire baisser les tensions. Bien entendu, la sécurité, tant des prévenus que des agents et agentes de détention, est primordiale aux yeux de la minorité.
Plusieurs points mentionnés dans la motion - et on l'a vu durant les auditions - peuvent faire l'objet d'une réflexion et d'une amélioration. C'est notamment le cas de la gestion autonome de la lumière pour pouvoir l'éteindre et l'allumer au bon vouloir, sans devoir chaque fois appeler quelqu'un dans le poste de police; de l'accès à l'heure, afin de garder la notion du temps pendant la période de détention, ce qui permet également de réduire le stress; et puis il y a aussi la question d'un minimum de confort puisque, bien que les personnes soient retenues peu de temps dans les violons, certaines y passent la nuit, et elles doivent être dans de bonnes conditions en vue de leur rencontre avec la justice.
Les violons de nos postes de police sont fonctionnels. Ils sont pensés pour répondre aux situations les plus extrêmes qui peuvent survenir lors des arrestations: agressivité contre soi-même ou contre autrui, dégradation du matériel, bruit, etc. Pourtant, il semble ressortir de nos auditions à la commission des visiteurs que ces situations, bien qu'elles existent, ne sont réellement pas les plus fréquentes.
Le renvoi de ce texte au Conseil d'Etat permettrait d'étudier une amélioration des conditions de séjour et nous estimons bien évidemment, en tant que minorité, qu'il convient de l'étudier dans la limite de ce qui est possible en matière de sécurité. La minorité de la commission vous encourage donc à soutenir ce renvoi; l'amendement, qui a en effet été déposé hier, vise à recentrer la motion sur les points qui sont réellement envisageables, soit ceux que je viens de mentionner.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le but des motionnaires est tout à fait louable en ce qui concerne l'amélioration des conditions matérielles et aussi la dignité, je dirais, des personnes placées dans ces violons. Malheureusement, la réalité ne permet pas de mettre en oeuvre ce que demandent ces invites, car pour avoir exercé le métier de gendarme dans un des quartiers difficiles de notre canton, je le précise, où ces violons sont fréquemment utilisés, où les rotations sont, disons, vraiment constantes - toutes les trois ou quatre heures, une personne s'en va et une autre se retrouve ensuite dans cette cellule -, je peux vous dire qu'il est difficile de garantir ce que demandent les invites.
Il faut savoir que les personnes placées dans ces violons, pour la plupart, sont des gens fortement avinés, qui sont aussi sous l'effet de drogues, ce sont des personnes qui peuvent être violentes. C'est pourquoi on ne peut pas rendre ces cellules plus confortables, comme on le souhaite ici: parce que ces personnes, malheureusement, y vomissent, y défèquent, y urinent en dehors des cuvettes. Imaginez-vous l'état de ces cellules, parfois, après une soirée ! C'est bien pour cela qu'il y a des tuyaux d'arrosage pour les nettoyer assez rapidement, du fait de cette rotation fréquente ! Imaginez donc d'y mettre des draps, des oreillers ou autre chose: ça paraît très difficile. De plus, on ne peut pas transformer nos policiers en femmes de ménage pour nettoyer ces locaux et les rendre nickel comme on pourrait l'imaginer dans un hôtel.
Non, cette motion, je l'ai dit, est censée rendre une certaine dignité à ces personnes, mais celles-ci ne sont placées dans ces cellules que pour quelques heures, le temps qu'elles puissent justement se dégriser, et puis elles sont relâchées. Par conséquent, cela n'est pas nécessaire. On connaît le coût de ces cellules, de ces violons, qui est assez considérable, disons, et améliorer leur état, ce qui demanderait un nettoyage minutieux, ce n'est juste pas possible dans des quartiers comme les Pâquis, Plainpalais, Rive, etc., tellement ces cellules sont fréquentées. Cette motion, je peux vous l'assurer, n'est malheureusement pas applicable pour des questions pratiques, pragmatiques, et je pense qu'il faut la refuser. Merci.
Mme Masha Alimi (LJS). Il conviendrait de préciser qu'une cellule dans un poste de police ne peut être comparée à une cellule en prison ! Un violon est prévu pour un séjour de vingt-quatre heures, voire quarante-huit heures. Un violon sert aussi souvent de cellule de dégrisement pour certains, et il arrive régulièrement que les personnes arrêtées tentent de se blesser en se tapant contre les murs ou même défèquent en dehors des toilettes, dans la cellule !
L'invite initiale proposait une TV ou une radio et j'aurais bien entendu relevé la dangerosité de ces objets, que ce soit pour le policier ou pour le prévenu lui-même. La deuxième invite de l'amendement propose de trouver des solutions «sécures» pour améliorer le séjour; je veux bien, mais c'est très vague. Qu'on m'explique: une couverture compatible avec les impératifs de sécurité, je ne sais pas ce que cela signifie !
Ce que je peux aussi préciser, parce qu'on ne le dit pas souvent, c'est ce que j'ai vu lors d'une visite inopinée dans un poste de police où se trouvaient deux personnes en état d'arrestation. J'ai vu des policiers qui offraient des verres d'eau aux prévenus pendant leur audition et également une petite collation; j'ai vu des policiers attentifs à leurs besoins, ce que nous ont confirmé les prévenus eux-mêmes en dehors de la présence des policiers; j'ai vu que l'attitude des policiers contribue fortement aux conditions de détention de ces prévenus.
Cette motion part d'une bonne intention. Elle mériterait cependant d'être davantage travaillée pour apporter une valeur ajoutée à l'amélioration de la détention des personnes en état d'arrestation. En conséquence, nous la refusons et encourageons les auteurs du texte à faire des propositions plus concrètes et réalistes. Merci.
Mme Sophie Bobillier (Ve). Pour une petite question de compréhension, je rappellerai que la plupart des personnes amenées au poste de police, placées en cellule et dont le commissaire a demandé qu'elles soient déférées devant le Ministère public, passent la nuit au poste: à moins que la personne soit interpellée le matin et que l'agent ou l'agente de police fasse son rapport au plus vite, il est extrêmement rare que le Ministère public la reçoive le jour même. La plupart d'entre elles peuvent donc passer la nuit au poste de police, la limite étant bien entendu de quarante-huit heures.
Je ne dis pas que ces cellules, ces violons, doivent être particulièrement confortables: il s'agit d'un lieu de privation de liberté où l'on arrive suite à une interpellation de police. Il est toutefois nécessaire que les standards minimaux soient garantis - pourquoi ? Purement et simplement pour que le code de procédure pénale fédéral puisse être appliqué et que le bon déroulement de la procédure pénale puisse être garanti. Car lorsque les personnes sont interpellées, on doit garantir que leurs facultés intellectuelles soient assurées lors de l'audition par le ou la procureure. Je vous rappelle l'article 140 du code de procédure pénale, qui prévoit très spécifiquement les méthodes d'administration de preuves interdites, soit «les moyens de contrainte, le recours à la force, les menaces, les promesses, la tromperie et les moyens susceptibles de restreindre les facultés intellectuelles ou le libre arbitre». Certes, les cellules de garde à vue ne doivent pas procurer, comme on a pu l'entendre, le confort d'un hôtel - j'en conviens bien. Mais les infrastructures, qui sont, en l'état, rudimentaires, doivent permettre de garantir un procès équitable. Cela signifie que les personnes doivent potentiellement avoir pu dormir avant de se présenter devant la ou le magistrat et avoir des repères temporels.
Cet amendement, qui restreint effectivement le texte initial, demande que soient fournis un oreiller et une couverture, en respectant les standards d'hygiène: c'est tout à fait faisable, comme on le voit avec les rotations dans les hôpitaux; de pouvoir allumer et éteindre la lumière dans les cellules de manière autonome: vous pouvez lire dans le rapport que le président du syndicat de la police UPCP dit que c'est tout à fait faisable; et surtout de donner accès à l'heure pour éviter toute désorientation temporelle: on voit aussi dans le rapport qu'une projection de l'heure est tout à fait envisageable, selon l'audition du directeur ad interim du support et de la logistique de la police. La dernière invite concerne quant à elle cette fameuse expérimentation «cool down pink»: alors c'est effectivement particulier, mais les études démontrent, je l'ai appris, que cela apaise l'agressivité, qu'elle soit hétéro- ou autoagressive, et diminue les tensions. Raisons pour lesquelles je vous invite, au nom du groupe Vert, à voter cette motion. Je vous remercie. (Applaudissements.)
La présidente. Merci. Madame Ana Roch, vous avez la parole pour vingt-cinq secondes.
Mme Ana Roch (MCG). Merci, Madame la présidente. Je n'ai pas besoin de plus pour compléter les propos de mon collègue Roger Golay. J'aimerais souligner que ces cellules répondent à des normes de sécurité pour garantir l'intégrité corporelle des personnes qui y séjournent, et c'est vrai que c'est pour de courtes périodes; on se doit aussi de garantir leur sécurité. Merci.
M. Jacques Blondin (LC). C'est très intéressant, j'espère que vous aurez un jour l'occasion d'être membres de la commission des visiteurs officiels, Mesdames et Messieurs les députés, et d'aller voir ce qui se passe sur le terrain, de voir les conditions de détention des détenus, bien évidemment, mais aussi les conditions de travail de ceux qui sont gardiens dans ces locaux. Alors bien sûr, certains locaux de police ne sont pas ultramodernes et doivent être rénovés - ça se fait, c'est en cours -, mais je partage globalement l'avis émis par le rapporteur de majorité: le problème qui est exposé ici n'existe pas !
Parce que la réalité, quand on va sur place... D'abord, le premier problème pour quelqu'un qui arrive là - évidemment, il ne l'a pas souhaité et est surpris -, le vrai problème, c'est plutôt la claustrophobie, le fait d'être enfermé. Ça, c'est pris en compte, ce qui est très heureux, comme vous pouvez l'imaginer - ceux qui sont claustrophobes savent de quoi on parle et je crois qu'il n'y a qu'à avoir peur dans un ascenseur pour le comprendre; cet aspect est donc pris en compte. Il n'empêche que la sécurité des détenus est importante, et les gardiens nous l'ont dit, une simple couverture, ça fait peur ! D'abord, on ne parle même pas de l'état dans lequel on la retrouverait, selon l'état du détenu, mais certains pourraient en outre la lacérer, s'étouffer avec, il y en a qui pourraient attenter à leur vie, etc. Et ces gardiens nous ont clairement signalé que, dans beaucoup de cas, compte tenu de la durée que la personne arrêtée y passe, moins il y a d'objets dans la cellule, mieux on se porte. Ça, c'est donc une réalité.
Ce qu'il est bien sûr fondamental de se rappeler, c'est le principe de respect de la personne et du détenu, quelle que soit son attitude. On peut évidemment imaginer que quand quelqu'un se fait arrêter au milieu de la nuit, fortement alcoolisé, drogué ou autre, les choses ne se passent pas forcément bien. Il faut donc calmer le jeu, et je crois que c'est ce qui se passe. On nous parle de quatre heures en moyenne sur place; c'est vrai que ça peut durer jusqu'à vingt-quatre heures, mais si c'est quatre heures, le temps de se calmer, de reprendre contenance, les choses se passent en règle générale assez tranquillement. La réalité, quand vous allez dans les postes de police... Si on demande un service hôtelier, alors là, on entre dans une autre dimension ! Parce qu'il faudra le gérer, il faudra mettre en place des structures et ce n'est simplement pas possible.
Ce qui est fondamental, c'est que le département se soucie du fait que les postes de police soient équipés de manière correcte - c'est en train de se faire; c'est que les agents qui travaillent dans ces postes, les policiers, respectent les personnes quelles qu'elles soient - cela, on doit y veiller, et je crois que c'est ce qui se passe. Et puis le but, c'est de ne pas se retrouver dans ces violons, et comme ça, les choses seront bien évidemment plus simples. (Rires.) C'est facile à dire, je le conçois volontiers ! Mais pour toutes ces raisons, et étant membre de cette commission, j'invite ceux qui pensent qu'on peut améliorer les conditions à faire éventuellement une autre proposition; celle-ci est clairement excessive. Merci.
M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, le débat est intéressant; nous avons rarement l'occasion, dans notre parlement, de débattre des conditions de détention et, dans le cas particulier, des violons, ces lieux où les personnes restent finalement un certain temps: on a entendu quatre heures, on a entendu une nuit, donc une certaine durée pouvant aller jusqu'à une dizaine d'heures au maximum, ou peut-être un peu plus. Le débat est intéressant parce qu'on parle de personnes en situation d'extrême vulnérabilité. Vous savez, on parle du choc de l'incarcération, et certains l'ont dit, les personnes qui se font arrêter subissent un stress énorme. C'est d'ailleurs à ce moment-là que les bagarres ont lieu, que des risques de dérapage entre personnes arrêtées et personnes chargées de les arrêter peuvent survenir. Il s'agit donc quand même d'un moment extrêmement délicat.
Alors certains diront que la sécurité est importante - certes - et les voix dominantes jusqu'à présent ont peut-être été celles disant: il faut le minimum ! Il faut, pour des questions de sécurité, ne rien mettre dans ces cellules, ne même pas donner la possibilité d'éteindre ou allumer la lumière. C'est un raisonnement qui tient la route, mais on peut aussi se dire: pour des questions de sécurité et pour diminuer la tension dans ces moments de stress extrême, il faut faire des aménagements et mettre un repère temporel avec une horloge qui marque le temps, donner la possibilité d'éteindre et d'allumer la lumière et fournir une couverture - quelque chose de minimal. Et si vous avez le souci des questions d'hygiène, quelque chose qui soit lavable, qui ne soit pas du tissu: on ne parle pas d'un édredon, on ne parle pas de conditions hôtelières, on parle vraiment d'un minimum pour permettre aux gens de se couvrir. Figurez-vous que vous allez peut-être améliorer la sécurité ! Vous allez peut-être permettre, contrairement à ce qu'on pense, de faire baisser la tension et finalement que la personne ne soit pas considérée comme une chose qu'on arrête et qu'on jette dans une cage nue, avec juste le béton et les toilettes, mais comme quelqu'un qu'on place dans un lieu où, malgré les conditions de détention, l'humanité est encore présente.
Je ne stigmatise pas, je ne catégorise pas; il est vrai, comme l'a évoqué Mme Alimi, que quand nous sommes allés voir les violons, un agent de détention nous a dit: en général, on laisse la porte ouverte ! Parce que ça se passe très très bien. Les policiers sont capables de faire la différence et quand ça se passe très très bien, ils font l'entretien avec la personne arrêtée en laissant la porte ouverte - avec un verrou, évidemment ! Si la personne est très alcoolisée, eh bien ils procéderont peut-être autrement. Mais c'est à notre sens extrêmement important, pour baisser les risques et augmenter la sécurité - et donc améliorer aussi la qualité du travail des policiers et des policières -, de donner la possibilité d'avoir de quoi se couvrir, se chauffer, d'avoir de la lumière et de distinguer l'écoulement du temps. Nous vous invitons par conséquent à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat: ce n'est qu'une motion, il en fera certainement bon usage. Merci beaucoup.
La présidente. Je vous remercie. Les Verts n'ont plus du tout de temps de parole, je cède donc le micro à la rapporteure de minorité pour deux minutes.
Mme Léna Strasser (S), rapporteuse de minorité. Merci, Madame la présidente. Je voudrais juste réagir à deux points qui ont été mentionnés et notamment préciser que cette motion ne vise pas du tout à remettre en cause le travail des policiers et policières, comme a pu l'insinuer ma préopinante LJS. Au contraire, et nous l'avons aussi vu et observé lors de nos visites, les policiers font un travail remarquable et sont attentifs aux conditions de détention, parce qu'il en va également de leurs conditions de travail.
Et puis je voudrais remercier le député Golay - vous transmettrez, Madame la présidente: je n'ai encore jamais demandé à voir le tuyau d'arrosage dans les postes visités, mais je le ferai ! Et j'en demanderai l'usage parce que les choses ont peut-être changé depuis son époque - on nous a dit, à nous, qu'il est fait appel à des sociétés de nettoyage pour nettoyer les cellules. (Rire.)
La présidente. Merci. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole pour une minute quinze.
M. Thierry Oppikofer (PLR), rapporteur de majorité ad interim. Parfait, merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai entendu - je ne vais pas citer de noms, comme ça vous n'aurez pas à transmettre trop de messages, Madame la présidente - le mot «détention». En fait, on parle bien de rétention, on parle en quelque sorte de mise sous surveillance et non de détention. Il ne s'agit pas de cellules où on détient des prisonniers pendant des années.
Et puis j'ai entendu que beaucoup de gens y passent la nuit, alors que les personnes auditionnées nous ont dit (il y avait le président de l'UPCP et le responsable logistique de la police; à vrai dire, je ne sais plus lequel des deux l'a indiqué, mais je peux chercher si vous voulez, quoique je n'aurai pas le temps) que cela concerne 3% à 5% des cas. Autrement dit, comme l'a souligné un préopinant, on est en train de créer une espèce de problème là où il n'y en a pas ! Je vous invite donc à refuser l'amendement ainsi que cette motion.
La présidente. Je vous remercie. J'invite maintenant l'assemblée à se prononcer sur la motion... (Remarque.) Ah, pardon, nous avons effectivement un amendement général, sur lequel nous allons d'abord voter, qui vise à remplacer l'invite unique par celles-ci:
«- à mettre en place, à titre expérimental, dans les postes de police les plus utilisés durant la nuit, des cellules équipées d'un lit avec sommier, matelas, oreiller et couverture compatibles avec les impératifs de sécurité;
- à trouver des solutions sécures pour équiper toutes les cellules des postes de police d'interrupteurs permettant aux personnes détenues d'éteindre ou d'allumer la lumière de manière autonome;
- à trouver des solutions sécures pour que les personnes détenues puissent avoir accès à l'heure;
- à poursuivre les expérimentations de "cool down pink" en cours à Genève consistant à peindre certaines parties d'une cellule en rose.»
Mis aux voix, cet amendement général est rejeté par 58 non contre 29 oui.
Mise aux voix, la proposition de motion 2757 est rejetée par 58 non contre 29 oui (vote nominal).
Débat
La présidente. Voici le point suivant: la M 2763-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, et je cède la parole à M. Vincent Subilia.
M. Vincent Subilia (PLR), rapporteur de majorité. Et je la prends avec d'autant plus de plaisir, Madame la présidente, que m'a été donné l'honneur d'intervenir comme rapporteur de majorité sur cette proposition de motion, ce dont je me réjouis.
Au même titre que la Suisse, pays alpin, sans accès à la mer, a largement construit sa prospérité grâce à son ouverture au monde - n'en déplaise à celles et ceux qui, il y a un instant dans ce même hémicycle, défendaient l'opération dite Reditus, si j'ai bien lu l'ordre du jour -, cette prospérité helvétique se fonde également sur la capacité de notre pays, sur une base quotidienne, à innover. Innover, c'est faire preuve d'agilité, de résilience, des termes galvaudés que l'on a pu entendre durant la phase pandémique - mais c'est ce qui vaut à notre pays le rare privilège de figurer en tête de liste des pays les plus innovants, et ce pour la treizième année consécutive.
Mais voyez-vous, Mesdames et Messieurs, l'innovation ne se décrète pas, elle se construit patiemment. Rappelons qu'il y a un siècle et demi, la Suisse exportait ses forces vives, essentiellement des mercenaires et des paysans, et que par la magie du «reverse engineering», comme on le dit en mauvais français, notre pays a réussi à devenir ce pionnier que même Emmanuel Macron, en visite sous nos latitudes, louait pour sa capacité à se projeter dans l'avenir.
C'est précisément l'objectif de cette modeste motion dont vous aurez toutes et tous pris connaissance, une motion qui invite l'exécutif - avec respect et bienséance, naturellement - à s'immerger dans le monde tout à fait fascinant de la blockchain et, de façon plus précise - je reprends le texte -, à se doter d'une véritable stratégie permettant le déploiement de la blockchain dans le canton, à l'encadrer, parce que c'est essentiel, d'une réglementation qui viendrait elle-même se greffer sur les normes de droit fédéral dans le respect de la hiérarchie de celles-ci, et enfin à adopter une feuille de route qui permette au canton de Genève de se montrer précurseur en la matière, comme il l'a toujours été en tout domaine.
La blockchain, Mesdames et Messieurs, nonobstant un intitulé relativement barbare - la «chaîne de blocs», comme on pourrait le dire dans un jargon quasi militaire -, a des vocations et surtout des vertus multiples, et je pense - je me réjouis de l'entendre - que le rapporteur de minorité ne le contestera pas. Cette technologie, pour autant qu'elle soit intelligemment utilisée, constitue un outil extrêmement pertinent qui permet notamment, dans de nombreuses applications qui vont du domaine de la santé à celui de l'horlogerie dont Genève est la patrie, la traçabilité des produits et/ou des services; elle répond ainsi à ce qu'on appelle - encore un anglicisme que vous pardonnerez - la «trust economy» ou l'économie de la confiance, qui est véritablement l'écosystème que nous connaissons ici et qui est en plein déploiement, pour celles et ceux qui suivent attentivement les évolutions.
Il fait dès lors sens, Mesdames et Messieurs, que Genève, par ailleurs capitale de la gouvernance digitale grâce à la présence de nombreuses organisations internationales, à commencer par l'Union internationale des télécommunications et bien d'autres, incarne cette exemplarité que l'on souhaite projeter sur la scène internationale. Voilà pourquoi, encore une fois, ce texte est tout à fait pertinent.
Cet objet a été non seulement appuyé, mais aussi défendu par un certain nombre d'intervenants que nous avons eu le loisir d'auditionner, notamment un éminent professeur d'université, mais pas seulement: il y avait aussi le délégué au numérique de l'Etat de Genève. C'est dire si nous sommes alignés avec les objectifs de l'administration ! Je me réjouis que, main dans la main, nous puissions voir Genève, fidèle à sa tradition d'innovation, faire figure ici aussi de tête de lance ou de fer de lance ou de tête de pont - comme vous préférez - de l'innovation.
Cela est d'autant plus essentiel, Mesdames et Messieurs, qu'en réalité, l'innovation n'attend pas et que, force est de le constater - et je le regrette à titre personnel -, sur le plan suisse, malheureusement, nous sommes très largement distancés, parce que beaucoup d'autres cantons (il n'y a pas besoin d'aller jusqu'en Suisse orientale ni même jusqu'à Zoug, qui se distingue davantage en raison de la cryptomonnaie, laquelle représente l'une des applications de la blockchain, mais certainement pas celle que nous favorisons ici), qu'il s'agisse de Neuchâtel, pour citer nos quasi-voisins, ou d'autres, eux, ont saisi la perspective qu'offre cette technologie comme levier de croissance pour les opérateurs économiques.
C'est donc la bouche en coeur et forts d'une très solide majorité dont je me réjouis que nous appelons les uns et les autres à adopter cette motion, puis le Conseil d'Etat, vaillamment représenté par Mme Kast ici encore présente, et je l'en remercie, à la faire sienne en permettant à Genève de rayonner sous les auspices de la blockchain. Je vous remercie de votre attention.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je dois avouer que je souscris à 80%, voire à 90% des propos du rapporteur de majorité, qui a parfaitement raison de soutenir l'idée que le canton de Genève doit être proactif dans le domaine de l'innovation. Cependant, cette proposition de motion présente un certain nombre de failles qui, lorsqu'on parle de cryptographie et de cybersécurité, sont précisément les ennemis qu'il convient de combattre. Ces failles sont au nombre de trois, tout comme les invites.
La première porte précisément sur l'idée de l'innovation. Bien entendu, nous sommes en faveur du progrès. Or reprendre une technologie qui a aujourd'hui une quinzaine d'années - ou en tout cas une bonne dizaine d'années depuis qu'on en parle -, ce n'est pas particulièrement novateur, c'est au contraire essayer d'accrocher notre wagon à la queue d'un train qui est déjà largement parti - avec nous, sans nous, chacun en décidera.
Pourquoi cela ? Simplement parce qu'il règne une confusion entre une technologie - la blockchain dont on a esquissé les contours tout à l'heure avec beaucoup de pertinence - et un objectif. L'Etat n'a pas pour but de soutenir une technologie particulière; par contre, il aurait tout intérêt à se positionner dans le cadre des objectifs que cette technologie permet d'atteindre aujourd'hui, mais sans doute plus demain. En effet, l'innovation que le rapporteur de majorité appelait de ses voeux fait que les technologies se développent, atteignent un stade mature à un moment donné, puis laissent petit à petit la place à d'autres outils. On peut dire sans autre que la blockchain est probablement arrivée à maturité actuellement et qu'il n'y a plus grand-chose à faire dans ce domaine s'agissant d'innovation, comme l'a souligné M. Barclay, délégué au numérique.
L'autre problème est lié à la nature même de la blockchain. On ne va pas entrer dans un débat technique, évidemment, mais pour faire simple, disons que l'essence de la blockchain est précisément de ne pas être régulée de façon centralisée, d'être au contraire décentralisée, de passer les frontières. Dès lors, l'invite qui demande au Conseil d'Etat de réguler la blockchain, pour ainsi dire, voire de développer une blockchain GRTA, est un petit peu naïve par rapport à la réalité de ce monde.
Quant au troisième écueil, il est à notre sens relativement grave; il est apparu lorsque le dernier auditionné est venu présenter ce qu'il avait à nous dire, qui était par ailleurs tout à fait intéressant. Celui-ci a d'abord été présenté comme un juriste spécialiste de la blockchain, puis est soudain devenu le responsable d'une entreprise particulière. Effectivement, il est apparu que cette personne était en quelque sorte le crypto-auteur, si vous me permettez ce néologisme, de la motion, puisque au détour de l'audition, nous avons appris qu'il était simultanément intéressé à titre personnel via son entreprise au développement de la blockchain et l'un des auteurs, sinon l'auteur principal, du texte, alors que cette qualité n'apparaissait pas dans la convocation. A partir du moment où on dispose de cette clé de lecture, on comprend rapidement l'intérêt personnel de cette personne d'une part à ce que la blockchain en tant que telle soit soutenue et promue par l'Etat de Genève, d'autre part à ce que ce dernier dissipe la réputation sulfureuse que cette technologie s'est attirée.
Pourquoi ? Parce que, et vous le savez, un certain nombre d'activités, notamment ce qui relève des cryptomonnaies, s'appuie sur la blockchain. Il ne s'agit pas de dire que la blockchain est en elle-même essentiellement problématique ou support d'activités délictueuses, mais il se trouve que les activités les plus connues, les plus médiatisées en rapport avec la blockchain se trouvent simultanément dans cette zone grise, un petit peu sulfureuse des cryptomonnaies, ainsi que dans une zone grise en matière de respect de l'environnement. En effet, vous n'êtes pas sans savoir que le bitcoin, qui constitue la cryptomonnaie la plus fameuse, est un très gros consommateur d'énergie.
Tout cela pour dire que cette personne en particulier avait tout intérêt à ce que l'Etat labellise en quelque sorte la blockchain et donne une forme de blanc-seing aux entreprises locales qui ont décidé, et c'est un choix tout à fait légitime, de se spécialiser dans ce domaine. Cela étant, en tant que législatif, nous ne pouvons pas favoriser ces sociétés par rapport à d'autres, cela soulève un problème de conflit d'intérêts. Pour toutes ces raisons, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser cette motion. Je vous remercie.
Mme Monika Ducret (LJS), députée suppléante. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je représente mon collègue député Vincent Canonica, qui n'a pas pu venir aujourd'hui, donc je vais vous lire son plaidoyer pour cette proposition de motion, auquel j'adhère complètement.
«Quand j'ai lu cette proposition de motion pour que Genève devienne un centre de référence de la blockchain, je n'y comprenais pas grand-chose. Je me suis alors adressé au benjamin de notre parti afin qu'il m'explique ce qu'était cette technologie. Il m'a répondu dans son jargon d'informaticien, et je vous avoue que je n'y ai toujours pas compris grand-chose. Je lui ai demandé de me parler simplement, avec des mots que j'étais capable de saisir. Bref, au final, j'ai compris qu'il s'agissait d'une technologie moderne, innovante, capable d'offrir une plus grande sécurité, plus d'efficacité et une non-falsifiabilité des données. Le canton de Genève est d'ailleurs très en retard dans le domaine numérique et se fait distancer par de nombreux pays; c'est le moment de rattraper le temps perdu et de s'intéresser aux nouvelles technologies et notamment au numérique. C'est pourquoi le parti LJS votera en faveur de cet objet.» Merci.
M. André Pfeffer (UDC). Cette motion demande que Genève devienne un centre de référence de la technologie blockchain. L'objectif est ambitieux, et il faut relever l'enthousiasme du rapporteur de majorité. Le rôle de notre canton est d'offrir un cadre et un environnement favorables au développement de toute activité économique florissante, donc bien entendu également à cette technologie de pointe qu'est la blockchain.
Comme cela a déjà été indiqué, la blockchain existe depuis des années et plusieurs cantons, notamment Zoug et Neuchâtel, ont réussi à devenir des pôles dans ce domaine. Cette technologie est encore en plein développement, et le groupe UDC est pour créer un bon environnement afin d'attirer ou d'aider à développer toutes les entreprises actives dans ce secteur. Nous soutiendrons cette motion, même si nous pensons que sa portée et son impact sont très limités. Merci de votre attention.
M. Jean-Marc Guinchard (LC). Le rapport de minorité qui vient d'être défendu - et dont je salue d'ailleurs la bienfacture, parce que je l'ai lu avec intérêt - illustre parfaitement la façon dont d'aucuns se positionnent face aux évolutions technologiques ou aux progrès techniques. A cette attitude de méfiance, de refus, Le Centre préfère opposer une approche basée sur le scepticisme au sens premier du terme, c'est-à-dire procéder à des analyses critiques, à des comparaisons, à la recherche d'informations - M. Subilia a évoqué tout à l'heure des cantons comme Neuchâtel et Zoug, qui ont déjà fait un certain nombre d'avancées en la matière.
Nous nous rallions volontiers aux objectifs du texte, qui, en fait, ne demande qu'une chose: que le Conseil d'Etat effectue ces recherches et nous rende un rapport dans les six mois; à ce moment-là, nous pourrons décider de la suite que nous entendons donner à ce dossier. C'est pourquoi Le Centre vous encourage, Mesdames et Messieurs, à adopter cette motion avec la même majorité que celle rencontrée en commission. Je vous remercie.
M. Leonard Ferati (S). Mesdames et Messieurs les députés, la blockchain permet effectivement une traçabilité ainsi que d'éviter une certaine forme de bureaucratie, je vous l'accorde. Néanmoins, il s'agit d'une technologie décentralisée, il y a donc des risques importants pour la sécurité et le stockage des données, puisque celles-ci sont externalisées. L'un des biais de la blockchain est la cryptomonnaie, qui permet entre autres de pratiquer l'évasion fiscale et le blanchissement d'argent, sans parler du fait qu'il s'agit d'une technologie extrêmement polluante.
L'une des personnes auditionnées nous disait que de nombreux contribuables américains possédant des cryptomonnaies quittaient les Etats-Unis, car le gouvernement avait mis en place des impôts, et que nous pourrions par exemple les accueillir à Genève. Eh ben tiens, en voilà une bonne idée ! Si ces gens refusent de s'acquitter de leurs impôts aux USA, pourquoi les paieraient-ils donc à Genève ? A moins qu'ils puissent faire de l'évasion fiscale - avec l'aide de nos amis du PLR, peut-être ! (Commentaires.)
Le groupe socialiste n'est pas contre les révolutions technologiques, mais considère qu'il y a encore trop d'écueils à l'utilisation de ces technologies que l'on maîtrise encore mal. D'autant plus que l'un des auditionnés a admis avoir initié et rédigé la motion: celui-ci a une entreprise active dans la blockchain. Je fais donc miennes les paroles du rapporteur de minorité: on comprend bien l'intérêt d'une entreprise particulière à voir l'Etat rassurer ses clients potentiels quant à la sécurité de la technologie utilisée, mais on perçoit mal l'intérêt pour la collectivité.
Je me pose une question certainement naïve, mais sincère: si le secteur privé est censé avoir un temps d'avance sur le secteur public en matière d'innovation, pourquoi ne s'est-il pas encore approprié cette technologie à Genève ? Sans doute que nos amis biberonnés à l'économie libérale d'Hayek et d'Adam Smith pourront y répondre. Au vu de ces éléments, le groupe socialiste s'abstiendra sur cette motion. Merci.
La présidente. Je vous remercie. La parole va à M. Pierre Eckert pour une minute.
M. Pierre Eckert (Ve). Merci, Madame la présidente. Je n'ai pas l'intention de nier les bienfaits de la blockchain, j'aimerais juste relever une contradiction: quand nous, les Verts, demandons que l'Etat soutienne l'économie circulaire, le recyclage, la réutilisation, quand nous demandons que l'Etat développe une économie locale et solidaire ou encore des supermarchés participatifs, quand nous demandons que l'Etat favorise la presse locale, on nous répond toujours: laissez faire le marché. Ici, on souhaite que l'Etat s'occupe de la blockchain; vous voyez la contradiction. Je m'arrête là. (Applaudissements.)
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, il ne faut jamais s'opposer aux innovations technologiques, il faut les encadrer le cas échéant. Penser que la blockchain est dangereuse parce que certains utilisent cette technologie dans les cryptomonnaies est une erreur, il s'agit d'une confusion entre la technique elle-même et l'usage qui en est fait.
Genève peut se positionner dans ce domaine, et je crois d'ailleurs savoir que toute une série de jeunes entrepreneurs ont organisé un événement au mois de septembre là autour - ils appellent cela le Web3 -, événement qui a eu un grand succès et un retentissement presque international.
De fait, ce serait une grande erreur de se dire: allez, fermons les yeux, oublions tout ça. Non, nous devons saisir toutes les opportunités de faire rayonner Genève et notre pays, et le mieux est de traiter, d'encadrer et d'utiliser ces technologies qui permettent de sécuriser les données transmises entre les différentes entreprises, ce qui n'est pas le cas des technologies traditionnelles, dirais-je. Vous savez que nous courons de plus en plus de risques d'être piratés.
En conséquence, je pense qu'il est intéressant de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, qu'il nous rende un rapport de façon à ce que nous puissions mesurer ce qu'il est possible d'entreprendre en la matière et dans quel cadre; à ce moment-là, nous déciderons d'aller de l'avant ou pas, mais je trouve pour ma part que nous devons avancer dans ce sens et favoriser les nouvelles technologies à Genève. Nous soutiendrons donc cet objet. Merci.
La présidente. Je vous remercie. Monsieur Julien Nicolet-dit-Félix, il vous reste trente secondes.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Oui, Madame la présidente, merci, ce sera largement suffisant pour préciser deux points. Le premier, Mesdames et Messieurs, c'est que nous ne nous opposons pas à la blockchain, nous n'avons jamais eu cette prétention; nous nous opposons simplement au fait que l'Etat soutienne spécifiquement une technologie en particulier qui, de surcroît, a vraisemblablement atteint sa maturité et dont le potentiel d'innovation est donc extrêmement limité.
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Julien Nicolet-dit-Félix. Comme l'a très bien signalé M. Barclay - vous lirez le rapport -, la blockchain a atteint cette maturité, et il serait plus pertinent d'investir nos deniers dans des technologies plus innovantes...
La présidente. Merci.
M. Julien Nicolet-dit-Félix. Il y aurait encore beaucoup de choses à dire, mais je les relèverai à la buvette.
La présidente. La parole retourne à M. Vincent Subilia pour une minute.
M. Vincent Subilia (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Ce sera suffisant pour souligner rapidement quelques points. D'abord, je remercie M. Pfeffer d'avoir parlé d'enthousiasme; j'ai toujours considéré qu'il s'agissait du meilleur des carburants. Ensuite, dans le sillage des propos de notre futur conseiller national Sormanni, j'aimerais apporter trois clarifications.
D'une part, le secteur privé, n'en déplaise à nos amis socialistes - enfin, à nos confrères socialistes -, n'a pas attendu que l'Etat, par hypothèse, légifère, il est extrêmement actif en la matière, et c'est d'ailleurs à Genève que s'est tenu, il y a de nombreuses années - BC, «before covid» -, le premier congrès mondial consacré non pas au covid, mais à la blockchain. C'est dire s'il a déjà pris une longueur d'avance.
D'autre part, un amalgame coupable est entretenu de façon délibérée entre la blockchain et la cryptomonnaie; ce n'est pas de ça qu'il s'agit, on n'est pas en train de parler de schémas d'évasion fiscale que favoriserait un quelconque parti, je trouve ces propos hors de propos, précisément.
Enfin, et je serai bref, s'agissant de l'auteur de la motion, il est sain, en démocratie - c'est ainsi que nous fonctionnons, et heureusement -, que les opérateurs économiques privés, qui sont confrontés à des difficultés ou animés de bonnes initiatives, s'en ouvrent aux représentants politiques que nous sommes, sans qu'ils leur tiennent la plume par ailleurs, pour pouvoir faire évoluer la législation dans le sens de davantage d'innovation. Je vous remercie.
Mme Carole-Anne Kast, conseillère d'Etat. Ainsi que plusieurs préopinants l'ont souligné, il s'agit d'un domaine passionnant, en constante évolution, avec un potentiel d'innovations et de changements absolument révolutionnaires. Si vous aviez le plaisir d'échanger aussi fréquemment que moi avec le délégué au numérique du canton de Genève, Mesdames et Messieurs, vous constateriez que les perspectives sont véritablement enthousiasmantes, pour reprendre les mots du rapporteur de majorité.
Je ne me prononcerai pas spécifiquement sur la motion, mais sur l'engouement partagé que je sens dans ce Grand Conseil, plus particulièrement, j'en conviens, de ce côté-ci de l'hémicycle... (L'oratrice désigne les bancs de droite.) ...en ce qui concerne ces nouvelles technologies. Je comprends et je soutiens l'envie de profiler le canton de Genève comme un pôle de compétence en la matière. D'ailleurs, la conférence latine des directeurs cantonaux du numérique a déjà avancé sur un certain nombre d'autres secteurs très innovants; on peut notamment évoquer le cloud souverain, et Genève est très fier, notamment grâce à une ferveur sur ces bancs-ci de l'hémicycle... (L'oratrice désigne les bancs de droite.) ...d'avoir été le premier canton à introduire le principe d'intégrité numérique dans sa constitution.
Cependant, Mesdames et Messieurs les députés, j'espère que vous voterez avec autant d'enthousiasme que cette motion les moyens qu'il faudra donner au Conseil d'Etat pour les réaliser. Je me réjouis de rendre un rapport, de faire rayonner le canton de Genève dans le domaine de l'innovation pour autant que la cohérence soit de mise de tous les côtés de l'hémicycle. Merci, Madame la présidente.
La présidente. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Nous passons au vote sur cet objet.
Mise aux voix, la motion 2763 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 52 oui contre 15 non et 10 abstentions (vote nominal).
Débat
La présidente. Nous enchaînons avec la M 2872-A, dont le débat est classé en catégorie II, trente minutes. La parole revient à M. Christo Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, cette proposition de motion a été déposée par notre collègue Sylvain Thévoz et traitée il y a peu à la commission des transports. Je dirais qu'elle a un bon fond, puisqu'elle vise un objectif zéro mort et blessé grave sur les routes genevoises, mais qu'elle est quelque peu, on va dire, idéaliste.
En effet, lisons ses invites: «à se donner pour objectif zéro mort et blessé grave sur les routes genevoises [...]» - je pense que c'est le voeu de tout le monde; «à fédérer l'effort collectif de toutes les parties prenantes (département des infrastructures, police, communes, associations d'usagers, etc.)» - c'est déjà le cas; «à promouvoir des actions basées sur des données probantes pour prévenir et éliminer les décès et les blessures sur la route» - la police le fait déjà; «à renforcer la répression en ciblant particulièrement les excès de vitesse, cause majeure d'accidents» - on y reviendra, mais c'est déjà le cas aussi; «à développer de manière accélérée des installations sécurisées pour la mobilité douce afin que les flux de trafic soient séparés et protégés» - tout est en route à ce niveau également, même si ce n'est peut-être pas suffisant pour beaucoup d'entre nous; «à reconnaître le travail crucial des services d'urgence» - c'est une évidence; «à oeuvrer pour un meilleur soutien aux victimes de la route et à leurs familles» - cela paraît également une évidence. Vraiment, ce texte part d'un bon sentiment, mais constitue une fausse bonne idée.
J'aimerais vous donner quelques chiffres qui viennent du BPA, soit du Bureau de prévention des accidents, relatifs aux accidents impliquant entre autres les trottinettes électriques et publiés dans le rapport Sinus, qui relève que 91% des accidents de trottinettes électriques ont pour origine une inattention, la distraction ou la vitesse. Concernant les VAE, c'est-à-dire les vélos à assistance électrique, les accidents sont dus à des dérapages, donc à la perte de maîtrise de vélo, à de l'inattention, à de la distraction, à une mauvaise manoeuvre ou à un comportement fautif; dans 76% des accidents ayant tué ou blessé des VAE, les responsables sont d'autres conducteurs de VAE. Enfin, pour les motos, la première cause est la vitesse et, pour les voitures, un dérapage entraînant une perte de maîtrise du véhicule. Cet objet est plein de bonnes intentions, mais tape à côté de la cible, et il convient de le refuser. Je vous remercie.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, en 2022, dix personnes sont mortes sur les routes genevoises; c'est dix de trop. Certains, en commission, et M. Ivanov l'a refait à l'instant, ont loué l'intention de cette proposition de motion, mais décrété qu'elle ne servait à rien. Or, aux yeux de la minorité, rien n'est plus faux, les accidents graves ne sont pas une fatalité. Il suffit de jeter un petit regard en arrière pour s'en convaincre: en 1992, Genève déplorait 28 accidents mortels, et trente ans plus tard, alors qu'il y a eu une augmentation de 30% de la population et de 29% des véhicules en circulation, le nombre d'accidents mortels a heureusement été divisé par trois. Cela illustre l'efficacité des mesures prises pour éviter ce type de drames.
Certes, on ne pourra jamais se prémunir complètement contre tous les risques, mais ce texte a néanmoins pour vertu de définir un objectif clair et ambitieux, à savoir plus aucun mort ni blessé grave sur les routes genevoises dans les accidents de circulation. Une fois que ce but aura été posé, il incombera aux autorités, que ce soit le Conseil d'Etat, le Grand Conseil ou les autorités communales, de développer des mesures existantes ou d'en imaginer de nouvelles pour tendre à la réalisation de cet objectif.
Selon la minorité, ces mesures peuvent être de trois sortes. D'abord, il y a toute une série d'opérations préventives - sensibilisation, prévention routière, équipements de protection comme ceintures, airbags, etc. Ensuite, il y a les actions de répression des infractions, par exemple l'accroissement - nécessaire - des contrôles routiers. Enfin, il y a les dispositifs d'aménagement pour protéger les différents usagers de la route: cela va des trottoirs aux pistes cyclables en passant par des glissières de sécurité et autres. Ces installations visent à mieux séparer les flux de circulation afin de réduire l'insécurité des différents usagers de la route, qu'elle soit réelle ou ressentie, et, par là même, d'éviter les conflits d'usage qui engendrent des accidents.
Aujourd'hui, force est de constater que les aménagements cyclables sont un peu les parents pauvres des mesures d'aménagements routiers et de la mobilité. De ce fait, les cyclistes se retrouvent trop souvent mêlés soit au flux de voitures, puisqu'il n'y a pas d'installations cyclables, soit aux piétons en raison d'équipements mal conçus et accidentogènes, tant pour les cyclistes que pour les piétons. Le développement des infrastructures de mobilité douce représente l'un des principaux leviers qui nous permettront de réduire les accidents liés aux déplacements ainsi que d'encourager la pratique à la fois du vélo et de la marche. En effet, actuellement, on le sait, les problèmes de sécurité sont dissuasifs et freinent un certain nombre de personnes, en particulier s'agissant du vélo, dans le choix de ce type de mobilité.
Au sens de la minorité, c'est la conjonction des différentes mesures - prévention, répression des infractions et aménagements routiers - qui nous permettra de réduire drastiquement le nombre d'accidents. C'est précisément l'objectif de cette proposition de motion - donner un coup d'accélérateur à la politique de prévention des accidents - et c'est la raison pour laquelle nous vous demandons de l'accepter. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, zéro mort et blessé grave sur les routes genevoises, une utopie ? Peut-être pouvons-nous déjà commencer par en diminuer le nombre. Fin juillet, une cycliste perdait la vie, heurtée par un automobiliste. C'était la cinquième victime de l'année; entre-temps, il y en a eu d'autres. Peut-être que si on le formulait autrement, cela choquerait davantage: un automobiliste a tué une jeune femme à vélo. Les médias sont souvent friands de ce genre de faits divers.
En 2023, un grand nombre de cyclistes sont morts ou plutôt ont été tués sur la route; par inadvertance, par inconscience, par négligence ou tout simplement parce qu'il n'y a pas encore suffisamment d'aménagements sécurisés pour les personnes ayant fait le choix de la mobilité douce, notamment les piétons et les cyclistes. Ne minimisons pas les faits, chaque vie compte. Lorsqu'on sait qu'il est possible d'éviter des tragédies, alors il nous semble important de le dire, d'agir et de soutenir toutes les initiatives et décisions qui pourraient protéger les plus vulnérables - et celles et ceux qui privilégient la mobilité douce en font partie.
Cette proposition de motion invite le Conseil d'Etat à se donner des moyens d'action et plus spécifiquement à développer des installations sécurisées. Cela signifie: vite, séparons les flux et protégeons les plus vulnérables. La réduction de la vitesse à 30 km/h constitue également une mesure permettant d'éviter les accidents. Aujourd'hui, à Genève, les démarches se font si lentement que des jeunes de moins de vingt ans et des mineurs se sont mobilisés à travers une pétition pour exiger la sécurité et la protection qu'ils devraient normalement obtenir de facto de l'Etat; cette pétition, c'est la 2179. Ces jeunes ont peur de mourir en roulant à vélo sur la route d'Annecy.
Les jeunes, les enfants, les personnes âgées, les blessés, les familles, les personnes en situation de handicap, les piétons, les cyclistes... Beaucoup de monde est lésé dans notre canton à cause d'un manque de protection, à cause de la lenteur à installer des pistes cyclables sécurisées, continues, séparées: c'est la jungle. En conclusion, les Vertes et les Verts soutiendront cet objet, car non, la mort dans un tel chaos n'est pas une fatalité, nous pouvons l'éviter. Merci. (Applaudissements.)
M. Patrick Dimier (MCG). Mesdames et Messieurs, ce que je vais dire ne concerne pas seulement le réseau genevois ou même suisse mais, de manière générale, l'ensemble du réseau européen. La principale source d'accidents, c'est l'inattention. Et bien sûr, l'inattention se produit entre les automobilistes, entre les cyclistes et les automobilistes... Enfin, ça se multiplie à l'infini !
Comment régler cette question ? Eh bien pour avoir participé à plusieurs colloques tant en France qu'en Angleterre, je peux vous assurer que de nombreux législateurs s'échinent autour de cette problématique; elle n'est tout simplement pas résolvable. En effet, tout cela dépend de la responsabilité de chacun d'entre nous.
Bien entendu, autant que faire se peut, on doit séparer les flux, comme vient de le souligner ma préopinante, c'est logique. A Genève, il y a bien assez de place sur la majorité - je dis bien: la majorité, pas la totalité - des routes pour sécuriser les différents flux et surtout séparer les trafics qui ne sont pas compatibles entre eux. Mais la première chose que l'on peut faire, c'est être attentif quand on se promène, a fortiori quand on longe les routes de campagne en tant que piéton ou cycliste - je suis l'un et l'autre occasionnellement et à tour de rôle -, cela tend déjà à diminuer considérablement les risques.
Après, il est évidemment facile de tirer sur les uns ou sur les autres - les motocyclistes, les vélos électriques qui vont trop vite - quand les usagers ne sont pas attentifs à ce qu'ils font. Aussi, faisons d'abord preuve d'un peu de responsabilité individuelle. Ensuite, comme l'a indiqué Mme la rapporteuse Marti, des équipements peuvent être installés, surtout là où il y a la place de le faire. Le reste relève de la responsabilité individuelle de chacun des usagers de la route: il s'agit de l'espace public et nous sommes tous responsables. Merci.
M. Souheil Sayegh (LC). Ah, ça nous manquait un peu, le thème des transports, depuis quelques jours ! (Rires. L'orateur rit.) Bien entendu qu'il s'agit d'un texte plein de bonnes intentions, mais la manière, chers collègues, la manière: on nous culpabilise encore ! Quand je dis «nous», je ne parle pas forcément des conducteurs de quatre-roues, mais de toutes les personnes qui empruntent la route et qui, finalement, prennent le risque de se tuer, malheureusement.
Nous voilà encore, à la commission des transports, transformés en ingénieurs civils (on a proposé plein de moyens de sécuriser les routes), en policiers (comment faire pour réprimander les méchants quatre-roues ?), en ingénieurs du trafic (on pourrait installer des feux ici, des signaux là-bas, etc.). On a auditionné la police, tout le monde était là et on en arrive au même constat: les mesures sont déjà en cours, les professionnels visent déjà l'objectif zéro mort. On aurait tout aussi bien pu demander zéro décès lié au cancer du poumon, zéro agressivité dans les rues...
L'étude du BPA citée par le rapporteur de majorité le mentionne: c'est principalement l'inattention qui est responsable des accidents, ou encore le choc entre les vélos eux-mêmes, entre les trottinettes et les vélos. Interdisons les vélos et les trottinettes électriques, et nous réduirons drastiquement le nombre de morts sur la chaussée !
Des voix. Bravo ! (Commentaires.)
M. Souheil Sayegh. Non, je n'en ai pas l'intention. Plus sérieusement, nous sommes conscients que tout est fait pour limiter ces événements tragiques. Si des parents nous écoutent ici, commençons déjà par interdire aux adolescents - ou même aux adultes - l'utilisation de casques audio, et tout le monde serait beaucoup plus attentif sur nos routes, celles-ci seraient beaucoup plus sûres.
Pour la simple et bonne raison que tout est déjà entrepris pour limiter les drames, Le Centre estime que cette proposition de motion est dangereuse. Pourquoi ? Parce qu'en la votant, on envoie le signal que chacun est en sécurité et que le Grand Conseil s'occupe de nous. Pour ce motif et tant d'autres, nous la rejetterons et vous proposons naturellement d'en faire de même si vous le souhaitez. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Mme Fabienne Monbaron (PLR). Il est évident que chacun d'entre nous voudrait qu'il n'y ait plus de morts sur les routes. La rapporteure de minorité l'a indiqué, et cela est confirmé par le BPA: depuis cinquante ans, le nombre d'accidents, et notamment de ceux entraînant des décès, a très nettement diminué alors même que le nombre de véhicules en circulation a largement augmenté. Force est de constater que la prévention a fait son oeuvre, tout comme la répression, car nous ne pouvons pas soutenir que les contrôles radar ou d'alcoolémie sont inexistants sur notre territoire; ce n'est pas le cas, il n'y a qu'à voir les messages d'avertissement publiés sur Telegram, Waze ou d'autres applications. Soyons réalistes: même avec la meilleure volonté du monde, il ne sera pas possible de diminuer le nombre de morts ou de blessés sur les routes sans supprimer l'entier des véhicules qui y circulent, transports publics, vélos et trottinettes compris, ce qui n'est le souhait de personne.
Comme cela a également été signalé par le rapporteur de majorité qui a repris les mots que j'avais exprimés en commission, on peut lire dans l'étude du rapport Sinus, qui nous avait été transmise par le Bureau de prévention des accidents, qu'en 2022, 91% des accidents impliquant des trottinettes électriques étaient dus à l'inattention, à la distraction de leur conducteur ou à leur vitesse. Les vélos à assistance électrique doivent la survenue des accidents majoritairement à des pertes de maîtrise, notamment des dérapages, à l'inattention ou à la distraction de leur conducteur, à une mauvaise manoeuvre ou à un comportement fautif. Dans 76% des accidents qui ont tué ou blessé des conducteurs de vélos à assistance électrique, les responsables sont d'autres vélos électriques. Pour les motos, la première cause d'accident est la vitesse et, pour les voitures, un dérapage entraînant une perte de maîtrise du véhicule.
Cependant, toutes les mesures que nous pourrions mettre en oeuvre ne pourront jamais faire changer les comportements de certains. Chacune des invites de cette proposition de motion étant déjà quasiment réalisée ou en bonne voie de l'être, le PLR la refusera.
La présidente. Je vous remercie. La parole est à M. Sylvain Thévoz pour deux minutes dix-huit.
M. Sylvain Thévoz (S). Merci, Madame la présidente. Ce qu'on entend ce soir est proprement hallucinant ! Une droite toujours aussi bloquée sur les questions de mobilité qui privilégie la liberté individuelle au détriment de la sécurité et de la santé. Je pense qu'il y a une responsabilité politique forte dans les décès et les personnes qui se voient blessées sur la route, parce qu'on ne manifeste aucune volonté politique - ce que demandait cette proposition de motion, finalement - de rendre les possibilités d'accidents plus difficiles et de limiter le potentiel de décès.
Il n'y a pas de volonté politique quand elle existe dans d'autres domaines, comme en ce qui concerne la LAPSA, la loi sur l'aide aux personnes sans abri: au début, la Ville de Genève se fixe un objectif zéro sans-abri, puis on prend des mesures, on vote des lois, on se donne finalement les moyens d'y parvenir.
Ici, on a le taux le plus élevé de cyclistes tués depuis 2014, on a une augmentation de tous les accidents, mais la majorité du parlement s'obstine: «Tout va très bien, attendez, c'est en cours, tout le monde fait des efforts, ne vous pressez pas.» Non ! Il y a des personnes, des victimes, des familles qui, tous les jours, n'osent pas laisser leurs enfants sur le trottoir, parce qu'on est dans un milieu dangereux, les villes sont de plus en plus denses et les gens risquent leur peau quand ils circulent sur la route. Et la majorité de droite complètement aveugle et sourde persiste: «Circulez, il n'y a pas de problème, ça va se régler tout seul.» C'est faux, et ce texte n'est pas une bonne intention, mais une volonté politique. La droite, elle, ne manifeste aucune volonté politique, et c'est ce qui crée les accidents in fine, c'est ce qui cause le décès des personnes. (Commentaires.) Oui, c'est ça, le problème !
Mme Marjorie de Chastonay l'a rappelé: plus de trois mille personnes ont signé une pétition des élèves du collège de Staël, lesquels demandaient: «S'il vous plaît, on aimerait que vous sécurisiez la route d'Annecy, parce qu'on risque notre vie.» Ils sont allés voir M. Maudet qui, il faut lui rendre hommage, les a reçus. Et qu'a fait M. Maudet ? Par arrêté, il a modifié la limitation de vitesse, la faisant passer de 60 km/h à 50 km/h. Les solutions politiques sont là. Les solutions politiques, on les connaît, Mme Marti les a rappelées avec brio, mais il faut les appliquer.
Or on rencontre une opposition... (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...contre les zones à 30 km/h, une opposition contre les places piétonnes, une opposition contre la fermeture de rues, on met en avant la liberté de transport; sauf que la liberté de transport - et quelqu'un l'a relevé, M. Sayegh, me semble-t-il -, c'est la liberté du plus gros contre le plus faible. Vous nous enfumez en vous écriant: «Les trottinettes se glissent partout !» Ce n'est pas ça, le problème ! Si vous laissez le tigre avec l'agneau...
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Sylvain Thévoz. ...en disant que ça relève de la responsabilité individuelle et qu'il faut bien qu'ils s'entendent, vous allez privilégier le plus gros, le plus fort, celui qui bouffe l'autre. C'est ce qui est en train de se passer et ça a des conséquences sur la vie des gens...
La présidente. Je vous remercie...
M. Sylvain Thévoz. ...et, in fine, vos politiques en sont responsables. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
La présidente. Je passe la parole à M. Jean-Marie Voumard pour vingt-six secondes.
M. Jean-Marie Voumard (MCG). Je serai très rapide, Madame la présidente. J'aimerais juste rappeler que la politique de sécurité implique tout le monde: qu'on soit automobiliste ou cycliste, c'est la même chose pour chacun. Je mets au défi quiconque ici - pour ma part, je suis automobiliste - de voir un cycliste s'arrêter au feu rouge; c'est là d'où proviennent les accidents. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
La présidente. Merci. Monsieur Christo Ivanov, c'est à vous pour trois minutes.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Plus le temps du groupe le cas échéant ? (Remarque.) Voilà, c'est ça. Merci beaucoup, Madame la présidente. Ecoutez, Mesdames et Messieurs, la rapporteure de minorité Caroline Marti l'a relevé: de 1992 à aujourd'hui, donc en trente ans, nous avons divisé par trois le nombre de morts sur les routes du canton de Genève alors que, dans le même temps, il y a eu une augmentation à la fois de la population, du nombre de conducteurs et, pour faire simple, de la circulation en général. Il suffit de voir les bouchons qu'on subit tous les jours ! Et je ne parle même pas des pendulaires qu'il faut encore ajouter dans cette affaire... La hausse du nombre de pendulaires en trente ans, je n'ose même pas faire la multiplication !
S'agissant de l'objectif zéro mort, je pense que nous sommes tous d'accord, mais la problématique relève d'abord de la responsabilité individuelle, qui touche tout le monde. Et comme cela est souligné dans le rapport du BPA, ce sont d'abord l'inattention, l'indiscipline qui causent les accidents - certains circulent avec le casque sur les oreilles, sans même parler des cyclistes qui discutent en même temps sur leur portable - ainsi que les distractions de toutes les catégories d'usagers de nos routes.
Effectivement, il manque des glissières de sécurité, il manque certainement des protections pour les cyclistes, mais le département - les départements, puisqu'il s'agit d'une politique transversale, ont fait beaucoup de progrès, travaillent ensemble pour assurer une meilleure sécurité sur l'ensemble de notre réseau. Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission des transports vous demande de refuser cette proposition de motion. Merci, Madame la présidente.
La présidente. Merci. A présent, j'ouvre la procédure de vote sur cette proposition de motion.
Mise aux voix, la proposition de motion 2872 est rejetée par 50 non contre 23 oui (vote nominal).
Débat
La présidente. Nous allons finir par la M 2898-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, cette proposition de motion intitulée «Stop aux incivilités sonores routières dans le canton de Genève !» a été traitée rapidement par la commission des transports et présente deux invites. La première demande de «procéder à l'installation pérenne des radars anti-bruit qui ont jusqu'ici fait l'objet de projets pilotes sur les tronçons de route les plus bruyants du canton et à sanctionner (amendes) les dépassements de limites sonores». La deuxième invite vise quant à elle «à sanctionner plus systématiquement toute manipulation de composants de véhicule pouvant avoir une incidence sur le bruit». Tout comme pour la première invite, tout est déjà fait. Des contrôles sur les véhicules sont régulièrement effectués par la police. On peut par exemple parler de ce qui se fait sur le quai Gustave-Ador ou sur d'autres tronçons aux Acacias: il y a régulièrement des contrôles pour ceux qui gonflent leur moteur ou trafiquent des pièces de leur véhicule, que ce soient des motos ou des voitures.
En ce qui concerne le problème des radars antibruit, au niveau fédéral, un certain nombre d'ordonnances ont été établies en lien avec le durcissement des sanctions, et une consultation a été envoyée aux cantons, qui avaient jusqu'à mars 2023 pour y répondre. Le Conseil d'Etat a indiqué être favorable aux mesures permettant d'accentuer les sanctions des véhicules trafiqués, comme je vous le disais précédemment. Nous constatons donc que les ordonnances ont été validées par le canton fin mars. Cependant, elles ne sont pas encore homologuées sur le plan fédéral. Néanmoins, des phases tests ont déjà été effectuées dans le canton par la police avec des radars antibruit sur des secteurs en ville de Genève et dans les communes limitrophes, avec un certain nombre de résultats très probants. Par conséquent, tout ce que demande cette motion existe déjà; elle ne contient que de bonnes intentions. La majorité vous demande donc de bien vouloir la refuser. Je vous remercie.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion demande de l'action. 120 000 personnes souffrent du bruit à Genève: c'est un fléau ! De nombreux travaux pilotes ont eu lieu, de nombreuses études ont été menées. Aujourd'hui, il est temps d'agir. Il est temps de mettre en place une mesure plus forte en installant par exemple des radars antibruit, et si possible de manière pérenne. Il s'agit d'une question de santé publique qui mobilise un grand nombre de personnes qui déposent des pétitions. Ces dernières demandent toutes moins de bruit lié au trafic motorisé et concernent l'ensemble du territoire de notre canton, qu'il s'agisse du trafic de transit en milieu urbain, en milieu suburbain ou encore dans les villages, à la frontière avec la France. D'autres pétitions demandent d'agir directement sur le bruit, soit en supprimant des événements, soit en sanctionnant davantage les véhicules trafiqués.
Il faut distinguer le bruit tout court des pics de bruit. Pour lutter contre les pics de bruit, il y a la prévention, avec des radars antibruit. Il y a aussi la répression, avec des sanctions contre celles et ceux qui transforment leurs véhicules, mais aussi contre les personnes qui font du bruit volontairement avec des comportements inadéquats. Il est aussi possible de lutter contre le bruit en général à travers des mesures telles que la diminution de la vitesse, comme le passage de 50 km/h à 30 km/h. Bref, vous comprendrez mon discours: les moyens ne manquent pas.
Aujourd'hui, des tests sont encore en cours et les mesures fédérales se font attendre, mais rien n'empêche le Conseil d'Etat d'anticiper et de mettre en place des campagnes de sensibilisation à plus large échelle. Parce que si quelques petits tests de radars ont déjà été réalisés - encore cet été, ces essais ont fait l'objet d'un communiqué de presse -, le Conseil d'Etat pourrait mettre en oeuvre de plus larges campagnes de sensibilisation et se préparer à l'action par rapport aux futures mesures fédérales que nous attendons avec impatience et de manière plus globale.
Cette motion invite donc le Conseil d'Etat à prendre les devants, parce que les nuisances sonores ont des répercussions sur la qualité de vie et sur la santé. Selon les HUG, le bruit peut avoir un impact sur la mortalité, sur le risque de problèmes cardiovasculaires et sur la santé en général. Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à accepter cette motion. Merci. (Applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC). Cette motion est clairement inapplicable, pour la simple et bonne raison qu'aujourd'hui, les radars antibruit qui sont demandés ne sont pas homologués. En effet, le problème - enfin, pour nous, ce n'est pas un problème, mais pour d'autres peut-être que c'en est un - qui se pose est le suivant: la réalité, c'est qu'aujourd'hui, si vous voulez installer un radar antibruit, vous devez non seulement en prouver l'utilité et le besoin, mais vous devez aussi prouver l'efficacité et l'exactitude des données, ce qui est très compliqué. Le système législatif, fort heureusement, met donc un frein aux velléités de certains de vouloir absolument sanctionner le bruit, alors que la fiabilité de ce genre de mesures n'est pas prouvée à l'heure actuelle.
Si vous voulez vraiment agir contre le bruit, une possibilité existe: il s'agit de la loi sur les agents de la police municipale. Lors de l'adoption de cette loi en 2009, la commission judiciaire avait justement confié à la police municipale la tâche de mettre en place des mesures contre le bruit. Les communes n'ont jamais exercé cette compétence, non pas parce que les polices municipales, à leur décharge, n'appliquent pas le contrôle du bruit, mais simplement parce que les magistrats municipaux ne veulent pas investir dans les appareils pour mesurer le bruit. C'est pour ça que ça n'a jamais été fait. Il faut savoir que ce sont des machines qui coûtent extrêmement cher, et les magistrats, plus par pingrerie face à un mauvais investissement que par une volonté de réellement lutter contre le bruit, n'ont jamais... Aucune commune n'a acheté ces appareils à l'heure actuelle pour mettre en place des mesures de lutte contre le bruit. Ça ne fait pas partie des tâches qui sont données aux polices municipales, et pourtant cela figure dans la loi. Il est vrai que c'est un problème qu'il faudrait peut-être revoir aujourd'hui.
Pour le reste, cette motion étant de toute façon inapplicable, mieux vaut en rester là et la refuser. Je vous remercie.
M. Souheil Sayegh (LC). Chers collègues, je prends brièvement la parole pour vous donner la position du Centre. Cette motion, comme la précédente, est pleine de bon sens, mais notre appréciation ne sera pas la même: cette fois-ci, nous voterons cette proposition, même si elle se fait l'écho d'une autre motion déjà déposée au Grand Conseil. Même si - comme on l'a déjà dit - les invites ne sont pas forcément du ressort du canton, même si elle paraît inapplicable, il est bon de rappeler aux habitants que nous sommes attentifs aux nuisances sonores qu'ils subissent pour la majorité d'entre eux, bien que ces nuisances sonores ne soient causées que par 1,5% des usagers. Il faut que ces 1,5% d'usagers soient attentifs au fait que nous leur demandons de faire attention. La mise en place de ces instruments de mesure doit les inciter à lever le pied. Si on ne votait pas cette motion, ce serait un mauvais signal envoyé aux personnes qui sont à l'origine de ces nuisances sonores. C'est pour cette raison, pour le simple message envoyé, pour le bon sens de cette motion, que Le Centre la soutiendra et vous recommande d'en faire de même. Je vous remercie.
M. Jacques Jeannerat (LJS). Comme l'a dit le président de la commission des transports, les radars antibruit ne sont pas encore homologués. Par conséquent, au fond, cette motion revient un peu à enfoncer une porte ouverte. Néanmoins, Mme la rapporteure de minorité l'a bien précisé, beaucoup de bruits dans les rues sont dus à des voitures... des véhicules, je dis voitures, mais il y a aussi des motos qui sont trafiquées et dont le bruit va au-delà des normes.
Nous avons déposé un amendement pour qu'on sanctionne les gens qui sont passés par la police - qu'elle soit cantonale ou municipale, Monsieur le président de la commission des transports, peu importe - en leur demandant de se rendre immédiatement à l'office cantonal des véhicules pour la mise en conformité d'un véhicule qui aurait été trafiqué. Cet amendement propose donc une mesure qui peut être mise en place rapidement, au contraire des radars qui ne sont pas homologués. Merci.
Mme Fabienne Monbaron (PLR). Comme il a déjà pu le dire, le PLR est favorable aux radars antibruit, tout comme à la répression et aux sanctions à l'encontre des personnes qui utilisent des accessoires bruyants souvent non homologués ou qui font volontairement du bruit pour se faire remarquer, se sentir exister ou juste pour leur plaisir personnel. C'est pour cette raison qu'il avait accepté la motion 2479, qui demande exactement la même chose. En effet, le Conseil d'Etat a déjà été invité «à acquérir ou développer un appareil qui permette de mesurer le bruit et d'identifier les véhicules bruyants; à équiper la police routière de tels équipements pour ses missions de contrôle du bruit routier (équipement des véhicules et comportement des conducteurs); à mener des campagnes régulières de contrôle des véhicules bruyants, ainsi que des comportements routiers qui engendrent des nuisances pour la population; à sanctionner de façon exemplaire les personnes qui occasionnent ces nuisances», et enfin «à dresser une carte interactive des lieux sensibles, basée sur le cadastre du bruit et les plaintes concernant les excès de bruit, pour intervenir de manière ciblée».
Comme cela nous a été dit en commission, ces radars sont actuellement en phase de test. D'ailleurs, ces essais ont récemment pris fin et un retour sera fait dans le courant du mois de janvier prochain. Pour toutes ces raisons, le PLR refusera cette motion.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite rappeler en préambule que cette motion fait suite au dépôt de deux pétitions, notamment de la part des riverains, qui s'opposaient à la course de côte de Verbois, l'une soutenant cet événement sportif, l'autre le contestant, en raison des nuisances occasionnées non seulement le jour de la course, mais aussi le reste de l'année, dans la mesure où les participants à cette course viennent s'entraîner, causant évidemment des nuisances sonores très importantes le long de cette route.
Je crois qu'il y avait une forme d'unanimité lors des débats sur ces deux pétitions pour reconnaître qu'il n'était pas acceptable de simplement dire: «Voilà, c'est comme ça, on s'accommode de ce bruit, et puis les riverains n'ont qu'à se mettre le poing dans la poche et à serrer les dents, parce que finalement c'est comme ça, et c'est une question de liberté.» Non, il y avait une très large majorité de ce Grand Conseil pour dire que ce problème doit être pris au sérieux, qu'on doit entendre les revendications de ces riverains qui demandent simplement de vivre dans le calme et de ne pas subir des atteintes massives à leur santé en raison du bruit routier. Cette large majorité considérait que la proposition faite dans le cadre de la pétition n'était pas la bonne, qu'elle n'était pas efficace ni efficiente, et a décidé de retenir une autre démarche, ce qui a débouché sur le dépôt de cette motion. Ce texte propose de mettre en place un certain nombre de contrôles via des radars antibruit et d'appliquer des sanctions si les normes de bruit sont dépassées sur la base des constats de ces radars, mais aussi si des personnes ont modifié leurs véhicules, que ce soient des motos ou des automobiles, de manière à ce que ceux-ci dépassent les normes acceptables de bruit.
Or aujourd'hui, je constate - en tout cas, c'est ce qui ressort des travaux de commission - un refus de cette motion, et je le regrette, parce que le travail que nous avons mené est concret, cohérent et prend la situation dans sa globalité. Nous savons qu'il n'y a malheureusement pas que les habitants, à savoir les riverains de la route de Verbois, qui subissent des niveaux sonores largement supérieurs aux normes légales en raison du bruit routier. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Ce bruit a des impacts sur la qualité de vie des habitants, mais aussi sur la santé, qui se chiffrent de façon très concrète en nombre d'années de vie en moins, mais aussi en milliards de francs de frais de santé.
La présidente. Il vous faut conclure.
Mme Caroline Marti. J'invite donc celles et ceux qui se soucient des questions de circulation routière, mais aussi de coûts de la santé, à réfléchir aux véritables causes de leur augmentation: le bruit routier en est une, et je vous invite à ce titre-là à accepter cette motion. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Patrick Dimier (MCG). Comme tout le monde, et même si je suis un grand amateur de sport automobile, je dois faire la distinction entre les lieux où celui-ci peut se pratiquer et les rues. Les rues de Genève, comme celles d'autres villes, ne sont pas des pistes de courses d'automobiles, de motos ou de n'importe quel véhicule motorisé. De ce que je sais ou du moins de l'époque où je pratiquais cette partie-là du droit, un usager qui était pris en infraction devait présenter au bureau des autos son véhicule remis en ordre. Et là, c'est la porte ouverte à n'importe quelle répétition ! Je ne sais pas si cette pratique existe toujours, mais je crois que c'est encore comme ça. Si tel est le cas, vous devez commencer par saisir le véhicule, l'amener au bureau des autos et là, obliger l'usager, qu'il s'agisse d'une voiture, d'une moto ou d'une pétoire à 30 km/h modifiée, à remettre lui-même sur place le véhicule en état, puis il faut que le bureau des autos procède à la destruction ! Parce que c'est très simple sinon: vous venez, vous amenez votre véhicule en l'état, tout va bien, on rentre à la maison, «bis repetita placent» et on continue. Si une pratique doit être modifiée, c'est donc bien celle-ci, parce qu'encore une fois, même si je suis un grand amateur de sport automobile et de sport mécanisé, je trouve qu'il y a des lieux pour les pratiquer et que les rues de Genève ne sont pas le bon endroit pour le faire. Merci.
La présidente. Je vous remercie. Avant de donner la parole aux rapporteurs, je vous indique qu'un nouvel amendement de M. Martin est en train d'être distribué. Il vise à reprendre la nouvelle invite que propose M. Jeannerat à la place des deux autres; M. Martin propose quant à lui de l'ajouter tout en gardant les deux premières. Madame la rapporteure de minorité, vous avez la parole pour un peu plus de trois minutes.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de minorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, il semble que nous pourrions envisager de trouver un accord puisqu'il y a toute une série de propositions d'amendements et que je pense que nous sommes toutes et tous d'accord sur le fait que le bruit... (Brouhaha.)
La présidente. Excusez-moi, Madame la rapporteure...
Mme Marjorie de Chastonay. (L'oratrice élève la voix.) ...est un fléau ! Au fond de la salle aussi ! (Rires.)
La présidente. Excusez-moi, je demande effectivement un peu de silence. Dans dix minutes, vous pourrez parler librement, mais si on s'interrompt souvent, cela prendra plus de temps. Madame de Chastonay, vous avez la parole.
Mme Marjorie de Chastonay. Merci. Je suis désolée, je ne m'entendais plus parler, du coup j'ai haussé le ton. Je disais que je pense que nous sommes toutes et tous d'accord pour dire que le bruit est un fléau et que nous avons certainement envie d'agir sur ce problème pour améliorer la qualité de vie de la population genevoise en général.
J'en viens à notre amendement, Madame la présidente. Les Verts et les Vertes proposent de reprendre en partie l'amendement de LJS qui consiste à supprimer les deux invites de la motion - donc à la vider de son sens - et à rajouter une nouvelle invite prévoyant qu'il faut se rendre à l'office cantonal des véhicules pour une mise en conformité du véhicule qui avait été trafiqué. Nous suggérons donc de conserver les deux premières invites puisque à nos yeux, il reste quand même fondamental de maintenir ces radars antibruit et de maintenir la question des sanctions plus systématiques, mais nous sommes aussi tout à fait d'accord d'ajouter la mise en conformité à l'office cantonal des véhicules. Nous vous demandons donc d'accepter l'amendement Vert qui englobe toutes les demandes faites par les différents partis... (Remarque.) ...y compris celle du Centre proposant de supprimer les radars antibruit puisqu'ils ne sont pas encore homologués - mais ils vont l'être bientôt. Pour être plus claire, je vous suggère donc de soutenir l'amendement des Verts qui englobe toute la réflexion que fait cette motion, à savoir les trois invites, les deux actuelles et la nouvelle qui reprend celle de LJS. Merci. (Brouhaha.)
La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs, je vous appelle encore une fois au silence pour que nous puissions finir les travaux. La parole est au rapporteur de majorité, M. Christo Ivanov, pour quarante secondes.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. La M 2479, qui avait été déposée le 16 avril 2018, par le groupe des Verts d'ailleurs - à l'époque, Boris Calame, François Lefort et cosignataires - parle exactement de la même chose. On se retrouve cinq ans après avec une motion quasi identique. La première avait été acceptée par notre Grand Conseil. Par conséquent, il convient de refuser celle-ci ainsi que tous les amendements. Je vous remercie.
Mme Carole-Anne Kast, conseillère d'Etat. Je crois pouvoir m'exprimer en parfaite concordance avec mon collègue Pierre Maudet sur ce sujet puisque nous avons eu de nombreux échanges sur la manière de combattre le bruit, qui est un fléau et dont le bruit routier est une sous-catégorie, comme cela a été évoqué par plusieurs personnes qui se sont exprimées sur cet objet. Pour être tout à fait honnête avec vous, certaines choses qui ont été dites de part et d'autre méritent quelques précisions.
Certes, les radars antibruit que nous appelons de nos voeux sont des radars sanctions, c'est-à-dire capables, comme les radars de vitesse, de flasher une plaque et d'envoyer une amende au contrevenant qui aurait dépassé les normes de bruit. Il se trouve qu'aujourd'hui, la technologie ne permet pas de faire cela; ce n'est pas validé au niveau fédéral. Je peux vous assurer que la police routière attend véritablement cette validation, mais en l'état, ce n'est pas encore le cas et la répression du bruit routier ne peut malheureusement se faire - j'ai envie de dire - qu'à la force du poignet, c'est-à-dire avec des moyens humains et une présence dans la rue significative pour pouvoir réprimer les contrevenants.
A cet égard, évidemment, les radars préventifs antibruit - et ceux-là, ils fonctionnent sans problème - sont déjà une solution pour la prévention, mais ces radars sympathiques, comme les appellent les policiers, ne sont peut-être pas suffisants face à des personnes dont l'objectif assumé est de bricoler leur véhicule afin qu'il fasse plus de bruit. On peut imaginer que le petit smiley content - «oui, c'est bon, votre véhicule va bien» - ou bien le petit smiley fâché - «non, votre véhicule fait trop de bruit» - sont assez peu efficaces face à des personnes dont l'objectif est d'avoir un véhicule bruyant.
Il nous reste donc effectivement la répression faite par la police, qui est indispensable, mais qui prend énormément de temps et qui doit être mise en oeuvre avec des ressources complémentaires. Il nous reste également l'idée suggérée par l'amendement de M. Jeannerat, repris par M. Martin, qui consiste à avoir une démarche chicanière vis-à-vis des personnes qui ont des véhicules trop bruyants en leur demandant de bien vouloir faire vérifier si tout est en ordre à l'office cantonal des véhicules. Nous pensons que c'est une piste à explorer, notamment puisque si nous ne pouvons pas attester scientifiquement que le véhicule flashé est bien à l'origine du bruit mesuré, nous pouvons quand même considérer que cela vaut la peine de vérifier le niveau sonore de ce véhicule. C'est une piste à explorer et nous vous invitons à soutenir sa mise en oeuvre afin de donner un signal clair.
Je me permets de vous lire le message que m'a envoyé le capitaine Crettenand, responsable de ces questions de bruit routier, et j'en conclurai par là pour saluer l'intervention de M. Sayegh, qui a raison. M. Crettenand dit: «Si on ne montre pas politiquement qu'on veut agir sur cette question, le message est catastrophique.» Par conséquent, même si l'on sait que ce sera encore un travail de longue haleine, il faut envoyer un message clair dans ce sens sur le terrain politique. Je vous remercie pour votre attention et pour les belles idées exprimées dans le cadre de ce débat. (Applaudissements.)
La présidente. Je vous remercie. Nous sommes saisis de trois amendements. En premier, nous allons voter sur l'amendement de M. Jeannerat, qui est considéré comme un amendement général. S'il est accepté, il fera tomber les autres amendements. S'il est refusé, nous voterons sur les deux autres amendements, qui sont jugés compatibles entre eux et qui ne s'annuleront donc pas.
Je commence par l'amendement de M. Jeannerat:
«Invite (nouvelle, invites 1 et 2 biffées)
invite le Conseil d'Etat
à obliger le détenteur du véhicule à se rendre à l'Office cantonal des véhicules (OCV) pour une mise en conformité en cas de dépassement des valeurs sonores admises.»
Le vote est lancé.
Une voix. Il faut l'accepter ! Il faut l'accepter !
Une autre voix. Je ne t'ai pas écouté, mon cher !
Mis aux voix, cet amendement général est adopté par 53 oui contre 37 non. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Une voix. Bravo, Jacques !
Mise aux voix, la motion 2898 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 65 oui contre 26 non et 1 abstention (vote nominal).
La présidente. Nous avons bien travaillé, je vous en remercie. Je vous rappelle que nous reprenons nos travaux jeudi prochain à 17h pour la suite de l'ordre du jour. D'ici là, je vous souhaite un bon retour dans vos foyers.
La séance est levée à 20h.