Séance du
jeudi 21 septembre 2023 à
17h
3e
législature -
1re
année -
4e
session -
20e
séance
PL 13073-B
Premier débat
La présidente. Nous pouvons maintenant commencer le traitement de notre ordre du jour ordinaire avec le PL 13073-B, qui est classé en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Chers collègues, je vous rappelle que ce projet de loi arrive en plénière pour la seconde fois: nous l'avions renvoyé en commission dès l'ouverture des débats - j'avais déjà rédigé le premier rapport - afin de lever un malentendu. En fait, ce malentendu correspond exactement à la question de fond que pose cet objet. Cette question est la suivante: est-il possible, dans le cadre de la LRGC telle qu'elle est libellée à l'heure actuelle, de reconduire une expérience qui avait donné satisfaction à tout le monde, c'est-à-dire organiser une séance de commission avec près de 250 collégiens qui avaient été invités à débattre à la Nouvelle Comédie avec la commission des droits politiques sur la question du vote à 16 ans ? Vous voyez bien, Mesdames et Messieurs, qu'il n'avait pas été nécessaire, en l'occurrence, de modifier la LRGC pour organiser cet événement et qu'il est tout à fait possible de reprogrammer un événement comparable sans modifier la LRGC. Alors pourquoi en parlons-nous ?
Nous en parlons parce que le projet de loi dont nous devons aujourd'hui décider du sort a été déposé suite à l'événement que j'évoquais avec les collégiens et qu'il prévoit la disposition suivante: «Une commission peut, à la majorité des deux tiers de ses membres, décider d'une audition publique sur un texte qu'elle traite.» Vous avez bien compris où se niche la nuance, qui est fondamentale: auditionner un large public, c'est une chose - c'est ce que nous avons fait avec les collégiens -, mais laisser demain nos commissions siéger en public, ça n'a absolument rien à voir ! Ça signifie que les personnes que vous inviteriez ou que vous convoqueriez pour une audition, par exemple la direction des TPG à la commission des transports, pourraient répondre aux questions des commissaires en présence d'un public que la commission aurait décidé de faire venir, auquel elle aurait choisi de s'ouvrir, public qui serait passif, simplement témoin des propos des personnes auditionnées.
Vous avez bien compris, Mesdames et Messieurs, que nous changerions fondamentalement, ce faisant, notre culture parlementaire - la culture des travaux de nos commissions -, mais aussi la confiance qui doit régner entre les commissaires et les personnes auditionnées qui, je peux vous l'assurer, ne souhaitent pas du tout que leurs propos, que ces échanges soient publics ! Même si les rapports le deviennent par la suite, les échanges doivent pouvoir garder, dans le cadre des travaux de commission, la confidentialité requise.
Mesdames et Messieurs, nous pouvons, si nous le souhaitons, reproduire l'expérience que nous avons vécue avec les collégiens dans le cadre de la LRGC. Alors s'il vous plaît, ne modifions pas la LRGC et ne créons pas des commissions parlementaires publiques. La majorité de la commission vous invite par conséquent à refuser ce projet de loi. Je vous remercie de votre attention.
La présidente. Je vous remercie. Je profite du passage entre les deux rapporteurs pour rappeler la règle qui vaut dans cette salle: les discussions ont lieu à l'extérieur. (Un instant s'écoule.) Messieurs et Madame la cheffe de groupe, s'il vous plaît ! Je donne la parole au rapporteur de minorité.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, comme l'a dit le rapporteur de majorité, le destin de ce projet de loi est un peu particulier vu qu'il est déjà passé deux fois en commission, que les débats y ont été nourris, et qu'à deux reprises - après un certain nombre de suggestions, sinon de propositions d'amendements - l'entrée en matière a été refusée à une très courte majorité.
Le problème de ce projet de loi, cela a été suggéré tout à l'heure, c'est qu'il a eu de la peine à s'émanciper de l'événement qui lui a servi de base. Il y a eu effectivement ce moment assez extraordinaire - à titre personnel, je l'ai vécu mais de l'autre côté, en tant qu'enseignant - où la commission des droits politiques a pu auditionner plusieurs centaines d'élèves du secondaire II à la Nouvelle Comédie: cela a été une réussite et a servi de base à ce texte.
Mais, cela a été dit, ce projet de loi va beaucoup plus loin, a une approche beaucoup plus large que cette expérience et il propose effectivement, moyennant une condition relativement drastique puisqu'il faut une majorité qualifiée des deux tiers, qu'une commission puisse procéder... (Brouhaha.) Excusez-moi, j'ai de la peine à m'écouter moi-même, Monsieur Sormanni ! ...qu'une commission puisse procéder à des auditions publiques. Certes, il faut définir ce qu'est une audition publique: est-ce une copie de ce qui a été fait en 2021, à savoir une audition qui convoque un large public ès qualités, constitué par exemple d'élèves, mais pourquoi pas d'habitants d'un hameau ou d'adeptes d'un loisir particulier ? Ou, autre possibilité, est-ce que l'on convoque un nombre relativement restreint de personnes en présence d'un public anonyme - comme l'a suggéré le rapporteur de majorité -, qui peut suivre l'audition soit en direct, soit par des procédés télévisuels, comme cela se fait dans d'autres pays et même en Suisse, au niveau fédéral ?
La minorité a donc une impression d'inachevé: ces discussions étaient intéressantes, et il aurait véritablement fallu parvenir à extraire ce projet de loi de cette expérience particulière pour définir ensemble ce qu'on entend par audition publique; en refusant par deux fois l'entrée en matière, la commission s'est interdit, en définitive, de définir plus précisément le cadre de ces auditions publiques. Alors on se retrouve avec ce projet de loi, qui pose des conditions relativement sévères - on peut faire confiance aux commissions pour ne pas abuser de ce droit - et instaure une pratique qui, si elle n'est pas très clairement définie, présente un certain nombre d'intérêts; on peut les lister, mais je n'en ai pas forcément le temps, on y reviendra tout à l'heure. Il ne va pas nécessairement à l'encontre de la culture parlementaire à laquelle faisait allusion le rapporteur de majorité, pour la simple et bonne raison que les propos des auditionnés, aujourd'hui déjà...
La présidente. Vous parlez sur le temps de votre groupe.
M. Julien Nicolet-dit-Félix. J'arrive au terme de mon intervention. ...les propos des auditionnés sont, de fait, publics puisqu'ils apparaissent carrément verbatim dans les rapports de commission. C'est peut-être l'occasion de préciser - là, le rapporteur de majorité n'a pas été tout à fait précis - qu'il ne s'agit pas de rendre tous les travaux des commissions publics, mais bien les auditions. Et si certains commissaires utilisent ces auditions pour développer leur position politique, ce n'est pas le but de ces auditions ! Celles-ci ont pour but qu'on puisse poser des questions et, surtout, écouter les réponses des auditionnés. Pour toutes ces raisons, la minorité vous propose d'accepter ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Jean-Louis Fazio (LJS). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe Libertés et Justice sociale votera le rapport de majorité. Après réflexion, il ne nous paraît pas judicieux d'accueillir dans les salles de commissions un public qui ne prend pas part aux discussions. En effet, les députés tirent leur participation au débat parlementaire - en plénum ou en commission - de la volonté du peuple, grâce au suffrage universel. Dès lors, le débat démocratique doit se tenir au sein de notre parlement, sans interférence extérieure; il en va du respect de notre légitimité et de nos institutions. N'ajoutons pas de la confusion dans nos débats et du flou sur la représentativité des uns et des autres. Merci de votre écoute.
M. Yves de Matteis (Ve). En ce qui me concerne et en ce qui concerne mon groupe, nous allons demander le renvoi en commission: ce projet de loi avait en effet été renvoyé une première fois pour que les débats aient réellement lieu, mais, à une courte majorité - 8 non contre 7 oui -, nous n'avons finalement pas véritablement pu en rediscuter. Il se trouve que les auditions publiques existent au niveau national, soit au parlement fédéral, et il n'y aurait donc pas, a priori, d'objection sur le plan légal ni au regard des bonnes pratiques à ce que nous opérions de même.
Malheureusement, tous les amendements qui avaient été présentés ou du moins évoqués en plénière n'ont pas pu être présentés en commission: nous nous sommes arrêtés au premier débat, ils n'ont donc pas pu être discutés et votés. Raison pour laquelle je demande le renvoi de ce projet de loi en commission, pour pouvoir réellement avoir un débat; c'était le but du premier renvoi, mais il n'a pas pu être accompli puisque nous avons seulement travaillé pendant une séance sur cet objet, le 17 mai 2023. Merci, Madame la présidente.
La présidente. Je vous remercie. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission; je donne d'abord la parole au rapporteur de minorité pour qu'il s'exprime à ce propos.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Vous l'avez compris de mes propos de tout à l'heure, le groupe Vert et la minorité plus largement vont soutenir le renvoi en commission, parce qu'il y a effectivement un sentiment d'inachevé s'agissant des travaux sur ce projet de loi: cela vaudrait la peine qu'on puisse réfléchir à mieux circonscrire ce qu'est une audition publique, ce qu'elle pourrait être dans notre droit. Je vous remercie.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de majorité. Chers collègues, non ! Il est totalement inutile de renvoyer ce projet de loi en commission, parce que les travaux ont été faits lors du premier passage en commission ! Nous avons auditionné toutes les personnes compétentes dans le domaine, nous avons approfondi la question juridique, la question politique. Nous avons auditionné... Je ne vais pas vous en faire la liste ici, mais les travaux de fond ont été faits.
Alors pourquoi est-ce que moi-même, qui étais déjà rapporteur à l'issue du premier passage, ai souhaité un renvoi en commission ? C'est parce qu'en rédigeant le rapport et en relisant consciencieusement tous les PV, je me suis rendu compte que dans les questions et les propos des uns et des autres, il subsistait cette ambiguïté entre audition publique et audition d'un public. Il s'agissait simplement de faire un tour de table de la position des groupes en une séance, ce que nous avons fait. Un certain nombre de groupes, minoritaires, même si c'était à une courte minorité, ont dit: nous voulons des auditions publiques ! Et la majorité a dit: non, nous ne voulons pas d'auditions publiques, nous voulons pouvoir auditionner un large public ! C'est pourquoi nous sommes là aujourd'hui. J'ai déjà présenté le rapport, qui clarifie ce point; il est donc totalement inutile de retourner en commission, nous devons trancher ce soir.
La présidente. Je vous remercie. Nous passons au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13073 à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil est rejeté par 54 non contre 41 oui.
La présidente. Nous continuons le débat, je donne la parole à M. Jean-Marc Guinchard.
M. Jean-Marc Guinchard (LC). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, je remercie le rapporteur de majorité, mais je crois qu'il a omis tout à l'heure, dans sa synthèse orale, de détailler le contenu de deux auditions importantes. Il a précisé qu'il y a eu beaucoup d'auditions, notamment s'agissant des plans juridique, législatif, etc. L'une d'entre elles a permis d'entendre le préposé cantonal à la protection des données, M. Werly, qui a indiqué que les séances des commissions, en l'état actuel, ne peuvent pas, légalement, être ouvertes au public - à un certain public - et qu'il est nécessaire, a-t-il précisé à plusieurs reprises, de modifier la LRGC pour ce faire. Il a rappelé que l'article 45B de la LRGC indique que «le Grand Conseil peut organiser des auditions publiques pour son information et celle de la population», mais cet article ne concerne que le Grand Conseil en tant que tel et non pas les commissions.
Une deuxième audition, tout aussi importante, est celle du professeur émérite de droit constitutionnel Thierry Tanquerel - que l'on a auditionné à réitérées reprises dans diverses commissions -, qui a estimé que le fond du projet de loi était une bonne chose, tant sur le plan juridique que sur le plan politique. Il a rappelé qu'il n'aimait pas une trop grande densité législative et qu'il y était en général opposé, qu'il ne souhaitait pas qu'on légifère pour un oui ou pour un non, mais qu'il estimait plutôt légitime, dans ce cas précis, d'être plus clair, plus explicite, et de clarifier la règle en matière de travaux de commission.
Sur cette base complémentaire et précise, dont je regrette qu'elle n'ait pas été citée et approfondie, le groupe Le Centre vous encourage vivement à ne pas suivre la majorité de la commission et à accepter l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Patrick Dimier (MCG). Je suis pris dans un grand écart. J'ai en effet une affection très particulière pour le système américain, dans lequel les auditions sont publiques ! Et je peux vous promettre et vous assurer que ces travaux ont une autre teneur, et surtout une autre tenue. A titre très personnel, je suis donc tout à fait en faveur d'une sélection, c'est-à-dire pas d'une automaticité, mais de laisser aux commissions l'autonomie de décider. Nous avons siégé, avec le rapporteur de majorité, dans une commission où nous avons eu un public, et ça s'est plutôt très bien passé; les retours que nous avons eus de ce public étaient tout à fait intéressants et surtout, s'agissant de jeunes, tout à fait encourageants pour la chose publique.
La position de mon groupe est différente et s'oppose à cette vision; chargé par mon groupe d'être son porte-parole, je m'opposerai à ce texte. Merci.
M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi représente un gain en matière de démocratie. Contrairement à ce que j'ai pu entendre, une démocratie qui fonctionne, c'est une démocratie qui est transparente et qui justement rend publics les débats en son sein. C'est intéressant: notre collègue Jean-Louis Fazio mentionnait que cela mettrait en péril la démocratie; bien au contraire ! Bien au contraire, une démocratie qui cache ses débats, qui cache le pouvoir et la manière dont les décisions sont prises par le pouvoir, eh bien c'est une démocratie qui fonctionne mal et qui peut faire douter la population de la façon dont se déroulent nos débats. Maintenant, ce n'est pas parce qu'il existe un vide juridique et que la commission des droits politiques avait en effet pu, il y a deux ans, organiser cette séance en dehors de tous les clous qu'il n'est pas bon de légiférer aujourd'hui pour justement davantage institutionnaliser et cadrer ce genre de séance.
L'exemple que nous avons connu était tout à fait positif. Cela avait un sens puisqu'il s'était agi d'inviter des jeunes du collège, de l'école de commerce, de l'école de culture générale à propos d'un sujet qui les concernait, à savoir le droit de vote à 16 ans. C'était par conséquent davantage une audition qu'une séance publique, dès lors que nous avons pu les entendre et même procéder à un petit vote à la fin; il n'avait bien sûr pas d'incidence sur la prise de décision au niveau du parlement, mais permettait d'avoir une véritable consultation, en direct, quelque part, d'un public concerné par un certain sujet. C'est exactement la façon dont nous procédons habituellement, Mesdames et Messieurs, chers collègues, quand nous auditionnons des publics concernés par les sujets que nous traitons, en convoquant notamment des associations ou tout acteur ou actrice concernés par un sujet. Et nous leur demandons justement, lors de ces auditions, leur avis. Il s'agit donc ici de franchir un pas; je crois qu'on est encore très loin du système américain - j'avoue être en faveur de la plus grande transparence possible -, mais il serait bon de franchir ce pas pour davantage de publicité et de transparence.
Il existe véritablement des garde-fous dans le cadre de ce projet de loi puisque... J'ai entendu le terme «automaticité»: ici, il ne s'agit justement pas d'automaticité ! Toutes les séances de commission ne seront pas publiques ! Le fait qu'une majorité des deux tiers de la commission soit nécessaire constitue un garde-fou: cela veut dire que la commission est quand même largement en faveur d'une séance en public et qu'on ne pourrait pas décider d'en effectuer une à une simple, courte majorité. Aujourd'hui, il faut donc savoir un peu oser, Mesdames et Messieurs, aller de l'avant, pour rendre notre démocratie et notre système politique un peu plus modernes, et cela dans le bon sens de la démocratie, puisque jamais - vous pouvez relire les ouvrages fondamentaux de la démocratie, de l'Antiquité grecque aux Lumières -, jamais, jamais il n'a été fait l'apologie de l'opacité en matière de débats démocratiques, bien au contraire. Allons dans ce sens et rendons les débats publics !
M. Patrick Lussi (UDC), député suppléant. Il est toujours navrant d'entendre - notamment mon préopinant - annoncer que nous sommes dans l'opacité et presque dans la cachotterie: ce qui se passe dans nos commissions figure dans les PV qui en sortent, qui sont repris dans le rapport de majorité et l'éventuel rapport de minorité, ce qui fait que tout ce qui s'est dit sur un sujet dans une commission est clairement décrit ! Comment peut-on dire aujourd'hui qu'il y a de l'opacité ?
Mon cher préopinant, allons sur la place du Molard puis faisons une forme de Landsgemeinde de commission. Parce qu'en définitive, qu'est-ce qui compte ? D'y voir une majorité d'opposants, qui existe au sein de la population, qui, tout en pouvant avoir une influence dans une votation, ne constitueront de toute façon pas une majorité mais une minorité, ou bien de les écouter et de dire: «On vous a entendus» ? Notre démocratie suisse permet tellement... Si un projet de loi est vraiment si déplorable, désastreux et outrageux, elle permet de le refuser en récoltant des signatures.
Mesdames et Messieurs les députés, je crois que c'est un faux débat. On l'a vu, et le rapporteur de majorité l'a clairement expliqué: en cas de nécessité... J'étais dans cette commission et il est évident qu'il était nécessaire d'entendre ces jeunes sur le vote à 16 ans. Curieusement, ils n'étaient pas une majorité à l'accepter, entre nous soit dit ! C'était donc une nécessité, mais c'est un cas très particulier et notre LRGC nous permet toujours de réitérer la pratique. Par conséquent, de grâce, restons quand même lucides, restons quand même fidèles à nos institutions et à ce qui en sort. Surtout, ne jetons pas l'opprobre sur ce qui se fait actuellement dans nos commissions: c'est clair, c'est limpide et je crois qu'il n'y a aucune opacité - ça se saurait depuis longtemps. Il faut donc évidemment voter le rapport de majorité et refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
La présidente. Merci. La parole est à M. Murat-Julian Alder pour deux minutes cinquante-cinq.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Je vous remercie, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi part d'une intention qui est tout à fait louable et sans nul doute bienveillante, mais c'est à juste titre que M. Lussi rappelle sa genèse. C'était un cas très particulier: l'audition de jeunes, en lien avec la question du droit de vote à 16 ans. On ne peut peut-être pas demander à des jeunes, pour certains mineurs, de venir devant une commission parlementaire s'exprimer de la même façon qu'ils le feraient par exemple dans l'un de ces débats dont les collèges et les autres écoles ont le secret juste avant les élections. Nous sommes plusieurs ici à avoir participé à ce genre de discussions, qui sont souvent animées; on y voit le potentiel de certains à rejoindre les rangs de celles et ceux qui font de la politique, et c'est une bonne chose. Mais mon souci, largement partagé au sein du PLR, c'est qu'avec des auditions publiques, on assiste finalement à un mélange des genres !
J'en veux pour preuve une expérience que j'ai vécue il y a quatorze ans, lorsque je siégeais sur les bancs de l'Assemblée constituante: nous avions, à la commission des droits politiques, organisé une consultation publique autour de la thématique du droit de vote des étrangers avec un certain nombre d'associations, à Vernier. Très rapidement, cette consultation publique s'est transformée en un débat. Le débat est bien évidemment indispensable pour notre démocratie, mais le but d'une audition, c'est d'abord et surtout de se renseigner, de se documenter, d'avoir des informations sur l'opinion des différents milieux concernés. Et c'est finalement aussi d'offrir la possibilité aux personnes que nous auditionnons d'avoir une parole libre. Certaines personnes, lorsqu'on les auditionne, ne seraient peut-être pas enclines à nous donner toutes les informations qu'on attend d'elles si on ne leur offrait pas certaines garanties en matière de confidentialité. Il est des situations où les commissions doivent pouvoir accéder à des informations confidentielles sans pour autant siéger à huis clos.
Finalement, j'ajouterai simplement ceci: le préposé cantonal à la protection des données et à la transparence - j'ai déjà eu l'occasion de le lui dire - a un intitulé de fonction qui est contradictoire ! Parce que la transparence s'arrête là où le droit à la protection des données commence, et inversement. Et c'est exactement la règle qui veut que, au parlement, les commissions soient confidentielles et les travaux en plénière publics. Merci de votre attention et merci de bien vouloir refuser ce projet de loi.
La présidente. Je vous remercie. Je passe la parole aux rapporteurs, et d'abord au rapporteur de minorité, M. Julien Nicolet-dit-Félix.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Je vais rebondir sur les propos...
La présidente. Pardon, je précise: pour une minute dix-sept.
M. Julien Nicolet-dit-Félix. Je serai rapide ! Je vais rebondir sur les propos de M. Alder. Il a parfaitement raison ! Le débat public doit s'ouvrir à la cité: il a eu l'occasion de venir dans une de mes classes et c'est tout à fait heureux. On voit qu'on prône l'opacité en la matière, dans le canton voisin, et cela fait beaucoup jaser. Nous pouvons être heureux que notre canton prône effectivement la transparence; il ne faut pas avoir peur de la transparence, pour reprendre les propos de M. Lussi, dont le discours n'était pas tout à fait cohérent à ce propos - en disant qu'on est transparent, on refuse, de fait, de l'être encore plus.
Et les soucis que l'on peut rencontrer parfois entre la population - la société civile - et le corps politique viennent précisément du fait que la jointure ne se fait pas toujours. Les occasions où on pourrait envisager de convoquer une large partie de la population à une audition ne sont pas très fréquentes, mais elles existent ! On a parlé des classes; on peut parler d'associations, d'usagers de certaines infrastructures sur lesquelles une action politique serait requise. Dans ces cas-là, ce projet de loi pourrait déployer ses effets, soit maintenir et renforcer le lien entre le corps politique et la société civile. C'est pour ça que nous vous invitons à le voter. Je vous remercie.
La présidente. Merci. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Pierre Conne, pour trente-quatre secondes.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Je vais citer les mots du professeur Tanquerel pour clarifier le doute juridique. Il nous dit, se référant à l'article 45B LRGC, qu'«il n'existe pas de limites imposées concernant le nombre de personnes auditionnées lors d'une audition. Une commission peut donc, si elle le souhaite, organiser l'audition de 1000 personnes en même temps». Vous avez bien compris que nous n'avons pas besoin de modifier la LRGC; refusons ce projet de loi ! Merci.
La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote d'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 13073 est rejeté en premier débat par 55 non contre 42 oui et 1 abstention.