Séance du
vendredi 1 septembre 2023 à
17h
3e
législature -
1re
année -
3e
session -
19e
séance
M 2517-A
Débat
La présidente. Nous abordons notre dernier point de la journée... (Exclamations.) ...à savoir la M 2517-A, qui est classée en catégorie II, trente minutes. Le rapport de M. Bertrand Buchs est repris, comme nous commençons à en avoir l'habitude, par M. Jean-Marc Guinchard. Vous avez la parole, Monsieur.
M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur ad interim. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs, il ne tient qu'à vous que ce soit la dernière fois... (Brouhaha.)
La présidente. Excusez-moi ! On peut avancer vite si on s'entend parler; sinon, ça peut prendre beaucoup plus de temps. Reprenez, Monsieur.
M. Jean-Marc Guinchard. Je disais: il ne tient qu'à vous que ce soit la dernière fois que je m'assois à cette table ce soir, et j'espère y arriver ! (Rires.)
Une voix. Pour ce soir !
M. Jean-Marc Guinchard. Bien. Le rapport a été rédigé par M. Bertrand Buchs, qui est également premier signataire de cette proposition de motion acceptée en commission par une large majorité de 12 oui contre 1 non et 2 abstentions. Il a déposé ce texte suite à différents articles publiés dans la presse ainsi qu'à plusieurs enquêtes menées par des médias, en particulier en France. Dans le cadre du fameux scandale de ce qu'on a appelé «la prothèse mammaire PIP» - ne me demandez pas ce que signifie «PIP» -, on a enregistré des ruptures d'implants chez 30 000 femmes en France tandis que 15 000 autres femmes ont dû subir une extraction de cette prothèse, ce qui constitue un geste chirurgical invasif et peut, comme n'importe quel geste chirurgical invasif, s'avérer assez dangereux, car on n'exclut jamais certains risques.
Les implants sont des corps étrangers, c'est juste, il faut le rappeler, mais peuvent se révéler extrêmement utiles, et ils sont d'ailleurs multiples: il n'y a pas que des implants mammaires, il y a des prothèses articulaires, des implants dentaires, des implants oculaires, des pacemakers, etc. Ce qu'on observe à l'heure actuelle, c'est que rien n'est fait, en tout cas dans notre pays, pour assurer la traçabilité de ces prothèses. On se vante aujourd'hui de garantir la traçabilité de toute une série de produits, qu'ils soient alimentaires ou issus du milieu agricole, on s'exclame: «Ah, il faut à tout prix qu'on puisse savoir d'où provient tel produit, s'il est estampillé GRTA», et là, curieusement, dans un domaine tout aussi sensible, qui touche une part intime de nous-mêmes, qui touche notre corps, il n'y a rien.
La proposition qui vous est faite et qui, je le répète, a été adoptée par une belle majorité en commission... (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...consiste à créer un registre cantonal genevois des implants. Au niveau médical, on part du principe qu'on peut travailler sur des problèmes et faire ce que fait par exemple l'industrie aéronautique: toutes les pièces d'un avion sont systématiquement répertoriées et leur origine retraçable. Le texte rappelle - je prends sur le temps de mon groupe, Madame la présidente - qu'une motion du même type a été déposée sur le plan fédéral, mais refusée par le Conseil fédéral: j'ose espérer que les députés dans cette salle manifesteront un esprit d'ouverture un peu plus large à ce niveau. Je vous remercie.
M. Jean-Charles Rielle (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, chers collègues, je serai rapide non seulement à cause de l'heure, mais aussi parce que le travail a été très bien réalisé en commission. Il s'agit d'un sujet extrêmement important, bien exposé par le rapporteur qui remplace M. Buchs - il faut dire qu'en tant qu'ancien directeur général de la santé, il connaît la question.
Les socialistes vous recommandent de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. Cela permettra de déterminer comment s'articulera ce registre, soit en collaboration avec EUDAMED au niveau européen, soit avec Swissmedic, soit sur la base d'un autre modèle, car Genève dispose maintenant de compétences reconnues dans le domaine. Je vous remercie.
M. Marc Saudan (LJS). Mesdames les députées, Messieurs les députés, je voudrais juste apporter une petite correction aux propos de mon estimé collègue M. Guinchard: en chirurgie prothétique, qui est mon domaine, nous avons des registres depuis longtemps, des registres qui sont plutôt internationaux et même, depuis quelques années, suisses. Ceux-ci ont une importance fondamentale; dans le cadre de mon activité, cela nous a permis de découvrir qu'un type d'implant dans les prothèses de hanches - on appelle ça «couple de frottement», mais rassurez-vous, je ne vais pas vous faire un cours de mécanique ou de chirurgie prothétique - montrait des déficiences au bout de trois à quatre ans, avec une inflexion de la courbe du taux de révision. Nous avons ainsi pu, à l'international, éviter de poser trop d'implants de ce type et corriger le tir. Dans le domaine des prothèses, il est essentiel de disposer de registres, et le groupe LJS soutiendra cette proposition.
La présidente. Merci. La parole va à M. Pierre Conne... Si son groupe veut bien arrêter de parler derrière, on l'entendra mieux !
M. Pierre Conne (PLR). Merci, Madame la présidente. Chers collègues, j'aimerais simplement indiquer que le groupe PLR soutiendra cette proposition de motion sur la base des arguments présentés dans le rapport et par le rapporteur. J'attire toutefois votre attention sur le fait que ce texte a été renvoyé en commission le 24 janvier 2019, que le temps s'est écoulé depuis. A l'époque déjà, le département montrait le travail en cours pour traiter la question de la traçabilité des différents implants. C'est avec grand intérêt que nous attendons l'actualisation des informations à ce sujet qui nous sera présentée prochainement par le Conseil d'Etat. Merci de votre attention.
M. Philippe Morel (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, j'abonde dans le sens des propos de mon préopinant, M. Marc Saudan: je ne voudrais pas qu'on ait l'impression qu'en Suisse et en particulier à Genève, on implante des prothèses sans exercer de suivi. Dans mon domaine, celui de la chirurgie abdominale, on pose souvent des filets, comme on les appelle, pour les éventrations, les hernies. Ce matériel est strictement répertorié à l'aide d'un numéro; la clinique ou l'hôpital ainsi que le chirurgien ont également un numéro de référence. Il y a donc un système de traçabilité extrêmement précis.
Je viens par ailleurs d'avoir la confirmation que pour ce qui est des prothèses mammaires, la conservation des informations est obligatoire à la fois pour le chirurgien, l'hôpital dans lequel l'intervention a lieu et le patient - ou la patiente, en l'occurrence -, qui reçoit un carnet sur lequel sont stipulés le numéro, le type et l'origine de l'implant. Il est clair qu'il y a un traçage, on n'introduit pas dans le corps des personnes du matériel étranger sans que l'on sache d'où il vient et sans que le patient lui-même ou la patiente elle-même ait la possibilité de connaître exactement le type de matériel dont il s'agit, de même que sa provenance.
Deux précautions valent peut-être mieux qu'une, mais sachez en tout cas qu'il existe déjà des registres médicaux, des registres dans les hôpitaux et même des registres tenus, comme cela a été indiqué, par les sociétés spécialisées en Suisse. Nous soutiendrons bien sûr cette proposition de motion. Je vous remercie.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Vertes et les Verts soutiendront le renvoi de la motion au Conseil d'Etat. Ce texte, qui demande la création d'un registre cantonal des implants, est fondamental dans un contexte de vieillissement de la population et d'augmentation de la pose d'implants. Nous trouvons que c'est une bonne idée s'agissant de la traçabilité, du suivi, de la coordination. Il s'agira de déterminer comment les choses vont s'articuler avec ce qui existe déjà au niveau suisse via Swissmedic et sur le plan européen grâce à la base de données EUDAMED. Nous soutenons la démarche consistant à renvoyer cet objet au Conseil d'Etat, lequel pourra se saisir de cette problématique cruciale de santé publique. Merci.
La présidente. Je vous remercie. La parole n'étant plus demandée, nous passons au vote.
Mise aux voix, la motion 2517 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 77 oui et 1 abstention (vote nominal).