Séance du
vendredi 1 septembre 2023 à
17h
3e
législature -
1re
année -
3e
session -
19e
séance
PL 13081-A
Premier débat
La présidente. Nous abordons le PL 13081-A, traité en catégorie II, trente minutes. Monsieur Martin, si vous demandez la parole, je vous la donne.
M. David Martin (Ve), rapporteur de majorité. Oui, merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, que nous propose le projet de loi qui figure à ce point de l'ordre du jour ? C'est très simple: il propose tout bonnement de supprimer la LMCE, la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée. Les signataires UDC et MCG de ce texte sont fâchés avec la LMCE - ça, on le savait...
Une voix. Avec son application !
M. David Martin. ...et ils s'offusquent du fait que cette loi n'a pas encore réussi à éliminer tous les bouchons en ville.
La LMCE a été adoptée en 2016 par 68% de la population et est issue d'un très large consensus politique. Elle a des qualités comme des défauts, et on a tous dû s'en contenter jusqu'à maintenant. Pourtant, les signataires du texte dont on parle ce soir n'en ont cure: ils nous disent que les gens n'étaient pas bien informés, qu'ils n'avaient pas bien compris le contenu de la LMCE.
Cette pauvre loi fait couler beaucoup d'encre et donne lieu à autant d'interprétations qu'il y a de politiciens à Genève. Il convient donc de rappeler certains de ses principes. Dans ses articles 6 et 7, la LMCE introduit la notion de zone et de priorisation des différents modes de transport. Elle instaure en particulier les zones I et II, dans lesquelles - c'est écrit dans la loi - «la priorité [...] est donnée à la mobilité douce et aux transports publics». Ces zones I et II s'étendent, grosso modo, sur une surface qui va du Grand-Saconnex à Chêne-Bougeries en passant par Onex et Plan-les-Ouates; en gros, c'est tout le centre-ville.
Quelles sont les dispositions prévues et inscrites dans la loi, celle qui a été votée par 68% de la population ? Limitation de la vitesse à 30 km/h; accès restreint aux autres modes de transport (c'est-à-dire ceux qui ne relèvent pas de la mobilité douce et des transports publics), autrement dit, accès restreint à la voiture - c'est écrit ainsi dans la loi; zones piétonnes favorisées - on n'en a pas encore vu beaucoup... Il est aussi prévu qu'on puisse enlever des places de stationnement pour atteindre les objectifs que je viens d'énoncer. L'article 3 introduit l'autre dispositif majeur de la LMCE, soit la fameuse moyenne ceinture, avec priorité aux voitures. Le tout dessine un ensemble qui a été jugé cohérent et qui, comme je l'ai dit, a été soutenu par 68% de la population.
Les signataires nous proposent donc de supprimer cette loi, mais que suggèrent-ils à la place ? Rien du tout, tout simplement ! Pour cette raison, une très large majorité de la commission vous invite à rejeter ce texte.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, il faut bien reconnaître que la LMCE pose problème et est sujette à de nombreuses interprétations. C'est une évidence. Avec ce qui se passe actuellement, par exemple la problématique du mauvais fonctionnement des feux de circulation qui péjore notamment la vitesse commerciale des TPG - on en a déjà abondamment parlé -, lorsqu'on voit qu'on a supprimé bon nombre d'ondes vertes utiles et qu'on crée des obstructions pour les entreprises, avec des temps de déplacement extrêmement longs, on constate qu'il convient tôt ou tard de trouver une solution à propos de cette LMCE.
Je peux tout à fait comprendre la position du rapporteur de majorité, à savoir que l'abrogation absolue de la LMCE pose problème, mais la politique de l'ancien magistrat était véritablement jugée anti-voiture, en raison de la suppression massive et non compensée de places de parking, par exemple en zone bleue, mais aussi de l'insuffisance du nombre de places de livraison, sans compter les autoroutes à vélos au centre-ville et les nombreuses chicanes qui empêchent de se parquer dans les quartiers. Et on ne parle même pas de tous les travaux actuels en ville ! Il devient quasi impossible de circuler. Pour toutes ces raisons, la minorité de la commission vous demande d'accepter l'entrée en matière sur le PL 13081. Je reprendrai la parole tout à l'heure, Madame la présidente.
M. Stéphane Florey (UDC). Si nous avons déposé ce projet de loi en début d'année, c'est simplement parce que - il faut bien le dire ici - l'application de la LMCE n'a rien réglé. Au contraire, la situation s'est fortement dégradée. Aux dires mêmes du conseiller d'Etat chargé de cette politique, la LMCE ressemble plus à une loi incohérente et déséquilibrée qu'à autre chose.
La population a certes accepté cette loi, mais c'est parce qu'elle devait faire un choix entre une initiative qui aurait été encore pire et un pseudo-contreprojet censé résoudre tous les problèmes de mobilité à Genève. Or, depuis son entrée en vigueur, ce n'est absolument pas le cas. La loi pose un certain nombre de problèmes qui ne sont toujours pas réglés actuellement, et d'autres solutions auraient peut-être été plus simples - on l'avait déjà dit, du reste on l'a répété à maintes reprises -, comme une meilleure régulation des feux au moyen du fameux crédit de 53 millions qu'on avait voté sous l'ère Barthassat. On voit qu'aujourd'hui encore ça ne fonctionne pas ! Rien que cette mesure aurait permis de régler un gros pourcentage de l'immobilité de notre canton. C'est pour ces raisons que nous restons persuadés qu'il faut agir.
J'avais même proposé en commission - mais la majorité des commissaires, tout comme le rapporteur de majorité et son parti, ont peur de tuer l'héritage de leur initiative et d'être désavoués - qu'on repose la question au peuple en appliquant le fameux article constitutionnel qui instaure un référendum obligatoire. On aurait pu simplement redonner la parole au peuple, parce que nous sommes convaincus que si aujourd'hui on lui posait la question, le résultat serait peut-être même inversé: ce serait plutôt 60% de non. Mais vous ne voulez pas, vous refusez donc de stopper une fois pour toutes la guerre des transports, alors qu'il est évident que si le peuple confirmait son vote de l'époque, ça mettrait fin à tous les débats, car s'il accepte deux fois la loi, c'est bel et bien qu'il veut la LMCE. Cela permettrait de conclure cette affaire, qui est loin d'être terminée. Je vous remercie.
Mme Fabienne Monbaron (PLR). Ce texte a pour but de supprimer la LMCE, la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée, qui a été approuvée par le peuple à 67,81% en 2016. Les auteurs estiment que cette dernière visait à régler la guerre des transports, mais que dans la réalité cela n'a pas été le cas, car sa lecture permet diverses interprétations, dont certains conseillers d'Etat ont à leur avis abusé.
S'il est exact que, lorsqu'il vote une loi, le peuple ne connaît pas les moyens qui vont être employés pour la mettre en oeuvre, et si nous nous étonnons des dispositifs déployés et de la façon dont ils ont été instaurés, nous doutons cependant qu'une abrogation pure et simple de cette loi sans autre proposition amène des solutions concrètes. Par ailleurs, différents recours ont été déposés suite aux décisions prises, or ceux-ci ne sont pas tranchés à ce jour et connaître leur issue nous intéresse.
En commission, notre groupe a proposé le gel de ce projet en attendant que le nouveau conseiller d'Etat chargé de cette politique puisse exprimer sa perception de la LMCE et indiquer les mesures qu'il souhaite mettre en oeuvre. Les auteurs de cet objet ont toutefois refusé cette proposition. Nous rejetterons donc ce projet de loi et vous invitons à en faire de même.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, pour commencer, je tiens à rappeler un certain nombre d'éléments. Premièrement, la LMCE est le fruit d'un très large compromis politique, qui ne rassemblait effectivement pas tous les groupes du Grand Conseil, mais une très grande partie d'entre eux. Dans le domaine des transports, c'est suffisamment rare pour être souligné ! Ce compromis a été soumis à votation et approuvé là aussi par une très large majorité de la population, à plus de 60%. Je fais aujourd'hui le constat que ce compromis sur la mobilité, qui a donné lieu à l'adoption de la LMCE, est passablement critiqué par l'ensemble même des bords politiques de ce Grand Conseil depuis son acceptation, et je me demande si ce n'est pas précisément là le signe qu'il s'agit d'un bon compromis, équilibré, comme l'évoque le titre de la loi.
Moi aussi, j'aurais évidemment un certain nombre de griefs à formuler à l'encontre de cette LMCE. Premièrement, la présence et la mention de la traversée du lac: c'est effectivement une couleuvre qu'on a dû avaler au moment de l'adoption de ce projet de loi, qui est devenu une loi. Ensuite, l'application de la moyenne ceinture: dans notre compréhension des choses, celle-ci devait être simplement une voie de circulation sur laquelle seraient redirigés des flux de transports individuels motorisés. Or, aujourd'hui, des projets visent à l'élargissement de cette voie de circulation, ce qui à notre sens va à l'encontre de l'intention initiale prévue dans la loi. (Brouhaha.)
La présidente. Excusez-moi, Madame Marti. Est-ce que je peux demander aux rapporteurs d'écouter les débats ? On pourra ainsi avancer. Merci.
Mme Caroline Marti. Merci beaucoup, Madame la présidente. La LMCE ne permettra pas de répondre aux ambitions du plan climat, à savoir une baisse de 40% des TIM. Comme toute loi, elle doit évidemment s'adapter aux nouvelles situations et évoluer avec son temps. Cela dit, la supprimer est tout à fait excessif: cela conduirait à rouvrir la guerre des transports, ce qui est particulièrement ironique le jour où le nouveau magistrat chargé des mobilités a convoqué des états généraux de la mobilité pour mettre autour de la table l'ensemble des acteurs de ce domaine. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons à rejeter purement, simplement et sèchement ce projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Souheil Sayegh (LC). Chers collègues, ce projet de loi s'inscrit dans la continuité des textes qui ont suivi la mise en oeuvre des mesures de mobilité introduites par notre magistrat Dal Busco. Je souhaite d'ailleurs rappeler l'importance de la démarche qu'il a initiée en citant les mesures de lutte contre le bruit, les pistes cyclables, la dénonciation des contrats dans certains parkings de la fondation du même nom, un abonnement attractif pour les quatre et deux-roues motorisés, et j'en passe.
Comme évoqué ce matin, il est temps de mettre fin à cette opposition entre les personnes pour et contre les mesures liées aux voitures, aux vélos, aux quatre-roues, à l'urgence climatique, aux 30 km/h, au plan climat, et j'en passe encore. Nous n'allons pas ici abroger une loi votée par le peuple; il n'en est pas question ! Nous préférons laisser au nouveau magistrat du département, qui nous a rejoints cet après-midi, le soin de revenir vers nous avec des propositions après les états généraux qu'il a entamés. Pour ne pas faire durer davantage le suspense, Le Centre vous recommande naturellement de rejeter ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Jacques Jeannerat (LJS). Je vais reprendre un peu les mêmes propos que ceux que j'ai tenus ce matin concernant les trois motions sur le 30 km/h. Je précise d'abord que nous n'avons pas participé au débat. Nous traitons là d'un dossier qui est effectivement chaud - Genève a mal à sa mobilité, c'est un diagnostic qui n'est pas compliqué à poser -, et comme deux de mes préopinants, je propose qu'on laisse le nouveau magistrat prendre les choses à bras-le-corps, non pas pour qu'il puisse avoir les mains libres, mais pour qu'on ait l'occasion de retravailler avec lui un certain nombre d'éléments en commission. Je serais donc assez favorable à un renvoi en commission de cet objet, tout comme du PL 13204-A que nous étudierons tout à l'heure.
La présidente. Je vous remercie. Le rapporteur de minorité souhaite-t-il s'exprimer sur cette demande ?
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Oui, merci, Madame la présidente. La minorité est favorable au renvoi pour permettre au nouveau magistrat de venir devant la commission afin de traiter ce problème. (Commentaires.)
M. David Martin (Ve), rapporteur de majorité. S'agissant de la proposition formulée par LJS, je m'excuse de m'interroger de cette manière, mais je me demande si M. Jeannerat - vous transmettrez, Madame la présidente - mesure les conséquences possibles d'un renvoi de ce texte en commission. En effet, cet objet pourrait tout d'un coup trouver une majorité, et on se retrouverait sans LMCE, sans règles de mobilité... Il faudrait reprendre à zéro toutes les discussions qui ont eu lieu dans le but de trouver des règles cohérentes et équilibrées pour mener la politique de la mobilité à Genève. De fait, ce texte suggère d'abroger la LMCE mais ne contient aucune nouvelle proposition ! Je pense que faire table rase n'est pas une bonne idée et je suis donc contre le renvoi en commission.
La présidente. Je vous remercie. Nous procédons au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13081 à la commission des transports est rejeté par 55 non contre 36 oui.
La présidente. Nous poursuivons le débat. Les rapporteurs doivent encore s'exprimer. Monsieur le rapporteur de minorité, il vous reste une minute quinze.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Mon préopinant, M. Stéphane Florey, l'a dit: ce Grand Conseil avait en effet voté il y a cinq ans, de mémoire, 53 millions pour le remplacement des feux. C'était extrêmement important et ça reste d'une actualité brûlante: on voit qu'on a toujours les mêmes problèmes malgré le vote de ce crédit - et d'autres avant lui - et qu'il existe un véritable souci de synchronisation des feux. Ça va vraiment être l'un des enjeux de la LMCE.
Il reste en outre toute la question relative aux 30 km/h. Nous en avons débattu tout à l'heure au travers des trois propositions de motions qui ont été acceptées; il s'agissait également de l'une des problématiques en lien avec la LMCE. Ensuite, il y a la question des pénétrantes et de tout ce qui va avec. On voit les problèmes de circulation qui y sont liés: si on prend l'exemple de la rue de Lausanne, quand le tram et les voitures derrière sont encolonnés, c'est bloqué jusqu'à la gare. D'ailleurs, demain la gare Cornavin sera piétonne. Bonjour la piétonnisation de la gare Cornavin ! Ça ne va vraiment pas être une sinécure de travailler en ville de Genève ! Il convient donc d'accepter l'entrée en matière sur ce projet de loi. Merci.
La présidente. Je vous remercie. La parole est au rapporteur de majorité pour quinze secondes. Ah non, pardon ! Vous êtes Vert, vous avez donc trois minutes. (Exclamations.)
M. David Martin (Ve), rapporteur de majorité. Je vous remercie de rappeler que je suis Vert, Madame la présidente ! Pour conclure ce débat absolument passionnant, j'aimerais dire au nom de la majorité qu'il est rassurant de voir qu'une stabilité dans le domaine de la mobilité est possible, basée sur le compromis de la LMCE; effectivement, certains aspects ne plaisent pas aux uns ou aux autres, mais c'est un compromis. Je voudrais également relever que les auteurs de ce texte n'apportent pas beaucoup d'arguments - vous m'excuserez, Monsieur le rapporteur de minorité - sur la proposition alternative; on ne parle finalement que des feux, comme si, en réalité, leur réglage était le nerf de la guerre, comme si la LMCE était la raison de la difficulté à régler des feux. Je ne vois pas vraiment le lien ! (Commentaires.) J'ai entendu M. Florey un peu plus tôt nous dire que si on n'avait pas eu la LMCE, on aurait enfin pu donner la priorité aux bus, or la LMCE prévoit bien de donner la priorité aux bus !
Une voix. Ce n'est pas le cas !
M. David Martin. On tourne donc un peu en rond et je suis rassuré de voir que nous n'allons pas entrer en matière sur ce texte, que je vous invite une fois de plus à rejeter.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, merci pour ce débat de qualité sur la LMCE. Je me réjouissais de pouvoir prendre la parole au sujet de cette loi importante, dont je vous dirai dans quelques instants - le propos qui était rapporté de commission n'était pas tout à fait exact - que je ne la trouve effectivement pas si équilibrée et si cohérente que ça, mais c'est le propre d'une loi votée en 2016 que de subir les outrages du temps et de connaître quelques altérations.
Premier élément de pure forme: je vous remercie de ne pas avoir renvoyé ce texte en commission, parce qu'il est trop radical d'un point de vue purement formel. Il s'agit évidemment de disposer dans l'ensemble du corpus législatif d'une loi de ce type, peu importe comment on l'appelle, qui règle un certain nombre de points, qui établit des zones - je crois que ce n'est pas contesté. C'est essentiel pour pouvoir travailler. De la même façon, un certain nombre de lois, comme la loi sur les routes ou la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière, sont importantes. En témoigne d'ailleurs - je m'adresse ici à certains groupes en particulier - le fait que c'est dans ces lois que vous trouvez l'ancrage nécessaire pour faire recours et contester une série de dispositions. L'abrogation pure et simple d'une loi n'est donc pas opportune dans ce domaine, d'autant plus que - vous l'avez mentionné - la loi a été votée par le peuple. Cela revêt une certaine importance, que je nuancerais toutefois un peu, en rappelant d'abord que du temps s'est écoulé, mais aussi - la préopinante socialiste l'a dit - que la vertu alors principale de cette loi était davantage son processus que son résultat: l'idée d'un compromis, l'idée de se mettre d'accord. Visiblement, certains n'ont pas compris la même chose que d'autres, et peut-être d'aucuns ont vu midi à leur porte, mais peu importe. A l'époque, le processus a marqué une forme de communion sur la vision des transports, et je crois pouvoir vous dire qu'aujourd'hui le Conseil d'Etat souhaite que nous entamions un processus similaire, non pas pour rédiger absolument une nouvelle LMCE, mais pour remettre les gens autour de la table.
Du reste, nous l'avons fait aujourd'hui avec les acteurs des mobilités au Pavillon Sicli. Vous aurez l'occasion - c'est là une partie de la réponse que vous donne le Conseil d'Etat - de sanctionner le résultat de ces discussions à la faveur d'éléments qui figurent dans la LMCE, puisque tous les cinq ans, sur cinq axes structurants de la mobilité (transport des marchandises, mobilité douce, transports en commun, etc.), nous vous soumettons des plans d'action, les fameux PATC, PAM, etc., que vous validez ou non. Nous, Conseil d'Etat, avons décidé de vous soumettre en début d'année prochaine de façon concomitante ces cinq plans d'action; ils vous permettront de dire si vous êtes d'accord ou non d'utiliser les doseurs et si la quotité des mesures prises vous convient ou non. Je vous rassure, vous ne serez pas dessaisis de ces compétences. Au contraire, vous pourrez pour la première fois vous prononcer sur ces éléments structurants à la commission des transports, j'imagine, comme ensuite en plénum. Voilà une raison de plus pour ne pas abroger cette loi.
Cela dit, je voulais préciser - et c'est l'occasion d'une déclaration un peu plus générale - que la LMCE n'a pas d'effets magiques. Comme toutes les lois, ce n'est pas une baguette ou une télécommande qui permettrait de faire observer à la circulation des mouvements que l'on souhaiterait absolument dans une direction ou dans l'autre. D'aucuns l'ont du reste dit sur ces bancs: c'est la façon d'appliquer la loi qui importe. Je ne vais toutefois pas me lancer dans l'exégèse de ce qui s'est fait ces dernières années. J'ai pris note de la confirmation du groupe du Centre, qui soutenait le bilan de son magistrat de l'époque. J'avais néanmoins cru comprendre, lors de quelques votes récents, que c'était plus nuancé, notamment sur les zones 30, à propos desquelles on vous sentait nettement plus critiques à la faveur du changement de législature, mais j'ai pris note de votre position. Evidemment, la loi en tant que telle n'a pas d'effets magiques, c'est la façon de l'appliquer qui est importante.
A propos des feux de circulation, je vous donne un exemple. J'ai demandé à mes services - nous communiquerons prochainement à ce sujet - de réévaluer en profondeur, dans une logique de fluidité plutôt que de vitesse, la possibilité de passer à des feux clignotants orange, sous réserve que la sécurité soit garantie, notamment en période nocturne, dans le but précisément d'améliorer la fluidité. La loi le permet, c'est une question d'équilibre à retrouver. De ce point de vue là, je pense - et je vous rejoins - qu'un déséquilibre s'est accru ces dernières années s'agissant des feux.
Une incohérence s'est aussi aggravée: dans les faits, Mesdames et Messieurs les députés, Madame la présidente, les besoins en mobilité ont augmenté, de même que le nombre de véhicules qui pénètrent sur le territoire depuis 2016. Vous le savez, c'est un fait qui n'est pas contesté: environ 100 000 places de parc sur domaine privé sont offertes par des employeurs à des employés, lesquelles génèrent un trafic pendulaire, essentiellement frontalier mais pas uniquement. Celui-ci a considérablement augmenté ces dernières années, amenant la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée à ses limites. Ce n'est toutefois pas avec une modification législative qu'on va résoudre le problème; c'est avec l'identification des doseurs et la prise en compte d'un certain nombre de mesures, concernant les feux mais pas seulement, que nous pourrons aller de l'avant et faire en sorte de produire si possible une offre qui précède la demande, car aujourd'hui c'est très largement la demande qui précède l'offre et qui finalement court-circuite toute une série d'efforts.
J'aimerais rappeler que cette loi n'a pas d'effets magiques et que son application est essentielle. L'exemple des feux clignotants, je vous l'ai donné. Je vous en cite un autre. Evidemment - et là je m'adresse au rapporteur de minorité -, la mesure consistant à fermer certaines artères par exemple au sud de la gare Cornavin, mesure qui procéderait d'une interprétation stricte de la LMCE, serait aberrante si le dispositif de la moyenne ceinture n'était pas renforcé. J'ai donc pris la décision de différer sine die la fermeture annoncée dans la presse en début d'année de l'artère au sud de la gare Cornavin pour étudier beaucoup plus en détail les incohérences actuelles - il faut le dire - de la moyenne ceinture. Par exemple, celle-ci s'arrête lorsqu'on arrive sur la route de Chêne. Où va alors le flot de voitures ? A Grange-Canal ? A la gare du CEVA ? De toute évidence pas, puisque l'accès est fermé. Est-ce dans le but de renvoyer les véhicules dans la ville ? Pas non plus, évidemment. Ces exemples montrent que la LMCE (que je trouve mal nommée - je persiste -, ou qui est devenue mal nommée avec le temps) va nécessiter d'abord un travail en profondeur quant à son application, puis sans doute un travail législatif pour que, tous ensemble, nous retrouvions les bons curseurs et fassions le bon dosage, avec - je le dis très clairement, parce que c'est la conception du Conseil d'Etat - une direction qui ne changera pas, à savoir celle d'une ville qui d'ici quelques années verra le trafic individuel motorisé diminuer substantiellement pour des raisons de pollution, de place et d'espace public. Cette orientation est clairement donnée, mais on doit pouvoir y arriver ensemble.
On a donc besoin de la LMCE, besoin d'équilibre et de cohérence, et de toute évidence il existe des marges d'amélioration, mais il est nécessaire que nous trouvions ensemble des modes d'application qui nous permettent de réguler le trafic. C'est la raison pour laquelle je vous invite à refuser ce projet de loi et à renvoyer en commission - car, pour le coup, c'est pertinent - le PL 13204-A, qui figure deux points plus loin dans l'ordre du jour, pour qu'on puisse en discuter; il trouve aussi son ancrage dans la LMCE. Je vous invite surtout à participer de façon constructive et positive, dans un horizon-temps prochain - en l'occurrence en janvier ou février -, aux débats sur les plans d'action relatifs à ces différents domaines d'activité, qui nous permettront ensuite, le cas échéant, de modifier la LMCE si on se rend compte que les instruments ne sont pas adéquats. Je vous remercie de votre attention.
La présidente. Je vous remercie. Nous allons passer au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13081 est rejeté en premier débat par 72 non contre 26 oui.