Séance du vendredi 12 mai 2023 à 14h
3e législature - 1re année - 1re session - 4e séance

RD 1508-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport chargée d'étudier le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil relatif à la lutte contre le décrochage scolaire : « Un jeune, un diplôme, un avenir »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 11 et 12 mai 2023.
Rapport de M. Youniss Mussa (S)

Débat

La présidente. Il s'agit maintenant du RD 1508-A. Je donne la parole à Mme la conseillère d'Etat Anne Emery-Torracinta.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je ne pouvais quand même pas résister au plaisir de prendre encore une ou deux fois la parole aujourd'hui. Je ne vais pas développer ce point, mais revenir sur ce que devrait être la suite de ce rapport.

Vous le savez, et je l'ai souligné hier soir encore, on peut se réjouir à Genève de toute une série de mesures qui ont été prises depuis une dizaine d'années. Je pense notamment à la formation obligatoire jusqu'à 18 ans et à la mise en place de CAP Formations pour les jeunes du canton de 18 à 25 ans sans aucune certification du secondaire II. CAP Formations a pour objectif de les réinsérer sur le marché, de la formation d'abord, puis du travail. Ces mesures ont permis d'augmenter le nombre de jeunes certifiés à Genève; non seulement le nombre absolu de jeunes certifiés, mais surtout en comparaison intercantonale. Je vous l'avais dit, Genève, qui se trouvait en dernière position des cantons suisses, a remonté la pente, si je puis dire.

J'aimerais cependant insister sur le fait qu'il faudra encore quelques années pour prendre véritablement la mesure de l'évolution de la situation et, surtout, pour évaluer ce qui a été mis en place. J'en veux pour preuve, par exemple, la formation obligatoire jusqu'à 18 ans, qui a été introduite à l'automne 2018. Les premiers jeunes qui ont pu en bénéficier - sachant qu'il y a en général une année de prise en charge avant de pouvoir éventuellement être inséré sur le marché du travail - sont probablement tout juste sortis d'une formation certifiante. Il faudra donc encore quelques années pour mesurer les effets.

On peut toutefois déjà relever un constat assez intéressant, à savoir que, sur la première volée qui a bénéficié de ces mesures et qui a donc pu être en partie réinsérée l'année suivante dans un système de formation, 10% des jeunes qui sont passés par une mesure de préqualification depuis FO18 ont obtenu une certification en 2022. En ce qui concerne la volée précédente, soit celle de 2017-2018, ils n'étaient que 5%. Par conséquent, il semble bien que les mesures mises en place portent leurs fruits, mais il faudra encore quelques années pour voir l'entier de leurs effets.

En revanche, j'ai quelques inquiétudes concernant ce que relève l'entier des observateurs, que ce soit dans les écoles - celles du secondaire II, mais aussi au cycle d'orientation et même à l'école primaire, en fin d'école primaire notamment -, dans les entreprises ou dans les milieux de la santé. Si vous avez lu les articles qu'on voit dans la presse ces derniers temps, il y a de quoi s'inquiéter par rapport à une jeunesse qui, depuis la période covid, montre des signes assez inquiétants de troubles psychiques, de phobie scolaire ou de difficultés, qui sont en augmentation.

C'est encore difficile à quantifier aujourd'hui, mais si des jeunes vont mal, cela aura forcément une incidence sur la réussite scolaire ou la réussite de la formation professionnelle. On sait que les jeunes vont moins bien aujourd'hui. Il y a eu la crise covid, mais il y a aussi la guerre en Ukraine et les questions climatiques. Une partie de la jeunesse a l'impression d'avoir un mur devant elle, d'être face à un avenir qui est certainement moins radieux, a priori, que ce qu'il a pu être pour d'autres générations, et je pense à la mienne en particulier.

Mesdames et Messieurs les députés, vous devrez par conséquent être attentifs à cette question de la santé psychique des jeunes, y compris des très jeunes, durant ces prochaines années. Il conviendra de voir comment adapter et faire évoluer les mesures qui ont été prises pour permettre la qualification et la formation de ces jeunes. On voit par exemple, en discutant avec les conseillers de CAP Formations - qui permet de réinsérer les jeunes et de les mettre en formation -, que les situations sont beaucoup plus complexes. Or si elles sont plus complexes, on a plus de peine à réinsérer les jeunes et à leur remettre le pied à l'étrier. Il sera donc plus difficile d'obtenir des qualifications.

Ce que je voulais vous dire, en conclusion, c'est que les moyens que vous avez accordés au département depuis une dizaine d'années sont payants. Ils sont efficaces, mais on doit être attentif à cette jeunesse qui n'évolue pas toujours bien, dans son contexte psychique et dans le contexte social général. Cela nécessitera peut-être de mettre des moyens, non pas directement dans la formation ou dans les outils de formation, mais aussi pour renforcer la santé psychique des jeunes, parce que finalement, c'est tout le système de formation qui pourrait être pénalisé. Voilà le message que je voulais faire passer aujourd'hui. Je vous remercie de votre attention.

La présidente. Je vous remercie.

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat RD 1508.