Séance du
vendredi 25 février 2022 à
18h
2e
législature -
4e
année -
8e
session -
48e
séance
PL 12475-B et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. Voici la prochaine urgence: les objets liés PL 12475-B et M 2522-B. (Brouhaha. Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Nous sommes en catégorie II, trente minutes. (Brouhaha. Le président marque à nouveau un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) J'ai l'impression d'être un enseignant en classe, quand les élèves sont sages seulement lorsqu'il tourne le dos au tableau noir ! La parole échoit à Mme Nicole Valiquer Grecuccio.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, la commission de l'enseignement, de l'éducation... (Brouhaha.)
Le président. Un instant, s'il vous plaît. Monsieur Florey, Monsieur Ivanov, la salle Nicolas-Bogueret est juste là ! (Remarque.) Oui, mais vous interrompez les débats, voilà le problème. Poursuivez, Madame Valiquer.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport, dans sa majorité, vous recommande d'accepter ce projet de loi. Vous savez que nous l'avons étudié par deux fois, puisqu'il avait été renvoyé en commission suite aux recommandations formulées par la Cour des comptes.
Au fond, l'affaire est assez simple. Il s'agit de répondre aux questions suivantes: les camps scolaires sont-ils obligatoires ou non ? S'ils le sont, la participation financière des parents est-elle engagée ou estime-t-on qu'il y a gratuité ? Eh bien comme ces sorties - c'est l'avis de la majorité de la commission - font partie intégrante de la formation, elles sont liées à l'enseignement et, de fait, doivent être rendues obligatoires.
Lorsque des nuitées sont comprises et que les familles ne peuvent pas payer, eh bien il faut trouver un mécanisme. En effet, les camps offrent aux enfants qui y prennent part un espace pour se développer et se confronter aux autres; pour beaucoup, ils constituent une expérience, leur donnent la possibilité de participer à des activités que le statut de leurs parents ne leur permettrait pas forcément, car les inégalités, rappelons-le, existent aussi dans le milieu scolaire.
Nous avons interrogé l'ACG quant à la participation obligatoire des communes; eh bien l'association ne connaissait pas le règlement de l'instruction publique et est plutôt en faveur de contributions ponctuelles. Aux yeux de la majorité de la commission, cet engagement financier ne peut pas être ponctuel ni varier en fonction des communes du moment que les sorties de classes font partie intégrante de la formation et que tout enfant y a droit.
C'est pourquoi, sur le volet des frais, les commissaires ont accepté un amendement stipulant que le coût additionnel est pris en charge par le canton et les communes. Bien sûr, la même réflexion a été menée en ce qui concerne la proposition de motion du groupe UDC, qui a également été adoptée avec cet amendement, ce qui semblait logique. Dès lors, la majorité de la commission vous invite à soutenir ce projet de loi, considérant que tous les enfants ont le droit de recevoir une formation de qualité et, partant, de participer aux excursions scolaires sans discrimination et sans avoir à solliciter de subventions. Je vous remercie.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, la première minorité estime que le projet de loi 12475, sur lequel l'entrée en matière avait initialement été refusée par la commission, est inutile et contre-productif, et ceci pour les raisons suivantes. Premièrement, les sorties sans nuitées sont obligatoires et déjà prises en charge financièrement. De plus, à l'école primaire, toutes les classes bénéficient d'un soutien des communes pour les camps avec nuitées, cela nous a été confirmé.
Seules les excursions au cycle d'orientation ne sont pas subventionnées et, selon les enseignants - je parle des syndicats représentant le corps enseignant -, des solutions sont toujours trouvées lorsqu'un problème d'ordre pécuniaire est identifié pour certains élèves. D'après le DIP, des aides existent déjà via les communes et la DGEO. Les frais supportés par les familles, lorsqu'il y en a, sont clairement fixés dans l'arrêt du Tribunal fédéral du 7 décembre 2017; il n'y a donc plus de questions à se poser à ce sujet. Les règlements ont été adaptés et nous suivons simplement les décisions de la justice.
Par ailleurs, les sorties de classes ne figurent pas dans le cahier des charges des enseignants; les rendre obligatoires va ouvrir la porte à d'importantes négociations potentiellement très complexes. Enfin, alors que nous trouvons des solutions pour tous les enfants et qu'aucun élève - c'est le retour des enseignants - ne participerait pas à un camp pour des raisons financières, on va se mettre à payer tout pour tout le monde, et c'est le DIP qui devra assumer ces coûts qui ont été estimés entre 7 et 9 millions par année.
Nous sommes ainsi face à un texte traitant un problème qui n'existe pas et nous allons créer de multiples autres écueils qu'il faudra résoudre. La première minorité vous demande de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi, qui avait initialement été rejetée par la commission, et vous remercie par avance de votre choix.
M. Souheil Sayegh (PDC), rapporteur de deuxième minorité. Chers collègues, la deuxième minorité abonde dans le sens de la première et s'interroge: pourquoi finalement interdire aux parents qui en ont les moyens de participer au financement des sorties et, à la place, faire porter ce coût à la collectivité ? Je parle ici des camps avec nuitées, ceux sans nuitées étant déjà pris en charge, étant «gratuits», entre guillemets. Je répète: pourquoi empêcher les familles qui peuvent se le permettre de payer et inscrire ces frais à la charge de la collectivité ? C'est la première question que je vous pose.
Nous reconnaissons l'importance des excursions avec nuitées pour la cohésion de groupe, pour la formation ou l'avenir des élèves, cet aspect n'est pas mis en doute. Cela étant, afin que nous puissions appréhender le taux d'absentéisme aux sorties de classe, des statistiques nous ont été fournies. Je vous les livre: sur un échantillon de huit établissements primaires, c'est-à-dire 30 000 élèves et 167 classes, 950 sorties étaient de type pédagogique et 368 étaient des courses d'école; on relève seulement 58 non-participations. Le sondage réalisé auprès des personnes n'ayant pas participé a mis en avant 25 raisons médicales et 22 motifs non renseignés, mais aucune justification d'ordre financier ou religieux.
Les auditions nous ont par ailleurs appris que les communes disposent de budgets pour ces situations et que ceux-ci sont rarement sollicités. Comme nous avons pu le comprendre en commission, c'est par pudeur ou peut-être par manque d'information que les foyers dans le besoin ne font pas appel à une aide à laquelle ils peuvent pourtant prétendre. Ce soutien devrait être proposé spontanément, de manière simple, sans que les familles qui en font la demande soient stigmatisées.
Voici le message de la deuxième minorité au corps enseignant: s'il vous plaît, rendez accessible l'information relative aux aides, votre hiérarchie sait si la commune dans laquelle vous travaillez accorde une subvention. Quant aux parents qui rencontrent des obstacles et qui nous écoutent, n'ayez pas peur de solliciter une contribution en cas de nécessité, des solutions existent pour vos enfants, il ne faut pas avoir honte, vous n'êtes pas les seuls dans cette situation. Enfin, aux communes: proposez spontanément cette allocation ou apportez de manière claire l'information quant à sa disponibilité; les familles qui en ont besoin ont probablement plus de difficultés que d'autres à l'obtenir ou à oser la requérir en raison de barrières diverses, qui vont de l'embarras à l'incompréhension linguistique, peut-être.
Considérant la gratuité déjà effective des excursions diurnes, l'absence de chiffres quant aux foyers ayant besoin d'un soutien financier pour les camps avec nuitées et donc au volume de l'aide nécessaire, la présence d'une subvention sur demande dans les communes, le fait que de nombreuses familles ont la capacité de payer ces sorties, nous vous invitons à faire confiance aux communes pour soutenir leur population avec les allocations à disposition et à ne pas engager les finances de l'Etat pour un montant à hauteur de 7 à 9 millions afin de répondre à ces deux objets. Je vous remercie.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci bien. La parole va maintenant à M. Pierre Vanek.
Une voix. Non !
M. Pierre Vanek (EAG). Merci, Monsieur le président...
Une voix. Je m'excuse, mais c'est Aude qui prend la parole pour notre groupe !
M. Pierre Vanek. Mais non !
Le président. Madame Nyffeler, je donne le micro dans l'ordre des demandes.
Une voix. Oui, mais malheureusement... (Commentaires.)
Le président. Cela ne regarde pas le Grand Conseil !
M. Pierre Vanek. Bon, merci.
Une voix. C'est une femme qui doit s'exprimer ! (Commentaires.)
M. Pierre Vanek. Mesdames et Messieurs, je...
Une autre voix. Il va aussi falloir demander la parole anonymement, désormais ! (Rires. Applaudissements.)
Le président. S'il vous plaît ! S'il vous plaît !
Une voix. On intervient sur des questions féministes et après, on pique la parole aux femmes !
Une autre voix. Exactement !
Une autre voix. Il y a du sexisme même chez les communistes !
Une autre voix. Bien sûr !
Le président. S'il vous plaît !
M. Pierre Vanek. Bien...
Une voix. Serait-il macho ?
Le président. Mesdames et Messieurs ! Comme vous le savez certainement, ce n'est pas au Bureau d'arbitrer les choix de prise de parole au sein des groupes.
Une voix. Ce n'est plus un groupe ! (Commentaires.)
Le président. J'ai passé la parole à M. Vanek, il va maintenant s'en saisir.
M. Pierre Vanek. Je la prendrai très brièvement, Monsieur le président. Cette interruption me surprend, mais enfin...
Mesdames et Messieurs, le député PLR s'est offusqué: «On va finir par payer tout pour tout le monde !» Eh bien oui, en matière de services publics, en matière d'école, on doit payer tout pour tout le monde ! Son comparse du PDC a indiqué... (Commentaires.) Son collègue du PDC s'est interrogé: pourquoi empêcher les parents qui ont les moyens de payer ?
Si on met le doigt dans cet engrenage, Mesdames et Messieurs, eh bien on en arrive à ce que l'école publique devienne payante ! Vous renoncez ici à des principes fondamentaux s'agissant du fonctionnement de notre république. En considérant que les sorties culturelles, sportives, les camps avec nuitées constituent une partie annexe... Ce n'est pas de la crème chantilly ajoutée sur le gâteau de l'enseignement, ils font partie intégrante de l'éducation et, à cet égard, il faut évidemment les prendre en charge et garantir leur gratuité dans le cadre de l'instruction publique, comme le propose ce projet de loi.
Vous prônez le fait que les parents ne doivent pas avoir honte - on vous a entendu, Monsieur Sayegh - de demander la charité. Dans le rapport, il est indiqué: «Un autre député PLR estime qu'on est en train de légiférer un problème qui n'existe pas. Ceux qui ont des difficultés financières peuvent s'adresser au DIP et aux services sociaux.» Eh bien non, Mesdames et Messieurs, il ne s'agit pas de charité, il s'agit d'offrir une prestation de service public à la hauteur d'exigences évidentes sur lesquelles nous sommes tous d'accord...
Une voix. Tu as pris tout le temps !
M. Pierre Vanek. Merci de ne pas m'interrompre ! ...et qui consistent à financer les camps. Par conséquent, nous soutiendrons ce texte qui émet une excellente idée. Merci.
Le président. Je vous remercie. Madame Xhevrie Osmani, c'est à vous pour deux minutes trente-huit.
Une voix. C'est pas vrai, ça !
Le président. Le groupe Ensemble à Gauche peut-il aller se disputer dans la salle des Pas-Perdus ? (Rires. Commentaires.) Laissez-nous poursuivre les travaux, s'il vous plaît.
Une voix. Résistez !
Le président. Allez-y, Madame Osmani.
Mme Xhevrie Osmani (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous gardons tous des souvenirs des activités scolaires de notre jeunesse. Parmi celles-ci, certains camps verts ou blancs nous marquent plus que d'autres. Pour moi, c'était le camp de ski: la première fois que je découvrais le Valais ainsi que ce sport. Je ne pense pas avoir été la seule, cela s'est vu sur le visage de plusieurs de mes camarades, heureux de voir autre chose que les paysages du Plateau, d'être plus proches de la montagne. Il faut dire que nous étions nombreux dans le groupe débutants.
Nul besoin de solliciter des experts pour apprécier le potentiel immense des excursions de classe dans la formation, l'intégration et la socialisation des enfants. Ces sorties permettent d'exercer des compétences ensemble et de se découvrir les uns les autres.
Le présent projet de loi garantit une égalité entre les élèves. L'égalité, c'est la dignité, Mesdames et Messieurs les députés. A l'école, les opportunités doivent être les mêmes pour tout le monde, qu'on soit issu de foyers aisés ou pauvres. Il existe des aides financières pour le logement, l'assurance-maladie, mais cela ne devrait pas être le cas pour faire participer son enfant à des activités. Je me rappelle que nous devions remplir et retourner rapidement à l'enseignant un talon-réponse avec la somme d'argent, et il y en avait toujours quelques-uns qu'il fallait relancer, qui tardaient à les rendre. On ne se demandait pas pourquoi, même si c'était évident, car au final, il est toujours possible de trouver un prétexte quand assumer le coût d'un camp n'est pas facile. (Commentaires.)
Une voix. Je t'ai vu !
Le président. S'il vous plaît ! C'est la dernière fois que je vous demande de ne pas interrompre la discussion. Poursuivez, Madame Osmani.
Mme Xhevrie Osmani. Alors imaginez des camps scolaires à la carte, qui sont fortement recommandés, mais pas obligatoires: certaines familles trouveront dans cette brèche le moyen de ne pas montrer leur incapacité à payer cette prestation à leur enfant et se déferont ainsi d'une honte. J'ai pris l'exemple du ski précisément parce que ce n'est pas un sport populaire et qu'il coûte cher. Environ un tiers des habitants, majoritairement ceux qui sont pourvus de revenus supérieurs, pratiquent cette activité, selon l'étude «Sport Suisse».
Il s'agit d'une pure coïncidence, mais il y a quinze jours, deux jeunes filles sont venues frapper à ma porte, et ce message accompagnait leur récolte de fonds: «Madame, Monsieur, malgré la générosité de notre commune et celle du service des loisirs de l'Etat de Genève, nous rencontrons quelques difficultés à financer notre camp d'hiver qui aura lieu à Crans-Montana. Afin de financer la réalisation de ce projet, nous organisons un orthographoton. Les enfants apprendront une liste de cent mots dont cinquante seront dictés en classe; chaque élève devra trouver des personnes pour sponsoriser les termes écrits correctement.»
Je voudrais dire ce soir à tous ces enfants et à leurs parents qu'ils n'auront plus à aller chercher de l'argent nulle part. Merci beaucoup pour votre écoute. (Applaudissements. Commentaires. Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.)
Une voix. Bon, on peut continuer ?
Le président. Je cède maintenant la parole à Mme Aude Martenot pour trente secondes. (Rire.)
Une voix. Lui laisser trente secondes...
Mme Aude Martenot (EAG), députée suppléante. Merci, Monsieur le président. Ensemble à Gauche soutiendra ce projet de loi pour la défense de l'égalité de traitement entre toutes et tous les élèves du canton, où qu'ils et elles habitent, pour la garantie du principe de gratuité dans l'enseignement obligatoire et finalement pour la défense de la justice sociale avant tout. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Madame la députée, et bravo pour votre concision. (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs, je rencontre certaines difficultés à faire respecter les interventions de personnes qui ont été élues démocratiquement par le peuple, c'est tout de même la raison pour laquelle nous sommes réunis ici. Je vous demande un peu de tenue, vous pourrez prendre l'apéro dans une heure ! Monsieur Patrick Saudan, c'est votre tour pour une minute trente.
M. Patrick Saudan (HP). Merci beaucoup, Monsieur le président. Je serai un peu moins politique, Mesdames et Messieurs, mais je dois vous avouer avoir une certaine sympathie pour ce projet de loi et je vais donc le soutenir. En effet, pour rebondir sur les propos de ma préopinante Mme Osmani, de mon côté, en tant que Valaiso-Genevois, j'ai redécouvert mon canton d'origine grâce aux camps de sport.
Forger le lien confédéral m'a toujours semblé très important, et c'est au jeune âge que cela se passe, quand on est enfant et qu'on explore d'autres cantons, qu'on découvre d'autres parties de la Suisse. Personne n'a remis en cause l'aspect pédagogique des excursions scolaires, mais j'insiste quant à moi sur le maintien du lien confédéral, c'est un aspect qui m'est très cher.
C'est la raison pour laquelle j'accepterai ce projet de loi. C'est vrai qu'il a un coût, et j'ai été sensible aux arguments avancés entre autres par le rapporteur de deuxième minorité, mais je pense que les communes, qui sont d'une certaine manière chargées de l'éducation civique de notre population, peuvent prendre ces frais en charge. Voilà pourquoi je voterai cet objet. Merci. (Applaudissements.)
Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, les sorties et camps scolaires permettent aux élèves de notre canton de développer leur personnalité, leur créativité ainsi que leurs aptitudes intellectuelles, physiques et artistiques. A cet égard, ils font partie intégrante des objectifs de l'école publique au sens de l'article 10 de la LIP. Quant à la constitution, elle vise l'égalité des chances dans la formation et garantit, en son article 24, un enseignement de base suffisant et gratuit. Dès lors que les excursions relèvent de l'instruction publique, elles sont obligatoires, et dès lors qu'elles sont obligatoires, seuls les frais alimentaires peuvent être portés à la charge des parents.
Plutôt que de se cantonner à un débat stérile quant au caractère obligatoire ou non de ces activités, les commissaires ont réussi à se mettre d'accord autour d'un compromis résultant d'un amendement du DIP selon lequel le coût additionnel est pris en charge par le canton et les communes. Cette solution s'appliquant au projet de loi aussi bien qu'à la proposition de motion, nous vous encourageons à soutenir ces deux textes tels qu'amendés en commission. Je vous remercie.
M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le débat avait déjà été... (Brouhaha.)
Le président. Un instant, s'il vous plaît. Monsieur Uehlinger, une salle est à votre disposition juste à côté.
Une voix. Mais je n'ai pas de natel pour communiquer !
Le président. C'est un grand problème. Continuez, Monsieur Ivanov.
M. Christo Ivanov. Nous allons nous cotiser pour lui offrir un natel, Monsieur le président ! Pour revenir au projet de loi et à la proposition de motion, grâce à l'arrêt du Tribunal fédéral de 2017, les choses sont maintenant claires. Les deux objets proposent que les sorties avec nuitées soient obligatoires et gratuites pour toutes et tous afin qu'il y ait une véritable égalité des chances.
Comme cela a été indiqué par ma préopinante Verte, le coût additionnel sera pris en charge à la fois par les communes et le canton. On parle d'un montant de l'ordre de 7 millions, mais il s'agit d'un maximum et les frais seront évidemment moindres. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, le groupe UDC vous invite à accepter tant le projet de loi que la proposition de motion. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Stéphane Florey pour deux minutes et sept secondes.
M. Stéphane Florey (UDC). Oui, merci, Monsieur le président. Je commencerai par dire que la minorité n'y est pas du tout. Ce n'est ni une question d'aide, comme ses représentants le supposent, ni une question de subvention; simplement, comme l'a évoqué mon collègue, un recours avait été déposé par une famille argovienne qui s'étonnait de devoir payer des sommes astronomiques pour des camps scolaires, et elle a gagné. C'est allé jusqu'au Tribunal fédéral qui s'est montré clair: les sorties font partie intégrante de l'école, il y a donc une obligation de les prendre en charge.
A l'époque, l'UDC a été le premier parti à réagir à la décision du département de rendre les excursions facultatives en déposant une proposition de motion. Tout ça pour une histoire de coût, lequel est dérisoire quand on voit les conneries qu'on vote à longueur d'année et qui nous coûtent la moitié d'un bras... (Exclamations.) Je suis désolé de le formuler comme ça, mais c'est vrai ! Ici, il s'agit d'une somme de 8 millions au maximum pour des enfants, voilà la réalité.
Finalement, cette famille a eu gain de cause et c'est la raison pour laquelle nous appelons à adopter tant le projet de loi, qui est venu s'ajouter à la proposition de motion, que la motion elle-même qui garde tout son sens. En effet, comme je le disais, on parle d'enfants, on parle du bien-être des élèves, de la cohésion qui s'opère quand ils participent à des activités scolaires; celles-ci font partie de la formation, elles revêtent une importance sociale et par conséquent, Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à accepter les deux textes. Je vous remercie.
Une voix. Bravo, Steph !
M. Jean-Marie Voumard (MCG). Mesdames et Messieurs, je vous rappelle qu'au MCG, nous nous étions abstenus suite au rapport PL 12475-A, car le texte soulevait pour nous plusieurs problèmes. Lors d'une séance de commission, j'avais demandé à Mme la conseillère d'Etat chargée du département si un amendement allait être déposé concernant les frais, ce qui a été fait, puis la modification a été acceptée. Le MCG est satisfait pour les familles genevoises et vous propose d'accepter ce projet de loi. Je vous remercie.
Une voix. Bravo, Jean-Marie !
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, pour le député Florey, je vais rappeler ce qui s'est passé sur le plan historique. Ce n'est pas en Argovie, Monsieur le député, mais en Thurgovie qu'une ministre UDC... (Exclamations. Commentaires.) Mais attendez, attendez !
Une voix. Ouh, l'erreur, ouh !
Une autre voix. Ce n'est pas Bâle-Ville ? (Commentaires.)
Mme Anne Emery-Torracinta. ...qu'une ministre UDC s'est fait retoquer par le Tribunal fédéral parce qu'elle avait inscrit deux éléments dans la loi qu'elle proposait, et c'est le premier qui était problématique. Il y avait la question des camps et sorties scolaires qui devenaient payants - ce n'était pas tellement le principal problème -, mais surtout - c'est là le réel souci qui avait motivé le dépôt d'un recours auprès du Tribunal fédéral -, il s'agissait de faire porter aux familles la charge des cours d'allemand pour les élèves non germanophones. C'est donc une ministre thurgovienne qui est à l'origine de cet arrêt du Tribunal fédéral, lequel a coûté pas mal d'argent aux cantons, du moins à ceux qui ne finançaient pas les excursions scolaires de manière systématique.
Sur le fond, Mesdames et Messieurs, vous avez raison: si les camps avec nuitées font partie intégrante de l'instruction publique, eh bien il est logique qu'ils soient gratuits, et c'est là que réside toute la difficulté, il s'agit de définir ce qui est obligatoire, ce qui est inclus dans les programmes et ce qui ne l'est pas. Alors j'entends avec une certaine satisfaction que 8 millions, ce n'est rien. Ecoutez, vous êtes en tout cas quinze ici à siéger à la commission des finances, donc je me réjouis d'entendre à nouveau mercredi prochain que 8 millions, ce n'est rien.
Cela étant, je me félicite de constater que vous êtes prêts à mettre plus d'argent pour la formation, pour l'éducation, et je souhaiterais que cela ne soit pas uniquement le cas pour les activités scolaires, mais également pour l'ensemble des cursus, que face aux besoins qui augmentent, face à la hausse du nombre d'élèves, le parti qui est à l'origine de la proposition de motion et qui, année après année, refuse les budgets du Conseil d'Etat, tout particulièrement ceux du DIP, se mette enfin à voter les crédits.
Mesdames et Messieurs les députés, je prends acte qu'a priori, une majorité va se dégager en faveur du projet de loi. Sachez simplement qu'il nous faudra quelques mois pour le mettre en oeuvre; il ne s'agit pas d'une mauvaise volonté du Conseil d'Etat, mais puisque vous avez adopté l'amendement prévoyant que le coût additionnel soit pris en charge par le canton et les communes, il va falloir négocier avec ces dernières pour élaborer une base réglementaire et déterminer ce qu'elles financeront exactement, sachant par ailleurs que dans tous les autres cantons suisses, les camps et sorties scolaires sont entièrement payés par les communes. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous passons au vote sur le projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 12475 est adopté en premier débat par 55 oui contre 35 non.
Le projet de loi 12475 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12475 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 57 oui contre 33 non (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. A présent, je mets aux voix la proposition de motion... (Remarque.) Ah oui, excusez-moi. Monsieur Nicollier, vous avez demandé la parole ?
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Est-ce que je peux prendre la parole sur la proposition de motion, Monsieur le président ?
Le président. Oui, allez-y.
M. Pierre Nicollier. Merci beaucoup. Je me suis exprimé sur le projet de loi, je souhaite encore dire quelques mots sur le second objet. Avant d'aller dans le détail, je tiens à souligner qu'il a dû y avoir une confusion tout à l'heure pour certains intervenants, parce que les montants qui peuvent être demandés aux familles sont fixés par le Tribunal fédéral, ils se situent entre 10 et 16 francs par jour lorsque l'élève est loin pour la nuit, soit par période de vingt-quatre heures. Dès lors, si des enfants font du porte-à-porte pour récolter de l'argent, cela ne réduira pas la participation des parents, cela permettra simplement à la classe de disposer d'une enveloppe globale plus importante pour des activités plus chères. Il fallait clarifier ce point, parce que je pense qu'il y avait des erreurs dans ce qui a été mentionné plus tôt.
Cela ne changera rien au fait que les enseignants recevront une certaine somme tandis que d'autres montants seront réclamés aux parents - ah non, c'est précisément la disposition qui a disparu -, mais au bout du compte, si les enfants veulent aller plus loin, ils devront organiser une vente de pâtisseries, faire du porte-à-porte ou trouver d'autres moyens de récolter de l'argent, comme c'est le cas aujourd'hui. Je le répète, cela ne changera rien.
En ce qui concerne la proposition de motion elle-même, eh bien une loi vient d'être adoptée, donc elle est complètement caduque. Le Conseil d'Etat a d'ailleurs indiqué lors des travaux de commission qu'il se contenterait d'une seule phrase si la loi était acceptée, à savoir que celle-ci répond à la motion. Vous pouvez lire le rapport, Mesdames et Messieurs, c'est indiqué dedans. Je vais tout de même vous expliquer invite par invite pourquoi il faut la refuser. (Protestations.) La première...
Des voix. Oh non !
M. Pierre Nicollier. Si ! La première...
Le président. S'il vous plaît, n'interrompez pas l'orateur !
M. Pierre Nicollier. La première invite est inutile: les cas difficiles sont toujours résolus... (Remarque.) Non, je ne vais pas demander cinquante renvois en commission, ne vous inquiétez pas ! (L'orateur rit.) Quant à la deuxième invite qui propose de modifier les directives pour instaurer une participation obligatoire... Si on les modifie, cela implique un financement conséquent - 7 à 9 millions, cela a été souligné. Enfin, la dernière invite qui demande de limiter la contribution des parents à des montants de 10 à 16 francs est absurde, puisqu'on vient de voter un projet de loi rendant les camps gratuits. Je vous invite par conséquent à rejeter cette proposition de motion. On va simplement engendrer du travail supplémentaire pour l'administration, ce qui est parfaitement contre-productif, donc je vous remercie par avance de refuser ce texte.
Une voix. Il a raison !
Le président. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs, vous êtes maintenant priés de vous prononcer sur la M 2522.
Mise aux voix, la motion 2522 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 53 oui contre 32 non (vote nominal).