Séance du
vendredi 12 novembre 2021 à
18h
2e
législature -
4e
année -
5e
session -
32e
séance
PL 12974-A
Suite du premier débat
Le président. Nous reprenons le débat entamé tout à l'heure. Je cède la parole au rapporteur de deuxième minorité, M. Christo Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la deuxième minorité de la commission de l'enseignement vous demande également de refuser ce projet de loi 12974. Oui, ce texte amène un nivellement par le bas. Dans le rapport, il est indiqué à plusieurs pages qu'il ne s'agit pas d'un nivellement par le bas. Pourtant, c'est le cas, comme cela a été relevé par mon préopinant, le rapporteur de première minorité.
Pour le groupe UDC Genève, le premier problème est que les enseignants n'auraient pas été intégrés à la réforme CO22, alors que les élus ont participé à un groupe d'accompagnement - non rémunéré, il faut le dire, comme ça on règle la question de l'aspect financier des choses, il faut être honnête - à neuf reprises, en présence de Mme la conseillère d'Etat, du SRED et de la DGEO. Je n'ai pas participé à ce groupe d'accompagnement pour des raisons personnelles et professionnelles, mais j'y reviendrai plus tard, Monsieur le président. Les milieux professionnels des filières de l'apprentissage et des métiers n'ont pas été consultés. J'aimerais répondre à Mme la magistrate - vous transmettrez, Monsieur le président - que l'UAPG fait partie de la commission paritaire et qu'elle ne peut par conséquent pas être auditionnée, et que les associations professionnelles n'ont pas non plus été auditionnées. Il y a donc un véritable problème de communication et de dialogue dans cette réforme.
Le projet de loi a été étudié entre mai et octobre 2021. Il a été voté le 15 septembre 2021. Le 13 octobre 2021, soit un mois après le vote, le DIP a présenté à la commission un complément d'information. Celui-ci nous indiquait un changement dans les branches qui seraient abordées en différenciation en 9e année. Le DIP a en effet réalisé que les objectifs du PER - le plan d'études romand - seraient plus facilement atteignables en classe hétérogène différenciée en mathématiques et en allemand, plutôt qu'en français - dix mois avant la rentrée scolaire !
Ce PL 12974 propose de modifier la loi sur l'instruction publique, la LIP - C 1 10, en réformant le secondaire I, avec, cela a été dit, la 9e année et la 10e année où les élèves seraient répartis indistinctement dans les classes, et une 11e année qui comprendrait deux voies: une voie maturité donnant accès à la maturité gymnasiale ou professionnelle, une voie certificat menant directement ou indirectement à un certificat, par exemple pour les apprentis. Cette réforme CO22 laisse une petite place à l'ECG et aux voies professionnelles comme voies de second choix. Il y aura une augmentation des coefficients académiques s'agissant des élèves qui se dirigent vers la voie collège, mais pas de renforcement dans les disciplines pouvant être perçues comme plus intéressantes pour un cursus professionnel ou dans la filière social/santé. Il faut s'inquiéter du message envoyé aux élèves; certaines personnes effectivement s'en inquiètent et je les comprends: de nombreux parents m'ont téléphoné pour me faire part de leur inquiétude quant à ce qu'il adviendra de l'orientation de leurs enfants - pour ceux qui sont aujourd'hui en 8P -, car tous ne pourront pas aller au collège.
Sur la question de la promotion, il faut évoquer la filière commerciale vouée à disparaître en 2023, soit une année après la mise en oeuvre du CO22. Il conviendrait d'être plus souple dans la loi, car la réalité pourrait changer. Il aurait été intéressant d'entrer dans une démarche de promotion de ces filières. Les difficultés rencontrées actuellement sont dues à un écart entre les plans d'études. Dans une même filière, tous les élèves n'ont pas les mêmes compétences fondamentales. Cinq établissements proposent actuellement la filière commerciale; cela concerne beaucoup d'élèves. Il est difficile de savoir si un jeune qui sort du cycle d'orientation a des compétences professionnelles techniques. Ces dernières se sont complexifiées, mais, il faut bien le reconnaître, le niveau scolaire général baisse. Il conviendrait de mettre en route un véritable plan d'actions pour les élèves dits en difficulté et/ou à besoins éducatifs particuliers, regroupant un grand nombre d'acteurs.
Au nom de la deuxième minorité, Monsieur le président, j'aimerais demander un renvoi en commission pour mener les auditions qui n'ont pas été menées, en l'occurrence celles des associations professionnelles et également des enseignants. C'est tout pour l'instant. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Il est pris note de cette demande. Est-ce que le rapporteur de première minorité souhaite la commenter ? Monsieur Nicollier, vous avez la parole.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, comme l'a mentionné le député Ivanov, alors qu'on nous dit qu'une consultation large a eu lieu, nous avons des retours de la part des classes, avec par exemple cette lettre signée par plus de deux cents enseignants du cycle d'orientation qui nous indiquent qu'ils ne connaissent pas les détails de l'application de cette réforme, ce qui est extrêmement ennuyeux, disons, pour le moins.
Il faut aussi se rendre compte qu'avec une réforme qui comporte tant d'incertitudes, on va envoyer toutes les personnes qui ont des moyens dans des écoles privées et cela va aller complètement à l'opposé de la volonté de mixité. On va accroître les différences, comme je l'ai mentionné, entre la rive gauche et la rive droite; on va accroître les différences en raison du fait que tous les jeunes des milieux aisés vont se retrouver dans des écoles privées. Pour cette raison, nous pensons qu'il faut absolument prendre le temps de réfléchir aux implications de cette réforme.
Nous avons besoin d'entendre l'UAPG. La commission paritaire a été entendue. Nous avons entendu les syndicats individuellement. Nous n'avons en revanche pas entendu l'UAPG ni les associations professionnelles. C'est donc un peu fort de café de soutenir que l'UAPG a été entendue... (Commentaires.) ...quand elle fait partie d'un groupe dans lequel il y a encore d'autres gens, alors que les syndicats, eux, ont été entendus individuellement. Pour cette raison, la première minorité vous demande d'accepter le renvoi en commission, pour permettre d'adopter une réforme que tout le monde comprenne et puisse appuyer, non pas une réforme qui amène des tensions et qui nous conduit au référendum. (Brouhaha.)
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Mesdames et Messieurs, merci de laisser les orateurs s'exprimer ! Le débat se passe bien. Madame la rapporteure de majorité, sur le renvoi en commission.
Mme Patricia Bidaux (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. J'ai déjà pris la parole à ce sujet. Je maintiens le refus du renvoi en commission. Je rappellerai par ailleurs à M. le député Nicollier - vous transmettrez, Monsieur le président - qu'il avait tout loisir de demander cette audition en commission, s'il y tenait particulièrement. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la rapporteure de majorité. Le Conseil d'Etat souhaite-t-il s'exprimer sur cette demande ? (Remarque.) Ce n'est pas le cas. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite donc à vous prononcer sur... (Remarque de M. Christo Ivanov.) Vous avez demandé le renvoi, Monsieur le rapporteur de deuxième minorité ! Vous n'avez pas à nouveau droit à la parole ! (Commentaires.) Nous votons donc sur...
Une voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous l'êtes. Ce vote sera donc nominal.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12974 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 58 non contre 34 oui et 1 abstention (vote nominal).
Le président. Madame la députée Katia Leonelli, vous avez la parole.
Mme Katia Leonelli (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, depuis plusieurs années désormais, nous entendons un constat partagé par une majorité de la population, qui est le suivant: le système de cycle actuel ne fonctionne pas et doit être changé. Actuellement, on observe un certain nombre de dysfonctionnements au sein du nCO, qui prétéritent majoritairement les élèves en difficulté ou en grande difficulté et qui renforcent les inégalités sociales. Aujourd'hui, seule une faible proportion des élèves de CT atteint le niveau d'attentes fondamentales, et ils souffrent globalement de la répartition des classes, qui leur donne le sentiment d'être nuls ou inutiles aux yeux de la société.
Ce constat accablant est la raison même d'exister du projet CO22. En tant que députés, certains d'entre nous sont engagés dans le processus de rédaction de ce projet de réforme depuis bientôt deux ans, par le biais du groupe d'accompagnement politique. Au sein de ce groupe, nous avons toujours été encouragés à remettre le projet en question, mais aussi à être force de proposition. Les perches tendues par le département ont été si nombreuses qu'il est désolant de se retrouver aujourd'hui dans une situation où le projet sur lequel nous devrons nous exprimer au terme de ce débat ne ferait pas l'unanimité.
Très concrètement, ce projet a pour but de mettre en place un système mixte, dans lequel les élèves sont dans des classes mixtes, mais font partie de groupes de niveaux intégrés selon les matières scolaires en 9e et en 10e. En 11e, les élèves sont divisés en deux sections: une section maturité et une section certificat. La section maturité vise principalement la préparation aux filières menant à la maturité gymnasiale ou professionnelle. La section certificat vise principalement la préparation aux filières menant directement ou indirectement aux certificats. Depuis cette section, l'accès aux maturités professionnelles post-CFC est bien sûr possible.
Dans l'ordre, en commençant par la 9e, les points forts d'une mixité intégrée sont les suivants: tout d'abord, une stabilité du groupe classe et de l'équipe pédagogique, une valorisation des élèves, une flexibilité d'orientation et de changement de niveau, un accès aux mêmes contenus pour tous les élèves et finalement une transition douce par rapport à la 8P. En ce sens, on peut regretter que la modification proposée par la SPG durant le processus de consultation n'ait pas été retenue. Il s'agissait d'une modification proposant que le premier trimestre de 9e soit complètement hétérogène, comme à l'école primaire. Selon le projet tel qu'il est rédigé, les élèves sont attribués à un niveau de maths et de français en 9e en fonction de leurs notes de primaire. Le problème de ce type de fonctionnement est de faire peser sur le primaire le poids de l'orientation, qui est normalement le rôle du cycle. Il s'agit d'une réalité qui stresse énormément les élèves arrivant en fin de cursus primaire. Le département nous a cependant informés qu'il n'avait pas retenu cette proposition, car reconnaître la différence de compétences entre des élèves qui peuvent finir avec des notes entre 3 et 6 au terme de la 8P lui semblait pertinent. Le département a néanmoins reconnu la difficulté pratique que pouvait représenter l'attribution d'un niveau à des élèves ayant obtenu des résultats entre 4,5 et 5. Cependant, la perspective de changement de niveau en milieu d'année possible et facile avec le CO22 nous semble rassurante. En effet, un ou une élève entrant dans un certain niveau en début de 9e et obtenant des résultats ne correspondant pas au niveau en question pourra facilement changer en cours d'année, puisqu'il ou elle aura suivi les mêmes cours que tous ses autres camarades de classe depuis le début de l'année.
La mixité représente beaucoup d'avantages mais aussi des défis. En principe, les enseignants et enseignantes sont formés et capables de pratiquer l'enseignement différencié. C'est une des compétences apprises au cours de la formation pédagogique, mais c'est aussi le pain quotidien de chaque enseignant et enseignante, puisque même dans un système de filières, une homogénéité parfaite n'existe pas. Cependant, alors que la rentrée 2022 approche à grands pas, on sent une forme d'appréhension monter dans le corps enseignant. Cette inquiétude est tout à fait légitime. Bien qu'ils soient capables d'enseigner de manière différenciée, la mixité intégrée présentera des challenges pédagogiques, qui nécessitent une importante préparation. Pour préparer correctement le corps enseignant, il sera donc nécessaire de voter des budgets adéquats, afin que les formations complémentaires puissent commencer dès le début de l'année 2022. Par ailleurs, une formation différenciée en mixité intégrée efficace ne sera possible que si les effectifs de classe sont limités. En ce sens également, nous espérons qu'une majorité de ce Grand Conseil sera au rendez-vous lorsqu'il s'agira de voter des postes nécessaires au bon fonctionnement de cette réforme. (Commentaires.)
Le système de sections en 11e est également l'objet de critiques, puisqu'il pourrait selon certains avoir les mêmes conséquences que le nCO à la sortie du cycle. Cette critique est également tout à fait légitime. Cependant, le problème n'est pas tant que deux sections d'orientation existent. Finalement, il faut bien se préparer au passage au secondaire II à un moment donné. Cette 11e devient comme une année préparatoire et permet une transition douce vers la suite. Si la mixité était gardée jusqu'à la fin du cycle, d'autres conditions d'entrée seraient probablement trouvées, telles que des concours ou une sélection basée sur les notes de 11e, ce qui dans les deux cas serait moins efficace et moins valorisant que le système proposé par la réforme. Le problème réside dans le fait que les formations non gymnasiales restent peu valorisées. Le projet de loi dit vouloir mettre sur un pied d'égalité maturité gymnasiale et professionnelle. Or c'est une chose de le dire et une autre de le faire. Pour l'heure, l'orientation professionnelle bénéficiera de deux heures en 10e et 11e pour aider les élèves dans leur choix. La motivation vers la maturité professionnelle pourrait donc se faire dans ce cadre-là. Cependant, des améliorations concrètes pour valoriser la formation professionnelle seraient souhaitables à l'avenir. Je tiens néanmoins à rendre tout le monde attentif au fait que le DIP n'est pas le seul à devoir valoriser la formation professionnelle: il est de notre responsabilité à toutes et tous de valoriser les voies professionnelles. Les deux heures d'IOSP n'ont pas grand-chose d'utile si une fois qu'on rentre à la maison, on subit des pressions de la part de ses parents pour suivre une voie gymnasiale.
Un autre aspect qui pourrait provoquer une pression contreproductive de la part des parents est, à notre sens, le parcours accéléré. Le projet CO22 propose aux élèves ayant de grandes facilités à l'école de suivre un parcours accéléré leur permettant de terminer le cycle en deux ans à la place de trois. Actuellement, les élèves qui sautent une année au cycle restent des cas isolés. La réforme prévoit 10 à 25 élèves par cycle qui suivraient ce parcours accéléré. L'objectif de cet aspect de la réforme est d'offrir un accompagnement aux élèves qui souhaitent sauter une classe. Selon nous, ce ne sont pas des élèves pour lesquels il est nécessaire d'engager des moyens supplémentaires. Par ailleurs, cet accompagnement se fera essentiellement dans les matières les plus importantes, et il va sans dire que les arts visuels, l'histoire et la géographie seront mis de côté au profit du français, des maths, de l'allemand et de l'anglais, afin qu'ils aient les acquis pour aller au collège. Nous avons envie de croire que le parcours standard proposé par la réforme est si bon qu'il pourra réussir à stimuler même ces très bons élèves. Nous craignons que le fait de rendre un parcours accéléré facilement accessible puisse contribuer à ajouter une pression sur les élèves qui se solde de plus en plus par un burn-out, même chez les 12-15 ans. Nous avons cependant entendu les raisons du DIP justifiant la mise en place de ce programme et l'accepterons avec l'amendement proposé par le PDC.
Pour l'heure, et malgré nos réserves quant au parcours accéléré et au manque de valorisation de la formation professionnelle, ainsi que nos craintes au sujet des effectifs de classe, le groupe des Verts votera en faveur de ce projet de loi de réforme du cycle d'orientation, en refusant tous les amendements proposés par le PLR. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Souheil Sayegh (PDC). Chers collègues, je ne m'attendais pas à parler aussi tôt ! On va sortir un peu des classes et entrer dans le monde animal. Dans le monde animal, pour obtenir une hiérarchie, il faut six individus. Vous placez cinq individus ensemble, et c'est la paix; ajoutez-en un sixième et vous avez un dominant et un dominé. Un individu se retrouve donc isolé. Multipliez ces groupes de six par trois, par exemple, et vous vous retrouvez avec trois groupes de six, donc dix-huit individus; sur ceux-ci, on aura trois dominants et trois dominés. Gardez un groupe de dix-huit ensemble, et vous vous retrouvez avec un dominant, un dominé et seize qui se retrouvent dans la moyenne.
Une voix. CQFD !
M. Souheil Sayegh. C'est facile ! Alors loin de moi l'idée de comparer nos enfants à des souris, mais j'ai entendu parfois nos enfants se faire appeler «mon petit chat» ou «mon lapin»; c'est ce qui m'a suggéré cette comparaison !
De nombreux projets ont été proposés et se sont affinés avec le temps. Or, aujourd'hui, on demande au CO22 d'être fonctionnel tout de suite, demain, et on ne lui laisse pas le temps de se mettre en place; c'est dommage. Imaginez une seconde qu'on ait fonctionné de la même manière avec le covid et le vaccin et qu'on ait dit: «Attendez, on va regarder ce qui se passe, réfléchissons encore, on ne sait pas ce qui va arriver, on laisse faire, on ne se lance pas.» Aujourd'hui, ce qu'on demande au CO22, c'est d'être efficace tout de suite, avec des enseignants qui soient efficaces d'emblée.
Il est attendu d'un enseignant qui possède deux masters universitaires de s'occuper d'une classe de dix-huit élèves. Or, on part du principe que cet enseignant va se retrouver avec une classe d'élèves présentant tous des difficultés, et surtout que ce corps enseignant ne va pas y arriver. C'est un peu le postulat qu'on fait. On leur dit: «Ecoutez, on va vous donner des classes de dix-huit. Mais ça va être tellement compliqué pour vous que vous n'allez pas y arriver !» Deux masters universitaires ! Nous, au PDC, nous faisons confiance à ces enseignants.
En 2020, 76% des élèves se retrouvaient en R3, 20% en R2 et seulement 4% en R1. Et ces 4% étaient baladés à travers le canton pour qu'on puisse former des classes qui soient un tant soit peu remplies. Ce qui fait que les enseignants, avec le CO22, vont se retrouver avec des classes composées ainsi: 0,7 élève de R1; 3,6 élèves de R2 et 13,7 élèves de R3. On ne va pas les couper, mais je vous fais le calcul. Ce sera comme ça: sur 18, trois quarts seront de niveau R3, 3,6 de R2 et 0,7 de R1. Est-ce que vous pensez sincèrement qu'il va falloir beaucoup d'heures de formation à des titulaires de deux masters universitaires - on parle de nos enseignants - pour encadrer quatre élèves - R1 et R2 compris - qui, compte tenu de l'esprit de cette réforme, pourraient même être aspirés vers le haut par leurs camarades de classe ? Encore une fois, nous, au PDC, nous ne le pensons pas. Nous faisons confiance à nos enseignants et nous pensons sincèrement qu'ils en sont capables.
Chaque année, on nous demande une augmentation de postes. Cette année, on ne va pas dire qu'on sera surpris par cette augmentation, puisque chaque année, elle revient. Elle paraît logique, puisque la population grandit; le nombre d'enfants grandit également. Donc, finalement, avoir un peu plus d'enseignants pour enseigner à un peu plus d'enfants, cela nous paraît assez logique, à nous, au PDC. On nous a dit que cette augmentation serait progressive et qu'on nous rendra quelques postes en 2025; comme l'a indiqué la rapporteuse de majorité, nous y serons attentifs.
Pour toutes ces raisons, nous allons laisser la chance à ces élèves de passer du nCO au CO22. Nous allons laisser la chance à nos enseignants, en lesquels nous avons toute confiance, d'enseigner à ces élèves. Le PDC - le Centre - vous recommande de voter ce projet de loi. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la députée Joëlle Fiss.
Mme Joëlle Fiss (PLR). Merci beaucoup, Monsieur le président. Je cède la parole à un membre PLR de la commission de l'enseignement. J'interviendrai plus tard.
Le président. Il en est pris bonne note. Monsieur le député Youniss Mussa, c'est à vous.
Présidence de M. Jean-Luc Forni, premier vice-président
M. Youniss Mussa (S). Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, je m'adresse à mes collègues du PLR: très honnêtement, j'ai honte du comportement que vous avez eu aujourd'hui ! (Protestations.) Vous êtes dans l'obstruction et le sabotage ! Ce qui est drôle avec vous, Mesdames et Messieurs du PLR... (Remarque.) ...c'est que, quand vous êtes minoritaires, vous êtes encore plus décevants que quand vous êtes majoritaires !
Une voix. Bravo !
M. Youniss Mussa. Aujourd'hui, vous n'avez aucun respect, ni pour cette enceinte ni pour nos concitoyens ! (Commentaires.)
Le président. Monsieur le député, s'il vous plaît ! (Applaudissements sur les bancs du PLR et de l'UDC. Huées.) S'il vous plaît !
M. Youniss Mussa. Pour en venir enfin au fond... (Les applaudissements se poursuivent. L'orateur parle fort en raison du brouhaha.) ...quelle fierté de défendre une réforme d'une telle importance pour le cycle d'orientation ! (Les applaudissements se poursuivent. Brouhaha. Le président agite la cloche.) Une réforme...
Le président. Monsieur le député, s'il vous plaît ! Vous intervenez sur le projet de loi !
M. Youniss Mussa. ...fondamentale... (Les applaudissements se poursuivent. L'orateur continue de parler fort en raison du brouhaha.) ...qui permet d'adapter enfin l'enseignement en tenant compte des faiblesses du régime actuel. Les effets... (Applaudissements continus. Huées. L'orateur s'interrompt.) Monsieur le président ! J'aimerais bien pouvoir m'exprimer ! C'est de l'obstruction !
Le président. Monsieur le député, je vous demande d'intervenir sur le projet de loi CO22, s'il vous plaît. (Commentaires.)
M. Youniss Mussa. Si je n'avais pas été interrompu par mes collègues du PLR... (Commentaires.)
Le président. Monsieur le député, sur le projet de loi, merci !
M. Youniss Mussa. ...ils auraient pu entendre que je m'exprimais bien sur le fond !
Le président. Et un peu de calme, s'il vous plaît, dans l'assemblée ! On vous écoute, Monsieur le député. Sur le projet de loi CO22.
M. Youniss Mussa. Très bien, j'espère que mon temps de parole n'a pas été compté. (Commentaires.) Pour en venir au fond, quelle fierté de défendre une réforme d'une telle importance pour le cycle d'orientation ! Une réforme fondamentale, qui permet d'adapter enfin l'enseignement en prenant en compte les faiblesses du régime actuel. Les effets du nCO sur les compétences scolaires sont problématiques. Il ressort d'une analyse des tests d'attentes fondamentales que si la grande majorité des élèves maîtrisent celles-ci, à savoir qu'ils disposent des compétences de base fixées au niveau intercantonal, il existe de très fortes disparités entre les sections.
Terminée, l'école qui marginalise certaines et certains élèves, qui les trie à l'âge de 11 ans en les séparant par des murs. Il y aurait soi-disant les génies, ceux pour qui toutes les opportunités sont possibles, et celles et ceux qui se voient et sont vus comme des nuls, des racailles, de futurs chômeurs, des incapables. Voilà concrètement ce que l'on peut entendre dans les couloirs d'un cycle. (Commentaires.)
Une voix. Chut !
M. Youniss Mussa. Il est plus que temps de réformer l'école du XXe siècle, qui catégorise et qui est basée sur la distinction. Vive la mixité, qui permet à tous les élèves de faire corps commun, de partager les facilités des uns avec les difficultés des autres ! Imaginez-vous la perte de confiance en soi, quand on est catégorisé d'une telle façon. Il est regrettable que, quand on est par exemple bon en maths mais moins bon en français, alors qu'on a seulement 11, 12 ou 13 ans, on baisse les bras et préfère se livrer à ce que l'on attend de nous: être turbulent et, entre guillemets, «mauvais à l'école». J'ai l'intime conviction que cette expression ne veut rien dire. Aucun des enfants de ce canton ne doit penser qu'il n'a rien à apporter à notre société ni qu'il n'a aucune compétence, parce que, oui, chacune et chacun doit avoir une place. Nous ne voulons plus de stigmatisations, c'est pourquoi, avec fierté et honneur, nous voterons ce projet de loi qui rompt avec la logique des filières qui a montré ses limites.
Le projet CO22 s'appuie sur une diversité d'opinions et d'expertises, afin de proposer une organisation et des dispositifs pouvant répondre au mieux aux objectifs globaux suivants: améliorer les compétences de tous les élèves, en particulier celles des plus fragiles; améliorer l'orientation des élèves en fin d'école obligatoire, en particulier vers la filière professionnelle duale; répondre aux besoins de tous les élèves, qu'ils aient des difficultés ou de la facilité.
A ceux qui diront qu'il s'agit de bêtement prolonger l'école primaire et que cette réforme est mauvaise, j'aimerais répondre que cette réforme va justement permettre une meilleure transition entre l'école primaire, qui ne distingue pas les élèves selon leur niveau, et l'enseignement secondaire II, qui est constitué de plusieurs filières distinctes. Cette réforme met en place une mixité intelligente et proportionnée, car de la 9e à la 11e, la mixité s'adaptera aux réalités.
A ceux qui me diront que les moins bons élèves vont tirer tout le monde vers le bas, je réponds clairement que non, c'est l'inverse qui se produira. Aucun enfant n'est bon partout et cette réforme permettra de prendre en compte tous les élèves: il y a celui qui est bon dans une branche et qui aurait des difficultés dans une autre. Vous me direz: une école à la carte ? Oui. Pour subvenir aux besoins de notre future matière grise, il faut que le cadre scolaire devienne plus flexible et plus individualisé. Je vous renvoie au travail d'Oliver Dlabac, chercheur au centre pour la démocratie d'Aarau, qui explique de manière détaillée que la mixité n'a pas d'impact sur les performances des élèves avec la plus grande facilité.
Cette réforme, c'est aussi la prise en compte des élèves ayant une grande facilité, car oui, ces élèves existent aussi. Ils auront la possibilité de bénéficier d'aménagements pour un parcours accéléré en deux ans. Cette réforme a pour volonté de faire du cycle d'orientation genevois une institution mieux à même de tenir compte des compétences hétérogènes de ses élèves. Elle s'adresse donc à tous les élèves. Alors oui, faisons le choix d'une école qui ne laisse de côté aucun des enfants de ce canton.
Toutes les dernières études le montrent - je vous renvoie à l'article du journal «Le Temps» paru il y a peu -, le constat est clair: la mixité combat notamment les inégalités de classes, parce que la composition des écoles reflète les inégalités sociales et ethniques de nos quartiers. Et la pandémie actuelle creuse un peu plus les inégalités !
Une école de qualité, oui, ça coûte, mais c'est de l'investissement, notamment en faveur des entreprises qui engageront de futurs apprentis, employés, pleinement formés. (Remarque.) Malheureusement, le PLR ne saisit pas l'importance d'avoir une école de qualité, notamment en lien avec l'attractivité économique, thème qu'il rabâche à chaque séance !
Pour conclure, comme je l'ai dit, nous devons garantir à chaque adolescent une place digne dans notre société, lui garantir la connaissance des fondamentaux. C'est lui ouvrir les portes d'un avenir fait d'opportunités et non de stigmatisation. Je vous remercie.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Xavier Magnin pour sept minutes cinquante et une.
M. Xavier Magnin (PDC), député suppléant. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette session a ressemblé par moments à certaines classes de R1. (Commentaires.) Et c'est là une bonne preuve qu'un groupe peut perturber une assemblée entière... (Commentaires.) ...ce que permettra d'éviter ce projet de loi.
Le besoin impératif et urgent est de changer. Le constat est clair et admis. Nous ne pouvons pas rester dans l'apprentissage de la perturbation que connaissent certaines classes dans certains regroupements. (Commentaires.) Les regroupements du nCO sont un échec, aussi en raison du fait que 76% des élèves atteignent le niveau R3; les autres - 24% - atteignent les niveaux R1 et R2. Finalement, cette analyse est gaussienne. La stigmatisation n'a jamais donné de fruits très digestes ni goûteux. Il faut absolument changer cela. C'est aussi s'adapter aux changements sociétaux profonds, qui sont nombreux, contre lesquels il faut lutter ou auxquels il faut apporter des solutions: réseaux sociaux, fake news, téléréalité, influenceurs, éducation par les pairs du même niveau et donc horizontale. On connaît la puissance d'un groupe, ses dynamiques positives ou négatives; on peut changer cela.
Les enseignants sont rompus à la pédagogie différenciée. C'est ce qu'ils font tous les jours, et c'est même le sens de la pédagogie. Gérer un groupe en réglant les niveaux nécessaires à chacun est normal et quotidien. L'évaluation n'est pas une source d'inquiétude. Les moyens existent pour réussir et différencier, aussi dans la même épreuve. Le véritable gain, c'est d'envisager le calme en classe, où tout peut être assuré de façon correcte, pour le bien des élèves. Des élèves qui écoutent et qui suivent, si l'environnement scolaire le permet, et c'est presque gagné. Cela correspond aussi aux objectifs du DIP. Je cite: «L'école publique a pour mission fondamentale de donner aux élèves le moyen d'acquérir les meilleures connaissances et compétences en vue de leur vie future.» Elle a des missions: former les élèves à être des citoyens, les former pour leur permettre de développer un esprit critique et de s'insérer socialement et professionnellement; les former pour leur permettre d'acquérir de la confiance et des compétences, dont des «soft skills» - ces fameuses «soft skills» qui sont prioritairement du ressort des parents, mais qui sont également validées et perçues à l'école.
La responsabilité des directions sera importante. C'est répartir les élèves correctement en classe, notamment en fonction des comportements, afin que cette minorité puisse être tirée vers le haut par une majorité. Les ressources supplémentaires ne devraient normalement pas être nécessaires si cette répartition est bien faite, avec moins d'administration, car moins de perturbations, plus de travail en classe et une meilleure progression. La réorientation promotionnelle est déjà en place et nécessite déjà ces évaluations différenciées, puisque près de 30% des élèves en profitent. C'est inscrit dans le rapport de septembre 2019. Si cela ne devait pas être le cas, si on avait besoin de 100 ou 200 enseignants supplémentaires, comme je l'ai entendu, ce serait une faillite générale de notre système d'enseignement et la démonstration que cela nécessitera une refonte totale de notre instruction publique. Le but est de remettre au travail les élèves, une vertu qui se perd. La Suisse et Genève ne peuvent pas se le permettre; c'est notre qualité, notre savoir-faire, c'est notre matière première. Voici la possibilité par ce projet de loi de mettre en pratique l'intelligence collective d'une classe au bénéfice d'une autonomie individuelle. La réforme est nécessaire; sans elle, on va dans le mur. Nous perdons des jeunes, c'est intolérable et les chiffres sont alarmants: entrée en apprentissage à 18,5 ans; 69% des jeunes sans formation entre 18 et 25 ans à l'aide sociale; 4% seulement de passages du CO en apprentissage - j'en appelle aussi aux patrons !
Une voix. On les écoute pas ! On nous écoute pas... (Remarque.)
M. Xavier Magnin. C'est ce qui est dit dans le rapport, en conclusion, page 54: les élèves en R1 «sont "coincés" entre les filières professionnelles en école pour lesquelles ils ne remplissent pas les conditions d'accès et des apprentissages pour lesquels ils n'arrivent pas à se faire engager». Ils sont alors majoritairement orientés vers des structures de transition, et ce tant avant qu'après la réforme. Concernant les débouchés après le CO, la réforme n'a pas apporté de changement notable; on peut espérer que celle-ci en amène. Il s'agit donc d'assurer une égalité des chances - c'est possible. Je parle ici d'un changement urgent, pour éviter les dispositifs préqualifiants ou préprofessionnels ou de transition, en consacrant plus de temps à l'orientation, en réduisant le temps d'étude pour ceux qui le peuvent et en cherchant à monter le niveau. Si on veut s'occuper en priorité des élèves et notamment de ceux en difficulté, la modification de loi est nécessaire, le but étant encore et toujours de faire progresser chaque élève. Le groupe démocrate-chrétien recommande un vote positif sur ce projet de loi. Merci de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la députée Nicole Valiquer Grecuccio pour cinq minutes.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Merci, Monsieur le président. Au nom du groupe socialiste, j'aimerais intervenir plutôt sur la méthode qui a été employée jusqu'à maintenant. Nous avions compris que nous toutes et nous tous ici, élues et élus, étions là pour faire avancer des projets pour le bien commun. Or, qu'avons-nous entendu aujourd'hui ? Il y a eu un travail collaboratif - je pense que la rapporteure de majorité l'a très bien expliqué -, et pourtant, aucune proposition, ou en tout cas aucune contestation du représentant PLR, M. Nicollier, dans ce groupe. On se serait attendu à des propositions. En commission: aucune proposition, ni d'auditions ni d'amendements. Le seul amendement déposé consistait à supprimer l'article 69, qui revenait tout simplement à supprimer ce qui était en train de se mettre en place pour le CO22. J'ai écouté attentivement le rapporteur de minorité, M. Nicollier. C'était une opposition tout à fait déclaratoire: on relève tout ce que les autres font faux, tout ce qu'on aurait dû faire, mais on ne formule aucune proposition concrète. (Commentaires.)
Je relève encore que la commission de l'enseignement compte quatre députés PLR, qui devraient être source de propositions constructives, car c'est notre rôle de députées et de députés, qui malgré nos différences devons faire avancer les projets communs. Or, rien, aucune proposition fondée sur une expertise - à moins que l'expertise ne soit celle de l'obstruction. Au terme de ce petit moment que nous avons vécu tout à l'heure, pour moi et pour le groupe socialiste, c'est une forme de colère que nous ressentons, mais aussi une grande tristesse devant le spectacle pitoyable que nous avons donné aux jeunes, pour lesquels on essaie effectivement de trouver des solutions; à la population, qui affronte de véritables problèmes aujourd'hui avec la pandémie, et qui attend des solutions, qui attend un parlement constructif et qui travaille, non pas un parlement qui gaspille les deniers publics en faisant - n'est-ce pas ! - du tapage comme on a entendu tout à l'heure, et qui a été en plus dénigrant envers notre collègue, dont nous nous séparions.
Le groupe socialiste appelle donc vraiment à voter très clairement ce projet de loi et invite le PLR non pas à déposer trente amendements... (Remarque.) ...qu'il n'a jamais déposés en commission et qu'il dépose aujourd'hui en plénière, mais à les retirer. S'il a des propositions à faire, qu'il les formule à l'occasion de ce fameux référendum qu'il brandit comme une menace ! Et effectivement, on donnera la preuve une fois de plus qu'on ne règle pas les problèmes au parlement, dont on peut se demander aujourd'hui quelle est l'utilité quand on assiste à un tel comportement. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
M. André Pfeffer (UDC). Les grandes lignes de cette réforme doivent être rappelées. Ici, il est question de supprimer les sections du cycle, soit les regroupements 1, 2 et 3. En lieu et place de ces sections, il est prévu: premièrement, une mixité intégrée en 9e année, ce qui veut dire que la majorité des cours sont destinés à la plupart des élèves de la classe et que, pour certains d'entre eux, il y aurait des cours à niveaux intégrés, ce qui créerait une répartition de la classe selon leur niveau; deuxièmement, un niveau varié en 10e année, ce qui signifie davantage de cours avec niveaux, c'est-à-dire pour des élèves avec des niveaux différents, et l'introduction d'options à choix; troisièmement, une répartition en deux catégories en 11e année: soit la voie maturité, soit la voie certificat; quatrièmement, pour finir, une voie accélérée pour les meilleurs élèves, qui pourront effectuer le cycle en deux ans.
Maintenant, les problèmes de cette réforme sont nombreux. Premièrement, les locaux et les enseignants nécessaires pour une formation à la carte n'existent pas. Les nombreuses options ainsi que la répartition des élèves en divers groupes pour les cours à niveaux intégrés nécessitent des salles de cours, des enseignants, des places, etc. Deuxièmement, la base de toute réforme doit être une évaluation de ce qui ne fonctionne pas, des raisons et objectifs de ce que l'on veut améliorer, etc. Là, il n'y a rien de convaincant. La dernière réforme du cycle date d'il y a dix ans; de plus, il y avait déjà eu trois autres réformes les années précédentes. Changer pour changer est une manie genevoise, mais une catastrophe pour nos enfants ! Troisièmement, existe-t-il un modèle similaire à celui proposé par cette réforme dans un autre canton ou un autre pays ? Aucune idée ! Pas de réponse claire ! Ni éventuellement une quelconque évaluation crédible d'une telle réforme dans une autre région. Une fois de plus, Genève joue avec nos enfants !
Genève est doté d'un système scolaire plus cher que ceux des autres cantons et obtient des résultats plus mauvais. Dans les collèges, soit après le cycle, Genève offre à ses élèves près d'une centaine d'options différentes. A Zurich, les collèges n'en offrent que sept. Encore une fois, le système genevois est plus cher, avec, hélas, de plus mauvais résultats. Cette réforme complexifierait la formation dans les cycles. Les élèves d'une classe partiraient d'une manière dispersée, chacun dans son coin, pour suivre des cours à niveaux intégrés ou une formation à options, à la carte. Est-ce qu'un tel dispersement améliorera la formation ? On peut se poser cette question. Encore une fois, la formation à Genève est mauvaise, connaît des résultats plus bas qu'ailleurs et des coûts, évidemment, beaucoup plus élevés. Pour toute réforme, le minimum est de savoir où on veut aller et surtout pour quelles raisons. Là, nous savons que le coût sera supérieur, que nos élèves seront baladés de salle en salle, de cours en cours, et il est peu probable que l'enseignement s'améliore.
Pour toutes ces raisons, le groupe UDC vous demande encore une fois un retour de ce projet de loi en commission. Merci de votre attention.
Présidence de M. Diego Esteban, président
Le président. Merci, Monsieur le député. Il en est pris bonne note. Monsieur le rapporteur de seconde minorité, vous avez la parole sur le renvoi en commission.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. En effet, pour répondre à un de mes préopinants, à la sortie du cycle d'orientation, 4% des élèves vont en apprentissage. Les milieux associatifs et professionnels, dont les efforts sont adéquats, proposent des formations complètes, duales, des apprentissages et des places de stage. Oui, c'est très insuffisant. Pour prendre un exemple, dans la filière étanchéité-ferblanterie, il n'y a que douze inscrits en première année. Dans le domaine des transports, il y aura bientôt pénurie de chauffeurs - on l'a vu d'ailleurs en Grande-Bretagne et dans d'autres pays. Il conviendra de recruter et de former en Suisse pour ne pas tomber dans la pénurie, comme cela a été le cas avec les chauffeurs mécaniciens au sein des CFF. Vous vous souvenez que beaucoup de trains avaient été annulés l'an dernier et en début de cette année. De même, cela avait péjoré le réseau du Léman Express. (Commentaires.)
Vous l'aurez compris, à Genève, comme en France, malheureusement, il n'y a pas de culture de l'apprentissage - je rappelle que nous avons fait partie quand même pendant quinze ans du département du Léman... (Protestations.)
Le président. Sur le renvoi en commission, s'il vous plaît !
M. Christo Ivanov. ...et ici, les seuls qui sont considérés sont ceux avec une réussite scolaire... (Remarque.) ...et qui suivent une maturité et non un apprentissage.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur...
M. Christo Ivanov. Pour toutes ces raisons, Monsieur le président, je redemande l'audition de l'UAPG, des enseignants et des milieux professionnels, en l'occurrence du bâtiment, pour qu'on mène un véritable dialogue et qu'on puisse offrir de véritables perspectives à nos jeunes. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci. Monsieur le rapporteur de première minorité Pierre Nicollier, sur le renvoi en commission.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons des propositions. Celles-ci ont été présentées il y a quinze jours dans un document qui a été largement communiqué. Il y a des propositions pour améliorer le système. Il s'agit de permettre que des élèves évoluent hors du plan d'études romand lorsqu'ils sont de toute façon dans des groupes qui n'atteignent pas les objectifs, alors que vous souhaitez seulement faire perdurer l'échec de ces élèves en les gardant dans la même pédagogie et en les mélangeant avec des élèves qui, eux, réussissent. (Commentaires.) Nous souhaitons développer un projet pédagogique qui corresponde à ce dont ils ont besoin pour sortir de l'échec dans lequel ils se trouvent depuis huit ans. Nous souhaitons travailler sur l'amélioration de l'orientation. Nous souhaitons mener une réflexion sur le PER... (L'orateur est interpellé.) ...une réflexion plus large.
Une voix. Sur le renvoi ! (Commentaires.)
M. Pierre Nicollier. Oui, absolument, c'est pour vous expliquer notre position ! Nous devons donc réfléchir au PER, aux MER - moyens d'enseignement romands. (Commentaires.)
Le président. Merci.
M. Pierre Nicollier. Nous devons définir des plans d'actions...
Une voix. Sur le renvoi !
M. Pierre Nicollier. ...pour renforcer l'identité des groupes et des individus, pour recréer cette flamme, cette étincelle dont ces enfants ont besoin pour réussir et devenir autonomes dans la société ! (Brouhaha.) C'est ce qui est nécessaire ! Nous avons besoin de réfléchir aux établissements et à la manière dont ils fonctionnent ! Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à approuver le renvoi en commission. (Un instant s'écoule.)
Une voix. Continue !
M. Pierre Nicollier. Alors...
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole va maintenant à la rapporteure de majorité, si elle souhaite s'exprimer sur le renvoi en commission.
Mme Patricia Bidaux (PDC), rapporteuse de majorité. Non, merci, Monsieur le président. Tout est dit, tout est redit et re-redit. Je ne rajouterai rien.
Le président. Très bien. Madame la conseillère d'Etat, sur le renvoi en commission ?
Mme Anne Emery-Torracinta. Pas maintenant, non.
Le président. Pas maintenant, très bien.
Une voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Nous passons donc au vote nominal.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12974 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 62 non contre 35 oui (vote nominal).
Le président. La parole va maintenant à Mme la députée Francine de Planta.
Mme Francine de Planta (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, «l'école [...] est le lieu du savoir et de l'esprit critique». Cette citation d'Elisabeth Badinter sonne comme une évidence. Et pourtant ! Réformer notre système scolaire est un engagement fort, qui mérite réflexion, discussion et analyse. La réforme que l'on nous présente aujourd'hui et qui est un véritable bouleversement n'est clairement pas aboutie et il serait irresponsable de l'adopter à marche forcée. Les craintes exposées par le PLR sont fondées. Elles ont été exprimées dans le rapport de minorité, car nous pensons que cette réforme n'apportera pas les effets escomptés, tant elle est théorique. Ce n'est pas en modifiant les normes que l'on va atteindre l'objectif voulu.
Alors quel objectif, me demanderez-vous ? Celui d'une école de qualité, qui corresponde aux exigences de la société actuelle et qui propose une place à chacune et chacun. Quelle est la tendance ? Un hebdomadaire titrait cette semaine que la maturité était trop facile et qu'on songeait à durcir les conditions d'obtention du fameux sésame. La Confédération, les cantons et les milieux économiques se penchent donc sur une réforme qui semble aller dans ce sens. Alors quelle préparation idéale pour la tranche d'âge du secondaire I ? Le taux d'échec important en première année du collège démontre clairement que la voie académique n'est pas la seule à suivre, que l'orientation doit aussi porter sur d'autres filières et qu'il est nécessaire de revaloriser l'apprentissage et le certificat de culture générale préprofessionnel. Les élèves doivent suivre au cycle d'orientation un cursus qui permette d'acquérir les compétences de base, transversales et interdisciplinaires.
Alors, me demanderez-vous, est-ce que la mixité intégrée est le bon chemin pour y parvenir ? Le PLR n'y croit pas. Les hautes écoles se plaignent d'une baisse de niveau et demandent de soigner en amont l'orientation des élèves. Affirmer que les bons s'en sortent toujours mérite, Mesdames et Messieurs, un complément: leur menu doit être copieux et équilibré, sinon leurs facultés ne se développeront plus. Le sens de l'effort n'est pas inné. Le socioconstructivisme, qui souligne l'importance des interactions sociales, est un label de pédagogie indispensable. Il ne doit toutefois pas se vivre à sens unique. Inutile de dire et de rappeler que cette réforme nécessiterait une nouvelle formation pour l'ensemble des enseignants et des enseignantes, qui devraient apprendre le nouveau métier d'individualisation de l'enseignement, de différenciation pédagogique et d'évaluation afférente, au sein d'un même groupe, car on ne pourra certainement pas se contenter de deux barèmes distincts. (Commentaires.) Comment imaginer que cela puisse être effectué d'ici la rentrée 2022, soit dans moins de neuf mois ? La formation, Mesdames et Messieurs, est un enjeu majeur de la société. Nous devons prendre davantage de temps pour concevoir les changements nécessaires au cycle d'orientation, qui, je le rappelle, a pour mission d'orienter nos jeunes au moment charnière de l'adolescence. Refusons une réforme idéologique qui se ferait au détriment des élèves et du corps enseignant ! Le PLR vous demande un renvoi en commission. Je vous remercie.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Monsieur le rapporteur de deuxième minorité Christo Ivanov, sur le renvoi en commission.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. La deuxième minorité bien évidemment soutiendra ce renvoi en commission. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il n'y a pas de volonté politique affichée de la part du DIP de renforcer les filières professionnelles et l'apprentissage ou la formation duale.
Une voix. Ça n'a rien à voir !
M. Christo Ivanov. Trois établissements avaient tenté une réforme du nouveau cycle d'orientation à l'époque: Budé, Coudriers et Bois-Caran avaient testé la 9e hétérogène pendant de nombreuses années. Or, lors de l'introduction du nouveau cycle d'orientation - projet porté par le DIP -, ces projets pilotes ont tous été abandonnés. Dix ans plus tard, le DIP revient et souhaite généraliser la pratique. Les classes hétérogènes ont été systématiquement recalées. Pourquoi le DIP revient-il avec un projet du passé et désire-t-il implémenter de manière générale des projets pilotes interrompus ? Pourquoi souhaite-t-il revenir sur la décision de la population ? Je vous rappelle qu'il y avait eu à l'époque un vote sur une initiative ou un référendum socialiste, qui avait été... (Remarque.) ...qui avait été refusé par le peuple en 2001. Je me permets de vous le rappeler. Pour être cohérents, nous devrions au moins avoir le courage de poser la question à la population, et l'UDC le fera en lançant, quoi qu'il arrive, un référendum avec le PLR. (Exclamations.) Pour toutes ces raisons, le groupe UDC vous demande le renvoi en commission.
Le président. M. le rapporteur de première minorité ne souhaite pas s'exprimer sur le renvoi... Si ? Ah, voilà, la demande de parole apparaît. C'est à vous.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Excusez-moi, j'avais oublié d'appuyer sur le bouton. Je m'améliorerai pour les prochaines demandes de renvoi en commission - si par le plus grand des hasards d'autres renvois étaient demandés ! Je soutiens ce renvoi en commission, parce que nous n'avons pas parlé des élèves en R2. Nous n'avons pas parlé de ces élèves qui sont souvent reconnus comme fragiles en primaire et qui présentent certaines difficultés; ces élèves qui, en arrivant au cycle d'orientation, sont enfin reconnus dans leur rythme. Pour la première fois de leur vie scolaire, ils ne courent plus derrière le train, comme ils l'ont fait en primaire, en présentant des résultats suffisants, mais souvent jugés médiocres, comparés à ceux du reste de la classe. Que vont devenir ces élèves-là, noyés dans une filière mixte, quand la majorité des élèves avance plus vite et de manière plus performante dans les disciplines ? Vont-ils se sentir mieux ? Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, la recherche, au niveau international, nous montre que cela est négatif pour leur confiance en eux. Pour cette raison, nous acceptons ce renvoi en commission et refuserons ce projet de loi. Chaque individu aujourd'hui doit être reconnu dans ses différences, ses spécificités, ses intérêts et ses besoins. Il est négatif de mettre tout le monde ensemble, cela ne valorise pas l'individu et cela ne permet pas non plus un accompagnement adapté aux besoins de chacun. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Madame la rapporteure de majorité ? (Remarque.) Non. Le Conseil d'Etat ?
Mme Anne Emery-Torracinta. Pas pour l'instant.
Le président. Non plus. Je lance donc le vote sur cette demande de renvoi en commission.
Des voix. Vote nominal ! (Commentaires.)
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12974 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 55 non contre 31 oui.
Le président. Je cède maintenant la parole à M. le député Jean Romain. (Brouhaha.)
M. Jean Romain (PLR). Merci, Monsieur le président. Je ne vais pas du tout revenir sur ce qui a été dit... (Brouhaha. L'orateur s'interrompt.) S'il vous plaît ! (Rires.)
Une voix. Comme le président n'arrive pas à faire la discipline, il faut la faire soi-même ! (Commentaires.)
M. Jean Romain. Je ne vais pas revenir sur ce qui a été dit au sujet de l'impréparation de cette réforme; on va un tout petit peu trop vite. J'aimerais juste prendre un exemple, un seul exemple dont je n'ai jamais entendu parler, à propos duquel je n'ai jamais entendu aucune réflexion au sein de la commission. Ce qui est... (Remarque. Rires.) Je n'y siège plus, à cette commission ! Ce qui est intéressant, c'est que le rôle de transmission des connaissances n'appartient pas seulement à l'école; il y a une dynamique qui est propre à la classe, et tout professeur le sait: apprendre, c'est aussi apprendre ensemble. Il y a le groupe classe, la force du groupe classe, et on sait très bien que la proposition qui consiste à dire que moins il y a d'élèves, plus grande est l'efficacité, n'est pas toujours pertinente. Si vous descendez en dessous d'un certain seuil, l'efficacité est moins grande et, si on raisonne à l'absurde, avec un enseignant pour un élève n'ayant plus de classe, il n'y a plus du tout la force du groupe.
Lorsque nous serons en hétérogénéité ou en mixité intégrée, il y aura au minimum trois groupes différents. Ces trois groupes différents devront travailler ensemble et le professeur aura, pour faire simple, sept élèves d'un côté, six et cinq de l'autre, mais il faudra apprendre à travailler et à ne pas perdre la dynamique du groupe classe. Certains, dans un groupe, ne devront rien faire, c'est-à-dire qu'au fond, ils devront suivre ce que l'enseignant dira pendant qu'un autre groupe travaillera de manière autonome. Et il s'agit de périodes de quarante-cinq minutes. Or en quarante-cinq minutes, vous ne pouvez pas récupérer par le temps long - par le temps un petit peu plus long - ce que le groupe classe vous donne dès lors que vous le découpez en trois. Il faut plus de temps ! Peut-être faudrait-il idéalement, pendant une matinée, travailler avec des groupes, alors que les autres doivent travailler individuellement. Eh bien, ni les enseignants ni les élèves ne sont habitués à ce type de travail. Si nous voulons donner à chacun la chance qu'il mérite, il faut d'abord qu'il n'y ait pas trop d'enseignants différents ! Il ne faut pas qu'ils aient 130 ou 180 élèves par année - ce n'est pas le cas en primaire. L'enseignant en primaire peut le faire dès lors qu'il est pratiquement tout seul. Les rythmes différents ne se déploient pas sur des périodes de quarante-cinq minutes, et il manque à cette réforme non seulement le temps, celui de la réflexion, mais aussi la prise en compte de cette donnée fondamentale qu'est, tout simplement, le fait qu'apprendre ensemble est une force du groupe. Et plus nous divisons le groupe, plus le temps sera court, moins cette force pourra se déployer. Raison pour laquelle, évidemment, je vais demander le renvoi en commission. (Exclamations.)
Une voix. Bravo !
Le président. Monsieur Ivanov, sur le renvoi.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Renvoi que je soutiens, bien évidemment ! Attendez, j'enlève mon masque, parce que ce sera mieux ainsi. Merci. Comme indiqué précédemment, les enseignants vont devoir modifier leurs gestes métier. Le DIP indique que le CO22 est une sorte de mélange entre un modèle d'intégration individualisé et un modèle d'intégration avec des regroupements souples. Cela implique de lier la réforme avec des aspects pédagogiques, un changement de la profession enseignante. Il indique également qu'en contexte mixte, le défi consiste à proposer des activités d'enseignement-apprentissage qui tiennent compte des besoins, des aptitudes et des caractéristiques des élèves, de manière à garantir la participation sociale et l'apprentissage optimal de tous. A ces fins, certains dispositifs internalisés au sein de la classe peuvent être mis en place afin de faciliter des apprentissages différenciés, comme des plans de travail, des groupes de besoins, des apprentissages coopératifs ou encore un système de tutorat.
Pensons-nous que les enseignants soient en mesure de transformer leurs gestes métier dès la rentrée 2022, soit d'identifier pour chaque jeune son niveau de connaissances et sa vitesse d'apprentissage, et d'adapter pour chacun d'entre eux un enseignement différencié, suivi d'évaluations également différenciées, et même expressément différentes ? Seront-ils en mesure de gérer l'hétérogénéité au profit de la mixité, comme l'appelle cette réforme ? En matière de gestion de classe, comment feront-ils face à cette mixité et aux dynamiques que celle-ci va engendrer ? Les élèves fragiles, en difficulté scolaire et souvent sociale, pour lesquels cette réforme est proposée, bénéficieront-ils du soutien pédagogique et affectif dont ils ont besoin ? Pour rappel, l'institution n'offre actuellement qu'un seul outil de différenciation: la salle de différenciation pédagogique, la salle de retenue.
Pour toutes ces raisons, la deuxième minorité vous demande d'accepter le renvoi en commission. Monsieur le président, j'ai dit ! Merci.
Le président. Merci, comme d'habitude, pour votre concision. Monsieur le rapporteur de première minorité Pierre Nicollier, c'est à vous.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, merci beaucoup. Pour vous expliquer notre position concernant ce renvoi en commission, je souhaite vous faire part d'une tribune très intéressante de Mme Marie-Claude Sawerschel, qui était secrétaire générale du DIP et qui indique: «On ne nous dit pas de quoi [cette réforme] sera faite ni comment elle réussira à déjouer le piège diabolique du carcan horaire, parce qu'elle est encore à mettre sur pied. Je crois pour ma part une certaine mixité formidable pour les élèves, comme pour chacun d'entre nous. Mixité de genres, mixité de cultures, mixité intergénérationnelle. On n'apprend jamais mieux et plus qu'avec ceux qui sont différents. Mais je crois que celle que vise CO22 occasionnera des résultats décevants tout en soumettant les enseignants à des acrobaties épuisantes. Comment se déroulera l'évaluation dans ces classes intégrées ? Il faut y réfléchir encore, les travaux sont encore en cours, mais il est clair qu'"on ne pourra pas se contenter de deux barèmes distincts". Les travaux sur ces questions essentielles sont fort avancés comme on le voit.» C'est ironique ! «La hâte est mauvaise conseillère. Elle est particulièrement inquiétante dans un registre éducatif qui concerne des milliers d'élèves. Pourquoi tant de précipitation ? Est-il capital pour un conseiller d'Etat en charge du DIP de planter son drapeau sur l'île du CO avant son départ ? La formation des maîtres, la différenciation pédagogique et l'évaluation afférente ne sont pas des détails pratiques faciles à résoudre une fois le principe posé. C'est même par là qu'il s'agirait de commencer avant de poser la structure organisationnelle.»
Nous soutenons donc le renvoi en commission.
Une voix. Parfait !
Le président. Madame la rapporteure de majorité, Madame la conseillère d'Etat ? (Commentaires.) C'est moi qui dirige la procédure, si jamais ! (Remarque.) Chaque chose en son temps ! (Commentaires.) Madame la conseillère d'Etat, à vous la parole.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'habitude veut que le conseiller ou la conseillère d'Etat chargée d'une politique publique s'exprime à la fin du premier débat. Compte tenu de ce qui est en train de se passer, il me semble nécessaire que je situe un peu les choses et que je clarifie un certain nombre d'éléments, parce qu'apparemment, il y a encore beaucoup de confusion.
Quand on engage une réforme scolaire - je rejoindrai le député Pfeffer sur ce point, et c'est le seul -, on doit procéder à une évaluation du système en place. Le nCO, accepté en votation populaire en 2009, est entré en vigueur en 2011. Nous l'avons évalué. Que demandait le nCO ? Je vous donne quelques exemples: une école plus exigeante pour tous, mais pas plus sélective; une orientation renforcée continue, particulièrement promotionnelle; une volonté de lutter contre les inégalités sociales; des débouchés clairement définis; une valorisation de la formation professionnelle; et - c'est peut-être le seul point sur lequel, oui, il y a une réussite du nCO - une structure unique et lisible.
Or, le nCO, Mesdames et Messieurs les députés, n'a pas répondu aux attentes. Quelques exemples: on parle d'une école que l'on ne voulait pas plus sélective, qu'on voulait promotionnelle. Eh bien, en 2011, en fin de 9e année, on comptait 311 orientations promotionnelles, donc des élèves, par exemple, de R1, qui passaient au niveau R2, c'est-à-dire en LC l'année suivante. Combien étaient-ils en 2019, quand nous avons réalisé l'étude ? Plus que 139 ! En 2011, il y avait 208 orientations sélectives - celles qui vont vers un niveau moins exigeant; en 2019, nous en avions 514. Un autre chiffre inquiétant: prenons l'exemple des élèves qui aujourd'hui sont en 11e. Ceux-ci sont, depuis la rentrée scolaire dernière, 66,1% en LS et 11% en CT. Ces mêmes élèves de 11e, comment étaient-ils répartis il y a deux ans quand ils sont entrés au cycle d'orientation ? Ils étaient plus de 70% en R3 et seulement 6,5% en R1. Qu'est-ce que cela signifie ? Que le système a échoué à être promotionnel: au contraire, il dégouline, si j'ose dire ! Les élèves vont toujours vers des sections moins exigeantes.
Le nCO voulait des élèves qui disposent de bonnes connaissances, notamment les élèves les plus faibles. Que constate-t-on ? Que les élèves de 11e CT sont effectivement très peu nombreux à atteindre les compétences fondamentales: 2,4% à un moment donné. Mais quand on regarde de plus près, qu'observe-t-on ? Que certains de ces élèves obtiennent de meilleurs résultats, par exemple en mathématiques, en français ou en allemand - là où on établit des comparaisons - que certains autres élèves de LS; c'est là qu'un système de mixité prendra tout son sens.
Mesdames et Messieurs les députés, quand vous n'êtes que 4%, 5% ou 6% d'élèves entrant au cycle dans un regroupement comme le R1, quelle image avez-vous de vous-même ? Comment peut-on être enclin à travailler, à croire au système scolaire, à croire que l'école vous donne une chance, quand tous vos copains, toutes vos copines partent en R2 ou en R3 et que vous n'êtes plus que cinq ou six dans un cycle - c'est le cas parfois - à aller en R1 ? Par ailleurs, que se passe-t-il dans ces cas-là ? On déplace les élèves, parce que nous n'avons pas les moyens, Mesdames et Messieurs les députés, d'avoir des classes de cinq élèves. Imaginez l'élève qui non seulement va en R1, mais qui en plus se retrouve sans ses copains ? Comment croyez-vous qu'il va se comporter ? Croyez-vous qu'il ait envie de travailler ? C'est une des raisons de l'échec dans ces classes. (Commentaires.)
Que nous dit la recherche ? Nous avons travaillé avec tous les partenaires, mais nous nous sommes aussi appuyés sur la recherche. L'expérience des autres cantons nous montre que la mixité ou l'hétérogénéité, c'est selon, est favorable aux élèves. Je vais vous lire un tout petit texte, qui n'émane pas d'un groupuscule gauchiste, mais de l'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économiques en Europe. Elle nous dit ceci - et elle le dit régulièrement dans différents rapports, je vous en cite un extrait: «La sélection précoce a un impact négatif sur les élèves assignés aux filières de second ordre et aggrave les inégalités, sans pour autant améliorer la performance moyenne. Cette pratique devrait donc être reportée au deuxième cycle de l'enseignement secondaire en privilégiant auparavant les cursus d'enseignement général.» Avec le CO22, nous sommes même plus modestes, puisque la sélection se fera au cycle d'orientation, avec déjà deux voies pour la 11e année. Je vous dirai aussi que c'est la tendance internationale, ainsi que celle des autres cantons. Savez-vous que le cycle d'orientation dans les cantons du Jura, du Valais - le Valais dont on cite souvent en exemple les résultats scolaires - ou de Neuchâtel est de type mixte ? Ces cantons s'en réjouissent et s'en félicitent.
Le CO22, en définitive, Mesdames et Messieurs les députés, c'est une transition en douceur entre l'école primaire totalement hétérogène, c'est-à-dire avec des élèves dans la même classe et pour lesquels les exigences sont les mêmes, et le système du secondaire II, distingué en filières et en bâtiments séparés, avec une 9e année où, effectivement, les élèves seront dans la même classe - c'est cela, la mixité intégrée -, mais où, dans deux disciplines, les maths et l'allemand, on aura des exigences un peu différentes. En 10e année, il y aura un peu plus de niveaux - je signale d'ailleurs que chez nos amis neuchâtelois, il y a cinq disciplines à niveaux, ainsi que des options -, et, en 11e, deux voies clairement définies, qui permettront d'aller au secondaire II.
Il s'agit donc d'une réforme scolaire qui s'appuie sur l'évaluation de l'actualité et qui décide de former les enseignants. M. Nicollier nous a lu tout à l'heure un document que je me réjouis de recevoir - il m'est apparemment adressé, mais je crois qu'il l'a reçu avant moi, ce qui m'étonne tout de même - concernant l'inquiétude des enseignants. (Remarque.) Mais je les comprends ! Je les comprends, parce que le parlement tergiverse ! Vous voulez encore renvoyer en commission ce projet de loi ? (Commentaires.) Comment voulez-vous que les enseignants - il en va de même pour nous, au département - puissent avancer dans leur préparation s'ils ne reçoivent pas un signe clair du parlement ? Il faut maintenant savoir si c'est «go» ou «no-go», si on va de l'avant, si on peut travailler sur l'aspect concret... (Remarque.) ...sur les grilles horaires, qui sont en discussion, et sur la formation. Parce qu'en effet, vous avez raison, aucune réforme scolaire ne peut fonctionner sans un corps enseignant formé, mais celui-ci peut être aussi rassuré parce qu'il sait où il va.
Par ailleurs, Mesdames et Messieurs les députés, on croit rêver: aucune proposition du PLR pendant un an et demi de discussions ! (Exclamation.) Aucune proposition en commission ! Aucun amendement voté ! Au contraire, le PLR nous disait: «Nous ne voterons aucun amendement, nous ne ferons aucune proposition.» Et puis, il y a quelques jours, une proposition par communiqué de presse. Qu'est-ce qu'on nous dit ? D'abord, qu'il faut maintenir les effectifs à 12 élèves en moyenne par classe en R1 ou en CT. C'est exactement la situation d'aujourd'hui: on peut aller jusqu'à 14; la moyenne cantonale - elle varie, elle peut aller de 11,5 à 12,5 selon les degrés - se situe autour de 12 élèves par classe. Et qu'est-ce qu'on nous dit ? Un enseignant unique et l'abandon du plan d'études romand ! Ça, Mesdames et Messieurs les députés, ça s'appelle l'enseignement spécialisé, ou bien ça s'appelle de l'exclusion ! En fait, ce que vous êtes en train de faire avec les élèves a priori les plus fragiles, c'est que vous voulez les exclure du système, vous ne leur donnez même pas la chance de s'améliorer, alors que toute la recherche montre qu'il n'y a aucun nivellement par le bas, mais que donner la chance à des élèves qui ont un peu moins de facilité scolaire d'être stimulés par les autres, c'est leur permettre de réussir. (Remarque.) Mesdames et Messieurs les députés, vous avez assez tergiversé, acceptez ce projet de loi ! Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. J'invite l'assemblée à se prononcer sur le renvoi en commission.
Une voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12974 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 57 non contre 33 oui (vote nominal).
Le président. Nous poursuivons le débat. Je donne la parole à M. le député Pierre Conne pour cinq minutes et trente et une secondes.
M. Pierre Conne (PLR). Merci, Monsieur le président. L'UAPG a été citée pour être disqualifiée par la rapporteure de majorité et par la magistrate, l'UAPG qui vous a écrit, Monsieur le président, un courrier daté du 8 novembre qui dit notamment ceci: «Les partenaires sociaux sont parties prenantes des questions de formation professionnelle, en particulier et plus largement des questions d'éducation. Or ces derniers n'ont pas été entendus dans le cadre de cette réforme d'importance.» Je demande donc, Monsieur le président, la lecture de ce courrier et le renvoi en commission de ce projet de loi pour auditionner l'UAPG. Je vous remercie. (Exclamations.)
Des voix. Bravo !
Présidence de M. Jean-Luc Forni, premier vice-président
Le président. Merci, Monsieur le député. Quel courrier exactement voulez-vous que l'on lise ? (Commentaires.) La lettre de l'UAPG ?
Une voix. Je vois qu'on est écoutés dans cette salle !
Le président. Il y a eu beaucoup de courriers, Monsieur le député ! (Commentaires. Un instant s'écoule.) Comme on vous l'a expliqué hier, cette lettre n'est pas arrivée au Grand Conseil. Par conséquent, si vous en voulez la lecture, il faut que vous la lisiez vous-même sur le temps de votre groupe. (Rires. Commentaires.) Vous pouvez la lire si vous le voulez, mais comme elle n'a pas été adressée au secrétariat général du Grand Conseil, en tout cas pas à temps, on ne peut pas vous en donner lecture maintenant. (Remarque.) Il faut que vous preniez sur le temps de votre groupe. (Commentaires.)
Une voix. 50 000 employés et l'association patronale faîtière du canton ! Et on ne peut pas lire un courrier ! Je suis désolé, mais... (Commentaires.)
Le président. Monsieur le député, il y a des règles au Grand Conseil. Si vous voulez qu'un courrier soit lu... (Commentaires.) ...il faut qu'il soit adressé au président dans les temps requis avant la séance, ce qui n'est pas le cas. Cela dit, si vous voulez le lire vous-même, vous pouvez !
Une voix. Le président l'a reçu !
Le président. Le président l'a reçu ? (Remarque.) Le secrétariat général du Grand Conseil en tout cas ne l'a pas reçu, or le secrétariat est le seul habilité à porter ce courrier dans la rubrique «Correspondance». Comme cela n'a pas été fait, malheureusement, je ne peux pas vous donner lecture de ce courrier. En revanche, comme on vous l'a déjà proposé, vous pouvez tout à fait prendre sur votre temps de parole et le lire dans le cadre de vos interventions. (Commentaires.)
M. Pierre Conne. Monsieur le président, est-ce que je peux répondre à votre... (Commentaires.)
Le président. Je vous écoute, Monsieur le député.
M. Pierre Conne (PLR). J'ai bien entendu, Monsieur le président, votre rappel de la manière dont les choses se sont déroulées et du fait que peut-être la lettre de l'UAPG ne vous est pas parvenue dans les délais, mais je ne peux pas prendre cette décision moi-même. Je dois consulter mon groupe. Je demande donc une suspension de séance. Je vous remercie.
Le président. C'est une motion d'ordre, Monsieur le député ? Vous demandez une suspension de séance ?
M. Pierre Conne. Oui, pour pouvoir consulter mon groupe et savoir si on accepte de lire cette lettre sur notre temps de parole ou non... (Commentaires.) ...parce qu'il y a encore beaucoup de demandes de parole des députés PLR et notamment des députés membres de la commission de l'enseignement. Vous comprendrez donc que ma demande est légitime. Merci. (Commentaires.)
Le président. Très bien. Vous demandez une suspension de séance sous la forme d'une motion d'ordre. Je rappelle que pour être acceptée, cette demande requiert la majorité des deux tiers des députés présents.
Une voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien. Le vote sera donc nominal.
Mise aux voix, la motion d'ordre (suspension de la séance) est rejetée par 58 non contre 36 oui (majorité des deux tiers non atteinte) (vote nominal).
Le président. La séance se poursuit donc normalement.
Une voix. Monsieur le président, motion d'ordre !
Le président. Monsieur le député Murat-Julian Alder, vous avez une motion d'ordre à formuler ?
M. Pierre Conne. J'avais fait deux demandes, Monsieur le président ! (Exclamations.)
Le président. Quelle est la deuxième demande, Monsieur le député ?
M. Pierre Conne (PLR). La lecture du courrier et un renvoi en commission... (Commentaires.)
Le président. Vous avez demandé une suspension de séance pour discuter de la lecture du courrier. Nous avons procédé au vote et la demande a été refusée. Voilà. Maintenant, vous avez une deuxième demande ?
Une voix. Il l'a faite ! (Commentaires.)
Le président. Vous voulez le renvoi en commission ? (Commentaires.)
M. Pierre Conne. J'ai formulé cette demande au moment de mon intervention, Monsieur le président.
Le président. Très bien. Sur le renvoi en commission, Madame la rapporteure de majorité ? (Remarque.) Pas de commentaire. Monsieur le rapporteur de deuxième minorité ? Je vous donne la parole.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, vous me donnez la parole, ce que j'apprécie beaucoup, mais mon collègue Murat-Julian Alder l'avait demandée. Donc je redemande un renvoi en commission... (Commentaires.) ...parce qu'on aimerait la lecture de cette lettre de l'UAPG, qui vous a été adressée, Monsieur le président, et je ne comprends pas pourquoi vous n'en faites pas la lecture, pour apaiser cette noble assemblée ! (Commentaires.) Une fois de plus, on voit qu'on méprise les associations professionnelles et que, malheureusement, on veut favoriser la filière gymnasiale et non les filières d'apprentissage en formation duale et en formation professionnelle, ce qui est très regrettable. Donc je redemande, Monsieur le président, un renvoi en commission. Je vous remercie.
Présidence de M. Diego Esteban, président
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de deuxième minorité. Monsieur Pierre Nicollier, c'est à vous.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie beaucoup. Comme vous le savez, nous ne remettons pas en question l'hétérogénéité, mais la modalité de cette organisation avec des périodes de quarante-cinq minutes, avec des élèves qui changent de classe cinq ou six fois par jour. Nous ne savons pas comment les choses s'organisent. Nous devons prendre le temps de comprendre comment les enseignants au cycle d'orientation, avec 120 élèves qu'ils voient trois heures ou trois périodes par semaine, seront en mesure d'appliquer tout ce que le département a imaginé pour eux.
Je souhaite également renvoyer ce projet de loi en commission, parce que, comme cela a été mentionné dans cet article qui s'intitule «Comment le système scolaire gère-t-il l'hétérogénéité des élèves ?», c'est dans le modèle de séparation avec un système de suivi pour les élèves faibles que la différence de confiance en soi entre les élèves est la moins significative. Cela va à l'encontre des propos de Mme la conseillère d'Etat et nous devons vraiment clarifier cela en commission. Ce résultat est particulièrement intéressant: il montre clairement que les systèmes éducatifs qui placent les enfants peu performants dans des écoles hétérogènes sont aussi ceux qui présentent le plus grand écart dans la confiance en soi. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est la recherche internationale, et nous devons clarifier ce point: c'est quand même fou d'avoir des opinions aussi diverses sur un élément si important ! Je termine par cette citation: «En ce qui concerne le niveau de réussite, nous observons que dans le modèle d'intégration uniforme, les élèves les plus faibles ont toujours les résultats les plus faibles par rapport à tous les autres modèles.» Cela va donc complètement à l'encontre de ce qui a été dit. C'est très inquiétant. On ne sait pas où on va avec le CO22. Renvoyons ce projet de loi en commission, soyons au clair sur la façon dont on veut l'exécuter, et ensuite on pourra le traiter sereinement en plénière, avec vous tous, sans cette tension que je sens dans la salle et qui est très dommageable pour nous tous. Je soutiens donc ce renvoi en commission et demande le vote nominal, Monsieur le président.
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous l'êtes. Le vote est lancé sur le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12974 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 60 non contre 35 oui (vote nominal).
Une voix. Motion d'ordre, Monsieur le président !
Le président. Monsieur le député Murat-Julian Alder, vous avez la parole pour formuler votre motion d'ordre.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Je vous remercie, Monsieur le président, de me donner la parole. Je demande, sous la forme d'une motion d'ordre, la lecture du courrier de l'UAPG. Je vous remercie, Monsieur le président. (Exclamations. Commentaires.)
Le président. Monsieur le député, est-ce que vous pourriez me citer la disposition de la LRGC correspondant à votre motion d'ordre ?
M. Murat-Julian Alder. Je vous remercie, Monsieur le président. Si vous voulez, je peux vous faire un avis de droit oral... (Rires.) ...pour les trente prochaines minutes. Je commencerai tout d'abord par rappeler que nous sommes soumis à un certain nombre de règles démocratiques...
Le président. Ne vous inquiétez pas, je vous aide...
M. Murat-Julian Alder. ...règles qui ont été bafouées...
Le président. Je vous aide. Lettre a: la motion d'ordre consiste à interrompre...
M. Murat-Julian Alder. ...règles de la LRGC... (Commentaires.)
Le président. Monsieur le député, deux motions d'ordre sont à votre disposition. La première possibilité est contenue à l'article 79, alinéa 1, lettre a, de la LRGC: «d'interrompre immédiatement le débat et, le cas échéant, de passer au vote». La deuxième, à la lettre b: «de suspendre ou de lever la séance». Lettre a ou lettre b ?
M. Murat-Julian Alder. Je choisis la motion d'ordre que j'ai déposée, c'est-à-dire de demander la lecture du courrier de l'UAPG. C'est tout, Monsieur le président. (Commentaires.) De toute façon, le règlement, vous l'appliquez un peu comme ça vous amuse ! Donc, en partant de là... (Commentaires.)
Le président. Je suis désolé, Monsieur le député, ce n'est pas un menu de restaurant ! Il y a deux options: poisson ou viande ! Nous continuons avec M. le député Stéphane Florey. A vous.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Dans les années 1970, il y avait une émission qui s'appelait «L'Ecole des fans». Peut-être que les plus jeunes ici ne connaissent pas, mais c'était une émission où, finalement, tout le monde avait gagné !
Une voix. Exactement !
M. Stéphane Florey. A vous entendre, vous de la majorité, on pourrait croire - et malheureusement ce n'est pas le cas - que cette réforme va justement permettre d'arriver à ce fameux 100% où tout le monde a gagné. (Commentaires.)
Le président. Un instant, s'il vous plaît, Monsieur le député ! (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Merci. Vous pouvez poursuivre.
M. Stéphane Florey. Malheureusement, dans ce rapport, il n'y a aucun élément permettant de corroborer cette affirmation. Je suis désolé, mais si vous demandez à n'importe quel citoyen de lire le rapport... Il est totalement illisible ! Mal construit, mal écrit, il ne reflète en rien les travaux qui se sont déroulés sur cette réforme. On apprend qu'il y a eu neuf séances, que sept ont été consacrées aux auditions - donc on a écouté des gens et tout -, qu'une seule a été consacrée aux travaux concernant ce projet de loi bâclé et qu'il y a eu une séance complémentaire, qui, à la lecture de la LRGC, n'aurait jamais dû apparaître dans ce rapport. Donc, même dans nos travaux de commission, on ne respecte plus la LRGC ! La séance du 13 octobre 2021 n'avait absolument pas lieu d'être et n'a absolument pas lieu de figurer dans ce rapport, puisqu'elle est intervenue après le vote. Or, vous le savez très bien, une fois qu'une commission a procédé au vote final d'un objet - que ce soit une motion, une résolution ou un projet de loi -, celui-ci ne lui appartient plus ! Il n'est plus possible de revenir dessus ! Et c'est exactement ce qu'a fait la commission. Par conséquent, il y a eu un vice de forme flagrant dans ce rapport, ce rapport n'est déjà pas conforme à la LRGC.
La deuxième chose, c'est que, toujours en lisant ce rapport, on est noyé dans les abréviations: DGEO, FAPEO, tout ce que vous voulez. Ok, nous, on sait ce que ça signifie, parce qu'on a l'habitude de travailler là-dessus. Mais allez demander à un citoyen, à Monsieur et Madame Tout-le-Monde, ce que sont la FAMCO, la FAPEO, la DGEO, le DIP ! Personne ne pourra véritablement vous répondre, la plupart des citoyens ne savent pas de quoi on parle dans ce rapport ! La moindre des choses pour qu'au moins on comprenne de quoi on parle, c'était de donner en préambule un lexique de toutes ces abréviations.
Maintenant, quand on se penche un peu sur les auditions, on voit que la FAMCO exprime ses craintes s'agissant des enseignants, parce que ceux-ci ne comprennent pas vraiment ce qui va changer. Alors tout le monde est d'accord: oui, il faut changer, mais personne ne comprend rien. Et il s'agit de savoir surtout s'ils vont être correctement formés ! Mais dans ce rapport, une fois de plus, il n'y a aucun élément qui démontre qu'on va correctement former les enseignants à ce qu'on leur demande ! On peut donc largement présager un échec total de cette réforme. Quand on lit l'audition de la FAPEO... Je ne peux pas vous donner le nom complet, parce que je ne le connais même pas moi-même ! Donc il faudra faire des recherches pour savoir de qui on parle. Mais enfin bon, la FAPEO dit qu'il aurait fallu peut-être s'assurer de l'adhésion totale des enseignants, parce qu'eux-mêmes ne sont pas convaincus ! Ils le disent ! Ils le disent eux-mêmes en audition ! Or, toujours à la lecture de ce rapport, aucun élément ne démontre clairement qu'on s'est assuré de l'adhésion même des enseignants ! On a l'impression qu'ils ont parlé dans le vide et qu'effectivement, ils n'ont pas été entendus. Peut-être qu'ils ont été écoutés, mais il faut bien faire la différence: quand on est écouté, on n'est pas forcément entendu ni même compris ! Et c'est exactement ce qui s'est passé durant ces travaux. Finalement, on peut se demander si le département comprend là où il veut en venir ! Parce que moi, ce que j'en déduis, c'est que depuis les années 1980, on a eu quoi... Trois, quatre, cinq réformes ? Il y en a eu tellement, on ne sait même plus de laquelle on parle ! Toujours est-il que chaque réforme a été un échec. C'est pour cela qu'une nouvelle réforme est engagée.
Une voix. Renvoi ! (Commentaires.)
M. Stéphane Florey. Parce qu'il y a échec sur échec ! C'est ça qui s'est passé depuis les années 1980. A aucun moment, la commission n'a fait le bilan de ce qui se passait bien avant toutes ces réformes ! Je suis désolé... Donnez-moi, Madame la conseillère d'Etat, le nombre de personnes qui sortaient du cycle d'orientation dans les années 1980 et qui se retrouvaient sur le carreau ! Qui n'y arrivaient pas dans ce qu'on appelait communément la générale à l'époque. Combien ne trouvaient pas d'apprentissage ? (Commentaires.) Je peux vous dire que les résultats seraient impressionnants, puisque le taux d'échec... (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Monsieur le député...
M. Stéphane Florey. ...était dix fois moindre...
Le président. Un instant !
M. Stéphane Florey. ...qu'aujourd'hui ! (Commentaires.)
Une voix. Chut !
Le président. S'il vous plaît ! (Brouhaha.)
Une voix. Respire, parle plus fort ! (Un instant s'écoule.)
Le président. Vous pouvez poursuivre, Monsieur Florey.
M. Stéphane Florey. Je disais donc qu'à aucun moment on ne s'est posé ces vraies questions. Et moi je peux dire ici qu'il y avait beaucoup plus d'élèves qui finissaient le cycle d'orientation dans les années 1980, qui suivaient des apprentissages, et chaque élève trouvait sa place dans la société. (Remarque.) Parce que là où on a surtout cassé quelque chose ces vingt dernières années, c'est en faisant croire aux élèves - même encore aujourd'hui avec cette réforme - qu'on peut tous y arriver ! Or non, c'est faux ! Vous pouvez faire ce que vous voulez: un élève moyen restera toujours moyen, quoi qu'on fasse ! (Commentaires.) Et le pire qu'on puisse lire et comprendre de cette réforme, c'est quand vous affirmez que la base d'une classe sera l'élève le plus faible et qu'il sera le marqueur d'une classe ! Là, vous êtes inévitablement voués à l'échec.
C'est pour toutes ces raisons qu'encore une fois, je demande le renvoi de ce rapport en commission, pour qu'il soit retravaillé, qu'on comprenne de quoi on parle, qu'on auditionne les bonnes personnes et qu'on commence enfin à travailler pour de vrai sur cette réforme, chose qui n'a pas été faite jusqu'à présent. Je vous remercie. (Remarque.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Sur ce renvoi en commission...
Une voix. Vote nominal ! (Commentaires.)
Le président. Attendez, Monsieur Ivanov, je vais quand même consulter les rapporteurs. Monsieur Ivanov, d'ailleurs ! A vous.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Vous êtes trop bon, Monsieur le président. Evidemment, nous allons soutenir le renvoi en commission. On peut parler ici d'une réforme idéologique et politique, au détriment de l'encadrement des plus faibles. Cette réforme est basée sur la constatation que les élèves les plus en difficulté réussissent mieux lorsqu'ils sont intégrés avec les effectifs les plus avancés. Elle suit donc en droite ligne la politique de mixité prônée par le DIP en faisant complètement fi de la constatation, pourtant présentée dans le rapport sur le nCO - réforme du nouveau cycle d'orientation introduite en 2011 -, que le succès des élèves en difficulté est massivement lié à l'attention et à l'accompagnement individuel permis par leur encadrement.
Il n'a jamais été présenté de comparaison entre une classe de 12 élèves - moyenne de la rentrée 2021 pour le regroupement 1, R1 - et ces mêmes élèves répartis dans des classes de 18 élèves avec des différences de niveaux majeures et des objectifs pédagogiques différenciés. Le DIP lui-même indiquait que «les élèves en difficulté sont plus dépendants notamment de la relation avec l'enseignant, comme le soulignent les études sur le décrochage scolaire».
Cette réforme est politique et n'a pas pour objectif d'améliorer l'encadrement des plus faibles, qui connaîtront une augmentation de 50% des effectifs dans leur classe et donc une diminution du temps et de l'attention que pourront leur consacrer leurs enseignants. Le CO22 promet une détérioration de l'encadrement des élèves les plus faibles.
C'est une réforme basée sur un projet de référence visiblement incompris. Le DIP a maintes fois présenté la dernière réforme du cycle d'orientation du canton de Neuchâtel comme un exemple de différenciation. Il est piquant de constater qu'à Neuchâtel, la différenciation est effectuée en séparant physiquement les classes par niveaux pour les branches de base et les langues. Les élèves sont donc dans des classes séparées. Les enseignants ont été formés à la prise en charge différenciée au sein des regroupements, et cela ne s'est pas fait en quelques mois.
A la question de savoir si une hétérogénéité complète des classes, avec différenciation pour toutes les matières des branches principales ainsi que les langues, serait adéquate, le canton de Neuchâtel «répond par la négative, car la réforme est encore en cours de stabilisation».
Le président. Merci !
M. Christo Ivanov. «Six ans d'expérience laissent entrevoir une stabilisation»...
Le président. Il faut conclure !
M. Christo Ivanov. ...«mais il y a encore des éléments à améliorer.» Genève mentionne Neuchâtel...
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de deuxième minorité...
M. Christo Ivanov. ...comme exemple, mais, dans la pratique, le DIP propose un changement...
Le président. Vous avez droit à trois minutes. Ces trois minutes sont écoulées. Je cède maintenant la parole...
Une voix. Motion d'ordre, Monsieur le président !
Le président. Nous sommes saisis d'une motion d'ordre de la part du groupe Ensemble à Gauche. Monsieur Jean Burgermeister, vous avez la parole.
M. Jean Burgermeister (EAG). Oui, Monsieur le président. En vertu de l'article 79, alinéa 1, lettre a, de la LRGC, je demande d'interrompre immédiatement les débats et de passer au vote d'entrée en matière sur ce projet de loi. (Applaudissements.)
Une voix. Et vive la démocratie, hein ! (Rires. Exclamations.)
Le président. Très bien. Je mets aux voix cette motion d'ordre. Je vous rappelle que, comme pour les autres motions d'ordre, pour être acceptée, cette demande doit recueillir la majorité des deux tiers.
Une voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Largement. Très bien, nous passons donc au vote nominal.
Mise aux voix, la motion d'ordre (interruption immédiate du débat et passage au vote) est rejetée par 60 oui contre 37 non (majorité des deux tiers non atteinte) (vote nominal). (Le vote nominal n'a pas pu être enregistré.)
Le président. Nous poursuivons nos débats et je passe la parole à M. le député Yvan Zweifel pour quatre minutes et six secondes. (Commentaires.) Excusez-moi, Monsieur Zweifel, je suis allé un peu vite en besogne ! Monsieur le rapporteur de première minorité Pierre Nicollier, sur le renvoi en commission.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous souhaitons renvoyer ce texte en commission pour deux raisons. La première, c'est le courrier qui vous a été envoyé le 8 novembre 2021, Monsieur le président, et qui mentionne ce qui suit: «Ce projet de loi porte sur la refonte du cycle d'orientation par le biais d'un projet nommé CO22. Comme vous n'êtes sans doute pas sans savoir, les partenaires sociaux sont parties prenantes des questions de formation professionnelle, en particulier et plus largement des questions d'éducation. Or ces derniers»... (Remarque.)
Une voix. Plus fort !
Le président. Un instant, Monsieur le rapporteur, un instant.
Une voix. On n'entend rien ! (Commentaires. Un instant s'écoule.)
Le président. Je rassure M. Cuendet: je suis très discipliné, mais je ne sais pas pour d'autres personnes dans cette salle ! (Commentaires.)
Des voix. Burgermeister !
Une voix. Avertissement, Monsieur, avertissement ! (Commentaires.)
Une autre voix. Avertissement démocratique !
Une autre voix. C'est un scandale ! (Commentaires.)
Le président. Et moi qui croyais que vous étiez contre la délation ! (Brouhaha.) Un instant, s'il vous plaît ! Monsieur Alder, s'il vous plaît, laissez votre rapporteur s'exprimer. (Remarque.) Très bien. Monsieur Nicollier, vous pouvez poursuivre.
M. Pierre Nicollier. Je vous remercie, Monsieur le président. (Brouhaha.) Je citais donc le courrier de l'UAPG qui vous était adressé et vous a été envoyé le 8 novembre 2021, soit il y a quatre jours, qui mentionne... (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Monsieur le rapporteur. (Brouhaha.) Madame Strasser... (Brouhaha.) Madame Strasser, est-ce que vous pouvez aller rire dehors, s'il vous plaît ! (Un instant s'écoule.) J'en profite pour rappeler aux personnes présentes de bien vouloir porter leur masque; cela diminue aussi le volume des voix qui interfèrent avec le discours du rapporteur. Vous pouvez poursuivre, Monsieur.
M. Pierre Nicollier. Je vous remercie, Monsieur le président. Je mentionnais donc ce courrier du 8 novembre 2021 que l'UAPG vous a envoyé, Monsieur le président, courrier qui dit ceci: «Ce projet de loi porte sur la refonte du cycle d'orientation par le biais d'un projet nommé CO22. Comme vous n'êtes sans doute pas sans savoir, les partenaires sociaux sont parties prenantes des questions de formation professionnelle, en particulier et plus largement des questions d'éducation. Or ces derniers n'ont pas été entendus»... (Remarque.) «Or ces derniers n'ont pas été entendus dans le cadre»...
Le président. Monsieur Cuendet, arrêtez de perturber le discours du rapporteur de minorité ! (Remarque.)
M. Pierre Nicollier. «Or ces derniers n'ont pas été entendus dans le cadre de cette réforme d'importance. Nous demandons par conséquent à votre assemblée de bien vouloir renvoyer ce projet en commission afin que les partenaires sociaux puissent être entendus sur ce projet qui joue un rôle déterminant dans la formation et l'avenir professionnel des jeunes. En vous remerciant de l'attention que vous voudrez bien donner à la présente, nous vous prions de croire, Monsieur le président, en l'assurance de notre considération distinguée.» Et c'est signé par M. Jean-Luc Favre, président, et Mme Stéphanie Ruegsegger, secrétaire permanente, avec copie à la CGAS et aux secrétariats des partis représentés au Grand Conseil.
Comme vous l'avez vu, l'UAPG demande à être entendue en tant que telle et non dans des commissions mixtes et, pour cette raison, nous soutenons le renvoi en commission.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Madame la rapporteure de majorité, sur le renvoi en commission ? (Remarque.) Non. Madame la conseillère d'Etat ? (Remarque.) Non plus. Nous passons donc au vote: celles et ceux qui acceptent le renvoi votent oui, les autres non...
Une voix. Vote nominal !
Le président. ...les abstentions sont possibles. Le vote est lancé.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12974 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 59 non contre 34 oui.
Le président. Nous poursuivons le débat. Madame la députée Diane Barbier-Mueller, vous avez la parole.
Mme Diane Barbier-Mueller (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui, les reproches de la minorité de ce parlement ne portent pas sur le fond de cette réforme mais uniquement sur son application trop rapide. Les problèmes constatés à l'heure actuelle ne seront pas résolus avec cette réforme. Pourquoi ? Il y a trois raisons à cela.
D'abord, le cycle d'orientation ne joue plus son rôle d'orientation; il faut donc revoir les objectifs pour les élèves. Deuxièmement, l'apprentissage n'est pas valorisé à Genève; preuve en est que son taux d'apprentis est le plus bas du pays. A ce propos, je mentionne déjà mes amendements, même s'ils seront traités plus tard. J'en propose plusieurs: ils ont pour vocation de revaloriser cette filière, qu'il faudrait peut-être renommer «préprofessionnelle», et de redonner sa place à cette voie qui est tout à fait valorisable. Quant à la troisième raison, c'est la formation des enseignants: à l'heure actuelle, ils ne sont pas équipés pour gérer l'hétérogénéité des classes.
N'ayant pas le temps d'en dire beaucoup plus, je vous invite à accepter nos amendements. Je vous invite à renvoyer ce projet en commission pour pouvoir rendre cette réforme acceptable. Vous avez creusé la dette; ne rendons pas la vie et l'avenir de nos jeunes encore plus difficiles ! Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Madame la députée. Je précise que le temps dévolu à la présentation des amendements est inclus dans l'enveloppe de temps des différents groupes, dont je vais rappeler l'état des lieux à ce stade. Il reste trois minutes trois à la rapporteure de majorité, le rapporteur de première minorité n'a plus de temps de parole, et il reste cinq minutes trente-huit au rapporteur de deuxième minorité. Ensemble à Gauche dispose de douze minutes; les socialistes d'une minute quarante; les Verts de trois minutes cinquante-sept; le PDC de trois minutes vingt-huit; le PLR de trois minutes quatre; l'UDC de quarante-quatre secondes; le MCG de douze minutes; et les indépendants de six minutes.
Sur ce, nous sommes saisis d'une nouvelle demande de renvoi en commission. Monsieur le rapporteur de deuxième minorité Christo Ivanov, c'est à vous.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Permettez que j'enlève le masque. J'aimerais quand même - si vous me le permettez, Monsieur le président - vous prier de la mettre en oeuvre lorsqu'il y a une demande de vote nominal: c'est la deuxième fois que vous empêchez le vote nominal. Je vous remercie de respecter la LRGC !
Cela étant dit, je soutiens évidemment le renvoi en commission. Je suis assez sidéré de voir de quelle manière l'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants est pensé dans cette réforme. Il est essentiel, pour notre groupe et pour la deuxième minorité, d'entendre les associations patronales et les représentants des enseignants, car nous ne sommes pas fondamentalement opposés à cette réforme mais à la méthode et à la manière dont on veut l'appliquer. On voit bien que nous avons un taux d'apprentissage de 4%, ce qui est en effet extrêmement faible; nous devons également nous occuper de toutes celles et tous ceux qui sont en décrochage scolaire et à qui nous devons donner une formation pour leur assurer un avenir.
J'aimerais revenir sur deux ou trois choses. On n'a pas parlé de la problématique des finances, mais tout le monde sait à Genève que nous avons une dette importante. Elle se monte officiellement à 12,6 ou 13 milliards, auxquels il faut encore ajouter les 6 milliards de la CPEG plus ce qu'il y a en pied de bilan; nous nous retrouvons quand même avec une dette de plus de 20 milliards ! Telle est la réalité. Avec l'inflation qui repart à la hausse et au vu des déficits auxquels nous faisons régulièrement face, où allons-nous trouver les fonds nécessaires pour mettre en oeuvre cette réforme qui implique l'engagement de nombreux enseignants et intervenants ? Nous ne voulons pas d'une réforme bâclée: nous voulons une réforme réfléchie !
La qualité de l'enseignement est directement liée aux effectifs; je le conçois tout à fait. La réforme permettrait de faire baisser les effectifs moyens par classe, mais elle va par contre péjorer les niveaux R2 et R1 dont les effectifs risquent de passer de 12 à 18 élèves. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) C'est un changement trop rapide, car il y a un risque à mettre les élèves qui ont le plus de difficultés dans des classes avec des effectifs plus élevés. La mise en oeuvre rapide de cette réforme...
Le président. Merci.
M. Christo Ivanov. ...compromettrait une formation générale des enseignants. Le défi proposé...
Le président. Merci.
M. Christo Ivanov. ...au corps enseignant en amont de la mise en place des modifications prévues...
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur.
M. Christo Ivanov. Il faut prendre en compte les besoins en matière de personnel et de moyens financiers !
Le président. En ce qui concerne votre remarque initiale, il est trop tard pour formuler la demande lorsque je lance le vote ! Nous en sommes à la dixième demande de renvoi en commission; rien ne vous empêche de requérir le vote nominal au moment de formuler la demande. Monsieur le rapporteur de première minorité Pierre Nicollier, vous avez la parole.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Je demande déjà, par avance, le vote nominal.
Le président. Etes-vous suivi ? (Plusieurs mains se lèvent.)
Des voix. Oui !
Le président. Vous l'êtes ! Voilà, c'est mieux comme ça.
M. Pierre Nicollier. Je vous remercie, Monsieur le président. Comme ça, on évitera tout malentendu. Nous soutenons le renvoi en commission de ce projet de loi pour la raison suivante: cette réforme, telle qu'elle doit être appliquée, se fera au détriment de tous et particulièrement des élèves les plus fragiles. Elle fait fi d'un constat appuyé par les études sur le décrochage scolaire, qui a guidé la précédente réforme du cycle en 2011. Les élèves en difficulté sont plus dépendants que les autres de la relation avec l'enseignant et du suivi de ce dernier. Ainsi, au lieu d'offrir aux plus fragiles un accompagnement personnalisé et d'adapter l'enseignement à leurs besoins, dans des classes... (Remarque.)
Des voix. Chut !
Le président. Un instant, s'il vous plaît, Monsieur le rapporteur.
M. Pierre Nicollier. ...avec des... (Commentaires.)
Le président. Un instant ! (Commentaires.) Un instant !
Une voix. On n'entend pas ! (Commentaires.) Monsieur le président, il y a des menaces !
Une autre voix. C'est un scandale ! (Commentaires. Protestations. Un instant s'écoule.)
Le président. Monsieur Hiltpold, Monsieur Cruchon, s'il vous plaît ! (Commentaires.) Monsieur Hiltpold, vous arrêtez, s'il vous plaît ! (Commentaires.) Un instant, Monsieur Selleger !
Des voix. Avertissement !
Le président. S'il vous plaît ! (Remarque.)
Une voix. Il faut distribuer des cartons ! (Un instant s'écoule.)
Le président. Asseyez-vous, Monsieur Hiltpold, s'il vous plaît. (Commentaires.) Monsieur Hiltpold, asseyez-vous, s'il vous plaît ! (Remarque.) Non ! Monsieur Hiltpold, vous n'avez pas la parole ! Nous sommes en plein milieu... (Commentaires.)
Une voix. Il y a une motion d'ordre !
Le président. Monsieur Hiltpold, s'il vous plaît ! Nous sommes en plein milieu de l'intervention du rapporteur de première minorité; il n'est pas nécessaire d'interrompre la séance pour enquêter sur des faits qui se déroulent dans cette salle. Je vais envoyer le premier vice-président discuter avec tout le monde, nous pouvons continuer les interventions. Monsieur le rapporteur de première minorité, poursuivez.
M. Pierre Nicollier. Je vous remercie beaucoup, Monsieur le président. Comme je le mentionnais tout à l'heure, les élèves en difficulté sont plus dépendants que les autres de la relation avec l'enseignant et du suivi de ce dernier. Avec le CO22, au lieu d'offrir un accompagnement personnalisé aux plus fragiles et d'adapter l'enseignement à leurs besoins, dans des classes avec des effectifs réduits, ces élèves se retrouveront dans des classes comptant 50% d'effectif additionnel ! Ils verront donc une diminution significative du temps et de l'attention que leur consacreront leurs enseignants.
Comparons avec l'école primaire. Dans le cadre du CO22, l'enseignant de mathématiques devra aborder certaines notions en 9e année avec une partie de la classe et ces mêmes notions avec d'autres élèves en 10e année, dans un horaire conçu pour ne couvrir qu'un seul programme. Comment pouvons-nous imaginer que cela fonctionne ?! A l'école primaire, avec de la différenciation, les enseignants sont avec les élèves pendant vingt-huit périodes par semaine ! Au cycle d'orientation, les enseignants sont avec les élèves entre trois et cinq périodes par semaine ! Et nous souhaitons qu'ils puissent faire de la différenciation en changeant de classe toutes les quarante-cinq minutes ?!
On parle d'une réforme qui est inapplicable ! Au lieu d'entrer dans des discussions émotionnelles, je vous encourage vraiment, vivement, à renvoyer ce projet de loi en commission.
Le président. Madame Bidaux, sur le renvoi en commission ? (Remarque.) Non. Madame la conseillère d'Etat ? (Remarque.) Non plus. Nous sommes donc en procédure de vote. (Remarque.) Il est déjà nominal, je vous rassure !
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12974 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 59 non contre 35 oui (vote nominal).
Le président. Nous continuons le débat et je cède la parole à M. le député Serge Hiltpold pour trois minutes et quatre secondes.
M. Serge Hiltpold (PLR). Merci. S'agissant du renvoi en commission, Monsieur le président, cela a été expliqué... Excusez-moi, je vais peut-être enlever le masque. ...des acteurs principaux de la formation n'ont pas été entendus. J'aimerais rappeler le courrier lu tout à l'heure par M. le rapporteur de première ou deuxième minorité, je ne sais plus - mon collègue Pierre Nicollier. Nous ne sommes malheureusement pas dans un débat libre et des acteurs importants - les formateurs, les patrons - n'ont pas pu être entendus !
Je ne parle pas des secrétariats patronaux ni des représentants paritaires, mais des gens qui font de la formation - nous sommes trois ou quatre dans ce parlement. Malheureusement, la démocratie, ce soir, ne nous laisse pas la possibilité de parler en débat libre et j'estime donc que, ne pouvant pas le faire dans un plénum, dont le rôle principal est la discussion, nous devons être entendus en commission afin d'exposer un point de vue qui défende la formation professionnelle. Un point de vue différent: un point de vue de l'expérience, un point de vue sur le geste métier, un point de vue quant aux différences de génération, un point de vue relatif à la transmission du savoir, un point de vue sur les valeurs ! Un point de vue en lien avec la réalité du monde économique ! Un point de vue sur ce que vous demandez: la transition écologique, climatique ! Et la formation continue ! Est-ce que vous allez faire de la formation continue dans les écoles ? Non, elle aura lieu dans les entreprises, avec les ouvriers, avec les cadres, avec les contremaîtres, avec les encadrants !
C'est à côté de ça que passe cette réforme: l'union des acteurs ! Alors qu'il s'agit d'une réforme capitale pour les vingt-cinq prochaines années, vous mettez de côté les personnes qui ont un point de vue différent bien qu'elles soient en Suisse, je le rappelle, les piliers de notre système ! A Genève, on ne se pose même pas la question du déficit de formateurs et du faible taux d'apprentissages, on dit simplement: non, c'est bon, on ne veut pas les entendre ! En ce qui me concerne, c'est un discours que je ne peux pas accepter ! C'est un discours que je ne veux pas accepter !
Monsieur le président, j'en veux pour exemple très concret la mise en application des hautes écoles spécialisées. Les hautes écoles spécialisées sont la voie royale de la formation professionnelle; malheureusement, malheureusement, elles ont été placées au niveau des... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) C'est terminé, Monsieur le président ? Alors je demande le renvoi en commission. Merci. (Rires.)
Le président. C'est tout, Monsieur le député ? (Commentaires.)
Une voix. Vote nominal !
Le président. Ah ! Etes-vous suivie ? (Plusieurs mains se lèvent.) Voilà, très bien. Monsieur Ivanov, vous avez la parole sur le renvoi en commission.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. La deuxième minorité soutiendra bien évidemment le renvoi en commission. Il est en effet capital, mes préopinants l'ont dit, d'entendre en commission les milieux de la formation professionnelle. Moi qui suis un petit entrepreneur, j'essaie de faire un maximum pour le futur de nos jeunes, pour les futures générations - nous devons assurer un avenir à nos enfants et à nos petits-enfants. Comme l'a dit mon préopinant Serge Hiltpold, cette réforme est pour les vingt, trente ou quarante prochaines années: nous n'avons pas le droit de la rater. C'est pourquoi j'ai vraiment de la peine à comprendre pourquoi les groupes ne soutiennent pas un renvoi en commission: en quelques séances, nous pourrions régler le problème, trouver un consensus, ce qui est la manière de faire dans ce pays. Tous nous envient, dans le monde, le compromis à la suisse et je ne comprends pas le dogmatisme. D'ailleurs, un certain groupe a retourné sa veste: il avait refusé le projet de loi en commission et, tout d'un coup, il est maintenant du côté de la majorité, de ceux qui veulent passer en force avec ce projet, je dirais, ce qui est une aberration absolue. Il faut qu'il y ait un véritable dialogue.
Le problème de cette réforme, c'est qu'elle se base sur le postulat que les élèves en grande difficulté rentreront mieux dans le cadre s'ils peuvent s'inspirer des élèves ayant plus de facilité. Elle ne remet jamais en question le cadre ni la nature même de l'enseignement pour ces jeunes en difficulté. Modifier l'organisation du cycle d'orientation sans se poser la question de la stratégie pédagogique de manière globale ne fera que reproduire des résultats identiques. Le DIP indiquait d'ailleurs très ironiquement qu'il y a une relation faible entre structures scolaires et performances scolaires.
Nous devons nous poser les questions suivantes: quels sont les éléments qui permettront aux jeunes les plus en difficulté de devenir des adultes autonomes ? Est-il adéquat de poursuivre une formation avec un enseignement frontal pour ces élèves ? Et plus généralement: quels sont les besoins et les mécanismes de développement des jeunes adolescents ? Si la situation est si grave, pourquoi ne pas remettre en question la nature de l'enseignement au cycle et les objectifs du PER, que nous devrons tôt ou tard, d'une manière ou d'une autre, améliorer ? Cela ne fait aucun doute: il est impératif de renvoyer ce texte en commission, Monsieur le président, et je demande le vote nominal.
Le président. Il a déjà été demandé et il a déjà été validé. Monsieur le rapporteur de première minorité Pierre Nicollier, à vous la parole.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, on l'a mentionné tout à l'heure: en plus de ne pas prendre en compte les besoins des élèves les plus fragiles et d'être irréaliste dans son exécution, cette réforme porte un coup supplémentaire à l'apprentissage et aux filières professionnelles. Au lieu de valoriser l'apprentissage et les filières professionnelles, cette réforme noie les élèves dans la filière gymnasiale majoritaire, qui devient de facto la seule référence. Nous devrions reconnaître les qualités de ces filières professionnelles et de l'apprentissage et les promouvoir auprès des élèves et des parents.
Nous devrions être inquiets d'avoir beaucoup de réorientations forcées - non parce que ce sont des réorientations, mais parce qu'elles sont forcées ! Cela signifie que l'orientation, dès le départ, a été mal faite; notre objectif doit être d'éviter des échecs dans l'ES II comme nous en avons encore beaucoup, beaucoup trop.
Finalement - c'est sans doute l'élément le plus grave et il a été relevé très très souvent - cette réforme n'est pas aboutie. Les formations théoriques que nous avons mentionnées au début du débat n'ont par ailleurs absolument rien à voir avec ce qui est nécessaire aux enseignants. Nous demandons par conséquent un renvoi en commission pour pouvoir vraiment entendre toutes les personnes que nous devons entendre et prendre une décision raisonnable et raisonnée. Merci.
Mme Patricia Bidaux (PDC), rapporteuse de majorité. Je vais prendre quelques minutes pour donner également mon avis sur ces demandes de renvoi en commission sans fin. Malheureusement, je dois dire que ça ne me surprend pas de la part du groupe PLR qui depuis le départ a pris une seule décision: faire capoter ce projet. Par conséquent, même si on le traitait en commission, je ne suis de loin pas certaine qu'on aboutisse à ce que le PLR appelle de ses voeux, c'est-à-dire un compromis, puisque le compromis qu'il souhaite, c'est le refus tout simple de ce texte.
Je prends donc la parole maintenant mais je ne la reprendrai plus très souvent, parce que, finalement, il s'agit d'un blocage parlementaire qui pour moi... Pour ceux qui nous regardent, pour ceux qui sont attentifs, eh bien je le trouve déplacé ! (Commentaires.) Messieurs, s'il vous plaît, je ne vous ai jamais coupé la parole durant l'ensemble des débats et je vous remercie de me laisser terminer ! (Applaudissements soutenus.)
Des voix. Bravo !
Mme Patricia Bidaux. Je vous remercie. Je disais donc que, alors que le but avoué depuis le départ est de jouer la montre, et du fait des pressions exercées par le groupe PLR - sur mon groupe, sur moi-même, sur tous ceux qui n'étaient pas d'accord avec lui -, je ne reprendrai pas la parole afin de ne pas entrer dans ce jeu qui ne mène à rien et qui n'est pas de l'ordre du débat puisque les prises de parole ne visent qu'à faire passer le temps. Il est 20h04, Messieurs, et si je trouve malheureusement déplorable ce qui nous arrive, je serai là pour ma part jusqu'à la fin, aussi longtemps que nécessaire... (Exclamations. Vifs applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Mme Patricia Bidaux. ...et je vous demande de refuser ce renvoi en commission. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la rapporteure. Est-ce que la conseillère d'Etat souhaite s'exprimer ? (Remarque.) Non. J'invite donc l'assemblée à se prononcer sur le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12974 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 61 non contre 35 oui (vote nominal).
Le président. Nous poursuivons le débat. Monsieur le député Patrick Lussi, vous avez la parole pour quarante-quatre secondes.
M. Patrick Lussi (UDC). Quarante-quatre secondes - merci, Monsieur le président. Je fais partie de cette génération qui n'a pas - fort heureusement, j'ai l'impression - connu le cycle d'orientation: nous avions le collège Calvin, le collège moderne et le Grütli pour les soi-disant incapables. A mon époque, comme l'a dit mon préopinant Florey, il y avait beaucoup moins de pertes. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Je trouve donc dommage qu'on laisse de côté toute la filière professionnelle qui est aussi... Ce projet de loi est non seulement partiel, mais il a l'air d'être également partial. Je demande son renvoi en commission avec un vote nominal. Merci.
Le président. Etes-vous suivi, Monsieur le député ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, vous l'êtes. Monsieur Ivanov, c'est à vous.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Sur le renvoi en commission ? Merci, Monsieur le président. Nous soutenons bien évidemment le renvoi en commission: la problématique quant au fait qu'on ne veut pas entendre les acteurs de l'économie, les représentants des milieux professionnels, a été évoquée maintes et maintes fois. Ceux qui créent de l'emploi dans ce canton et dans ce pays, ce sont quand même les PMI et les PME. Je parle sous le contrôle de certains de mes collègues, qui ont fait beaucoup de choses - je pense à Thomas Bläsi: il a permis à une fille qui était à l'AI de faire une formation professionnelle et d'obtenir un CFC. Ça, c'est de la véritable intégration réussie ! Et en plus, n'en déplaise à certains, elle est sortie première du canton. Oui, nous, les petits patrons, les petits chefs d'entreprise, nous créons des places d'apprentissage et nous avons des résultats probants; il faudrait peut-être s'en souvenir, même si pousser la filière de l'apprentissage n'est malheureusement pas dans la culture de notre canton.
Maintenant, s'agissant de l'école primaire et du passage au cycle d'orientation, les enseignants de l'école primaire gèrent des classes mixtes et différencient leur enseignement. Nous pourrions donc considérer qu'il n'est pas difficile de répliquer cela au CO. Il existe néanmoins deux différences majeures entre le cycle d'orientation et l'école primaire. En premier lieu, la formation des enseignants du primaire aborde la différenciation durant tout leur cursus - bachelor et master, je dirais -, comme expliqué par la SPG, le syndicat des professionnels de l'école primaire genevoise. La FAMCO - syndicat du personnel du cycle d'orientation - nous a quant à elle indiqué à plusieurs reprises que malgré une formation de qualité, les enseignants ne s'estiment pas équipés pour modifier l'organisation de l'enseignement comme prévu dans la réforme CO22. Je suis très étonné que la majorité n'entende pas ce message des enseignants et de ceux qui s'occupent de formation professionnelle dans ce canton; c'est quand même une aberration absolue. Un courrier de la FAMCO daté du 18 octobre 2021 souligne encore ce manque et demande une formation pratique avant l'entrée en vigueur de la réforme. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
La seconde différence est bien plus alarmante. A l'école primaire, l'enseignant titulaire accueille un seul groupe d'élèves durant toutes les périodes de la semaine, et ce dans une seule classe - 24 périodes pour le titulaire !
Le président. Merci. Il vous faut conclure: vous êtes au bout de vos trois minutes.
M. Christo Ivanov. Pour toutes ces raisons, Monsieur le président - et je conclus -, je demande un renvoi en commission et le vote nominal. Merci. (Plusieurs mains se lèvent.)
Le président. Le vote nominal a déjà été demandé et soutenu, vous pouvez baisser les mains ! Monsieur le rapporteur Pierre Nicollier, vous avez la parole.
M. Pierre Nicollier (PLR), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le principe d'un regroupement unique est une brique de plus à l'édifice construit année après année qui promeut les études universitaires au détriment de l'apprentissage et des filières professionnelles. La valorisation de ces filières naît également de la création d'une identité forte et de leur promotion. Les pays anglo-saxons sont un exemple dont nous pourrions nous inspirer pour la création de ces identités de groupe.
Le DIP pose comme raison à cette réforme le trop grand nombre de redirections forcées des filières gymnasiales vers les filières préprofessionnelles. Mais pourquoi est-ce un problème lorsqu'un tiers des élèves entreprenant le collège ne le finit pas ? Noyer les élèves de ces filières dans une majorité d'élèves qui entament le collège ne va pas aider leur orientation ! Cela a été dit plusieurs fois et je vous demande, pour cette raison, de soutenir le renvoi en commission. Merci, Monsieur le président.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci. Madame la rapporteure ? (Remarque.) Non. Le Conseil d'Etat ? (Remarque.) Non plus - tout à l'heure. Très bien, nous passons donc au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12974 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 60 non contre 34 oui (vote nominal).
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, on vient de m'apprendre une nouvelle qu'on ne m'avait pas communiquée plus tôt: c'est l'anniversaire de notre collègue Ruth Bänziger. (Exclamations. Applaudissements. L'assemblée chante «Joyeux anniversaire».) Je vois que l'expérience du karaoké a fait du bien à ce Grand Conseil ! Monsieur le député Yvan Zweifel, vous pouvez présenter votre motion d'ordre.
M. Yvan Zweifel (PLR). Merci, Monsieur le président. Etant donné qu'il est plus de 20h, qu'il y a encore des prises de parole et, surtout, que vous aurez une trentaine d'amendements à faire voter en deuxième puis en troisième débat - je vous prierai d'ailleurs de les lire et nous demanderons en outre le vote nominal sur absolument chacun d'entre eux -, je souhaiterais une suspension de séance pour que le Bureau et les chefs de groupe puissent se réunir et discuter de la suite. Merci, Monsieur le président.
Le président. Très bien. C'est une motion d'ordre d'après l'alinéa 1, lettre b, de l'article 79; ce vote est soumis à une majorité des deux tiers.
Mise aux voix, la motion d'ordre (suspension de la séance) est rejetée par 60 non contre 34 oui (majorité des deux tiers non atteinte).
Le président. Nous poursuivons le débat et je passe la parole à Mme la députée Ana Roch. Avant que vous ne la preniez... (Brouhaha. Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.)
Mme Ana Roch. Merci, Monsieur le président.
Le président. Un instant ! (Brouhaha. Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Un peu de silence, s'il vous plaît ! Monsieur Romain, un peu de silence, s'il vous plaît. (Un instant s'écoule.) Merci. Madame Roch, vous pouvez y aller.
Mme Ana Roch (MCG). Merci, Monsieur le président. J'avais préparé une intervention pour souligner les points positifs de ce projet, mais je ne vais pas faire perdre plus de temps à ce Grand Conseil. Nous soutenons... (Remarque.) ...tous les avantages mis en avant par la majorité de ce parlement en faveur de ce texte.
Ça fait maintenant plus de deux heures qu'on entend je ne sais combien de fois le PLR dire qu'il n'a rien compris au projet ! Vu le nombre de séances auxquelles nous avons eu droit non seulement pour l'explication du projet, mais aussi pour participer à son élaboration et nous l'approprier - il a été construit avec les personnes qui ont participé à ces séances et à ces commissions -, je pense qu'on aurait pu demander les auditions nécessaires ou voulues: nous en avions largement la possibilité, comme dans toutes les commissions.
Une voix. Vous l'avez refusé en commission !
Mme Ana Roch. Je ne vous ai pas coupé la parole, Monsieur Ivanov, lorsque vous vous êtes exprimé; merci ! Au lieu de nous faire perdre aujourd'hui du temps, ou plutôt de faire perdre du temps et de l'argent pour rien, le PLR aurait peut-être mieux fait de demander un cours particulier pour qu'on lui explique le texte. Nous aurions gagné en efficience aujourd'hui, au parlement !
Je n'en dirai pas plus, à part qu'il faut soutenir ce projet de loi: il est évident qu'il faut du changement. On a peur du changement, car il amène bien sûr des interrogations et de nouvelles choses. Nous sous-estimons notre corps enseignant: même s'il n'est à la base pas formé pour la mixité, je pense qu'il a largement les compétences pour apprendre et enseigner correctement dans cette configuration, et donner ainsi leur chance à tous les élèves ! Le PLR souhaite créer des castes - des castes d'élite et d'autres; je trouve ça ignoble ! (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Mme Ana Roch. Ignoble, parce que tous les élèves ne sont pas égaux ! Chacun a ses difficultés et ses réussites, mais ce n'est pas une raison pour faire deux écoles différenciées. C'est honteux - honteux ! Et pour avoir des apprentis qui sortent des niveaux les plus bas, je vous assure que même les élèves en grande difficulté font des apprentis formidables ! (Applaudissements.) Je ne laisserai pas le PLR sous-estimer le corps enseignant et les élèves ! Merci. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo ! (Commentaires. M. Sylvain Thévoz prend des clichés de l'assistance. Protestations.)
Une voix. C'est scandaleux !
Une autre voix. C'est inadmissible !
Le président. Monsieur Thévoz... (Commentaires. Protestations.) Taisez-vous, s'il vous plaît ! Monsieur Thévoz, la prise d'images dans cette enceinte est soumise à l'approbation de la présidence. Je vous prie de supprimer les images qui figurent sur votre téléphone... (Commentaires.) Un instant ! S'il vous plaît ! Vous voulez ma place ? (Commentaires.) Monsieur le sautier, je vous invite à vérifier auprès de M. Thévoz que la procédure à ce sujet est bien respectée. Nous poursuivons le débat et je passe la parole à M. Olivier Baud.
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, «l'école publique a pour buts [...]:
a) de donner à chaque élève le moyen d'acquérir les meilleures connaissances et compétences dans la perspective de ses activités futures et de chercher à susciter chez lui le désir permanent d'apprendre et de se former; [...]
f) de tendre à corriger les inégalités de chance de réussite scolaire des élèves dès les premières années de l'école.»
Je n'ai fait que lire les lettres a et f de l'article 10 de la LIP, article qui mériterait d'être relu plus souvent dans son intégralité. Or, Mesdames et Messieurs les députés, les statistiques du canton mettent en évidence l'impasse dans laquelle se trouve le système scolaire genevois, et tout particulièrement son incapacité à corriger les inégalités de chance de réussite scolaire des élèves.
Pour Ensemble à Gauche, ce constat est crucial et impose de ne pas rester les bras ballants. Les indicateurs statistiques du SRED ont montré que les compétences des élèves des milieux modestes ou défavorisés en fin de 9e, notamment en français et en mathématiques, sont nettement plus faibles que celles des élèves de milieux plus favorisés. De plus, s'agissant de leur promotion, les élèves de R3 réussissent bien mieux que ceux de R1 en fin de 9e. Les constats sont semblables en fin de 11e. Il convient ainsi de revoir l'organisation actuelle du cycle d'orientation afin que la stigmatisation et l'exclusion, qui empêchent le bon déroulement de la fin de la scolarité obligatoire de nombre d'élèves, cèdent le pas à une école permettant la réussite de toutes et tous.
De fait, le cycle d'orientation vit toujours au rythme des sections, comme lors de sa création dans les années 60. Mais à l'époque, les élèves trouvaient plus facilement des places d'apprentissage après la scolarité obligatoire et pouvaient donner du sens à leurs études malgré les éventuelles difficultés scolaires rencontrées. Le contexte a fortement évolué; je n'ai pas besoin de l'expliquer. Je m'en voudrais aussi de redonner les arguments en faveur de cet objet, car nous manquons de temps et les groupes qui ont suivi les travaux et vont voter ce projet de loi les connaissent - je les en remercie.
J'aimerais toutefois évoquer brièvement un tableau que vous trouverez à la page 104 du rapport, présenté par le service de l'enseignement neuchâtelois - son audition avait été demandée. Une forme de fantasme perdure qui veut faire croire que les élèves d'un niveau dit inférieur ont des connaissances qui vont de A à B, ceux d'un niveau moyen de B à C et ceux du niveau au-dessus de C à D. Mais c'est absolument inexact, c'est une vision erronée, car le recoupement des niveaux est patent sur le graphique: les meilleurs élèves du niveau dit inférieur sont meilleurs que bien des élèves du niveau dit supérieur. Il est donc totalement injuste de s'obstiner à séparer ces élèves.
Mesdames et Messieurs les députés, je préside la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport depuis le 26 mai 2021, date qui coïncide avec le début des travaux de commission sur le CO22. Ce que j'entends ce soir est quand même surprenant pour moi qui étais présent à toutes les séances, sans compter la vacuité des propos des opposants. J'aimerais d'abord, avant de vous faire part de mon étonnement sur certains points, souligner la qualité des travaux menés par le département, notamment dans le groupe politique. Toutes les questions ont pu être posées et il a été répondu à tout. Les députés ont pu non seulement suivre l'évolution des travaux mais y participer activement. M. Ivanov n'est pas venu; peut-être parce qu'il pensait, à tort, qu'il n'y avait pas de jetons de présence ? Je ne le connais pas vénal et il s'agit plutôt, à mon avis, de méconnaissance. (Remarque.) Quoi qu'il en soit, toutes les auditions demandées en commission ont été honorées et aucun amendement n'a été déposé.
Ce soir, j'apprends qu'une lettre de l'UAPG a été envoyée. A qui ? Pas à moi, pas à la commission de l'enseignement: je ne l'ai pas vue, pas lue. Il faudrait donc croire que l'UAPG n'a pas trouvé le moyen de la faire parvenir ? Ce n'est véritablement pas sérieux ! Comme cette lettre signée par des profs du cycle d'orientation; les associations professionnelles représentatives du personnel enseignant ont été auditionnées et soutiennent ce projet à l'unanimité. J'entends aussi que le PLR voudrait auditionner l'université. Serait-il tout d'un coup disposé à prendre en compte les résultats de la recherche en éducation en Suisse ? C'est une bonne nouvelle - si c'est le cas.
Mesdames et Messieurs les députés - et je vais conclure là -, le PLR a annoncé qu'il lancerait un référendum. Alors un peu de courage, Mesdames et Messieurs les députés du PLR: laissez la majorité voter ce projet de loi et laissons ensuite le peuple trancher, si vous arrivez à récolter les signatures nécessaires. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. (Remarque.) J'ai bien noté... (Remarque.) Attendez ! Dans l'ordre: j'ai bien noté la mise en cause de M. Ivanov, mais j'ai auparavant reçu une proposition de motion d'ordre de la part de M. Florey et c'est par elle que je vais commencer. Monsieur Stéphane Florey, vous pouvez formuler votre motion d'ordre.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Il est 20h21: donnez-moi, s'il vous plaît, les articles qui vous permettent de capturer le Grand Conseil au-delà de l'horaire ordinaire, soit 20h ! J'ai retourné la LRGC dans plusieurs sens, il n'y a concrètement aucun élément qui vous le permette. Dans les faits, il est admis qu'on peut prolonger un débat, à raison d'un quart d'heure, pour le conclure; là, nous n'avons même pas fini...
Le président. Votre motion d'ordre, Monsieur le député ?
M. Stéphane Florey. ...le premier débat. Il y a une multitude d'amendements pour le deuxième débat et, on le sait déjà, pour le troisième. Je vous le redemande donc, Monsieur le président: donnez-moi la base légale qui vous permet de faire durer ce débat à l'envi, chose qui pour moi n'est pas possible. Je vous remercie. Et je demande bien évidemment la levée de la séance !
Le président. Très bien, voilà la motion d'ordre. Je vous précise que la compétence découle de la teneur de la convocation, qui n'indique que des heures de début de séance; usuellement, quand on passe deux séances à traiter un objet, on essaie au moins de le traiter entièrement. Mais je vais faire voter votre motion d'ordre qui vise donc à... suspendre ou lever la séance ? (Remarque.) Lever la séance, très bien. La majorité des deux tiers est requise, comme d'habitude.
Mise aux voix, la motion d'ordre (levée de la séance) est rejetée par 56 non contre 35 oui et 1 abstention (majorité des deux tiers non atteinte).
Le président. J'imagine que M. le député Murat-Julian Alder a également une motion d'ordre à formuler ? (Remarque.) Vous avez la parole.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Monsieur le président, je vous remercie de me donner la parole. Conformément à l'article 79A de la LRGC, je demande au Bureau de faire respecter le règlement. Selon l'article 7 de la LRGC:
«1 Chaque session comprend une ou plusieurs séances.
2 Les convocations adressées à chaque député pour une ou plusieurs séances doivent contenir:
a) l'indication du lieu, des jours et des heures des séances prévues;
b) l'ordre du jour de ces séances. [...]»
Nous avons été convoqués le jeudi 11 novembre à 17h et 20h30 et le vendredi 12 novembre à 14h, 16h et 18h; il n'apparaît nulle part que nous aurions été convoqués à 20h. J'aimerais encore ajouter que lorsque nous pouvons être amenés à siéger le vendredi soir, par exemple pour les comptes ou le budget - ce que nous ne faisons jamais, mais nous sommes quand même convoqués à titre préventif -, il y a toujours la mention de 20h30 sur la convocation ! Ce n'est pas le cas ici.
Nous sommes un parlement de milice, nous avons d'autres activités. (Brouhaha.) Le week-end commence; nous avons des familles. (Brouhaha.) Il n'y a objectivement... (Brouhaha.)
Le président. Laissez l'intervenant parler, s'il vous plaît !
M. Murat-Julian Alder. Il n'y a objectivement aucune urgence à ce que ce projet de loi soit traité ce soir ! Cela peut parfaitement avoir lieu lors d'une séance ultérieure. Je considère donc, Monsieur le président, que toute décision prise par ce parlement au-delà de 20h est soumise à un recours pour des irrégularités, pour des vices de forme ! Il est temps maintenant que la majorité prenne acte du fait que la séance de ce jour est terminée. Et il vous appartient, Monsieur le président - je le dis respectueusement -, de prendre de la distance avec la majorité et, conformément au règlement du Grand Conseil, à la convocation que nous avons reçue et à nos propres usages, de lever la séance puis de reprendre simplement ce sujet lors d'une séance ultérieure. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Le président. Je note donc une motion d'ordre visant à lever la séance, mais vous n'avez pas cité de base légale qui forcerait à lever la séance à 20h.
M. Murat-Julian Alder. Vous n'avez pas cité de base légale qui vous autorise à nous garder au-delà de 20h.
Le président. C'est un silence qualifié de la loi, Monsieur le député. (Remarque. Commentaires.) Très bien, nous sommes saisis d'une nouvelle motion d'ordre visant à lever la séance.
Mise aux voix, la motion d'ordre (levée de la séance) est rejetée par 59 non contre 35 oui (majorité des deux tiers non atteinte).
Le président. Comme le veut l'usage, j'accorde maintenant trente secondes à... Excusez-moi, Monsieur Ivanov, nous sommes saisis d'une nouvelle motion d'ordre. Madame la députée Caroline Marti, vous avez la parole.
Mme Caroline Marti (S). Merci, Monsieur le président. Je propose d'interrompre les débats et de passer directement au vote d'entrée en matière. Je vous remercie.
Le président. Très bien. C'est une autre motion d'ordre, basée sur la lettre a, alinéa 1, de l'article 79. Nous passons au vote.
Mise aux voix, la motion d'ordre (interruption immédiate du débat et passage au vote) est rejetée par 61 oui contre 34 non (majorité des deux tiers non atteinte).
Le président. Nous poursuivons... (Remarque.) Est-ce que c'est une motion d'ordre, Monsieur Béné ? (Remarque.) Vous avez la parole pour la formuler.
M. Jacques Béné (PLR). C'est bien une motion d'ordre: je demande à nouveau de cesser maintenant nos travaux. Mais j'aimerais savoir, si cette demande est refusée, jusqu'à quelle heure vous avez l'intention de nous garder dans cette salle. Je pense que nous sommes quand même en droit de savoir jusqu'à quelle heure vous, en tant que président seul, sans décision du Bureau, avez l'intention de nous garder ici, ce qui n'est jamais, jamais, jamais arrivé !
Le président. Je vais suspendre brièvement la séance pour réunir le Bureau au perchoir et vous offrir la réponse. Je convoque les membres du Bureau ici même.
La séance est suspendue à 20h27.
La séance est reprise à 20h53.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, après des discussions constructives entre le Bureau et les chefs de groupe, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il est dans l'intérêt de tous les groupes de terminer le traitement de ce point ce soir même, le plus vite possible. Je vous encourage à limiter vos prises de parole et, quant à moi, je prendrai garde à bien énoncer les différentes étapes du traitement de cet objet. En attendant, je dois juste vous informer qu'en raison d'un temps de parole restant de cinq secondes, les différents inscrits du groupe PLR ne pourront plus s'exprimer. Il en va de même pour le groupe UDC...
Une voix. Ah !
Le président. ...et il me semble qu'aucun autre groupe n'a demandé la parole; toutes les demandes de parole, à part celle de M. Cerutti, sont donc annulées. Est-ce que M. Thierry Cerutti souhaite quand même intervenir ?
M. Thierry Cerutti (MCG). Merci, Monsieur le président. C'était justement pour présenter une motion d'ordre visant à clore les débats et à passer immédiatement au vote de ce projet de loi, mais ça a été fait. Merci.
Le président. Très bien. C'était justement l'étape suivante; est-ce qu'une telle demande est formulée ? (Commentaires.) Ah, excusez-moi, j'ai oublié les demandes de parole de M. Selleger et de Mme Desbiolles. Est-ce que ces demandes sont maintenues ?
M. Charles Selleger (HP). Oui, Monsieur le président !
Le président. Monsieur Selleger, après vous. (Un instant s'écoule.) Après vous, Monsieur Selleger !
M. Charles Selleger. Si je comprends bien, Monsieur le président, vous me donnez la parole maintenant; je vous remercie. En préambule, je dirai que je trouve piquant que les groupes qui préconisent l'augmentation, le retardement de l'âge auquel les enfants font leur choix - leur choix de carrière, qu'il soit gymnasial ou professionnel -, soient les mêmes qui, sur le plan civique, réclament l'abaissement de l'âge du droit de vote.
Cela dit, si on en revient au début des années 60, à l'époque où le cycle d'orientation a été pensé, on aurait peut-être mieux fait de l'appeler le cycle de réorientation ! L'orientation se faisait alors à la fin du primaire; les élèves arrivaient dans le secondaire I déjà orientés, mais ils pouvaient, grâce au cycle, être réorientés si la première orientation n'était pas la bonne ! Cela était facilité par la proximité des classes qui étaient toutes regroupées dans les mêmes établissements. Il y avait par conséquent une proximité des élèves et surtout des enseignants: ils se connaissaient entre eux et pouvaient, au cours de leurs séances, échanger sur la pertinence de réorienter tel élève ou tel autre et sur le soutien adéquat à lui apporter.
Progressivement, l'évolution de la société a voulu que l'on privilégie l'orientation vers des filières gymnasiales plutôt que vers des filières d'apprentissage et celles-ci ont donc été déconsidérées. On s'est acharné à retarder les orientations, on a gonflé la masse d'élèves orientés à tout prix vers le gymnasial, ce qui a abouti à affaiblir ce niveau et à augmenter le nombre d'élèves mal à leur place et finalement en échec. Il est temps, contrairement à ce que nous propose cette loi, de revenir aux fondamentaux du cycle d'orientation tel que l'avaient pensé, et voulu, des politiciens visionnaires comme Alfred Borel ou André Chavanne.
En conclusion, il convient de refuser cette réforme et, si la situation actuelle n'est pas bonne, d'en faire une qui aille dans un autre sens. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va maintenant à Mme la députée Sophie Desbiolles...
Mme Sophie Desbiolles. Je renonce.
Le président. ...qui renonce. La parole va donc à... (Remarque.) Ah oui, excusez-moi, Monsieur Ivanov. Comme vous avez été mis en cause, vous avez la parole pour trente secondes.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Je ne veux pas épiloguer, car il y a une motion d'ordre. Néanmoins, j'aimerais juste préciser quelque chose: j'aurais trouvé beaucoup plus sain... (Remarque.) J'ai appris qu'il y a eu des jetons de présence lors de ces neuf séances et je trouve ça regrettable - je pense qu'on peut donner un peu de temps pour le canton. Personnellement, j'ai une entreprise à mener; on arrive en fin d'année et c'est chaud. Par conséquent, on cause une fois de plus du tort aux petites entreprises, aux petits patrons qui se lèvent tôt le matin et qui créent de l'emploi, des places d'apprentissage...
Le président. Merci.
M. Christo Ivanov. ...et je trouve simplement cela insultant et inadmissible ! Monsieur le président, j'ai dit. Merci.
Le président. Merci. Pour finir, le dernier inscrit est M. Buchs. Vous avez trois minutes vingt-huit.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président, je serai bref. Je voudrais juste dire que ce débat s'inscrit aussi dans la révision de la loi sur la prévoyance sociale et l'aide sociale, et c'est vraiment intéressant de voir que le gros problème dans ce canton, ce sont réellement les jeunes en état de décrochage. Je vous donne les chiffres - c'est important de les connaître et qu'ils figurent au Mémorial: 69% des jeunes de 18 à 25 ans qui sont à l'aide sociale et à l'Hospice général n'ont pas de formation professionnelle alors que le taux est de 50% dans le reste de la population. On voit donc qu'il y a un gros gros gros problème chez des jeunes qui sont en décrochage et nous avons aujourd'hui la possibilité de proposer quelque chose pour éviter ce décrochage social, ce qui est vraiment essentiel. Si on veut faire une réforme de l'aide sociale, si on veut aider ces jeunes, si on veut trouver des solutions, il faut tout simplement voter cette loi. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, Mesdames et Messieurs, je vous fais voter l'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 12974 est adopté en premier débat par 57 oui contre 32 non.
Deuxième débat
Le président. En accord avec le chef de groupe PLR, tous les amendements venant de membres de son groupe sont à considérer, pour le vote, comme un grand amendement général. A moins qu'il n'y ait des oppositions, je vous en épargne la lecture. (Un instant s'écoule.) Pas de scandale ? Nous allons donc voter sur l'amendement général du groupe PLR.
Le président. Quelqu'un a sollicité tout à l'heure le vote nominal; est-ce que cette demande est soutenue ? (Plusieurs mains se lèvent.) C'est le cas. Mesdames et Messieurs, nous sommes en procédure de vote.
Mis aux voix, cet amendement général est rejeté par 57 non contre 32 oui (vote nominal).
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 24, al. 3 (nouveau), et 25 (nouvelle teneur).
Le président. La rapporteure de majorité a déposé un amendement à l'article 67, alinéa 2, pour biffer une partie de la disposition, soit «répondre aux besoins des élèves à haut potentiel intellectuel au sens de l'article 27», et ajouter «les élèves répondant aux conditions fixées par voie réglementaire». Je vous lis le texte soumis à votre approbation:
«Art. 67, al. 2 (nouvelle teneur)
2 Des aménagements pour un parcours accéléré peuvent être prévus afin de raccourcir d'une année la durée du degré secondaire I pour les élèves répondant aux conditions fixées par voie réglementaire.»
Celles et ceux... (Remarque.) Ah ? Madame Bidaux, vous souhaitez vous exprimer sur cet amendement ?
Mme Patricia Bidaux (PDC), rapporteuse de majorité. C'était pour l'expliquer, mais on peut tout à fait le voter en l'état, comme a choisi de le faire tout à l'heure le PLR.
Le président. Très bien. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais donc voter sur cet amendement de la majorité.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 56 oui contre 32 non.
Mis aux voix, l'art. 67 (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'art. 68, al. 1 (nouvelle teneur), est adopté, de même que les art. 69 (nouvelle teneur avec modification de la note) à 82 (nouvelle teneur).
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Le président. Le troisième débat est-il demandé ? (Remarque.) Il l'est. (Rires. Commentaires.)
Troisième débat
Le président. Je vous laisse même demander le vote nominal !
Une voix. Vote nominal ! (Rires.)
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.)
Des voix. Oui !
Le président. Très bien, vous l'êtes. Avant de lancer le vote d'ensemble, je vous remercie déjà d'être patients: j'ai un petit message à vous lire à la fin de ce débat.
Mise aux voix, la loi 12974 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 57 oui contre 31 non (vote nominal). (Applaudissements soutenus à l'annonce du résultat. Exclamations.)