Séance du
jeudi 3 juin 2021 à
20h30
2e
législature -
4e
année -
1re
session -
7e
séance
PL 12635-A
Premier débat
Le président. Nous reprenons notre ordre du jour avec le PL 12635-A et sommes en catégorie II, trente minutes. Madame la rapporteure de majorité Sylvie Jay, à vous la parole.
Mme Sylvie Jay (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. La commission des affaires sociales a été chargée d'étudier le projet du Conseil d'Etat modifiant la loi sur le revenu déterminant unifié en vue de mettre en place une entraide administrative. Rappelons ici que les dispositions de l'actuelle LRDU visent à assurer une juste allocation des prestations sociales aux personnes qui y ont réellement droit. (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Madame la rapporteure. (Un instant s'écoule.) Vous pouvez reprendre.
Mme Sylvie Jay. Merci beaucoup. Les éléments déterminants pour fonder un droit aux prestations sociales ou à un assujettissement fiscal sont la domiciliation effective d'une personne ainsi que la prise en compte de l'ensemble de ses revenus et/ou de sa fortune déclarés à l'administration fiscale cantonale. Or l'actuelle organisation de type silos et l'absence de communication de données ciblées entre les services soumis à la LRDU et ceux de l'AFC et de l'OCPM ne favorisent pas l'identification de potentiels comportements abusifs privant l'Etat de ressources nécessaires pour répondre aux besoins des personnes concernées.
L'introduction d'une entraide administrative à des fins de prévention contre les versements indus fait suite à l'entrée en vigueur le 1er octobre 2016 de l'article 148a du code pénal, lequel demande que soit adoptée une stratégie transversale administrative permettant de détecter les cas d'abus. C'est dans ce contexte que s'inscrit le projet de loi avec l'ajout en son article premier d'un alinéa nouveau pour le renforcement de l'entraide administrative au niveau cantonal et une simplification des procédures en vue d'un traitement efficace des demandes d'aides.
Actuellement, la collaboration et les échanges d'informations entre les services concernés sont conditionnés au dépôt d'une requête formelle qui alourdit et freine le processus d'allocation de prestations sociales au détriment des bénéficiaires. La proposition d'une entraide administrative à caractère spontané permet d'y remédier. Il est souligné à ce propos que ladite spontanéité n'est pas obligatoire, mais constitue une faculté n'impliquant plus la forme d'une requête formelle.
La commission s'est toutefois inquiétée de la mise en place de cette forme d'échange, notamment du point de vue de la protection des données; elle a souhaité l'avis du préposé cantonal à la protection des données, lequel, dans ses recommandations, demande que l'échange soit restreint aux services amenés à rendre des décisions et que les informations répondent au principe de finalité.
La seconde modification, apportée à l'article 3, alinéa 2, permet de réserver également les exceptions prévues par la loi d'application de la loi fédérale sur l'assurance-maladie concernant les assurés ayant une fortune ou un revenu brut annuel importants qui, de fait, ne peuvent bénéficier de l'octroi d'un subside.
Enfin, la dernière modification consiste en un nouvel article 13F, qui correspond amplement à l'article 9A RRDU, lequel sera abrogé après l'entrée en vigueur du présent projet de loi.
La commission prend acte du fait que ces modifications créent la base légale formelle ancrant l'entraide administrative dans la LRDU et vous recommande dans sa majorité d'accepter ce projet de loi. Merci, Monsieur le président.
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, l'entraide administrative ne peut, ne doit se concevoir à sens unique. Or c'est pourtant bien un renforcement de cette unilatéralité qui nous est proposé ici. La modification légale proposée par le projet de loi 12635 a été présentée comme ayant pour but principal de renforcer l'entraide administrative afin de prévenir les versements indus de prestations sociales cantonales et de faciliter les procédures de recouvrement. De fait, l'exposé des motifs, les présentations et les divers commentaires de ce projet de loi ont été focalisés sur un objectif de renforcement de la lutte contre la fraude aux prestations sociales. Cela alors que, de l'aveu même du département de la cohésion sociale, les occurrences de fraude sont très faibles. Il faut en effet relever - et les chiffres mentionnés par le DCS en attestent - que la fraude aux prestations sociales est un phénomène de très faible importance, contrairement à celui du non-recours, dont on sait - sans pouvoir malheureusement le chiffrer, et pour cause - qu'il est très fréquent et qu'il induit des coûts sociaux et sanitaires importants faute d'une intervention idoine en temps requis.
L'une des dernières révisions de la loi sur le revenu déterminant unifié traitées par notre Grand Conseil prévoyait d'ores et déjà un renforcement de l'entraide administrative en permettant en «back office» la transmission d'un service de l'Etat à l'autre des données nécessaires à la réactualisation des dossiers à des fins de corrections des montants de prestations. Des corrections à sens unique, rappelez-vous, Mesdames et Messieurs, puisqu'elles ne devaient s'opérer qu'en faveur de l'Etat en cas de montants indûment perçus, mais qu'elles ne fonctionneraient pas dans les cas de figure où des ayants droit se verraient pénalisés par défaut de réactualisation des données les concernant, une asymétrie désignée par certains d'entre nous comme douteuse et injuste.
Aujourd'hui, par le biais du projet de loi, on nous propose entre autres une consolidation du système de lutte contre la fraude aux prestations sociales. Avec la proposition d'introduire la modalité de «communication spontanée», la recherche de fraude devient systématique et peut s'appliquer sans autre indication que la méfiance ou le préjugé, sans garantie contre l'arbitraire.
Il faut remarquer qu'en supprimant la nécessité d'une requête formelle, il n'y a pas de simplification ou de fluidification des procédures d'accès aux prestations. On pourrait à l'inverse en déduire l'ajout fréquent, voire systématique, d'une étape supplémentaire dans l'examen des dossiers. De fait, l'introduction dans le dispositif légal de cette autorisation de communication spontanée revient à affirmer la volonté de privilégier la recherche d'éventuels rares fraudeurs alors que la logique et l'urgence voudraient plutôt que l'Etat s'attache à résorber l'ample et coûteuse problématique du non-recours.
Lors des travaux de la commission, il a été indiqué que «si, à l'origine, le Conseil d'Etat avait pour premier objectif le lien avec l'art. 148a CP» - celui qui se rapporte à l'obtention illicite de prestations d'une assurance sociale ou de l'aide sociale -, «en réalité cela va dans les deux sens, pour autant qu'il y ait un échange d'informations sur la question», ce qui n'est pas garanti.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Jocelyne Haller. Oui, merci. La minorité constate qu'à aucun moment, que ce soit dans l'exposé des motifs ou dans les présentations et commentaires de ce texte, cet élément n'a été mentionné. Il apparaît que quand bien même le texte légal permettrait ces corrections à la hausse ou à la baisse, rien n'est dit ou mis en place pour favoriser des corrections en faveur des ayants droit, pas plus sur le plan procédural que sur un nouvel état d'esprit à développer pour traquer le non-recours ou la légitime rectification à la hausse de prestations sociales ne correspondant pas ou plus à la situation réelle d'une personne.
Lorsque l'on a introduit la loi RDU en 2005, c'était dans la perspective de hiérarchiser les prestations, mais surtout de simplifier l'accès à celles-ci. Or, depuis lors, il n'a pas été constaté une simplification d'accès, bien au contraire: les exigences procédurales n'ont cessé de croître et les moyens pour accompagner les usagers dans le dédale des administrations sociales de diminuer. Dès lors, considérant que le système de lutte contre la fraude est d'ores et déjà largement développé, qu'il remplit à satisfaction son office et que l'entraide administrative devrait avant tout être destinée à simplifier les démarches des usagers - ainsi que le prévoyait la loi RDU lors de son adoption - plutôt qu'à renforcer la méfiance à l'égard de ceux-ci, la minorité vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser le projet de loi tel que présenté et à n'en retenir que l'adaptation technique prévue à l'article 3, alinéa 2, dans sa nouvelle teneur. Cela l'amène formellement à présenter les amendements figurant dans son rapport, que nous vous invitons à accepter comme condition à l'adoption de ce projet de loi. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Madame la rapporteure de minorité. La parole va maintenant à M. le député Jacques Apothéloz pour deux minutes quarante-sept.
M. Jacques Apothéloz (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cet objectif de prévention par un renforcement de l'entraide administrative consacre la volonté du Conseil d'Etat d'adopter une stratégie transversale permettant de détecter de manière optimale des cas d'abus, suite à l'introduction le 1er octobre 2016 de l'article 148a du code pénal réprouvant l'obtention illicite de prestations d'une assurance sociale ou de l'aide sociale.
Je pourrais m'arrêter à la lecture de cet extrait de l'exposé des motifs de ce projet de loi, car il synthétise parfaitement la raison de voter en sa faveur. Mais il faut tout de même ajouter que si certains argumentent que la fraude est à un niveau suffisamment bas - et nous nous en réjouissons - pour ne pas accepter ce projet de modification de la loi, celui-ci n'est en rien une contrainte supplémentaire pour les bénéficiaires de prestations sociales. Cette modification n'est qu'une facilitation de l'échange et de la transmission d'informations entre différents services de l'Etat.
Les principaux changements consistent à introduire la possibilité de transmission spontanée, ce qui dispense les acteurs d'une requête formelle, à spécifier quels sont les services concernés par cette transmission et à amener les précisions juridiques nécessaires quant aux lois qui sont réservées. Il s'agit de supprimer les entraves aux échanges d'informations entre les services et ainsi de simplifier les relations avec l'administration. Cela ne change rien aux fondements et aux principes décrits dans la loi. Cette modification a donc un effet préventif et il est pertinent de disposer d'une base légale pour la communication spontanée, ce qui est à saluer.
J'ajouterai enfin que cette modification a été validée, voire plébiscitée par le préposé cantonal à la protection des données et à la transparence. Pour ces raisons, le groupe PLR vous engage, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce projet de loi. Je vous remercie.
M. André Pfeffer (UDC). Comme cela a déjà été dit, les éléments déterminants pour fonder un droit aux prestations sociales sont, d'une part, la domiciliation effective d'une personne à Genève et, d'autre part, la prise en compte de l'ensemble des revenus et de l'éventuelle fortune déclarés aux impôts. L'organisation de type silos et l'absence de communication de données pertinentes entre les services et institutions soumis à la loi sur le revenu déterminant unifié posent problème. Cette absence de communication suffisante génère, premièrement, des comportements abusifs de certains services ou instituts; deuxièmement, un travail supplémentaire voire à double de notre administration, ainsi qu'une augmentation des tâches pour les bénéficiaires, qui doivent démultiplier les démarches et les documents à remettre; troisièmement, un sentiment d'inefficacité de notre administration; quatrièmement, un risque d'erreur ou de fraude s'agissant du versement des prestations; enfin, une impression d'injustice et d'iniquité autant chez les bénéficiaires que chez les contribuables.
Ce projet de loi, déposé par le Conseil d'Etat, propose d'améliorer la cohésion sociale et de renforcer la confiance dans les institutions. Les modifications apportées créent la base légale pour une entraide administrative pour tous les acteurs liés au revenu déterminant unifié. La collaboration et la facilité de renseignement sont très limitées. Il faut rappeler en outre que tous les fonctionnaires et collaborateurs de l'Etat et des instituts de droit public sont soumis au secret de fonction.
Pour toutes ces raisons, le groupe UDC vous recommande d'accepter ce projet de loi déposé par le Conseil d'Etat. Merci de votre attention.
Mme Helena Verissimo de Freitas (S). On le sait, la fraude aux prestations sociales est un phénomène de très faible importance, contrairement au phénomène de non-recours à ces mêmes prestations, par méconnaissance d'un système complexe ou par peur d'être stigmatisé et disqualifié socialement, comme cela apparaît dans l'étude sur le non-recours de Barbara Lucas. Ce dernier phénomène a un coût social et sanitaire bien plus élevé pour la société que le coût de la fraude. La prise en charge se faisant trop tardivement, les situations sont trop dégradées et les personnes bien trop fragiles. C'est bien de ce côté-là qu'il faut se pencher et investir, car oui, l'aide sociale doit maintenant être considérée comme un investissement. Il est temps désormais de changer le regard vis-à-vis de l'aide sociale et de faire en sorte qu'elle soit un tremplin pour sortir de la pauvreté, plutôt qu'un marteau qui enfonce encore plus des personnes en situation de précarité et de fragilité. Ce projet de loi ne prévoyant pas d'entraide administrative dans les deux sens, le parti socialiste conditionne son acceptation au vote des amendements proposés par Mme Jocelyne Haller. Merci beaucoup.
M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien s'était abstenu en commission sur cet objet, mais, après discussion en caucus, a décidé de le voter. C'est un petit oui, parce que nous considérons que cette modification n'est pas nécessaire. C'est beaucoup de choses, c'est une loi compliquée pour un élément qui semble évident, à savoir la transmission spontanée aux autres services qui s'occupent des prestations sociales - cela figure à l'article 13F, alinéa 2, du projet de loi.
Je relève juste un bémol: je suis tout à fait d'accord avec la gauche sur le fait qu'il faut se battre contre le phénomène du non-recours, et sur ce point, la réforme de la LIASI devrait permettre une diminution du taux de non-recours. On ne doit toutefois pas négliger non plus la dénonciation d'abus, même s'ils sont rares, parce que c'est aussi une question d'équilibre et de justice, tant vis-à-vis des gens qui touchent les aides sociales que des gens qui n'y ont pas droit, que ceux qui les touchent indûment soient recherchés et punis, même si c'est une proportion très faible - et heureusement - des cas constatés.
Il est nécessaire de le faire, mais le parti démocrate-chrétien pense qu'actuellement, cela est possible sans édicter une nouvelle loi. C'est pour cette raison que nous nous étions abstenus en commission, mais nous voterons cette loi. Je vous remercie.
Mme Alessandra Oriolo (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, ce projet de loi déposé par le Conseil d'Etat en janvier 2020 a, nous dit-on, pour but de renforcer l'entraide administrative afin de prévenir les versements indus des prestations sociales cantonales et de faciliter les procédures de recouvrement. Cependant, ce texte se concentre sur la fraude, alors que celle-ci représente 0,5% des dossiers. La problématique du non-recours, quant à elle, est bien plus importante et il nous semble que c'est véritablement là que l'Etat doit mettre les moyens.
A titre personnel, je déplore qu'on nous présente un projet concernant une problématique annexe plutôt que de nous proposer une solide politique sociale d'aide aux personnes défavorisées. Sans vouloir incriminer un bloc, je regrette qu'un des rares objets que nous arrivions à faire passer à la commission des affaires sociales soit un projet pour éviter la fraude. Quid des familles en situation précaire et difficile ? Quid de l'augmentation de la pauvreté ? Quid des véritables besoins ? Rien ou peu. Une majorité de ce parlement semble être guidée uniquement par l'objectif de faire des économies. Je comprends que la politique, c'est trouver des compromis et des consensus, mais honnêtement, parfois, je sèche un peu.
Il a semblé à une partie des Verts que ce projet de loi ratait sa cible et que ce n'est pas en renforçant les contrôles et en systématisant les transmissions de données privées à tout service que nous ferons une véritable avancée sociale. Les moyens ne devraient pas être mis là. Toutefois, nous sommes en démocratie, nous discutons, réfléchissons, débattons beaucoup chez les Verts et ce projet de loi nous a partagés. Pour une partie du groupe, il reste intéressant de pouvoir améliorer le fonctionnement du RDU et son informatisation, et cette proposition permettrait également de lutter contre une organisation en silos et de favoriser une meilleure transparence. Une partie des Vertes et des Verts a donc jugé qu'il présentait une amélioration de l'Etat qui était bonne à prendre et qu'elle pourrait même être éventuellement bénéfique pour les personnes recevant ces prestations. Une partie de notre groupe, vous l'aurez compris, est favorable à ce projet de loi. Pour ces raisons, le groupe des Verts et des Vertes, attaché à la pluralité des idées, laissera la liberté de vote à ses députés.
Quant aux amendements déposés par le groupe Ensemble à Gauche, nous les soutiendrons, car ils enlèvent notamment l'article 13F qui autorise à communiquer spontanément les informations, ce qui nous semblait être un point sensible. Je vous remercie.
Mme Françoise Sapin (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, comme cela a été relevé par plusieurs préopinants, ce projet de loi renforce l'entraide administrative dans la lutte contre la fraude. C'est bien entendu la volonté du Conseil d'Etat, puisque c'est lui-même qui propose ce texte. Même si les cas de fraude sont très peu nombreux, nous devons tout mettre en oeuvre pour les supprimer totalement. Les modifications présentées dans ce projet de loi vont dans ce sens. C'est pourquoi le MCG soutiendra cet objet et vous enjoint de faire de même.
Le président. Merci, Madame la députée. Je rends la parole à M. le député Bertrand Buchs pour une minute quarante-neuf.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Je pense qu'on se trompe de débat en mettant en parallèle le non-recours et la fraude. Vous ne pouvez pas ne pas vous battre contre la fraude, même si elle est très faible. C'est une question de bon sens. Le non-recours, c'est autre chose et cela doit faire l'objet d'une autre loi. Nous sommes donc en train de refuser un projet de loi en discutant du non-recours, qui n'a rien à voir avec le propos que nous tenons actuellement. (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Monsieur le député. (Un instant s'écoule.) Merci de respecter les prises de parole ! Vous pouvez poursuivre, Monsieur le député.
M. Bertrand Buchs. Merci beaucoup, Monsieur le président. La question qu'on doit donc se poser sur ce projet de loi, c'est s'il est nécessaire ou non du point de vue du combat contre la fraude. Point. C'est tout. Quant au non-recours, il faut en parler dans le cadre d'un autre projet de loi et dans d'autres conditions. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va maintenant à Mme la rapporteure de minorité pour une minute vingt-deux.
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. J'enchaîne sur ce que vient de dire M. Buchs: précisément, le non-recours, on n'en parle pas assez ! Ou si on en parle, on ne fait rien contre ! En fait, la loi RDU a bel et bien trait à cette question, puisque, la plupart du temps, il s'agit du non-recours aux prestations qui sont réunies sous le chapeau de la LRDU. Le lien est donc naturel et il est bien fondé.
Cela étant dit, je ne peux pas laisser parler de fonctionnement en silos, parce que sinon, ce serait se demander à quoi cela sert que ce Grand Conseil se décarcasse à légiférer, si on oublie que nous avons déjà accepté une modification de la LRDU qui consistait précisément à développer la transmission d'informations entre les différentes composantes de la LRDU. C'est-à-dire que lorsqu'une personne demande une prestation, les données entrées réactualisent automatiquement les données qui la concernent dans les autres dispositifs de prestations. Cette communication existe donc; cette capacité à identifier d'éventuelles fraudes existe. Qu'on ne vienne pas nous faire passer ce projet de loi comme étant indispensable pour lutter contre la fraude aux prestations sociales ! Aujourd'hui, il existe déjà un dispositif.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous le savez, la LRDU définit notamment les éléments de revenus et de fortune qui sont pris en compte pour le calcul du revenu déterminant unifié. Elle s'applique évidemment à toutes les prestations sociales, sous condition de ressources, qui sont versées par le canton. Cela me paraît important de rappeler qu'en 2018, ces prestations sociales ont représenté un montant de plus de 1,7 milliard de francs, Mesdames et Messieurs les députés: 1,7 milliard de francs !
Effectivement, le Conseil d'Etat a décidé en octobre 2017 de renforcer l'entraide administrative dans le cadre de la lutte contre la fraude aux prestations sociales, la fraude fiscale et/ou la domiciliation fictive. Ce projet de loi vise à compléter le but de la LRDU sous l'angle du renforcement de l'entraide administrative entre les services et les institutions soumis à la LRDU et à introduire dans la loi une disposition spécifique à cet effet.
Il ne s'agit effectivement pas d'un projet de loi qui traite du non-recours à l'aide sociale. Je ne peux pas entendre aujourd'hui, en représentant le Conseil d'Etat dans le cadre des discussions sur cette proposition de modification de loi, qu'il n'est pas soucieux de cette question du non-recours. Il y a eu moult communications, y compris des annonces, pour rappeler aux habitants du canton de Genève qu'ils avaient le droit à des prestations sociales. Cela a même été reproché au Conseil d'Etat par certains, qui estimaient qu'on faisait de la publicité pour le recours aux prestations sociales. Nous sommes là dans le cadre d'un projet qui vise à améliorer la transversalité des différents services de l'Etat, alors pour une fois qu'on ne nous reproche pas de travailler en silos, mais au contraire d'améliorer la transversalité et de permettre aux différents services de s'échanger des données...
Et puis, je suis navrée, mais cet argent qui permet d'allouer des prestations sociales, Mesdames et Messieurs, c'est de l'argent public ! C'est de l'argent qui nous est versé par celles et ceux qui contribuent à l'impôt. Il est donc essentiel s'agissant d'argent public que nous nous assurions que celui-ci est dépensé de façon correcte et qu'il ne bénéficie pas à des personnes - et effectivement, cela a été relevé, elles ne sont pas nombreuses - qui n'auraient pas le droit de recevoir ces prestations.
Je me félicite donc, au nom du Conseil d'Etat, que la majorité de votre Conseil entende adopter ce projet de loi. Je pense que c'est aussi essentiel pour donner confiance à la population sur le fait que ces prestations vont être allouées à des personnes qui y ont droit et que nous combattons la fraude avec une organisation transversale entre les différents services. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. La parole n'étant plus demandée, je mets aux voix l'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 12635 est adopté en premier débat par 76 oui contre 15 non et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 1, alinéa 3, présenté par la rapporteure de minorité et proposant de biffer cette disposition.
Mis aux voix, cet amendement (biffage de l'art. 1, al. 3) est adopté par 47 oui contre 46 non. (Applaudissements. Commentaires. Quelques instants s'écoulent.)
Une voix. Vous vous êtes trompés ! Il faut revenir en troisième débat !
Une autre voix. Troisième débat ! (Commentaires.)
Une autre voix. On est en procédure de vote ! (Commentaires. Quelques instants s'écoulent.)
Une autre voix. Il faut redéposer un amendement !
Mis aux voix, l'art. 3, al. 2 (nouvelle teneur), est adopté.
Le président. Nous passons à l'article 13F «Entraide administrative», pour lequel nous sommes à nouveau saisis d'un amendement de la rapporteure de minorité consistant une fois de plus à biffer cette disposition.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 55 non contre 37 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'art. 13F (nouveau, à insérer dans le chapitre IIIA, les art. 13F à 13H anciens devenant les art. 13G à 13I) est adopté. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
Une voix. Mais Yvan, redépose l'amendement !
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Troisième débat
Le président. Je soumets maintenant à votre approbation ce projet de loi dans son ensemble... (Commentaires.)
Une voix. J'ai demandé la parole, Monsieur le président !
Le président. Monsieur le... (Commentaires.)
Une voix. On est en procédure de vote !
Une autre voix. Monsieur le président, on pourrait avoir deux minutes pour rédiger un amendement ?
Des voix. Non non ! (Commentaires.)
Le président. J'ai vu les demandes de prise de parole. Je vais les accorder. Toute autre demande ne sera pas prise en compte. Monsieur le député Cyril Aellen, c'est à vous pour une minute treize.
M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. Je souhaite déposer un amendement au troisième débat qui consiste à réintroduire la disposition biffée précédemment, s'il vous plaît.
Le président. Monsieur le député Sandro Pistis, c'est à vous.
M. Sandro Pistis (MCG). C'était la même proposition. Je vous remercie.
Le président. Merci. Si vous pouvez, en deux minutes, déposer un amendement rédigé et signé, il sera pris en compte. Deux minutes ! (Commentaires. M. Cyril Aellen, Mme Delphine Bachmann, M. Adrien Genecand et M. Yvan Zweifel rédigent l'amendement.)
Nous sommes au terme des deux minutes imparties pour la rédaction de cet amendement. Il n'a pas été reçu. Nous allons donc passer au vote final sur ce projet de loi. (Vives protestations.) Le vote est lancé. (Vives protestations.) Le vote est lancé ! (Huées. Chahut. Quelques instants s'écoulent. M. Yvan Zweifel dépose l'amendement. Brouhaha.) Je vous prie de regagner vos places ! J'ai dit - si vous m'avez bien écouté - que vous aviez deux minutes pour déposer un amendement. Il n'a pas été déposé dans les temps. J'ai ensuite lancé la procédure de vote... (Applaudissements. Chahut.)
Des voix. Motion d'ordre ! (Brouhaha.)
Une voix. Une motion d'ordre, c'est obligatoire, vous êtes obligé de faire trancher, Monsieur le président ! Vous êtes obligé de mettre au vote la motion d'ordre ! (Brouhaha.)
Une autre voix. On se calme !
La première voix. Vous êtes obligé !
Une voix. O-bli-gé ! (Rires. Commentaires.)
Une autre voix. Il a déposé une motion d'ordre ! On demande une suspension de séance, on vote là-dessus ! (Brouhaha. Un instant s'écoule.) Il a demandé une motion d'ordre !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons une longue soirée devant nous, si vous ne me laissez pas terminer mes phrases. J'aimerais terminer ma phrase. La fin de celle-ci, c'était que le règlement autorise les demandes de suspension de séance. Je vais donc vous laisser le proposer. Je vous ai donné deux minutes et nous en avons perdu davantage, parce que vous ne laissez pas les prises de parole se faire dans l'ordre. Monsieur Cyril Aellen, vous pouvez formuler votre demande.
M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. Puisque aucune forme n'est nécessaire pour l'amendement, je vais vous lire ce que je propose comme amendement au troisième débat, et je demande...
Le président. Monsieur Aellen, vous avez demandé une motion d'ordre. Formulez votre motion d'ordre !
M. Cyril Aellen. Alors je demande une suspension de séance, mais j'aimerais proposer l'amendement dans un second temps et je redemanderai la parole pour ce faire. Mais si ce n'est que pour la motion d'ordre, je demande une suspension de séance, Monsieur le président. (Commentaires.)
Le président. Très bien. Je rappelle que la motion d'ordre doit être acceptée par la majorité des deux tiers.
Mise aux voix, la motion d'ordre (suspension de la séance) est rejetée par 56 oui contre 36 non (majorité des deux tiers non atteinte). (Commentaires pendant la procédure de vote.)
Le président. J'imagine que les douze demandes de parole suivantes portaient sur la même requête ? Très bien. Nous sommes arrivés au terme des discussions sur cet objet. Je vous fais donc voter sur ce projet de loi dans son ensemble. (Protestations.)
Une voix. Si on est au troisième débat, je prends la parole, Monsieur le président !
Le président. Nous sommes arrivés au...
Une voix. Appelez la police, Monsieur le président ! (Rires. Commentaires. Un instant s'écoule.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je suspends la séance quelques minutes, le temps que le Bureau et les chefs de groupe se réunissent au sous-sol ! (Exclamations.)
La séance est suspendue à 21h08.
La séance est reprise à 21h25.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le débat sur ce projet de loi. Après discussion avec les chefs de groupe et les membres du Bureau, il a été décidé que cet amendement serait soumis au vote. (Exclamations.)
Une voix. Tout ça pour ça ! (Commentaires.)
Le président. Et comme l'observe un député à ma gauche, il aurait été préférable de le faire sans une aussi grande perte de temps. (Commentaires.) Je vous remercie de garder vos commentaires pour vos interventions au micro lorsque vous êtes inscrites et inscrits. Passé ces quelques remarques, nous allons donc voter sur cet amendement visant à réintroduire l'article 1, alinéa 3, qui a été biffé lors du deuxième débat. Je vous le lis:
«Art. 1, al. 3 (nouveau)
3 Elle a également pour but de renforcer l'entraide administrative afin de prévenir les versements indus de prestations sociales cantonales et de faciliter les procédures de recouvrement.»
Une voix. C'est oui ! (Commentaires.)
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 56 oui contre 36 non et 1 abstention.
Le président. Il ne reste plus de temps de parole au groupe Ensemble à Gauche. Nous passons au vote final sur ce projet de loi.
Mise aux voix, la loi 12635 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 59 oui contre 32 non et 3 abstentions.