Séance du vendredi 2 octobre 2020 à 14h
2e législature - 3e année - 5e session - 25e séance

P 2050-C
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la pétition : Que la honte change de camp !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session V des 1er et 2 octobre 2020.

Débat

Le président. En ce qui concerne l'objet suivant, soit la P 2050-C, Mme Adrienne Sordet sollicite la parole, et je la lui cède.

Mme Adrienne Sordet (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, voilà déjà le deuxième rapport du Conseil d'Etat sur cette pétition. Y figurent des déclarations du département pleines de bonne volonté telles que: «En outre, dans le cadre scolaire, le dispositif du DIP pour l'égalité et la prévention des discriminations liées au genre, à l'orientation et à l'identité sexuelles a été consolidé.» Bizarrement, ces mots sonnent faux.

Un pressentiment confirmé par l'actualité brûlante du t-shirt de la honte et les propos légèrement alarmants tenus par la conseillère d'Etat en charge lors d'une interview. En effet, il y a une forme d'incohérence lorsque, d'un côté, on prétend publiquement qu'il n'y a pas de sexisme chez les enseignants et enseignantes et que, de l'autre, on écrit dans un rapport que des formations spécifiques à ce sujet devraient être prévues pour les professionnels. Lors de ce même entretien, la magistrate affirmait que les enseignants et enseignantes sont le reflet de notre société.

Quand on voit ce qui se passe au cycle de Pinchat et dans les autres établissements, il est normal d'être en colère. En colère car l'école, le lieu qui devrait précisément lutter contre les discriminations liées à l'identité de genre, à l'orientation et à l'identité sexuelles ne le fait pas du tout et cultive un patriarcat dégueulasse. Voilà qui démontre encore une fois que les dispositions prises par l'Etat ne sont de loin pas suffisantes et ne visent pas assez large. C'est avec lassitude et exaspération face à un certain déni de la conseillère d'Etat que nous ne prendrons pas acte de cette réponse et que nous la renverrons à l'expéditeur. Merci. (Applaudissements.)

Mme Françoise Nyffeler (EAG), députée suppléante. La honte doit changer de camp, c'est un thème d'actualité. L'association Viol-Secours avait déposé cette pétition demandant que des mesures concrètes soient prises par l'Etat face aux nombreux témoignages de femmes qui, depuis quelque temps, se sont mises à parler. Or, dans son rapport, le Conseil d'Etat nous répond en gros: «Tout va bien, pas de problème, nous avons déjà entrepris tout ce qu'il faut.» Il nous a annoncé il y a déjà plus d'un an qu'un avant-projet de loi sur l'égalité et la lutte contre les violences et les discriminations liées au genre allait être déposé; nous l'attendons toujours ! Et la réponse à cette pétition, qui ne date pas d'hier non plus, est qu'il faut patienter jusqu'au dépôt de ce texte, car il résoudra tous les problèmes. Nous ne pouvons pas nous prononcer dessus, bien entendu, puisque nous n'en avons pas pris connaissance.

Dans l'intervalle, le sexisme dans les écoles se poursuit, les t-shirts et autres regards prédateurs dont on parlera d'ailleurs dans un moment sont une réalité. On entend pléthore de témoignages quant à des commentaires ou même à des actes sexistes de la part d'enseignants dans les établissements scolaires et les lieux de formation, c'est affligeant. Comportements sexistes, harcèlement, violences et homophobie sont toujours extrêmement répandus parmi les élèves, parfois dans le corps enseignant.

Face à cette situation, le DIP indique que tout va bien, que le dispositif a été renforcé. On aimerait bien en connaître les détails, car on n'en voit pas les effets ! Toujours d'après le rapport, les directions générales disposent maintenant de personnes de référence. Voilà ce que le DIP aime beaucoup faire, régler les problèmes en plaçant des gens au sein des directions générales; malheureusement, sur le terrain, ces nominations ont peu de répercussions. Comme toujours, on nous dit que les programmes d'éducation sexuelle sont censés résoudre la question. Or ces cours sont peu nombreux dans la scolarité d'un enfant et ne suffisent évidemment pas pour répandre et développer la culture du consentement et du respect, pour combattre le viol, les attitudes et les regards prédateurs qui ont cours actuellement.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Mme Danièle Magnin (MCG). Pour ma part, je pense que la pétition était fondée, mais j'ai entendu quelque chose qui m'a un tout petit peu surprise, à savoir l'histoire des t-shirts. Je voudrais simplement dire à ce sujet qu'imposer une tenue correcte semble évident; à titre personnel, j'ai porté l'uniforme pendant toute ma scolarité primaire et cela ne m'a jamais gênée. Voilà, merci. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Le président. Merci. La parole va maintenant à Mme la députée Léna Strasser.

Mme Léna Strasser (S). Merci, Monsieur le président... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Madame la députée ! (Le président agite la cloche.) S'il vous plaît ! Monsieur Burgermeister, Monsieur Pistis !

Une voix. Chut !

Une autre voix. Hé, les gars !

Le président. Nous vous remercions. Allez-y, Madame Strasser.

Mme Léna Strasser. Merci, Monsieur le président. Le groupe socialiste soutiendra encore une fois le renvoi de ce rapport au Conseil d'Etat. Lors des discussions sur la pétition, le projet de loi que ma préopinante a évoqué était déjà presque prêt à être déposé, nous l'attendions pour septembre de l'an passé. La honte doit changer de camp maintenant, et pour cela, il faut mettre en place des moyens concrets qui, pour nous, ne sont pas assez détaillés dans la réponse que nous avons reçue. Merci.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Madame. Nous prenons acte...

Une voix. Il y a une demande de renvoi !

Le président. Ah oui, c'est exact: une demande de renvoi au Conseil d'Etat a été formulée dès le départ par Mme Adrienne Sordet. Veuillez m'excuser, Madame Sordet. Je prie le parlement de se prononcer.

Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la pétition 2050 est rejeté par 40 non contre 36 oui et 1 abstention.

Le Grand Conseil prend donc acte du rapport du Conseil d'Etat sur la pétition 2050.