Séance du
vendredi 13 mars 2020 à
16h
2e
législature -
2e
année -
11e
session -
60e
séance
PL 12165-A
Premier débat
Présidence de M. François Lefort, premier vice-président
Le président. Mesdames et Messieurs, l'ordre du jour appelle le PL 12165-A, classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité est de M. Christian Frey, remplacé par... (Un instant s'écoule.) ...Mme Léna Strasser, à qui je passe la parole.
Mme Léna Strasser (S), rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi, qui vise à supprimer l'article 11, alinéa 3, de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle, a été traité pendant quatre séances par la commission des affaires sociales. L'article 11, alinéa 3, permet aux titulaires d'un permis F, admis à titre provisoire, ayant travaillé à Genève, ayant épuisé leur droit au chômage et étant depuis plus de sept ans en Suisse, de bénéficier du barème d'aide ordinaire de l'aide sociale.
Je me permets, pour mémoire, un bref récapitulatif des types de permis. Un permis N est délivré à une personne qui fait une demande d'asile en Suisse. Il donne droit à une aide spécifique à l'asile, plus basse que l'aide ordinaire. Si l'asile est accordé, la personne obtient un permis B réfugié statutaire et passe à l'aide ordinaire. Si l'asile n'est pas accordé en Suisse, il y a deux cas de figure: soit la personne fait l'objet d'une non-entrée en matière à cause du système Dublin et est renvoyée dans le premier pays européen par lequel elle a transité, soit elle fait l'objet d'une décision négative et est déboutée de l'asile. Dans les deux cas, elle bénéficie d'une aide dite d'urgence, c'est-à-dire de 10 francs par jour, et de prestations d'aide en nature jusqu'à son départ.
Parfois, l'asile n'est pas accordé mais la personne ne peut pas être renvoyée dans son pays d'origine, celui-ci étant en guerre. Elle recevra donc un permis F et aura accès aux mêmes aides et prestations qu'un permis N. Pour mémoire, il est possible de travailler avec chacun de ces permis - pour le permis N avec délai d'attente de trois mois. Les entreprises sont de moins en moins frileuses à engager des personnes avec des permis N ou F, grâce notamment à la simplification des procédures d'embauche et à l'information diffusée entre autres par le bureau de l'intégration des étrangers.
Dès lors, l'article que ce projet de loi vise à éliminer fait pleinement sens: il protège les personnes qui quittent l'aide sociale parce qu'elles trouvent un emploi. Si elles perdent leur emploi, elles ont droit au chômage. Si elles n'arrivent pas retrouver du travail durant leur période de chômage et qu'elles sont en Suisse depuis plus de sept ans, elles passent alors à l'aide sociale, au barème ordinaire, ce qui les aide à rebondir plus facilement et à se réinsérer sur le marché du travail.
Mesdames et Messieurs, la dénomination «provisoire» attachée à leur permis est trompeuse. La majorité de ces personnes ne seront pas renvoyées, encore moins quand elles travaillent, et resteront certainement à Genève durablement. Pour qu'elles puissent sortir à nouveau de l'aide sociale, il est donc extrêmement important de ne pas péjorer leur situation en les privant d'une aide ordinaire. Une très large majorité de la commission vous remercie par conséquent de refuser ce projet de loi.
M. Marc Falquet (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs, les questions liées à l'asile soulèvent souvent de vives réactions, que ce soit de la part des gens qui soutiennent inconditionnellement le domaine de l'asile ou de la part de ceux qui le critiquent systématiquement. Je salue toutefois le travail des associations et des personnes sincères qui s'impliquent pour venir en aide à cette population et je les en remercie.
Si l'UDC a toujours combattu la politique de l'asile, c'est qu'elle considère qu'il s'agit d'une porte d'entrée pour une immigration non contrôlée, avec des gens qui s'intègrent difficilement et ne parviennent pas, dans leur grande majorité, à trouver un emploi. Ils se retrouvent, après des années en Suisse - même après avoir obtenu un permis de séjour - majoritairement à l'aide sociale: 90% des personnes issues de l'asile qui ont obtenu un permis de séjour à Genève se retrouvent à l'aide sociale.
Il faut par ailleurs reconnaître que la Suisse n'a pas un stock d'emplois à offrir à cette population généralement peu formée. Ces gens acceptent alors des emplois précaires, se font exploiter par des employeurs peu scrupuleux ou encore tombent dans la criminalité. Si la politique de l'asile est un problème épineux en matière d'emploi et d'intégration pour les intéressés, elle l'est également s'agissant de son acceptation par la population locale laborieuse, qui souvent ne reçoit pas d'aide du tout et dont la vie est toujours plus difficile.
Mesdames et Messieurs, je vais faire plaisir à notre collègue Diego Esteban, qui dit être tendu lorsque je prends la parole sur la question de l'asile. (L'orateur rit.) Je voudrais présenter mes excuses pour les propos excessifs et certainement stigmatisants que j'ai pu tenir à l'encontre des communautés concernées par le domaine de l'asile. Je présente mes excuses également pour avoir heurté certains collègues par mes propos excessifs. Pour le reste, je laisserai mon collègue Stéphane Florey vous donner les détails de cette motion. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député, pour cette confession publique. Je passe maintenant la parole à Mme la députée Jocelyne Haller.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Je vous remercie, Monsieur le président. Ce projet de loi ne propose rien de moins que de baisser les prestations de personnes au bénéfice d'une admission provisoire. Aujourd'hui, elles sont au barème ordinaire en raison d'un parcours d'intégration abouti mais provisoirement remis en question de par les aléas de la vie. Il s'agit de personnes qui ont travaillé dans notre canton puisqu'elles ont bénéficié du chômage, et sont à Genève depuis plus de sept ans. L'objectif n'est donc pas d'agir sur le nombre de dossiers, contrairement à ce que laisseraient supposer les auteurs du texte, mais simplement de réduire les prestations de certains ayants droit à l'aide sociale.
Il y avait, à l'époque où nous avons travaillé sur ce dossier, 1800 permis F parmi lesquels 86 étaient au bénéfice de l'aide ordinaire. Nous parlons par conséquent de 86 dossiers, rien de plus ! La réalité politique fait que certaines personnes ne pourraient pas rentrer dans leur pays quand bien même elles ne sont admises qu'à titre provisoire dans le nôtre: 95% d'entre elles sont appelées à rester ici. Le parcours de ces personnes démontre leur intégration; elles ont réussi à sortir de l'aide sociale, ce qui leur a valu d'être mises au barème ordinaire - un barème qui correspond juste au minimum vital !
Il ne faudrait quand même pas croire que l'on a dépensé des sommes complètement faramineuses et que ces gens ont une espèce de dragée qui leur tombe dans la bouche sans rien faire ! Ces gens recherchent un travail, ils cherchent à s'autonomiser; on leur donne simplement les moyens de subvenir à leurs besoins vitaux en attendant qu'ils réussissent à atteindre cet objectif. Or ce que veulent l'UDC et les signataires de ce projet de loi, c'est les renvoyer à la case départ: à l'aide d'urgence ! Une aide dont le barème permet de recevoir 451 francs par mois - pour tenir tout le mois !
Alors sachons de quoi on parle, Mesdames et Messieurs les députés ! Ces gens sont passés par la case départ, extrêmement difficile. Nous connaissons les conditions précaires dans lesquelles vivent les requérants d'asile, notamment lorsqu'il y a un afflux de demandes, et ces personnes ont réussi à en sortir. Elles ont pu bénéficier d'un emploi, ce qui leur permet d'être intégrées socialement. Elles ont momentanément perdu ce travail et doivent rechercher une alternative, alors permettez-leur de vivre correctement, au moins à hauteur de leurs besoins vitaux. C'est ni plus ni moins ce que veulent enlever à ces gens les auteurs de ce projet de loi. Nous ne pouvons que vous encourager à refuser ce texte et finalement à accepter...
Le président. Merci, Madame la députée.
Mme Jocelyne Haller. Merci. Pardon ! (L'oratrice rit.)
Le président. La parole est à M. le député François Baertschi.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président de séance. Il est question de personnes qui sont provisoirement à Genève, parfois depuis dix-sept ou vingt-cinq ans, ce qui est un temps tout à fait considérable. Ces migrants sont dans une situation qui en soi n'est pas acceptable, c'est certain, mais la proposition de ce projet de loi n'est pas non plus souhaitable: elle remplace l'aide financière ordinaire par quelque chose de très rigoureux quand même - peut-être trop rigoureux pour ce type de personnes. C'est pourquoi nous ne pouvons pas choisir entre la situation actuelle, qui n'est pas acceptable, et la proposition de ce texte.
Pour nous, il faut mettre en oeuvre des moyens de réinsertion efficaces pour les personnes véritablement intégrées, et bien intégrées depuis longtemps, mais qui se retrouvent dans une situation bancale, et avoir une réflexion générale sur notre politique de migration et d'asile. Nous nous abstiendrons donc sur ce projet de loi.
Mme Véronique Kämpfen (PLR). Ce projet de loi propose de supprimer les aides supplémentaires accordées aux personnes admises provisoirement au bénéfice d'un permis F, qui ont épuisé leurs indemnités chômage et ont résidé pendant plus de sept ans à Genève. Au moment de l'étude de ce texte, 86 personnes correspondaient à ces critères; elles n'ont pas le statut de réfugiées mais on ne peut pas les renvoyer dans leur pays. Les aides perçues sont modestes et l'économie réalisée si on les supprimait serait faible: moins de 500 000 francs par année, une bien faible économie pour des effets délétères.
Les personnes concernées ont travaillé; elles ont cotisé à l'assurance-chômage et l'ont touchée après avoir perdu leur emploi. Elles ont donc droit à l'aide sociale, selon l'article 11, alinéa 3, de la LIASI que ce texte entend supprimer. Ces personnes sont intégrées depuis longtemps à Genève et vont y rester. Leur couper une partie substantielle des vivres revient à donner un mauvais signal et à enfoncer dans la pauvreté une population déjà précarisée, rendant son insertion dans la société genevoise d'autant plus difficile. Pour l'ensemble de ces raisons, le groupe PLR vous invite à refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Frédérique Perler (Ve). Chers collègues, Mesdames et Messieurs les députés, on vient de le dire: plus de 95% des personnes admises provisoirement vont rester en Suisse. Ce qui a aussi été dit et répété à de nombreuses reprises dans cette enceinte, c'est que l'étiquette de «provisoire» ne colle plus à la réalité. Certaines personnes admises provisoirement sont même là depuis plus de quinze ans, et la Confédération a reconnu que ce terme ne correspond plus à la réalité.
Deuxièmement, l'argument principal de ce projet de loi est de faire des économies - ses initiants se sont livrés à quelques calculs. Le meilleur moyen de faire des économies, comme on l'a dit à l'instant, c'est pourtant de permettre à ces personnes de s'intégrer et de rester intégrées. Ainsi, cet objet propose une régression quant à leurs possibilités et à leur statut.
Il faut bien se rendre compte que le signal donné en cas d'acceptation de ce texte - ce qui serait extrêmement malheureux - anéantirait tous les efforts d'intégration faits par cette population, pour qui il a été particulièrement difficile de parvenir à une situation stable. Ces personnes ne sont absolument pas coupables d'avoir perdu leur emploi et d'être arrivées en fin de droit au chômage. Ce serait injuste de faire porter à tous ceux que vise ce projet de loi une quelconque responsabilité, car ils sont dans une situation qui ne relève précisément pas de la leur. Aussi, Mesdames et Messieurs, je vous invite à refuser vigoureusement ce texte. Je vous remercie.
M. Jean-Luc Forni (PDC). Le groupe démocrate-chrétien va bien entendu refuser ce projet de loi. On l'a entendu, 90% des 86 personnes concernées vont très probablement rester à Genève. Ces personnes ont travaillé et ont été intégrées; de par les aléas de la vie, elles ont perdu leur job et se sont retrouvées bien malgré elles à l'aide sociale. On connaît les difficultés pour les citoyens normaux à se réinsérer dans le marché de l'emploi; on sait quelles sont les difficultés de la LIASI - ils sont soumis à la LIASI et au RIASI, qui est le règlement d'application de la LIASI. On sait comme c'est difficile, d'autant plus pour eux: ils ont un statut d'admis à titre provisoire, quoique ce soit, on l'a entendu, une bien mauvaise appellation pour des gens qui vont finalement rester chez nous. Ce n'est pas très engageant, pour un employeur, d'embaucher quelqu'un avec un statut provisoire; c'est clair que ça n'aide pas à retrouver un emploi facilement.
Ne nous trompons pas, Mesdames et Messieurs les députés: pourquoi nous a-t-on soumis ce projet de loi ? Eh bien pour copier un mauvais exemple qui vient de Zurich, où il a été décidé de remettre les gens à l'aide sociale. C'est un mauvais signal que l'on va donner: c'est favoriser un passage à la clandestinité ou des emplois à faible rémunération, voire la délinquance. On entend souvent que les requérants d'asile sont des délinquants en puissance; ne leur donnons pas de quoi justifier cette appellation.
Finalement, c'est comme si on disait qu'une personne ayant vécu sept ans en Suisse et étant traitée comme n'importe quel citoyen suisse ne pourrait pas bénéficier de l'assistance médicale à laquelle chaque citoyen du canton a droit parce qu'elle a un statut provisoire. Ne rentrons pas dans ce jeu, Mesdames et Messieurs les députés, et acceptons que ces gens admis à titre provisoire, qui deviendront des citoyens à court terme... (Remarque.) ...soient traités comme n'importe quel autre citoyen du canton. Je vous remercie.
M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, il faut peut-être rappeler également que sur ces 86 personnes, un tiers sont des enfants, dans des familles. La proposition de l'UDC vise non seulement, comme à son habitude, à frapper sur les étrangers, sur les plus précaires, mais finalement sur les plus précaires parmi les plus précaires, dont des enfants. C'est particulièrement ignoble de s'en prendre à cette minorité, qui cherche sa place à Genève et fait des efforts pour l'obtenir en travaillant et en s'intégrant. M. Falquet a dit qu'elle ne veut finalement pas s'intégrer; c'est évidemment faux puisqu'on est là face à des personnes, des pères et des mères de famille, qui ont fait cette démarche et eu un emploi mais l'ont malheureusement perdu.
Ce sur quoi nous devons nous interroger, c'est sur le fait que Genève est aussi la lanterne rouge dans le taux d'employabilité des permis F: il est d'environ 30% au niveau suisse mais de 17% à Genève. Ça s'explique en partie par une économie très orientée vers les services plutôt que vers le secteur primaire, mais pas seulement. On peut aussi se demander quelles sont les mesures d'accompagnement mises en place pour que ces personnes puissent s'intégrer. Des efforts ont été faits par l'Hospice général, mais peut-être en faut-il davantage afin qu'elles sortent le plus rapidement possible de l'aide sociale.
Mais il ne faut en tout cas pas les punir, les enfoncer, comme l'a dit notamment la rapporteuse de majorité, Mme Léna Strasser: il s'agit de ne pas les fragiliser, les précariser encore plus et de ne pas hypothéquer leur avenir, notamment celui de ces enfants. Sinon, si on veut vraiment parler d'économies, ça coûtera encore plus cher à la société.
Le parti socialiste vous invite donc à rejeter vivement ce mauvais projet de loi à tendance raciste, extrêmement violent pour une minorité qui travaille pour s'intégrer, et à préserver la santé des plus précaires d'entre nous - les enfants et les personnes fragiles - comme le rappelle la Constitution suisse. Merci beaucoup.
M. Stéphane Florey (UDC). Tout d'abord, quelques rectifications: Monsieur le président, vous transmettrez à M. Thévoz qu'il n'y a pas d'enfants parmi les 86 personnes; c'est faux, c'est un pur mensonge de sa part. Les 86 personnes sont bel et bien des adultes: ce sont les chiffres qui avaient cours lors du dépôt du rapport le 22 décembre 2017. On ne parle donc pas d'enfants mais bel et bien d'adultes.
Ce qui est étonnant dans ce débat, c'est qu'on s'aperçoit une fois de plus que ce qui fonctionne très bien à Zurich, accepté par plus de 67% de la population zurichoise avec ce jour-là un taux de participation de 47,92%, soit un taux nettement supérieur qu'à Genève... A Zurich, ça fonctionne et ils en sont enchantés ! Ça leur a permis de faire des économies. Alors c'est vrai qu'il y a là-bas beaucoup plus de personnes dans ce cas, mais le but de ce projet de loi, il faut quand même le rappeler, était de permettre à notre canton de faire une réelle économie.
Il faut aussi revenir à la réalité de ces gens, que Mme Perler - et c'est scandaleux - qualifie de marchandise en leur collant des étiquettes... (Remarque.) Oui, vous l'avez dit, Madame Perler ! Vous transmettrez, Monsieur le président: elle a dit qu'on leur colle des étiquettes, comme de la vulgaire marchandise ! C'est un pur scandale ! Vous l'avez dit; ce sera certainement retranscrit dans le Mémorial et on pourra le prouver le moment venu ! Non, ce n'est pas de la marchandise: ce sont des personnes.
Maintenant il faut dire aussi que la grande majorité de ces personnes - plus de 90% - n'a jamais travaillé depuis qu'elle est à Genève ! C'est ça, la réalité: ce sont des gens qui, depuis qu'ils sont ici, depuis plus de trente ans pour la plupart, n'ont jamais travaillé ! C'est la réalité d'aujourd'hui, c'est la réalité des chiffres et c'est la réalité qui figure dans le rapport. Et vous allez refuser cet objet !
Eh bien voilà, vous faites ce que vous voulez puisque vous avez une majorité. Sachez qu'à Zurich, ça a fonctionné, mais à Genève, on n'arrive malheureusement pas à faire évoluer les choses. Il y a des choses qui ne fonctionnent pas, comme dans le reste de la Suisse. Nous vous invitons malgré tout à soutenir ce projet de loi et à revenir un peu plus dans la réalité du moment. Et puis les profiteurs, nous, l'UDC, on n'en veut plus ! Merci. (Exclamations. Huées.)
Une voix. C'est pas des profiteurs !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est maintenant à M. le député Patrick Dimier...
M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président. Vous transmettrez à M. Florey...
Le président. ...pour une minute cinquante.
M. Patrick Dimier. Vous transmettrez à M. Florey qu'on voudrait bien soutenir, mais on ne peut soutenir que des choses qui sont soutenables. (Un instant s'écoule.) Vous avez ici les effets, certes pervers, du non-recours à l'emploi local ! Si ces personnes sont au chômage, c'est parce qu'on n'a pas voulu les employer. Si on diminuait l'impact de l'emploi des étrangers sur notre territoire et qu'on employait ces gens - qui sont certainement tout à fait employables ! - on n'aurait pas ces situations.
Cela ne veut en aucun cas dire que l'on peut soutenir la position du MCG... pardon, de l'UDC ! (Rires.) Voilà, comme ça, c'est fait ! Chacun son petit virus ! Compte tenu d'arrangements que vous connaissez tous, nous nous contenterons de nous abstenir - ce qui ne veut certainement pas dire que nous avons une position favorable vis-à-vis d'un tel texte.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur le député Marc Falquet, la parole est à vous pour quarante-huit secondes.
M. Marc Falquet (UDC), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je n'ai jamais dit que les gens ne voulaient pas s'intégrer; il ne faut pas systématiquement déformer mes propos. Je voudrais savoir ce que veut dire l'intégration pour la gauche. Est-ce qu'être à l'aide sociale signifie être intégré ? Si la majorité de ces gens se retrouve à l'aide sociale, c'est qu'il y a un problème. Alors il faut regarder d'où vient le problème: ce sont effectivement les employeurs qui refusent d'engager ces personnes ! Je suis tout à fait d'accord. Mais il faut y réfléchir: pourquoi ces gens ne trouvent-ils pas d'emploi ? Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va à Mme la députée Frédérique Perler pour quarante-huit secondes.
Mme Frédérique Perler (Ve). Merci, Monsieur le président. Vous transmettrez à M. Florey, s'agissant de ses paroles relatives à l'étiquette, que ce que j'ai dit en réalité figure à la page 8 du rapport: il y est précisé que l'étiquette de «permis provisoire» n'est actuellement même plus reconnue par la Confédération suisse. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la députée, ce sera donc transmis. La parole est maintenant à Mme la rapporteure... Non, excusez-moi, la parole est à Mme la députée Jocelyne Haller.
Mme Jocelyne Haller. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Pardon: vous n'avez plus de temps de parole.
Mme Jocelyne Haller. Ah !
Le président. Vous avez effectivement tout mangé tout à l'heure. La parole est vraiment à Mme la rapporteure de majorité.
Mme Léna Strasser (S), rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Je reviens sur la question des 86 personnes. Si on lit le rapport: «Parmi ces 86 personnes, il y en a 54 qui vivent en famille et 32 personnes seules; 40% ont entre 30 et 45 ans, 35% ont entre 0 et 15 ans.» Mon préopinant UDC a lu le rapport en diagonale: il n'y a pas fait attention, mais il est bien question de familles et pas uniquement d'adultes. De plus - vous transmettrez, Monsieur le président - les traiter de profiteurs, c'est vraiment mal les connaître et mal connaître leur réalité. Merci. (Applaudissements.)
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, beaucoup de choses fausses, beaucoup de choses justes aussi ont été dites, preuve en est la dernière intervention de Mme la députée Strasser. Oui, des enfants sont effectivement concernés par ce barème. Il est essentiel de se rappeler que les enfants sont souvent les invisibles de l'aide sociale et peuvent être pleinement - pleinement - impactés lorsqu'on envisage une baisse de prestations, et je vous remercie de l'avoir mentionné. (Remarque.)
Le dispositif tel qu'il a été pensé à Genève est bon puisqu'il renforce l'intégration sociale et professionnelle. Je peux imaginer que l'UDC ait de la peine à vivre avec cela, mais ce serait au fond assez paradoxal qu'on ne puisse pas bénéficier du barème ordinaire de l'aide sociale - ce qui est absolument nécessaire, au vu notamment des montants - lorsqu'on est intégré, lorsqu'on est en capacité de travail, lorsqu'on a des possibilités de formation accrues.
Cela a été aussi rappelé, l'autre barème, celui de l'asile, est moitié plus bas - moitié plus bas ! - à 451 francs. Il y a donc là un risque majeur de voir des personnes intégrées socialement et professionnellement prendre des chemins qui ne sont pas acceptables. Je le dis d'autant plus que nous avons une politique de l'intégration active, proactive, dans les différents domaines. C'est en particulier le cas dans celui de l'aide à l'insertion professionnelle avec la nouvelle loi fédérale sur les étrangers et l'intégration: elle prévoit également un dispositif qui permet d'obtenir des résultats.
Il serait absolument paradoxal et contreproductif que d'imaginer les aider à la moitié de ce à quoi ils ont droit. Faire des économies sur le dos des plus précarisés, c'est prendre le pari qu'ils coûtent largement plus cher plus tard - c'est là aussi un changement de paradigme que le Conseil d'Etat veut opérer. Raison pour laquelle, notamment, il vous invite à refuser ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12165 est rejeté en premier débat par 64 non contre 7 oui et 9 abstentions.