Séance du
vendredi 13 mars 2020 à
16h
2e
législature -
2e
année -
11e
session -
60e
séance
M 2505-A et objet(s) lié(s)
Débat
Le président. Nous abordons maintenant les urgences restantes. La première d'entre elles est classée en catégorie II, trente minutes; il s'agit de la M 2505-A et de la R 910. (Un instant s'écoule.) M. Florey a demandé hier la lecture du courrier 3937, je prie Mme Salima Moyard de s'en charger.
Le président. Je vous remercie. La parole va à la rapporteuse de majorité, Mme Delphine Bachmann.
Mme Delphine Bachmann (PDC), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. La question du sucre est probablement un peu moins urgente que celle du coronavirus; elle mérite néanmoins toute notre attention. La commission de la santé, Mesdames et Messieurs les députés, s'est penchée sur le sujet de la surconsommation de sucre et a voté ce texte à l'unanimité moins une abstention.
Pour commencer, je vais vous rappeler quelques éléments de l'historique. Lors des travaux sur l'initiative 160 relative aux soins dentaires, les experts avaient d'ores et déjà suggéré l'instauration d'une taxe sur le sucre, notamment celui contenu dans les boissons. L'exécutif n'y était pas opposé, à l'époque, mais il soulignait la difficulté de sa mise en oeuvre. Quelques mois plus tard, à l'automne 2018, les experts présents à l'atelier de prévention des états généraux de la santé et travaillant sur la thématique de la prévention et de la nutrition ont fait plusieurs propositions qui vont dans le sens exact du texte de ce soir, notamment quant à la taxe sur les sucres ajoutés. Médecins, nutritionnistes, fédération des consommateurs, milieux sociaux, tout le monde a soutenu la pertinence de cette proposition PDC qui demande la concrétisation de ces mesures à Genève.
Je ne vous cache pas que le sucre est aujourd'hui un fléau pour la santé de la population, et il a le don de se cacher là où on ne l'attend pas. En plus des boissons ultrasucrées, on en retrouve dans les lasagnes, les sauces tomate - bref, partout. L'industrie a bien compris le mécanisme d'addiction au sucre de nos cellules, à peu près aussi puissant que celui à la cocaïne, et a tendance à en mettre trop et partout. Cela a pour conséquence une augmentation des maladies non transmissibles telles que le diabète ou l'obésité. Or, on le sait bien, ces maladies et leur prise en charge représentent près de 80% des coûts de la santé. La prévention ne peut donc plus attendre et la taxe permet d'avoir un financement concret à disposition. Relevons que trente pays dans le monde ont déjà pris des mesures restrictives; parmi eux, la France et l'Angleterre, mais aussi l'Afrique du Sud ou le Chili. Qu'attendons-nous pour agir ?
Cette motion ne propose pas qu'une taxe, mais également des mesures de prévention concrètes pour notre canton. Quant à la taxe elle-même, il faudra agir avec bon sens. L'objectif n'est pas de pénaliser le boulanger local et son pain au chocolat, mais bel et bien la grande industrie et les produits dans lesquels on n'est pas censé retrouver du sucre. Je rappelle aussi que ce texte laisse une marge de manoeuvre au Conseil d'Etat. Cette même industrie, avec ses lobbys, a réussi à lutter contre toutes les mesures proposées au niveau fédéral, notamment le nutri-score obligatoire, qui permet d'afficher sur les produits une note relative à leurs performances nutritionnelles. Il semble pourtant évident que le choix du consommateur doit être éclairé et que cette indication le rendrait plus rapide et facile.
En 2015, les grands distributeurs s'étaient par ailleurs engagés, via la déclaration de Milan, à réduire sur une base volontaire le sucre dans les produits, notamment dans ceux destinés aux enfants. Le résultat est criant de déception et parle de lui-même: 3% de sucre en moins dans les yogourts. Nous avons vraiment sauvé nos enfants ! Alors oui, il est temps de passer du volontarisme à certaines formes de contrainte, raison pour laquelle la majorité vous propose d'introduire dans le canton de Genève une taxe sur les sucres ajoutés; de réserver l'intégralité des revenus de cette taxe à la prévention des caries et de l'obésité; d'élargir les politiques d'information et de prévention; et enfin d'interdire les distributeurs d'aliments ultratransformés et de boissons industrielles dans les établissements publics, comme les universités ou les écoles. Vous allez me dire que celles-ci sont maintenant fermées, mais la mesure pourra être appliquée le jour où elles rouvriront.
La résolution de commission qui accompagne cette motion vise à agir en parallèle, en réduisant les sucres autorisés dans les produits transformés notamment. Pour toutes les raisons précitées, pour donner un signal fort quant à l'engagement de notre canton en faveur de la lutte contre l'obésité, la majorité vous invite, Mesdames et Messieurs, à accepter cette motion et la résolution qui l'accompagne.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, nous discutons aujourd'hui d'un grave problème de santé publique. De nombreuses pathologies sont liées à l'ajout excessif de sucre: je parle des troubles cardio-vasculaires, du diabète, du surpoids, de l'obésité, de certains cancers mais aussi des affections bucco-dentaires. Tous ces problèmes de santé génèrent une augmentation des coûts de la santé. Les coûts ont même triplé ! Il y a par ailleurs un effet masqué puisque beaucoup de sucres se trouvent également dans des aliments salés.
On connaît désormais le caractère addictif du sucre. Selon les chiffres officiels, environ 10% de la population est obèse en Suisse, contre 19,5% en Europe. Le taux de croissance dans notre pays est cependant l'un des plus élevés, comme une bombe à retardement. La commission de la santé a voté à l'unanimité deux objets parlementaires consensuels, deux outils différents mais complémentaires, qui permettraient d'agir enfin de manière efficace: la M 2505 et la R 910.
La motion telle qu'amendée en commission introduirait notamment une taxe sur les sucres ajoutés tant dans les boissons sucrées industrielles que dans les produits ultratransformés. L'intégralité des revenus de la taxe serait attribuée à la prévention et à la promotion de la santé. Nous, les Vertes et les Verts, nous déplorons cependant l'effritement du consensus trouvé autour de cette taxe. La machine des lobbys agroalimentaires et des milieux économiques s'est en effet activée en quelques jours, et elle fonctionne puisque nous avons déjà reçu l'amendement du PLR, qui vide la motion de sa substance principale: l'introduction d'une taxe incitative.
La taxe peut paraître une mesure injuste de prime abord, mais pour nous, les Verts et les Vertes, il s'agit d'un mal pour un bien ! Le mot «taxe» peut sembler effrayant, mais il est question de produits nocifs pour la santé et qui peuvent très bien être compensés par des produits naturels ou même de première nécessité. Par ailleurs, il existe déjà des taxes sur des produits nocifs sans que cela pose de problèmes financiers ou éthiques à la population: je parle des taxes sur l'alcool ou les cigarettes, considérés comme des addictions - tout comme l'est le sucre. Nous sommes ici dans la prévention et la promotion. C'est un instrument pour inciter à diminuer la teneur en sucre.
La commission de la santé a en outre voté une résolution adressée à l'Assemblée fédérale afin d'atténuer l'effet de la taxe. Il est encore temps de freiner les dégâts liés au sucre et aux effets pervers de la malbouffe. Et je pense qu'une incitation des producteurs ainsi que des consommateurs pourrait contribuer à diminuer d'un côté la teneur en sucre des aliments et, d'un autre côté, la consommation excessive d'aliments industriels et ultratransformés. La population n'est pas suffisamment informée à ce sujet, ce qui est aussi problématique, et la motion y remédie également.
Taxer le sucre, c'est protéger la population de graves maladies. Au nom des Vertes et des Verts, je vous invite à accepter cette motion et cette résolution et à refuser l'amendement du PLR. Merci.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, il ne s'agit pas ici de diaboliser le sucre: présent dans beaucoup d'aliments naturels, il est par ailleurs acquis qu'il est indispensable au fonctionnement des muscles et du cerveau. La véritable catastrophe sanitaire est toutefois due à l'excès de sucre - c'est un véritable fléau. Les experts n'ont pas de mots assez forts pour décrire le désastre qu'il provoque et surtout ses effets sur la santé des individus et les coûts de la santé.
Or nous nous trouvons là face à une situation particulièrement hypocrite. Les méfaits du sucre sont connus; les études orientées, financées par le lobby du sucre excessif, n'abusent plus personne. Le sucre est clairement identifié comme un rehausseur de goût, un cache-misère, un liant, un produit addictif, un ajout superflu dans la majeure partie des cas. Tout le monde se plaint de l'augmentation des coûts de la santé et de leur répercussion sur le prix des assurances-maladie.
Nous savons que l'excès de sucre présent dans la plupart des boissons sucrées et des préparations industrielles nuit gravement à la santé. Pourtant, rien ne se fait - ou presque. Il y a urgence, Mesdames et Messieurs les députés ! En 2016, l'OMS constatait que la prévalence mondiale du diabète a presque doublé depuis 1980, passant de 4,7% à 8,5% de la population adulte. La maladie touchait alors 442 millions de personnes, chiffre qui devrait atteindre les 622 millions de personnes d'ici vingt ans; elle occasionne 5 millions de décès par an, soit davantage que le sida, la tuberculose et le paludisme réunis. Or 80% de ces cas pourraient être évités moyennant une alimentation équilibrée. Pour l'OMS, la ligne rouge est franchie, mais rien n'est fait - ou presque - depuis qu'elle a tiré la sonnette d'alarme.
Le groupe Ensemble à Gauche a soutenu la M 2505 en commission, dans un premier temps du bout des lèvres, il est vrai. Il craignait que cette taxe ne se reporte sur le prix des produits concernés et que la malbouffe, qui touche essentiellement les couches défavorisées, n'en devienne que plus chère. Notre groupe estime cependant qu'il ne faut bouder aucune piste - aucune - qui permettrait d'agir sur ce grave problème de santé publique. Ce d'autant que la taxe sur le sucre, dont l'instauration est recommandée par l'OMS, a conduit les fabricants à baisser la teneur en sucre de leurs produits en France et au Mexique. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) C'est pourquoi, parallèlement à la M 2505, le groupe Ensemble à Gauche a proposé une résolution de commission adressée à l'Assemblée fédérale pour lui demander de légiférer afin d'abaisser les valeurs maximales de sucre contenu dans les produits alimentaires.
Le président. Je vous remercie.
Mme Jocelyne Haller. Je vous en prie, Monsieur.
Le président. Je passe la parole à M. le député...
Mme Jocelyne Haller. Vous comprendrez que je recommande de voter ces deux textes...
Le président. C'est très bien.
Mme Jocelyne Haller. ...et de refuser l'amendement. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Je passe la parole à M. le député Stéphane Florey.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Après la lecture du courrier, après la lecture du rapport - pour ceux qui l'auront lu - vous vous serez aperçus que la commission n'a pas fait ses travaux correctement. Elle a voté cette motion à la va-vite; la commission n'était ni unanime ni au complet. L'UDC n'était pas présente... (Protestations. Remarque.) ...mon collègue ayant dû s'absenter pour des raisons professionnelles. Bref, la commission n'a pas fait son travail correctement.
Depuis lors, elle a reçu cinq courriers de personnes, d'organisations, d'associations qui auraient souhaité être auditionnées; comme vous pouvez le voir dans le rapport, la commission n'a procédé à aucune audition ! Le plus grave, c'est qu'elle aurait dû le faire suite à la déclaration du conseiller d'Etat notamment: il détaille un certain nombre de problèmes potentiels vis-à-vis de cette motion. Cela aurait dû alerter la commission et l'inciter justement à procéder à des auditions pour se renseigner, chose qu'elle s'est refusée à faire, ce qui est purement et simplement inadmissible d'un point de vue parlementaire.
S'agissant de la résolution, il faut quand même dire que c'est une simple reprise d'une idée UDC: au départ, c'est mon collègue Bläsi qui a orienté la discussion plutôt vers une résolution adressée aux Chambres fédérales puisque c'est là-bas que les vraies décisions doivent être prises. La résolution a simplement été plus ou moins adaptée par la personne qui l'a déposée.
En conclusion, nous demandons le renvoi de la M 2505 en commission pour que celle-ci reprenne ses travaux correctement - la motion pose un véritable problème. Nous demandons par ailleurs de dissocier la R 910, que nous soutenons, que nous avons signée et que nous soutiendrons; nous en demandons le renvoi immédiat aux Chambres fédérales afin qu'elles puissent la traiter. Mais nous demandons par contre bel et bien le renvoi immédiat en commission de la M 2505. Je vous remercie.
Le président. Il en est pris note. Je passe à ce sujet la parole à Mme Delphine Bachmann.
Mme Delphine Bachmann (PDC), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Je m'exprimerai brièvement sur le renvoi: les travaux ont déjà été faits par les experts. La commission de la santé a pris position sur la santé des citoyens: non, elle n'a pas auditionné l'entièreté de l'industrie, qui a eu à maintes reprises l'occasion de faire preuve d'un peu plus de volontarisme dans le domaine ! Quand il n'y a pas de volontarisme, on passe effectivement de l'incitatif à la contrainte ! Et puis je rappelle que l'UDC avait proposé une résolution pour supprimer les produits sucrés de la catégorie des biens de première nécessité afin qu'ils ne bénéficient plus d'une TVA réduite. Je vous invite donc à refuser le renvoi en commission: les travaux ont été faits !
Le président. Merci. Nous passons au vote sur cette demande de renvoi de la M 2505 à la commission de la santé.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2505 à la commission de la santé est rejeté par 47 non contre 36 oui.
Le président. Nous poursuivons le débat et je passe la parole à M. le député Pierre Nicollier.
M. Pierre Nicollier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, l'adjonction de sucre dans notre alimentation est un fléau - un fléau dont nous subirons les méfaits pendant de nombreuses années encore. Mes préopinants l'ont relevé et personne ne le conteste.
Je souhaite cependant vous dire quelques mots relatifs à l'exemple du Chili, qui détenait le record peu glorieux de la consommation de sucre par habitant la plus élevée du monde. Je cite: «Frappée par une épidémie d'obésité et de diabète, la population chilienne était jusqu'à il y a peu la plus grande consommatrice au monde de boissons sucrées. En deux ans, des mesures volontaristes de santé publique ont fait chuter les ventes de près d'un quart.» Moins 25% ! Comment cela a-t-il été possible ? «Au lieu d'une taxe sur le sucre, le gouvernement a banni ces produits des écoles et, surtout, imposé un étiquetage clair et sans compromis. Placé sur le devant de l'emballage, noir et blanc, impossible pour l'acheteur de passer à côté des alertes: teneur élevée en sucre, en sel ou en matières grasses.» A noter que les valeurs minimales obligeant le fabricant à apposer ces éléments sont abaissées année après année.
D'autres exemples internationaux montrent qu'une politique volontariste d'information permet de réduire considérablement la quantité de sucre ajouté dans les aliments et, partant, de réduire les méfaits liés à une surconsommation. La taxe n'a pas fait partie de l'arsenal chilien et elle est surtout peu réaliste à une échelle cantonale, raison du dépôt de notre proposition d'amendement. Comment Genève pourra-t-il traiter les entreprises hors canton respectant la loi sur le marché intérieur ? Comment faire face aux grossistes et aux centrales nationales de distribution ? Il nous semble inutile de demander au Conseil d'Etat, qui d'ailleurs a actuellement besoin de toutes ses ressources, de répondre à des invites dont la réponse est connue: pas possible !
Nous devons agir au niveau de la Confédération; cela tombe bien, il existe une résolution largement soutenue. Nous vous invitons à approuver l'amendement, la motion amendée et la résolution. Je vous remercie.
M. Philippe Morel (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je serai bref puisqu'il me reste peu de temps. Il est évident que l'obésité est un problème majeur et que le sucre est une cause partielle de ce problème; puisqu'on parle du coronavirus, je vais vous en illustrer l'importance en comparant les deux. Le coronavirus touche aujourd'hui un peu plus de 130 000 personnes dans 116 pays et en a tué un peu plus de 5000. C'est grave, c'est sérieux, c'est important. L'obésité touche 650 millions de personnes dans le monde et en tue chaque année 2,8 millions ! L'obésité n'est certes pas transmissible, mais on peut la prévenir.
En Suisse, 15% de notre population est obèse, ce qui correspond à 1 million de personnes - le chiffre a doublé en vingt ans - et engendre des coûts annuels pour la santé de 8 milliards de francs. Diabète, hypertension et cholestérol en sont les conséquences; c'est la première cause de décès prématuré aux USA et nous suivons malheureusement derrière. En Suisse, 19% des enfants sont obèses ! Prévenir vaut mieux que guérir; il est important d'informer et je soutiens bien sûr la proposition de mon préopinant: cette motion amendée doit être acceptée. Merci, Monsieur le président.
M. Bertrand Buchs (PDC). Tout le monde dit la même chose: tout le monde dit que le sucre est une calamité. Mais la réponse aux demandes adressées à Berne depuis de nombreux mois, voire de nombreuses années, est toujours négative parce que les lobbys interdisent toute action sur le sucre. Le sucre a une valeur addictive plus forte que la cocaïne et on a eu l'idée de l'ajouter partout, y compris dans des aliments plutôt salés; les gens ne se rendent pas compte qu'en mettant du sucre, on va leur faire racheter ces aliments. C'est une véritable honte: on se moque des gens et on les trompe ! Là-dessus, tout le monde est d'accord.
L'OMS considère que le problème du sucre est mondial; tout le monde l'a constaté au vu du nombre de cas et on ne fait strictement rien ! Alors si nous demandons une taxe, c'est pour amorcer une réaction, pour qu'on prenne les devants et qu'on réagisse. Il y a plusieurs choses à considérer, M. Nicollier l'a dit, mais prenez la Norvège, qui est le dernier pays à avoir décidé d'une taxe sur le sucre de 50%. Elle a doublé le prix des aliments, ce qui est énorme, et en deux ans - en deux ans ! - la Norvège a clairement baissé de 25% son taux de diabétiques et de certains cancers liés au sucre. Ça marche !
On parle actuellement du coronavirus, mais si on doit prendre des mesures contre le sucre, qui est une calamité, il faut les prendre. N'ayez pas peur de ce qu'on vous raconte en disant que...
Le président. Je vous remercie, Monsieur Buchs.
M. Bertrand Buchs. ...que c'est risqué pour l'économie.
Le président. Vous avez... Ah, pardon !
M. Bertrand Buchs. Ce n'est pas du tout risqué pour l'économie. Votez ces deux objets. (Applaudissements.)
M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste salue le pas fait dans la bonne direction avec cette proposition de motion, qui vise à promouvoir la santé et à inviter le Conseil d'Etat à réduire l'impact des facteurs préjudiciables à la santé en taxant le sucre. La constante croissance, depuis plusieurs décennies, du nombre de personnes souffrant de surpoids ou d'obésité en Suisse, les graves dangers - on l'a dit - de la surconsommation de sucre pour notre population ainsi que son coût global pour notre système de santé sont des éléments avérés contre lesquels le parti socialiste s'est toujours élevé.
Nous nous étions réjouis du ralliement, dans un premier temps, de la droite, bien qu'elle ait refusé de voter une taxe sur le sucre dans le cadre de l'initiative populaire sur les soins dentaires gratuits. Le PDC notamment, qui revient avec cette motion, s'était opposé à cette taxe dans le cadre d'un projet de loi. Et patatras: même maintenant, alors qu'il s'agit d'une motion et d'une résolution, le PLR décide là encore d'amender le texte et de supprimer la proposition non contraignante pour le Conseil d'Etat d'une taxe sur le sucre. Nous regrettons ce énième revirement; Mme Marjorie de Chastonay l'a dit, il est en partie lié à une pression des lobbys du sucre.
Une voix. Mais non !
M. Sylvain Thévoz. Taxer l'industrie du sucre, produit reconnu comme nocif pour la santé, permettra d'améliorer la santé des Genevoises et des Genevois. L'augmentation du prix du paquet de cigarettes a bien fait diminuer le nombre de fumeurs dans les pays européens: c'est un exemple qui peut nous inspirer. Une telle taxe sur le sucre existe déjà dans les pays nordiques et en France depuis 2011, avec des résultats probants. Une taxe a également l'avantage d'introduire un élément d'éducation, qui permettra de sensibiliser les personnes buvant des boissons sucrées à leur nocivité pour la santé.
La consommation de boissons sucrées peut être freinée soit par les augmentations du prix des produits, soit en améliorant leur étiquetage, soit par des campagnes de sensibilisation à la population, soit en combinant ces différentes mesures. C'est exactement le but visé par cette motion. Le parti socialiste vous engage donc à voter ces deux textes - la motion et la résolution - et à refuser la suppression des deux invites voulue par le PLR.
Le parti socialiste vous rappellera aussi que nous ne sommes à nouveau pas égaux devant ce fléau qu'est le sucre. Certaines entreprises de restauration rapide ciblent les quartiers les plus défavorisés pour s'y installer et vendre dans ces lieux des boissons très sucrées. Les personnes les moins éduquées, les personnes des classes sociales les moins favorisées sont les cibles de ceux qui cherchent à vendre ces produits nocifs pour la santé. Le parti socialiste suivra attentivement, puisqu'une majorité semble se dégager pour ces deux textes, la mise en oeuvre de cette motion par le Conseil d'Etat et lui enjoindra d'agir au plus vite pour le bien de notre population. Merci beaucoup.
Le président. Merci. Je passe la parole pour quinze secondes à M. Florey.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Si vous voulez sauver ce qui peut encore l'être dans cette motion, il faut l'étudier correctement en commission. C'est pourquoi je demande à nouveau son renvoi à la commission de la santé: vous pourrez jubiler ce soir si vous obtenez un vote favorable...
Le président. Je vous remercie, c'est terminé.
M. Stéphane Florey. ...mais vous déchanterez quand vous aurez la réponse du Conseil d'Etat.
Le président. Il est pris note de votre demande. Madame Bachmann, concernant le renvoi en commission ?
Mme Delphine Bachmann (PDC), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Je vous invite à refuser le renvoi pour les raisons que j'ai déjà expliquées précédemment.
Le président. Parfait. Nous passons donc au vote sur la demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2505 à la commission de la santé est rejeté par 42 non contre 37 oui.
Le président. Nous continuons le débat et je passe la parole à M. le député François Baertschi.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Comme mes préopinants l'ont dit, le sucre ajouté dans les produits alimentaires est un véritable problème de santé publique. C'est un procédé qui occasionne du diabète et de l'hypertension - de nombreuses pathologies, qui sont quand même graves pour une bonne partie de la population; c'est une dégradation de ses conditions de vie.
Il suffit de regarder la composition des produits alimentaires: vous serez surpris de voir les éléments sucrés ou même salés, par ailleurs, qui entrent dans leur composition. Ils n'ont plus rien à voir avec le produit original. Ces ajouts, effectués par les fabricants pour des questions commerciales, causent un tort considérable à la population. C'est pourquoi le MCG vous conseille de soutenir ces deux textes parlementaires.
Le président. Je vous remercie. Je passe la parole pour un très court instant à Mme Delphine Bachmann.
Mme Delphine Bachmann (PDC), rapporteuse. Vous transmettrez au PLR, Monsieur le président, que son groupe et le mien, à mon plus grand désespoir, ont jusque-là refusé l'étiquetage nutri-score au niveau national. En attendant que des mesures soient prises à l'échelon fédéral, il convient de donner aujourd'hui un message extrêmement clair au niveau cantonal sur la direction qu'on veut emprunter. Je vous remercie.
Le président. Merci. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote et je vous demande en premier lieu de vous prononcer sur l'amendement déposé par M. Pierre Nicollier. La nouvelle formulation que revêtirait la M 2505 est affichée au tableau:
«invite le Conseil d'Etat
- à élargir la politique d'information et de prévention auprès des plus jeunes, à travers des campagnes actives et régulières sur le terrain scolaire comme sur les médias sociaux;
- à interdire les distributeurs d'aliments ultra-transformés et de boissons industrielles dans les établissements publics, notamment les universités et les écoles.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 37 oui et 1 abstention.
Mise aux voix, la motion 2505 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 56 oui contre 16 non et 7 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Mise aux voix, la résolution 910 est adoptée et renvoyée à l'Assemblée fédérale par 80 oui et 3 abstentions.