Séance du
jeudi 12 décembre 2019 à
17h
2e
législature -
2e
année -
8e
session -
41e
séance
PL 12576-A
Premier débat
Le président. Nous passons au projet de loi de budget. (Un instant s'écoule.) Monsieur Rossiaud, faites ça à l'extérieur, s'il vous plaît, pas à l'intérieur ! Non, faites ça à l'extérieur, je vous remercie ! (Remarque.) C'est gentil; à l'extérieur, merci ! (Commentaires. Un instant s'écoule.) Madame Tschudi ! Madame Tschudi, je viens d'en faire la remarque à votre collègue: s'il vous plaît, vous sortez ! Distribuez la nourriture à l'extérieur ! (Un instant s'écoule.) Je parle français, Madame Tschudi ? (Remarque.) Vous m'avez compris ? (Remarque.) Non, ce n'était pas ça ! La parole est à M. le député Jean-Luc Forni.
M. Jean-Luc Forni (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, le projet de budget de l'Etat de Genève, tel qu'issu du vote du troisième débat à la commission des finances le mercredi 20 novembre 2019, se présente ainsi. Au niveau du budget de fonctionnement, les revenus s'élèvent à 8 545 430 043 francs alors que les charges se montent quant à elles à 9 129 955 494 francs - soit un excédent de charges de 584 525 451 francs. S'agissant des investissements, les recettes s'élèvent à quelque 32 millions et les dépenses à 731 042 670 francs, ce qui fait que nos investissements nets sont de l'ordre de 700 millions, de 699 064 957 francs exactement.
Il convient de rappeler les éléments suivants. Tout d'abord, le projet de budget du Conseil d'Etat était marqué par les effets attendus de trois objets majeurs adoptés par le corps électoral genevois le 19 mai 2019: la RFFA - la réforme fiscale et le financement de l'AVS - qui engendre une baisse des revenus de 186 millions de francs; le contreprojet à l'IN 170 qui occasionne une hausse des charges de 176 millions de francs, montant qui a donc été revu à la baisse; et la recapitalisation de la caisse de prévoyance de l'Etat de Genève - la CPEG - pour 213 millions supplémentaires. A eux seuls, ces trois éléments induisaient une hausse des charges de près de 4,5% et une baisse des revenus de 2,2% en 2020.
La croissance totale des charges du projet de budget du gouvernement se montait à 6,5%. Hormis la recapitalisation de la CPEG et le contreprojet à l'IN 170, elle se limitait à 1,9%. A cela s'ajoutaient, on l'a entendu tout à l'heure, 54 millions de charges supplémentaires suite à l'arrêt du Tribunal fédéral concernant l'annuité 2016, et 49 millions de plus induits par l'arrêt du Tribunal fédéral relatif à la planification hospitalière. Ces différents éléments portaient le déficit de fonctionnement du projet de budget de l'exécutif pour l'exercice 2020 à 590 millions de francs.
Il faut aussi rappeler que deux modifications ont été apportées à la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat: la première, effectuée dans le cadre de la RFFA, fixait un déficit budgétaire maximum de 372 millions de francs pour 2020. La seconde prévoyait le maintien de la réserve conjoncturelle, qui s'élèvera à 710 millions au 1er janvier 2020. Dans le projet de budget du gouvernement, ce déficit admissible de 372 millions était dépassé de 218 millions, couverts certes par la réserve conjoncturelle.
Dès le début de l'examen du budget, la majorité des commissaires s'est inquiétée de la croissance des charges courantes, qui se matérialise par une augmentation significative des postes: plus de 400 équivalents plein temps. La majorité des commissaires a jugé déraisonnable de la part du Conseil d'Etat de faire payer à la fonction publique l'engagement de plus de 400 collaboratrices et collaborateurs en supprimant l'annuité 2020.
La commission des finances a pris les décisions suivantes lors des débats budgétaires. Elle a refusé le PL 12577 de l'exécutif sur la suspension de l'annuité 2020 et réintroduit son versement pour un montant de 54 millions de charges. Une majorité de la commission des finances a décidé de geler l'augmentation des postes au projet de budget 2020, soit -415,2 ETP représentant une diminution des charges de 35 millions. La commission des finances a par ailleurs approuvé deux économies linéaires de 12 millions chacune, soit une diminution des charges de 24 millions sur la ligne 31. Elle a aussi décidé de supprimer deux subventions, à la nature 36, l'une de 39 000 francs destinée à l'ASSUAS, l'autre au Rassemblement en faveur d'une politique sociale du logement pour un montant de 49 000 francs. Enfin, il a été décidé de supprimer 1,7 million de revenus sur les émoluments de mobilité des chantiers.
Mesdames les députées, Messieurs les députés, ce budget doit être considéré comme un budget de transition. Si l'on observe l'évolution du nombre de postes créés ces dernières années, on peut constater que, malgré le gel des nouveaux postes, on est toujours dans les clous face à l'augmentation de la population. L'engagement des partis qui ont soutenu la RFFA portait sur le fait que la baisse statique des impôts et le contreprojet à l'initiative ne devaient pas amener à une baisse des prestations. En contrepartie, le seuil du frein au déficit est passé à 372 millions de francs pour couvrir cela et éviter des coupes dans les prestations. La plupart des partis ont voté ce projet de loi et le peuple a avalisé cette décision.
Une majorité de la commission des finances a jugé qu'il faut gérer les deniers de l'Etat de manière raisonnable et responsable, en prenant les mesures qui s'imposent. Elle vous demande donc de soutenir ce projet de budget tel que sorti du troisième débat à la commission des finances et tel qu'il vous est présenté aujourd'hui, et vous invite à refuser tous les amendements. Je vous remercie de votre attention.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, pour le parti socialiste et la minorité que nous représentons ici, un processus budgétaire doit reposer sur une cartographie des besoins de la population et des prestations qui sont actuellement fournies, et chercher des mesures à proposer pour répondre aux besoins de la population.
Or la minorité regrette très amèrement la logique digne d'un petit comptable qui a été celle de la majorité de droite en commission: elle dénote une absence de vision politique et une totale absence de choix. Et ce au mépris non seulement des collaboratrices et des collaborateurs de l'Etat et de leur travail, mais également de la pérennité des prestations à la population, notamment en faveur des personnes qui en ont le plus besoin et qui se retrouvent dans une situation d'extrême vulnérabilité. Cette ligne politique est totalement contraire à l'intérêt général.
M. Forni a parlé d'un budget de transition; je parlerai quant à moi d'un budget d'exception, en raison du déficit certes record mais attendu. En effet, il découle directement des lois votées par le Grand Conseil et avalisées par le peuple, à savoir le contreprojet à l'initiative 170, la recapitalisation de la CPEG et la RFFA. Les coûts étaient donc connus, et celles et ceux qui aujourd'hui s'indignent de cette augmentation des charges ont tout simplement la mémoire courte - tellement courte qu'ils en oublient les engagements qu'ils ont pris pour faire passer la pilule RFFA: une réforme qui se ferait sans baisse de prestations. Eh bien, ici, la majorité de droite cherche véritablement à couper dans les prestations à la population !
En préambule de ce débat, il faudrait peut-être également rappeler que, n'en déplaise à la majorité de droite qui voudrait nous faire croire à un budget extrêmement dispendieux, nous sommes face à un budget somme toute extrêmement contraint. Les charges contraintes - des charges inscrites dans la loi, comme les subsides d'assurance-maladie suite à la votation sur le contreprojet à l'IN 170 - sont effectivement en augmentation, tout comme les dépenses liées à l'aide sociale et aux bourses ou prêts d'études. C'est tout simplement le reflet d'une précarisation de la population, ce qui augmente aussi les besoins en aide étatique.
Certaines charges contraintes sont directement liées à l'application de lois fédérales, par exemple la prise en charge des assurés débiteurs - extrêmement grosse dépense supplémentaire cette année - ou à des décisions de justice, tel l'arrêt du Tribunal fédéral sur le financement des prestations hospitalières. Si on ajoute à cela la recapitalisation de la CPEG, qui, je le rappelle, a été validée par la population, 83% des charges du budget de l'Etat sont des charges contraintes. La marge de manoeuvre du Conseil d'Etat pour faire des arbitrages, pour tenir compte aussi bien de l'augmentation de la population que d'une partie des charges était donc ténue.
Les besoins ont été très clairement identifiés et il faut y apporter des réponses: l'augmentation démographique de 1% que nous connaissons aujourd'hui s'accompagne évidemment aussi d'une augmentation, par exemple, du nombre d'élèves à accueillir à l'école primaire. Eh bien si vous voulez maintenir la qualité des prestations et le nombre d'élèves par classe, vous devez augmenter le nombre d'enseignants lorsqu'il y a plus d'élèves ! C'est parfaitement mathématique ! Mais la majorité de droite semble manifestement le nier.
Pour répondre aux besoins de la population, il faut également tenir compte d'autres phénomènes sociaux tels que le vieillissement de la population ou l'accroissement des inégalités, de la vulnérabilité et de la précarité. Il n'échappera évidemment à personne que le vieillissement de la population entraînera une augmentation des charges de l'IMAD, des EMS mais aussi du SPC. Limiter les charges de l'Etat à l'augmentation démographique est tout simplement un non-sens.
Malgré les postes que le Conseil d'Etat a ajoutés dans son projet de budget et que la minorité de la commission des finances a également tenté d'augmenter, des services sont encore aujourd'hui véritablement en souffrance. Cela nuit non seulement à la santé et au travail des collaboratrices et des collaborateurs mais aussi à la délivrance des prestations et à la qualité des services publics - le SPAd, le SPMi, les EPI ou les EMS sont notamment concernés. Cette situation de souffrance qui touche un certain nombre de services découle directement de la politique d'austérité menée toutes ces dernières années, avec des coupes linéaires dans le personnel de l'Etat et du secteur subventionné. Un rattrapage est aujourd'hui nécessaire pour que ces services puissent continuer à fonctionner.
La majorité de droite nie tout simplement cette réalité en procédant une fois encore à des coupes massives au détriment des services qui en ont le plus besoin. Raison pour laquelle nous vous inviterons, dans le cadre du deuxième débat, à réintroduire les postes supprimés à la commission des finances et nous déposerons un certain nombre d'autres amendements pour répondre de manière complémentaire à l'augmentation des besoins. Je vous remercie.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, un rapport publié récemment par la Confédération dresse un portrait édifiant de l'évolution des richesses en Suisse. On y apprend que le canton de Genève est le plus inégalitaire du pays en la matière ! On observe aussi qu'il est l'un des cantons qui connaissent le plus fort accroissement de la richesse, mais avec en parallèle un taux de rendement de l'impôt sur les richesses, disons, parmi les plus bas de Suisse.
Qu'est-ce qui se cache derrière cette apparente contradiction ? Eh bien tout simplement le fait que les plus grosses fortunes de ce canton sont protégées par un nombre toujours plus grand de privilèges fiscaux. Privilèges fiscaux octroyés année après année par une majorité de ce Grand Conseil, dont le mépris envers les plus précaires n'a d'égal que leur compassion inouïe à l'égard des plus riches. (Applaudissements.)
On sait aussi que les besoins de la population augmentent - la rapporteuse de première minorité, Mme Marti, l'a dit: cela est dû à l'augmentation de la pauvreté, à l'allongement de la durée des études et, bien sûr, au vieillissement de la population. Face à ce constat, il semblerait naturel de demander à l'Etat de jouer son rôle fondamental et de répartir les richesses, à travers d'une part des impôts proportionnels et d'autre part des services publics forts, qui permettraient de redistribuer ces richesses en assurant des prestations à la population. Au contraire - au contraire ! - les capacités de l'Etat en la matière sont réduites année après année. En l'occurrence, il faut le dire, la droite est directement responsable du déficit pour 2020. Celle-là même qui pousse des cris à la vue du déficit l'a orchestré ! Elle l'a orchestré, comme je l'ai dit, par des années de cadeaux fiscaux aux plus grosses fortunes; elle a pratiqué la politique des caisses vides.
En réalité, les 400 postes supprimés par la majorité de la commission sont un faux problème d'un point de vue purement budgétaire, d'un point de vue purement comptable. Ils ne portaient qu'une petite responsabilité dans ce déficit, qui provient essentiellement de la RFFA, ce cadeau fiscal massif pour les plus grandes entreprises. La droite - et le MCG - avait promis lors du vote du 19 mai que l'acceptation de cette réforme n'occasionnerait aucune coupe dans les prestations; elle a prouvé, et elle le prouvera aujourd'hui, que c'était un mensonge destiné à faire passer cette réforme. Le déficit résulte aussi de l'augmentation des subsides d'assurance-maladie, soutenue par la droite et le MCG d'une manière purement opportuniste pour faire passer la pilule RFFA. C'était purement opportuniste: ils l'ont prouvé lors des débats en commission, en supprimant l'ensemble des postes supplémentaires budgétés pour permettre de délivrer ces subsides !
Et puis le déficit provient également de l'obligation, pour l'Etat de Genève, de subventionner fortement les cliniques privées à partir de 2020. Cette décision du Tribunal fédéral découle directement de la politique de privatisation de la santé menée à Berne, PLR et PDC en tête. On pourrait évidemment aussi parler de l'annuité 2016 que le gouvernement avait illégalement supprimée - le climat délétère entretenu par la droite, qui dénonce systématiquement les conditions de rémunération de la fonction publique, y est bien entendu pour beaucoup.
Pourtant, ce déficit est aujourd'hui brandi comme un argument massue pour sabrer complètement les prestations, contrairement aux promesses, et ce sont les plus précaires qui sont touchés à travers le SPAd ou le SPC. Certains élus ont aussi fait d'autres promesses, à commencer par le MCG, qui a critiqué pendant des années la privatisation du service de convoyage des détenus induite par la loi Maudet sur la police et a même récemment réclamé l'urgence sur le sujet: il a supprimé tous les postes rendus nécessaires par cette réintégration qu'il réclamait de longue date. (Huées.) C'est évidemment moins surprenant de la part du PLR, celui-ci se contentant de défendre la politique de son magistrat !
Mesdames et Messieurs, le déficit va augmenter dans les années à venir. Il va augmenter parce que la RFFA va continuer à déployer ses effets, et le PLR et le MCG l'ont d'ailleurs annoncé en commission, au moment du vote du budget: «Nous voterons le budget parce que c'est un budget de transition, mais nous exigerons davantage d'économies l'année prochaine.» Ils ont clairement dit qu'ils n'ont fait que s'amuser avec 60 millions: l'année prochaine, ce sera bien pire ! Attention cependant à ne pas pousser le bouchon trop loin: rappelez-vous la mobilisation massive de la fonction publique et de la population, en 2015, qui a mis en échec ces politiques d'austérité.
Nous sommes en définitive devant un choix de société: est-ce que nous voulons un retour au XIXe siècle ? A une société dans laquelle des fortunes colossales vivent des gains sur leur capital, sans même travailler, alors qu'une part toujours plus importante de la population est plongée dans la précarité ? Ou bien est-ce que nous souhaitons une société plus solidaire, dans laquelle l'Etat joue son rôle et redistribue les richesses via des services publics forts ?
En réalité, pour résorber ce déficit et pour répondre aux besoins de la population, il n'y a guère le choix. Il faudra dès à présent travailler à taxer davantage les plus privilégiés au sein de la société, les gros actionnaires et les grosses fortunes en tête. Ensemble à Gauche déposera d'ailleurs tout prochainement une série de projets de lois allant dans ce sens.
En résumé, Mesdames et Messieurs, vous l'avez compris, ce budget tourne résolument le dos aux besoins de la population et Ensemble à Gauche le refusera catégoriquement. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Mathias Buschbeck (Ve), rapporteur de troisième minorité. Chères et chers collègues, nous sommes un peu effarés, chez les Verts, par l'absence de vision à long terme de ce parlement. (Rire.) On l'a dit... (Rire.) ...on savait très bien ce qui allait se passer en juin... (Rire.) Je vais peut-être laisser M. Vanek finir de rire. (Commentaires.) Il manque une vision à long terme, une capacité à se projeter: nous savions tous que, suite à la votation du mois de mai, le déficit serait énorme. Qui a pris une mesure ? Qui a fait en sorte de se projeter un tout petit peu plus loin que ça ? Personne !
Nous déplorons tous aujourd'hui un déficit extrêmement élevé, le pire de notre histoire - presque 600 millions - et personne n'arrive à nous dire comment nous allons nous en sortir. Pour la première fois, le plan financier quadriennal ne prévoit pas un retour à l'équilibre: on ne sait pas comment on va faire au bout des quatre ans. Nous aurons épuisé l'ensemble de la réserve conjoncturelle d'ici deux ans et nous déclencherons alors les mécanismes de frein à l'endettement, de frein au déficit - avec des coupes douloureuses, avec des propositions de hausses d'impôts - et personne ne s'y prépare.
Pire que ça: avec le déficit que nous allons accuser cette année, le mécanisme de frein à l'endettement sera donc déclenché dans deux ans, ce qui signifie que nous ne pourrons plus investir ! Nous devrions investir pour l'avenir mais nous ne le pourrons plus. Et aujourd'hui, personne ne s'en soucie ! Quand on demande au Conseil d'Etat ce qui se passera au bout de quatre ans, il répond qu'on s'en remettra à la croissance. On s'en remet à la croissance - on espère, une fois de plus, que la croissance va nous sauver alors que l'année qui s'achève a connu tout du long une mobilisation incroyable pour sortir d'une logique de croissance et adopter une logique de durabilité. On pense bien sûr au climat, mais aussi à tous les problèmes environnementaux qui se posent et auxquels nous sommes aujourd'hui totalement incapables d'apporter la moindre réponse.
Les Verts appellent des réformes. Ils demandent des réformes structurelles de l'Etat pour accompagner notre transition écologique, qui est indispensable: il faut l'opérer. A l'avenir, il faudra faire plus avec moins, ce qui implique de travailler sur l'efficience. Cela ne signifie pas mettre le personnel sous pression, mais travailler sur les principes que le gouvernement nous énonce à longueur d'année sans les appliquer. On voudrait en effet voir ne serait-ce que le début d'une amorce de ce chantier des ressources humaines: aujourd'hui encore, dans n'importe quel secteur - et c'est pareil dans toutes les commissions - le travail se fait en silos. D'énormes améliorations peuvent par conséquent être apportées dans ce domaine.
Je ne vais pas passer en revue l'ensemble des postes coupés au projet de budget: nous aurons l'occasion de les examiner les uns après les autres. Vous verrez dans quelle situation un petit peu ridicule vous nous mettez en refusant tous ces postes - postes que vous aviez pourtant promis, dans le sens où vous avez toujours dit être favorables au fait de tenir compte de l'augmentation de la population; s'agissant de l'augmentation des effectifs au DIP, ce n'est pas le cas ! Vous avez promis, en vue de la RFFA, que des subsides seraient alloués dans le cadre du contreprojet, mais vous n'octroyez pas les postes pour qu'ils soient versés ! Les gens toucheront donc les subventions à la fin de l'année 2020 - c'est une belle façon de respecter les promesses ! Et ainsi de suite.
Ce qui va probablement se passer, c'est que le Conseil d'Etat viendra avec une série de crédits complémentaires en début d'année prochaine: vous les accepterez, la queue un peu entre les jambes, parce que vous verrez bien que vous avez mis les services dans une situation inextricable. Le seul effet sera de creuser le déficit encore plus que ce que vous allez voter aujourd'hui.
Je conclurai donc en disant que c'est vraiment le pire des budgets que vous pouviez présenter: le déficit est énorme et on ne répond pas aux besoins. Vous auriez au moins pu vous en tenir à la version du Conseil d'Etat, qui répondait en tout cas aux besoins. Ici, vous avez le pire projet de budget possible: celui qui ne répond ni au souci d'une saine gestion des ressources publiques ni aux besoins de notre population. Je vous remercie.
M. Eric Leyvraz (UDC). Le seul point positif de ce budget est sa facile qualification: catastrophique ! Avec le découvert de 584 millions, il bat un record qui ferait hurler n'importe quel autre canton, mais nous sommes à Genève et un Conseil d'Etat placide et tranquille n'a pas hésité à nous le présenter.
Un nouveau taux d'imposition des entreprises était prévu depuis longtemps; il en découlait le devoir de prévenir les difficultés budgétaires. Les belles déclarations de M. Dal Busco lors des débats pour le budget 2017 me restent en mémoire: «Soyez assurés que le Conseil d'Etat est très préoccupé par des budgets déficitaires.» Sans commentaire ! Malgré des comptes dans les chiffres noirs, pour plus de 200 millions en 2018, le gouvernement s'est dépêché de jouer les cigales plutôt que de se préparer pour les mois d'un long hiver financier.
Tout est fait pour ne pas arriver au frein au déficit - mesure pourtant prudente - alors que le déficit est grave parce qu'il devient durablement structurel. Le Conseil d'Etat continue son petit train-train quotidien avec un leitmotiv: ne pas braquer la fonction publique. La dette est déjà colossale et on va l'augmenter d'environ 2 milliards de francs en quatre ans. Les dettes, faut-il rappeler cette évidence, on finit toujours par les payer, d'une manière ou d'une autre, et toujours au plus mauvais moment. Merci, au nom de la future génération, pour les pots cassés !
Face à un Conseil d'Etat sans unité, la déception est grande: pas d'anticipation de sa part, pas de capacité à se remettre en question ni à mettre en avant les vrais problèmes. J'ai bien lu l'article de Mme Torracinta, qui s'inquiétait de ne pas obtenir les ETP qu'elle demande. Je ne l'ai par contre pas entendue évoquer une quelconque amélioration de l'efficacité de ses services et des difficultés de rationalisation, les problèmes d'absentéisme à résoudre ou le fait que les professeurs donnent environ vingt et une heures de cours par semaine en Suisse romande alors qu'à Genève ils en donnent moins de dix-sept heures, etc.
Mesdames et Messieurs, oser formuler des critiques, ce n'est pas être contre l'Etat. Nous avons besoin d'un Etat fort, mais pas d'un Etat dont les dérives ne sont pas corrigées, avec le sempiternel argument bateau des futures baisses de prestations. Il faut casser cette fatalité qui consiste à dépenser toujours plus d'argent, et le seul moyen d'y parvenir est d'avoir le courage de supprimer ce statut obsolète de fonctionnaire, comme l'ont fait - d'ailleurs avec bonheur - tous les cantons suisses allemands. Dans toutes les grandes entreprises, il y a d'excellents collaborateurs et d'autres qui ne remplissent pas leurs tâches et sont licenciés. L'Etat n'encourage pas ses bons serviteurs et garde les mauvais, dont l'emploi est assuré à vie - à moins de tuer père et mère, et encore ! Cela conduit à toutes les dérives dénoncées par la Cour des comptes, notamment à un absentéisme qu'on ne rencontre dans aucune entreprise privée: certains services dépassent les 10%. Dans la vie des entreprises, la concurrence est féroce: c'est un peu la loi de la jungle - manger ou être mangé.
Que l'Etat revienne à la réalité du monde, qu'il se prenne en main et se rappelle qu'il est au service de la population ! Ce n'est pas la population qui est corvéable à merci au service de l'Etat. Les citoyens laborieux de ce canton commencent vraiment à en avoir assez d'un Etat qui coûte, par habitant, communes comprises, 25% de plus qu'à Zurich. Les dernières votations montrent un ras-le-bol de ce modèle de développement qui impose toujours plus de monde dans un espace restreint et des nuisances liées au bruit, et entraîne une perte de la qualité de vie. C'est ce que vivent, avec une satisfaction mitigée, des contribuables qui paient pourtant beaucoup et se retrouvent en fin d'année sans argent de côté.
Pour terminer, il s'agit aussi de pointer du doigt le dysfonctionnement de notre parlement, largement responsable de la perte de confiance de la population en notre capacité à gérer les affaires de la république. Notre ordre du jour pléthorique est un traité de mauvaise gouvernance, une fois de plus unique en Suisse: il est toujours chamboulé par des urgences et jamais suivi, avec des objets qui mettent des mois, voire des années, à passer en plénière; il y figure des projets de lois et des motions parfois indignes d'un canton aux fonctions internationales si importantes ! Nous perdons du temps et de l'argent du contribuable à traiter de futilités en commission alors que les problèmes financiers et de société demanderaient toute notre attention. L'incapacité des députés à limiter leurs dépôts, car chacun veut faire passer son objet, contribue par ailleurs à la baisse du niveau de nos débats. Tout cela n'est pas digne de notre république - tout cela n'est pas digne du formidable héritage qui nous a été confié !
Voilà le triste bilan de nos activités, qui induit un désintéressement des citoyens pour nos institutions et est l'une des raisons de l'absentéisme du corps électoral. Il serait temps que le Bureau du Grand Conseil réunisse, au-delà des partis, des gens de bonne volonté prêts à remettre à plat notre manière de gouverner pour permettre à notre république de repartir d'un bon pied. Dans cette période charnière, je pense que c'est le moment qu'on se dise nos quatre vérités ! Pour en revenir à notre budget, l'UDC reste très insatisfaite de ce projet 2020 calamiteux et refusera l'entrée en matière. Merci.
Le président. Merci. Je passe la parole à M. le député Cyril Aellen.
Une voix. Ah !
M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. Coupes massives ! Budget d'austérité ! Comme j'ai cru que j'avais mauvaise mémoire, je suis allé consulter le rapport, y compris le rappel du contenu du projet du Conseil d'Etat; je n'ai pas eu besoin de pousser très loin: à la page 5, un tableau montre que le budget 2019 s'est élevé à 8,589 milliards alors que le projet de budget 2020 est quant à lui chiffré à 9,143 milliards. Si ça c'est de l'austérité, Mesdames et Messieurs, qu'est-ce que ce sera quand il y aura une augmentation massive des dépenses !
Maintenant, considérons les motifs de cette hausse: l'augmentation des subsides d'assurance-maladie augmenterait la précarité. Ce serait la démonstration que la précarité augmente ! On distribue des subsides supplémentaires pour 186 millions et la précarité augmente ? Soyons sérieux ! On augmente le nombre de bourses destinées aux étudiants et la précarité augmente ? En aucun cas ! Ce budget fait la part belle à des prestations supplémentaires et les engagements pris dans le cadre de la RFFA, qui coûte au demeurant 103,3 millions au budget 2020, ont non seulement été tenus, mais nous sommes même allés bien au-delà: les engagements ont été assurés au-delà des promesses.
La politique implique de faire des choix. Quels choix ont été faits, par ce parlement d'abord et par la population ensuite ? Prenons l'exemple de la CPEG en 2013: 800 millions cash dans un premier temps, puis 400 millions avec une réserve et ensuite 147 millions par an. Et à cela, on a rajouté 213 millions en 2018 ! Eh oui, 400 millions par an, soit l'équivalent de 2400 postes - pas 412 mais 2400 postes - chaque année ! C'étaient les choix de ce parlement et de la population; aujourd'hui, il faut les assumer. Nous ne pouvons pas continuer à engager parce que nous avons opté pour d'autres dépenses - nous avons en particulier choisi d'alimenter la CPEG, caisse qui sert les prestations les plus importantes du pays et probablement du continent. Oui, il manque des postes dans certains services, oui, certains services ont besoin de plus de postes, c'est certain, mais nous avons fait des choix.
Le budget que nous nous apprêtons à voter n'est sans doute pas bon, mais la seule chose qu'il convient de faire aujourd'hui, c'est d'entreprendre rapidement des réformes afin que nous puissions avoir une vision d'avenir. Je rejoins le rapporteur Vert: nous avons besoin d'entreprendre les réformes nécessaires pour assurer les prestations là où elles sont nécessaires. Mais ne dilapidons pas l'argent que nous n'avons pas ! (Applaudissements.)
M. Yvan Zweifel (PLR). Je complète les excellents propos de mon collègue Cyril Aellen avec un certain nombre de chiffres - il en a déjà donné quelques-uns. On dit que la droite n'aurait pas respecté les engagements pris dans le cadre de la RFFA; notre engagement, Mesdames et Messieurs, était clair ! Nous reconnaissions que la réforme allait avoir un coût, et un coût d'autant plus important qu'on y ajoutait les fameux 186 millions de subsides d'assurance-maladie supplémentaires. La contrepartie a été d'augmenter le seuil du frein au déficit à 372 millions - voilà l'engagement clair que nous avions pris.
Si le Conseil d'Etat nous avait proposé un budget avec un déficit de 372 millions, le PLR l'aurait accepté parce que ça correspond à l'engagement qu'il a pris: accepter la RFFA sans baisse de prestations ! Mais on est très loin de ces 372 millions et si vous calculez la différence - M. Burgermeister sourit mais il le sait - elle est de 213 millions. Ah ! C'est évidemment, comme par hasard, le coût exact de la recapitalisation de la CPEG ! A cet égard, vous n'aviez par contre rien dit à la population ni proposé quoi que ce soit en contrepartie.
M. Cyril Aellen l'a dit aussi, Mesdames et Messieurs: on nous promet un cataclysme. Mais sur les dix dernières années, depuis 2011, la population a augmenté de 8% et les ETP à l'Etat, dans le même temps, de 15%. Autrement dit, sur dix ans, le nombre de fonctionnaires a augmenté deux fois plus que la population ! Si on renonce aujourd'hui à engager 412 personnes de plus - ce n'est pas une coupe: s'agissant des engagements, c'est mensonger de dire qu'on coupe quoi que ce soit - tous les engagements auxquels on a procédé ces dernières années couvrent largement ces postes.
Il est également inutile de revenir sur cette histoire de crise des recettes contre crise des dépenses lorsque l'on voit que les recettes fiscales ont augmenté de 100% sur les vingt dernières années. On a doublé les recettes fiscales ! Dans le même temps, la population n'a pourtant augmenté que de 24% et les charges de l'Etat de 54%. Contrairement à ce que vous affirmez à gauche, Mesdames et Messieurs, nous vivons une claire crise des dépenses et en aucun cas - en aucun cas ! - une crise des recettes.
Je vais simplement conclure en empruntant une citation à Winston Churchill: ce budget n'est pas bon, mais il est peut-être le plus mauvais à l'exclusion de tous les autres. C'est pourquoi le PLR le votera.
M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs, le projet de budget 2020 est certainement l'un des plus difficiles de ces dernières années. Les circonstances demandent un cadrage du Conseil d'Etat - c'était effectivement nécessaire. La technique budgétaire nous permet difficilement d'intervenir aujourd'hui dans ce débat.
Cela a été dit: les dépenses sont en continuelle augmentation. Mais pas uniquement les dépenses, Mesdames et Messieurs ! C'est également le cas des charges contraintes, que nous votons continuellement. Les charges contraintes ajoutées aux autres charges ne nous permettent finalement d'avoir un impact que très faible et limitent les décisions que nous pouvons prendre au moment d'élaborer le budget. Ce budget était ficelé: il était complètement ficelé lorsqu'il est arrivé chez nous et nous nous sommes aperçus qu'il était très difficile d'entrer en matière sur des propositions. Personne n'avait d'ailleurs envie de faire des propositions ! Que se passe-t-il, Mesdames et Messieurs, quand le Conseil d'Etat n'arrive plus à discuter et que le parlement lui tourne le dos ? Eh bien nous sommes dans une impasse - et aujourd'hui nous sommes dans cette impasse.
S'agissant de la sincérité budgétaire, nous avons pu constater un autre phénomène. Qu'est-ce que la sincérité budgétaire ? Il peut s'agir d'une mauvaise évaluation dans un domaine ou dans un autre. L'année passée, en 2018, nous avions un budget légèrement bénéficiaire et nous avons voté pour plus de 85 millions de crédits supplémentaires. Mais quand on vote 85 millions de dépenses supplémentaires, la donne peut changer. Les prévisions budgétaires peuvent être aussi compensées par des dépenses qui ne sont pas effectuées dans d'autres domaines.
La sincérité budgétaire est un élément essentiel, notamment quand les budgets sont déficitaires. Que s'est-il passé avec nos budgets déficitaires ? Le PFQ 2019-2022 prévoyait 302 ETP supplémentaires pour 2020 - je vous le répète: 302 ETP ! Nous en sommes à 412, ce qui en fait 109 de plus. Quel Conseil d'Etat a essayé de freiner les postes supplémentaires par rapport à ceux prévus par leurs PFQ ? On va chercher les éléments; on va en trouver un certain nombre - on aura le temps pendant ces deux jours. Vous voyez, Mesdames et Messieurs, on ne s'y retrouve plus dans la sincérité budgétaire ! Le parti démocrate-chrétien estime aujourd'hui que le gel des postes est une nécessité: il est nécessaire de redéfinir nos vrais besoins et ces vrais besoins, tels qu'ils seront redéfinis, feront l'objet de demandes de crédits supplémentaires qui seront peut-être acceptées. C'est une autre technique budgétaire, c'est une autre façon de voir comment les finances de l'Etat vont évoluer.
Le PDC est conscient du fait que nous avons besoin d'un budget, même très déficitaire, dans la situation actuelle. La responsabilité d'un parti gouvernemental passe avant tout par la stabilité des institutions afin de répondre aux besoins de la population - oui, Mesdames et Messieurs, aux besoins de la population ! Et non aux besoins de l'administration ! Une majorité est donc prête à voter un budget, mais pas n'importe lequel. C'est pourquoi la commission des finances, à travers ses amendements, a souhaité donner une direction claire au Conseil d'Etat de sorte à lui fixer des priorités pour ses futures demandes. La fonction publique doit rester au service de la population et des demandes du gouvernement; nous avons des doutes sur les prérogatives des uns et des autres. Les enjeux politiques majeurs, dans notre canton, demandent de la concertation et des efforts pour trouver des solutions; le parti démocrate-chrétien y sera toujours ouvert. Il votera donc l'entrée en matière sur ce projet de budget mais refusera tout amendement - nous voterons uniquement le budget tel qu'il est sorti de commission. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
Mme Frédérique Perler (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, j'ai entendu parler d'un budget de transition. Mais de quelle transition ? Il est un peu facile, selon moi, de dire que le Conseil d'Etat a tenu ses engagements alors que les postes pour leur mise en oeuvre ont été refusés.
Dès sa présentation par le gouvernement, le projet de budget n'a pas réjoui les Verts, et de loin. L'absence de mesures financières pour faire face à l'enjeu climatique est particulièrement choquante. Le groupe des Verts dénonce l'invisibilité de la crise environnementale à laquelle nous sommes confrontés. Je le répète: dans ce budget, aucune action forte, pourtant indispensable, n'a été entreprise en faveur de la transition écologique, et ce alors que nous avons tout récemment déclaré l'urgence climatique dans notre canton.
Par ailleurs, nous considérons que le déficit majeur provoqué par les différentes réformes, en particulier la RFFA - on a abondamment développé cette question - ne doit pas se faire aux dépens de la fonction publique et des générations futures. Ce défi colossal constitue un legs injuste à nos enfants, au même titre que l'inaction face à l'urgence climatique et à la protection de notre environnement. Les Verts sont donc choqués par le défaut de moyens pour affronter ces enjeux.
Le Conseil d'Etat se borne à prôner le lancement et l'accompagnement du Léman Express comme mesure forte pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre dans le canton; c'est totalement insuffisant, chers collègues ! A nos yeux, les fonds publics doivent être réorientés de manière ambitieuse pour financer non pas un budget de transition, mais la transition écologique, car il en va de notre survie, et les projets ne manquent pas: rénovation énergétique des bâtiments, multiplication des zones piétonnes, promotion du vélo, grand absent de la politique d'investissement en matière de mobilité. Le collège gouvernemental manque cruellement de volonté politique et ne semble pas prendre la mesure de la situation.
Le projet de budget proposé initialement par le Conseil d'Etat, bien qu'insuffisant pour couvrir l'augmentation des besoins de la population, avait au moins le mérite de conserver les prestations publiques. Mais ce que nous craignions se réalise, la symétrie des efforts n'est qu'un voeu pieux, le Conseil d'Etat n'honore pas ses engagements en tant qu'employeur et boude des mesures fiscales audacieuses. Dans une période de crise des revenus, quoi qu'en dise la droite, la suppression du bouclier fiscal, mesure antisociale par excellence et inégalitaire au possible, devrait tenir de l'évidence - et il y a d'autres pistes.
Qui dit déficit dit creusement de la dette, déjà située à presque 12 milliards de francs. Les Verts sont préoccupés et attendent du Conseil d'Etat qu'il mène une réflexion de fond à ce sujet. Les dépenses et les cadeaux fiscaux actuels accroissent l'endettement et se font au détriment des générations futures, au même titre - encore une fois ! - que l'inaction face à l'urgence climatique. Il est de notre devoir et de notre responsabilité de faire preuve de solidarité et de justice intergénérationnelle, d'affirmer et d'appliquer un nouveau contrat social.
Tel que ressorti des travaux de la commission des finances, le projet de budget est carrément désastreux. La droite et le MCG se sont entendus sur des coupes linéaires à l'aveugle et sans aucune réflexion quant à leur impact et aux effets concrets que les suppressions de postes allaient entraîner: un véritable jeu de massacre ! Les suppressions de postes ainsi que l'abolition de prestations de tiers nécessaires pour la protection de la nature, qui sont déjà misérables dans notre budget actuel... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...constituent une véritable provocation.
On a largement évoqué ce que biffer des postes pouvait engendrer au niveau de l'enseignement et de l'éducation, mais c'est aussi renoncer à des tâches consacrées à la sécurité, comme le convoyage des détenus - réclamé notamment par le MCG - ou encore à un nombre suffisant de bus TPG en circulation pour accompagner la mise en oeuvre du Léman Express...
Le président. C'est terminé, Madame.
Mme Frédérique Perler. ...qui a été inauguré aujourd'hui.
Le président. Je vous remercie...
Mme Frédérique Perler. On mesure ici toutes les contradictions... (Le micro de l'oratrice est coupé.)
Le président. Merci. Je passe la parole à M. le député Jean Batou.
M. Jean Batou (EAG). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, juste une information pour vous rendre attentifs à ce qui se passe réellement à Genève: une étude de l'Administration fédérale des contributions montre que dans notre canton, la fortune a augmenté de 6,5% par an de 2003 à 2012 tandis que les rentrées fiscales n'ont progressé que de 4,9% sur la même période, ce qui signifie que la fortune croît beaucoup plus rapidement que les recettes. C'est exactement l'inverse qui se passe dans le canton de Bâle-Ville ! Les ressources sont là, il faut les taxer, il faut répondre aux besoins de la population. Merci. (Applaudissements.)
Mme Françoise Sapin (MCG). Pour le MCG, comme cela a été relevé à plusieurs reprises, il s'agit d'un budget de transition qui tient compte des votations populaires sur la RFFA, les subsides d'assurance-maladie et la recapitalisation de la CPEG. Si nous avons passé un cap nécessaire pour l'avenir de Genève, la situation financière est en revanche difficile, précisément en raison des défis que nous avons relevés.
Au vu du contexte exceptionnel, le groupe MCG est opposé à la création de 412 postes, ce serait tout à fait irresponsable à nos yeux. En effet, quand un ménage est contraint d'engager des dépenses considérables, il ne va pas en ajouter de nouvelles. Par ailleurs, étant donné les efforts demandés, nous estimons que les membres de la fonction publique ne doivent pas payer pour un accroissement de l'Etat et sacrifier leur annuité en échange d'une augmentation de postes.
Parce que nous pensons également que les charges générales de l'Etat devraient être plus modérées, nous demanderons d'une part le gel de la ligne budgétaire 31 «Charges de biens et services et autres charges d'exploitation», soit la suppression d'une hausse de 11,9 millions opérée entre les budgets 2019 et 2020, et nous soutiendrons d'autre part la coupe de 12 millions proposée par un autre parti. Cela fait une économie totale de 24 millions - sur 582,2 millions, ce n'est pas la mer à boire.
Le groupe MCG suivra cette ligne politique pendant toute la durée des débats qui nous attendent ces deux jours sur le budget 2020; eu égard aux difficultés financières que rencontre l'Etat, c'est une question de bon sens. Il ne s'agit en aucun cas d'une suppression de prestations ou de coupes, comme certains l'ont déclaré à plusieurs reprises, mais uniquement de l'arrêt de nouvelles dépenses, d'un gel pragmatique afin de mieux affronter le futur. Pour l'avenir de notre canton, nous devons nous montrer réalistes et défendre un budget équilibré au service des citoyens genevois. Pour toutes ces raisons, le MCG votera l'entrée en matière sur ce projet de budget.
M. Alberto Velasco (S). Nous, les socialistes, avions demandé la liste complète des 412 postes pour les analyser, et je tiens à remercier le département des finances, tout particulièrement Mme la conseillère d'Etat, qui a eu l'amabilité de nous la transmettre. On entend souvent que la gauche exige constamment des postes supplémentaires sans justification; cette année, nous avons décidé d'étudier les postes un par un pour démontrer que chacun d'entre eux a une raison d'être, qu'il est légitime de les revendiquer, et si certaines personnes avaient estimé qu'il n'était pas nécessaire ou opportun de le faire, on aurait pu en discuter. Malheureusement, cet exercice nous a été refusé en commission. Au moment où nous avons proposé de procéder à cet examen, au moment où nous avons expliqué que nous avions analysé les 412 postes, le PLR a rétorqué qu'il l'avait fait aussi, qu'il s'était carrément livré à l'étude des 18 000 postes de l'Etat et que parmi ces 18 000 postes, certains n'étaient pas pertinents et pouvaient largement compenser les 412 nécessaires. Il est clair qu'avec cette attitude, ce que cherche à faire la droite, c'est restructurer l'Etat en éliminant des postes ou en réorganisant des services jugés indispensables.
Tout le débat, chers collègues, s'est concentré autour du constat que les charges s'accroissent, mais que leur hausse n'est pas proportionnelle à celle de la population. Mais est-ce que la misère est proportionnelle à la population ? A Genève, Mesdames et Messieurs, il se trouve que la pauvreté n'est pas proportionnelle à l'augmentation démographique, elle croît malheureusement plus vite. Un jour, il faudra donc admettre que la progression des charges correspond à celle de la précarité, parce que comme vous le savez, quand la misère s'accroît dans une région, les besoins sociaux s'accroissent également. Il suffit de voir les dépenses de l'Hospice général et vous comprendrez, il suffit d'observer les forts besoins en logements sociaux, on n'arrive plus à répondre à la demande. L'augmentation des charges, Mesdames et Messieurs, ce n'est pas seulement une ligne budgétaire indexée en fonction de la population, c'est aussi une situation de pauvreté, d'inégalités de traitement, d'injustice sociale qui s'installe.
J'aimerais relever qu'avec les baisses successives d'impôts, la substance fiscale genevoise a perdu un milliard, Mesdames et Messieurs ! Un milliard ! Si nous enregistrions aujourd'hui les mêmes rentrées fiscales qu'en l'an 2000, nous n'aurions aucun problème budgétaire ! Aucun problème budgétaire ! Ce sont les coupes successives qui ont prétérité nos finances d'un milliard et qui posent problème maintenant. Ce n'est pas dû à un manque de revenus, comme quelqu'un l'a dit tout à l'heure, non, non: le manque de recettes a été sciemment orchestré.
Je vais citer un chiffre éblouissant: en 2019, la richesse de notre pays s'est accrue de 107 milliards ! 107 milliards, Mesdames et Messieurs ! 107 milliards ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Et ici, on effectue des coupes pour 50 millions ! On effectue des coupes pour 50 millions - enfin, la totalité des postes, c'est entre 40 et 50 millions, mais bon... On parle de 107 milliards, et ici on n'arrive pas à trouver 50 millions pour financer, alors peut-être pas les 412 postes, mais au moins 300 postes nécessaires à la police, nécessaires à l'école primaire. En effet, Mesdames et Messieurs, une bonne partie de ces postes sont dévolus à l'école primaire. L'école primaire, c'est vraiment la base...
Le président. Je vous remercie, Monsieur Velasco, c'est terminé...
M. Alberto Velasco. Alors je dis juste en conclusion, Monsieur le président, que nous allons accepter l'entrée en matière, parce que nous avons des amendements à apporter. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Parfait. Je donne la parole à M. François Baertschi.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Ainsi donc une guérilla parlementaire est en train de se préparer... (Exclamations.) ...une guérilla parlementaire lancée et dirigée par Ensemble à Gauche qui dépose une quantité monumentale d'amendements. Cette guérilla, je tiens à le souligner, a déjà fait une victime: mon imprimante... (Rires.) ...qui, n'en pouvant plus, a rendu l'âme, tout ça à cause d'Ensemble à Gauche !
Ensemble à Gauche, c'est comme Georges Marchais à la grande époque du parti communiste français: on prend tout aux riches, on prend tout ! Marchais, c'était: «Au-dessus de 4 millions, je prends tout !» On prend tout: voilà la ligne politique d'Ensemble à Gauche. Or que va-t-il se passer ? Si on prend tout aux riches, il n'y aura plus rien pour les pauvres. Résultat, la précarité sera générale, elle se développera de manière excessive.
On connaît cette manière de faire, on connaît ces procédés, c'est là qu'Ensemble à Gauche veut nous mener. Eh bien nous n'y irons pas, le MCG ne votera aucun de ses amendements, bien que ses membres aient déployé des trésors d'imagination; nous refuserons tous les amendements.
Mme Jocelyne Haller (EAG). D'aucuns ici se plaisent à opposer personnel de la fonction publique et population. Alors je rappelle une évidence: la grande majorité des employés de l'Etat font partie de notre population, ce sont des contribuables, ce sont des usagers des services publics. Lorsque ce parlement s'emploie à infliger des baisses de prestations, eh bien il pénalise doublement cette partie de la population, et je tenais à le souligner. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. «Nous aurions voté un budget déficitaire de 372 millions», disait Yvan Zweifel tout à l'heure...
M. Yvan Zweifel. Avec un seul «f» !
M. Jean Burgermeister. Pardon ?
M. Yvan Zweifel. Zweifel avec un seul «f» !
M. Jean Burgermeister. Avec un seul «f», oui, contrairement à ce que j'ai pu écrire dans mon rapport ! Mais, somme toute, c'est le coût estimé des projets pour la RFFA et le renforcement des subsides d'assurance-maladie, projets que le PLR a soutenus. Quel aurait été le coût du texte gouvernemental sur la CPEG que le PLR a voté ? Au bas mot, 150 millions. Quoi qu'il soit advenu le 19 mai, le PLR aurait de toute façon sabré l'ensemble des nouveaux postes. Cette information, Mesdames et Messieurs les députés, il aurait été utile de la communiquer à la population avant la votation; au lieu de cela, le PLR a affirmé qu'il n'y aurait aucune coupe. C'était un mensonge, et il revient bel et bien aux citoyens de payer aujourd'hui pour les cadeaux fiscaux. Quant au MCG, c'est bien pire encore, puisqu'il avait même accepté le projet de loi de la gauche sur la CPEG, ce même MCG qui nous reproche une guérilla parlementaire, mais qui mène pour sa part une guerre frontale contre les services publics.
Il faut bien comprendre pourquoi nous parlons de budget d'austérité: avant même que le PLR et le MCG le sabotent, il ne répondait déjà pas aux besoins de la population. A l'heure actuelle, de nombreux services sont sinistrés par manque de moyens, en raison de sous-effectifs structurels. La droite nous parle d'efficience, mais quelle efficience possible au SPC, par exemple, qui n'a connu aucune augmentation de postes depuis 2006 malgré une évolution continue du nombre de dossiers et alors que son travail doublera l'année prochaine en raison de la réforme fédérale ? Quelle efficience possible au SPAd où même la Cour des comptes a pointé du doigt les sous-effectifs criants qui mettent en danger les personnes les plus précaires ? Et quelle efficience au DIP pour faire face à la hausse du nombre d'élèves ? (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Non, Mesdames et Messieurs, ce n'est pas d'efficience qu'il s'agit, c'est de réformer l'Etat, c'est de réduire les prestations publiques; pour le DIP, c'est tout simplement d'augmenter le nombre d'élèves par classe. Que le PLR ait au moins le courage d'assumer ce qu'il fait: saborder le budget et détruire les prestations à la population ! (Applaudissements.)
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ce débat est intéressant. J'ai été députée pendant longtemps, mes collègues du Conseil d'Etat l'ont été également, et nous avons présenté ensemble un budget qui, sans être le meilleur à nos yeux, répondait toutefois aux exigences contradictoires des différentes réformes que votre parlement a votées dans le même temps, c'est-à-dire à la fois des baisses de recettes et des augmentations de prestations - position qui a ensuite été confirmée par la population. D'un côté de cette assemblée, certains estiment que les dépenses sont trop importantes, de l'autre, on se plaint qu'elles ne le soient pas suffisamment. Vous conviendrez que pour notre collège, les choses ne sont pas faciles: chacun s'accroche à son dogme, chacun s'obstine à rester dans son camp politique, d'aucuns veulent plus, d'autres moins.
La situation financière de notre canton est inquiétante, ce n'est jamais une bonne nouvelle que de présenter un budget déficitaire. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, je vous garantis que l'Etat avait peu - voire presque pas - de marge de manoeuvre tant nous étions pris entre les charges contraintes, les charges qui découlent des différentes votations populaires et celles qui ressortissent au droit fédéral.
La majorité de votre Grand Conseil a décidé de procéder à des coupes dans deux domaines essentiels, premièrement à la nature 31. Nous avons entendu Mme Sapin indiquer tout à l'heure qu'il était nécessaire d'y économiser 24 millions. Qu'est-ce que cette rubrique ? Ce sont les charges de biens et services et autres charges d'exploitation, une ligne budgétaire qui regroupe des frais extrêmement divers. Vous semblez croire que le Conseil d'Etat peut se faire plaisir avec des dépenses qui ne sont pas toujours utiles, eh bien c'est faux, Mesdames et Messieurs: sur les 593 millions que compte cette rubrique, plus de 150 millions sont liés aux abandons et variations de valeur de créances fiscales, des données qui ne sont pas monnayables - d'ailleurs, les créances non fiscales ne le sont pas non plus. Ajoutez à cela une vingtaine de millions pour l'assistance judiciaire et les charges obligatoires du Pouvoir judiciaire. Si l'on ne tient compte que des éléments sur lesquels le Conseil d'Etat a une marge de manoeuvre - pour autant que l'on puisse parler de marge de manoeuvre et qu'il soit possible de stopper l'entretien de nos immeubles et de nos biens, de couper le chauffage, l'eau et l'électricité, de ne plus effectuer de mises à jour informatiques - on constate que les montants à la nature 31 sont en baisse de plusieurs millions par rapport à la moyenne des années 2011 à 2019. Ainsi, Mesdames et Messieurs, si vous maintenez votre coupe de 24 millions dans cette rubrique, le Conseil d'Etat ne pourra vraisemblablement pas faire fonctionner l'Etat et son administration correctement.
Deuxièmement, vous avez jugé que les 412 postes créés étaient de trop. Vous n'avez pas fait d'arbitrage - le Conseil d'Etat peut l'entendre - vous avez purement et simplement supprimé ces 412 postes, clamant que puisqu'il s'agit d'emplois supplémentaires, y renoncer n'engendrerait pas de diminution des prestations. Or comment pensez-vous que les services chargés de verser les subsides d'assurance-maladie à hauteur de 186 millions vont s'en sortir avec le même nombre de collaboratrices et collaborateurs ? Comment imaginez-vous que nous allons développer la mobilité dans le canton avec le même nombre de fonctionnaires ? Comment croyez-vous que nous allons répondre aux demandes de l'administration pour mieux servir la population ou encore mettre à jour les systèmes informatiques ? Pas plus tard que ce jour, j'ai reçu un mail d'une personne qui, s'étant rendue dans un office, a dû y patienter trois heures parce que le système informatique ne fonctionnait pas. Comment allons-nous faire, Mesdames et Messieurs ?
Certes, nous pouvons passer par le biais des demandes de crédits supplémentaires, vous avez raison. Ainsi, chaque semaine, l'un de mes collègues ou moi-même nous présenterons devant la commission des finances pour réclamer de nouveaux montants, de nouveaux postes. (Commentaires.) Des postes, oui, qui - contrairement à ce que vous pensez - ne sont pas là pour servir les conseillers d'Etat. On entend souvent que les postes ne sont pas à la disposition de l'administration, il est important de rappeler que le rôle de l'administration est d'être à la disposition de la population.
Mesdames et Messieurs les députés, finissons-en avec le mythe selon lequel les conseillers d'Etat sollicitent des postes pour gonfler leur secrétariat général. Chacun de mes collègues et moi-même viendrons défendre les emplois que nous avions créés en vous décrivant la souffrance qui règne dans certains services... (Commentaires.) Vous trouvez cela amusant, je vous assure que cela ne l'est pas. J'ai été à votre place, j'ai aussi ri lorsque des magistrats tentaient d'expliquer la situation, mais soyez certains qu'après avoir pris l'habit du conseiller d'Etat, notre vision change, non pas par rapport aux dépenses, mais par rapport aux responsabilités. Le gouvernement que vous décriez tant, celui dont vous dites qu'il n'est pas uni ou qu'il est une honte pour ce canton, a validé des postes et acceptera les critiques, parce que nous avons pour mission première de servir les intérêts de la population, parce que nous sommes attachés au service public, et lorsque nous demandons des postes, nous savons de quelle manière ils seront utilisés. Alors oui, les rôles changent. J'ai été à la place du groupe PLR, j'ai conspué certaines augmentations; il se trouve qu'aujourd'hui, dans l'habit que je porte, je les comprends mieux. Vous devriez à tout le moins, Mesdames et Messieurs, puisque le Conseil d'Etat n'a plus de contrôle sur ce budget aujourd'hui, vous occuper des services dans lesquels les requêtes sont urgentes.
Mesdames et Messieurs, je vous remercie d'entrer en matière sur ce projet de budget et d'examiner avec clairvoyance les différents amendements qui vous seront proposés. C'est bien d'avoir des ententes, c'est bien de trouver des majorités, mais si seulement les uns et les autres pouvaient exiger et revendiquer moins, chacun de son côté, je vous assure que nous finirions par avoir un budget, une fonction publique satisfaite, des prestations à délivrer aux citoyens. Encore une fois, je vous remercie d'entrer en matière.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci bien. Mesdames et Messieurs, je vous prie de vous prononcer sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12576 est adopté en premier débat par 83 oui contre 14 non.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 1 et 2.
Budget de fonctionnement (tome 1)
Le président. Nous passons à l'article 3 sur le budget de fonctionnement où nous sommes d'abord saisis de plusieurs amendements transversaux. Le premier provient du Conseil d'Etat et concerne la suspension de l'annuité 2020... Est-il maintenu, Madame Fontanet ? (Un instant s'écoule.) Madame Fontanet ?
Mme Nathalie Fontanet. Excusez-moi ?
Le président. Est-ce que vous maintenez votre amendement sur la suspension de l'annuité ?
Mme Nathalie Fontanet. Oui, bien sûr. (Exclamations.)
Des voix. Mais ce n'est pas possible !
Mme Nathalie Fontanet. Ah non, non, pardon !
Le président. Voilà, nous sommes bien d'accord. Cet amendement transversal est donc retiré et nous traitons celui de M. Pablo Cruchon: +1 764 525 francs à la nature 30 et +1 734 165 francs à la nature 36. Je laisse la parole à M. Olivier Baud.
M. Olivier Baud (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cet amendement se justifie pleinement. Le Conseil d'Etat a instauré une mesure assez mesquine, à savoir supprimer le doublement du dernier salaire. Il s'agissait d'une petite gratification en faveur des fonctionnaires qui ont oeuvré au sein de l'Etat pendant quarante ans, qui se sont dévoués pour le service public.
Sur l'ensemble d'une carrière, il peut y avoir jusqu'à 520 salaires, on peut bien en verser un de plus - pour autant que la personne travaille jusqu'au bout, c'est-à-dire jusqu'à 65 ans, parce que le gouvernement a déjà mis fin à la prime de départ pour ceux qui prennent leur retraite plus tôt.
Mesdames et Messieurs, la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat a étudié le projet du Conseil d'Etat et l'a refusé, donc il faut prendre en considération cette position. Je le répète: une majorité a décidé de ne pas aller dans le sens de cette disposition. Je pense que le Conseil d'Etat devrait y renoncer et notre parlement suivre la commission ad hoc et rejeter cette mesure mesquine. Merci.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur. Je lance le vote sur cet amendement transversal de M. Pablo Cruchon, à savoir +1 764 525 francs à la nature 30 et +1 734 165 francs à la nature 36.
Mis aux voix, cet amendement transversal est rejeté par 59 non contre 26 oui et 13 abstentions.
Le président. Nous poursuivons avec l'amendement transversal de M. Jean Burgermeister d'un montant de +12 millions de francs à la nature 31. Vous avez la parole, Monsieur Burgermeister.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Heu... Je ne sais plus exactement de quel amendement il s'agit... (Rires. Remarque.) Ah, voilà, oui ! L'objectif est simplement de revenir sur une coupe linéaire que le PDC a effectuée à l'aveugle, sans se poser une seule seconde la question des conséquences - mais bon, c'était comme ça tout du long à la commission des finances ! Mesdames et Messieurs, il s'agit d'une coupe absurde que je vous propose d'annuler.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de première minorité. Le parti socialiste soutiendra cet amendement. En effet, la coupe transversale de 12 millions à la nature 31 n'avait aucune justification politique, et en commission, même ses auteurs, à savoir les membres du groupe PDC, n'ont pas su nous dire pourquoi ils l'opéraient.
Je rappelle brièvement en quoi consiste la ligne 31, parce que les choses sont parfois un peu obscures: il s'agit par exemple de l'entretien des bâtiments et des routes, du service des achats, du matériel scolaire, des camps et des sorties d'école. Encore une fois, cette coupe linéaire proposée par le PDC et votée par la majorité de la commission des finances aura de graves conséquences sur les prestations à la population. Je vous remercie.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Juste une explication qui vaut pour l'ensemble des amendements d'Ensemble à Gauche: nous les avons financés en augmentant de 8 centimes l'impôt cantonal sur le bénéfice des personnes morales et de 8 centimes également celui sur le capital des personnes morales. Il s'agit d'une hausse tout à fait raisonnable eu égard au gigantesque cadeau fiscal dont bénéficient lesdites personnes morales, et ce système permet au final de financer les excellents amendements d'Ensemble à Gauche à un coût neutre pour l'écrasante majorité de la population. (Applaudissements.)
M. Mathias Buschbeck (Ve), rapporteur de troisième minorité. Les Verts soutiendront cette proposition visant à revenir sur l'amendement aveugle proposé en commission, lequel ne dit pas ce qu'il faut couper...
M. Jean Burgermeister. Ce n'est pas l'amendement qui est aveugle !
M. Mathias Buschbeck. Non, l'amendement n'est pas aveugle, effectivement, c'est la coupe qui est aveugle. Je te remercie, Jean ! (Rires.) Vous me direz qu'on parle de gommes et de crayons, Mesdames et Messieurs, mais il y a aussi les loyers des locaux occupés par l'administration, il faut bien les payer. Je voudrais savoir comment on va faire si on ne peut plus y loger demain !
Citons également toute une série de mandats en faveur de la biodiversité que des prestataires extérieurs effectuent et qui ne pourront plus être renouvelés; on ne sait pas exactement lesquels, on aurait souhaité au moins le savoir avant de subir cette modification en commission. Par conséquent, nous soutiendrons l'amendement d'Ensemble à Gauche qui revient sur l'amendement qui avait supprimé cette ligne. (M. Jean Burgermeister rit.)
M. Jean-Luc Forni (PDC), rapporteur de majorité. La majorité rejettera cet amendement pour une raison très simple, c'est un calcul mathématique élémentaire: avec les 35 millions du gel des postes et les 24 millions résultant des coupes à la nature 31, nous pouvons compenser le montant de l'annuité, ce que le Conseil d'Etat s'est refusé à faire. Je vous remercie.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Attention, ne nous y trompons pas: si le rétablissement de 12 millions à la ligne 31 fait partie des propositions qui seront présentées par les conseillers d'Etat de façon individuelle pour chaque politique publique, la solution exposée maintenant par M. Burgermeister, qui vise à augmenter les centimes additionnels cantonaux, n'est pas la bonne. En effet, le Grand Conseil n'a pas de marge de manoeuvre pour alourdir les charges de façon aussi importante, et il s'agit ici d'augmenter les impôts, de relancer la discussion sur l'imposition des personnes morales. Avec une telle hausse fiscale, certaines entreprises se retrouveraient taxées à un taux de plus de 15%...
Des voix. Ouh !
Mme Nathalie Fontanet. Nous avons déjà mené ce débat, Mesdames et Messieurs. Dès lors, le Conseil d'Etat vous invite à refuser cet amendement d'Ensemble à Gauche sous sa forme actuelle. Merci beaucoup.
Le président. Merci. Nous passons au vote sur l'amendement transversal de M. Jean Burgermeister qui, rappelons-le, prévoit +12 millions de francs à la nature 31.
Mis aux voix, cet amendement transversal est rejeté par 57 non contre 38 oui. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
Le président. Voici le dernier amendement transversal, qui a également été déposé par M. Burgermeister: +11 996 507 francs à la nature 31. C'est le même que le précédent, et je donne à nouveau la parole à son auteur.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Non, Monsieur le président, ce n'est pas le même, mais il lutte contre la même logique absurde. Dans le cas d'espèce, c'est le MCG qui avait proposé cette coupe. Alors j'ai cité sur la demande d'amendement un petit extrait d'un discours tenu en 2018 par le député François Baertschi qui s'adressait alors à la droite, PLR en tête: «Il faudrait être fou pour jouer à ce petit jeu de massacre qui fait tant de mal à Genève.» J'aurais pu ajouter le reste: «Il faudrait être fou pour suivre [c]es pompiers pyromanes.» Pompiers pyromanes, pourquoi ? Parce qu'après avoir savamment orchestré le déficit, ils cherchent à sabrer dans les postes et les prestations à la population.
Entre-temps, évidemment, le MCG a changé d'avis... Bon, ça lui arrive souvent, il faudrait une petite grève de la fonction publique pour le remettre sur le droit chemin ! (Commentaires.) Enfin, la logique est la même, Mesdames et Messieurs... (Commentaires. L'orateur rit. Le président agite la cloche.) Je vous remercie, Monsieur le président. Un peu de sérieux, s'il vous plaît, Mesdames et Messieurs du PLR ! La logique est la même: il s'agit d'une coupe aveugle, d'une coupe absurde, d'une coupe surtout qui n'a jamais été justifiée. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Mathias Buschbeck (Ve), rapporteur de troisième minorité. Le rapporteur de majorité vient de nous expliquer que cette coupe est nécessaire pour retrouver l'équilibre, alors j'aimerais le rassurer: puisqu'une marge supplémentaire a été dégagée suite au vote du budget en commission, nous n'avons plus besoin d'effectuer cette coupe, donc il peut facilement voter l'amendement.
Une voix. Ouais, c'est vrai, ça !
Le président. Je vous remercie et j'ouvre la procédure de vote sur cet amendement transversal de M. Burgermeister qui porte sur un montant de +11 996 507 francs à la nature 31.
Mis aux voix, cet amendement transversal est rejeté par 55 non contre 40 oui.
D - CULTURE, SPORT ET LOISIRS
Le président. Mesdames et Messieurs, nous abordons la politique publique D «Culture, sport et loisirs». Nous sommes saisis de deux amendements du Conseil d'Etat, d'un montant respectivement de +44 526 francs et de +43 531 francs.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 55 non contre 38 oui.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 55 non contre 40 oui.
Le président. Je mets maintenant aux voix l'ensemble de la politique publique D.
Mise aux voix, la politique publique D «Culture, sport et loisirs» est adoptée par 74 oui contre 10 non et 5 abstentions.