Séance du
vendredi 22 novembre 2019 à
16h15
2e
législature -
2e
année -
7e
session -
39e
séance
PL 12020-A
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs, nous abordons le rapport de la commission de l'économie sur le projet de loi 12020. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. André Pfeffer.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi 12020 doit être rejeté, car il est inutile, inapplicable et contraire au droit. Ce texte n'apporterait rien. La BCGE accomplit déjà un travail remarquable pour le développement de notre économie. Notre banque assiste et aide presque 20 000 entreprises ou PME. La BCGE, mais aussi les organismes comme la FAE, l'OPI, GENILEM, la FONGIT, la Fondetec, etc., sont au service de nos PME et micro-entreprises. Tous ces organismes assistent les PME et micro-entreprises pour améliorer leurs projets, leur viabilité et évidemment leurs capacités à être financées. La BCGE est l'un des acteurs majeurs sur le marché genevois, mais il existe d'autres banques, des fonds spécialisés en «capital risk», le «crowd funding», la fintech, etc. Plusieurs études le confirment: le marché des crédits aux PME fonctionne bien.
En plus d'être boiteux, ce projet de loi est également contraire au droit supérieur. M. Bahar, professeur d'université, spécialiste du droit des obligations et du droit bancaire, l'a précisé durant son audition: ce projet de loi porte atteinte à la garantie de la propriété; il porte atteinte aux droits des actionnaires; il induit une distorsion de la concurrence et est contraire à la garantie de la liberté économique. Il n'est pas conforme au droit fiscal et, évidemment, il n'est pas conforme aux principes du droit bancaire. Je le répète: cette proposition est boiteuse et non conforme au droit supérieur. La BCGE est une société anonyme, cotée en bourse, et les actionnaires, pour une très large majorité, sont l'Etat et les communes genevoises. La BCGE verse aux collectivités publiques, sous forme de dividendes et d'impôts, environ 47 millions par année. Pour terminer, je précise que le Conseil d'Etat, l'Association des communes genevoises et évidemment les représentants de la BCGE vous recommandent de refuser ce projet de loi. Merci.
M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de minorité. Bon, c'est le rapporteur de majorité qui recommande de refuser le projet de loi, pas les représentants de la BCGE directement, j'espère. Ce projet de loi intervient dans un contexte où - contrairement à ce qu'a soutenu le rapporteur de majorité, qui peint ici, on a l'impression, le diable sur la muraille - non, les entreprises n'ont pas toutes de la facilité à obtenir des crédits. Vous pouvez poser la question aux différents organismes qui traitent de cela. Je vais citer le magazine «Bilan» qui écrivait en 2016: «Ces dernières années, les volumes de crédit consentis aux PME stagnent, voire déclinent. Depuis 2002, les prêts aux PME de 10 à 50 employés ont baissé en moyenne de 3,5% par an, soit une baisse de près de 40% depuis treize ans. Les prêts qui augmentent sont de plus en plus gagés: de 38% au premier trimestre 2009, leur part s'est envolée à 48% fin 2014, soit une hausse moyenne de 5% par an des garanties demandées par les banques. Les crédits bancaires non gagés déclinent quant à eux nettement depuis 2009 [...]» On parlait hier des contrats de subventions - et une majorité de ce parlement les a votés - des différents organismes d'aide aux entreprises, c'est-à-dire la Fondation d'aide aux entreprises - la FAE - la FONGIT et l'office pour la promotion industrielle - l'OPI - qui justement assument ce rôle d'aide aux entreprises, rôle que les banques ne remplissent pas suffisamment. On avait d'ailleurs à plusieurs reprises entendu le directeur de la FAE, M. Schefer, se montrer quelque peu critique par rapport au rôle des banques. On le voit, ce n'est pas nécessairement leur faute, il y a une faute en matière de... Si on peut qualifier cela de faute; ce sont en tout cas des freins induits par la réglementation qui s'est montrée de plus en plus sévère sur l'octroi des crédits. Par conséquent, les banques aident moins facilement surtout les jeunes entreprises à naître ou à se développer. C'est la raison pour laquelle vous ne trouverez aucune banque qui proposera un crédit à une entreprise qui aurait moins de trois bilans comptables. Par conséquent, créer son entreprise devient particulièrement difficile si on n'a pas les fonds propres nécessaires, d'où l'existence des organismes de financement que j'ai cités au préalable.
Vous comprendrez bien que ce projet de loi intervient dans ce contexte-là et cherche - peut-être de façon un peu maladroite - à faire en sorte que la seule banque qualifiée de société anonyme de droit public - donc celle pour laquelle nous avons une loi cantonale sur laquelle nous pouvons agir - se montre peut-être moins frileuse que les autres dans les crédits aux très petites, petites et moyennes entreprises. Il ne s'agit pas de dire que la BCGE ne le fait pas, on peut saluer les efforts de la BCGE ces dernières années, mais le projet de loi vise à demander d'intensifier ces efforts. Il est peut-être un peu maladroit de demander d'accorder précisément 10% du bénéfice à cette tâche-là, c'est la raison pour laquelle je redépose l'amendement qui avait été déposé en commission, qui s'en tient à une modification des buts dans la loi sur la BCGE. Il s'agirait de la compléter de la façon suivante: «La banque a pour but principal de contribuer au développement économique du canton et de la région» - ça, c'est l'article actuel de la loi - «notamment en soutenant le développement et la création des micro, petites et moyennes entreprises». Excusez-moi, mais un amendement demandant d'ajouter cela dans les buts de la banque cantonale genevoise ne mange pas de pain ! C'est bien loin des propos, c'est vrai, du premier signataire, qui à l'époque avait dit: «Si on demande à la Banque cantonale de Genève de planter des patates, elle devra planter des patates !» En l'occurrence, on peut, en tant que Grand Conseil, demander à la BCGE qu'elle ait parmi ses buts de veiller au développement et à la création de micro, petites et moyennes entreprises, qui, je le rappelle, sont un poumon pour notre économie et représentent la très grande majorité des emplois. Il est donc extrêmement important que nous donnions cette orientation à notre banque cantonale - une société anonyme de droit public à laquelle nous pouvons donner une orientation - pour favoriser ces très petites, petites et moyennes entreprises. Je vous invite donc à accepter l'amendement et ensuite à accepter ce projet de loi.
M. Edouard Cuendet (PLR). Je vous le dis: le PS n'aime pas le droit fédéral ! Et le PS le prouve encore une fois de manière tonitruante avec son projet de loi, puisque le PL 12020 veut que la BGCE consacre 10% de son bénéfice net au soutien de petites et micro-entreprises par le biais de prêts à des taux préférentiels, des taux de faveur. Cet objet réussit l'exploit, dans un seul texte, de violer de nombreuses garanties constitutionnelles. Je dois saluer cet exploit ! Tout d'abord, le fait de soustraire systématiquement 10% du bénéfice net de la banque viole le droit des actionnaires au versement d'un dividende et viole le droit à un but lucratif, qui est ancré dans la Constitution fédérale. D'ailleurs, l'Association des communes genevoises, la célèbre ACG, ne s'y est pas trompée, puisque ses membres se sont unanimement opposés à ce texte qui viole gravement le droit des communes, qui font partie des actionnaires principaux de la BCGE. Le canton, par la voix de la conseillère d'Etat ici présente, s'est aussi fermement opposé à ce texte qui viole les droits du canton, actionnaire principal de la banque.
En second lieu, le PL 12020 viole de manière tout aussi flagrante la garantie de la liberté économique, puisque en privilégiant les petites entreprises et les micro-entreprises par rapport aux autres acteurs du tissu économique genevois, on crée une distorsion de concurrence totalement incompatible avec la Constitution fédérale.
Mais le PS ne s'arrête pas là dans sa croisade: en troisième lieu, il viole le droit bancaire fédéral en soustrayant 10% du bénéfice de la banque cantonale, qui devrait être utilisé dans certains cas à la création de fonds propres, eux aussi fixés par le droit fédéral. Bref, en un mot, il n'y a rien à sauver dans le PL 12020, et la commission de l'économie ne s'y est pas trompée, puisqu'elle a massivement rejeté l'entrée en matière. Même le PS, on l'a vu par la voix de M. de Sainte Marie, admet le caractère inapproprié de ce texte et essaie de le réanimer, de le sortir de son coma, par le biais d'un amendement désespéré que je vous invite évidemment à rejeter. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
Sur le fond, la BCGE a démontré qu'elle remplit son devoir de soutien aux entreprises: sur un bilan total de 23 milliards, elle ne consacre pas moins de 16 milliards au crédit aux entreprises, à 19 000 entreprises locales. Par ailleurs, la BGCE est le partenaire principal de la FAE, puisque 40% à 50% de toutes les affaires de la FAE passent par la BCGE. J'invite donc le PS à arrêter sa croisade insensée contre la BCGE qui fragilise...
Le président. Il vous faut terminer.
M. Edouard Cuendet. ...une institution essentielle pour le canton et je vous invite à refuser l'entrée en matière. Merci.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Chères et chers collègues, ce projet de loi pose trois problèmes: de chiffres, de fond et de forme. En 2017, la banque a versé 9 millions de francs à l'Etat et 6 millions aux communes et à la Ville de Genève sous forme de dividendes. Si on y ajoute les impôts, ce sont au total près de 47 millions de francs qui sont revenus aux collectivités publiques. La BCGE est le principal pilier de l'économie genevoise. Mon collègue Cuendet l'a rappelé, sur un bilan de 23 milliards de francs, 16 milliards sont accordés aux entreprises. Si l'on comptait 19 000 entreprises aidées par la BCGE en 2017, elles sont à l'heure actuelle plus de 25 000.
Quant au fond, dans le droit de la société anonyme, il existe un droit aux dividendes, qui est réservé à l'actionnaire. Il s'agit d'un droit absolu. Dans le projet de loi, on opère une ponction permanente du bénéfice et l'on touche à ce droit aux dividendes. Si l'on voulait renoncer au but lucratif, selon le droit de la société anonyme, il faudrait une unanimité des actionnaires, ce qui, vous en conviendrez, est quasiment impossible, étant donné notamment qu'il existe aussi des actionnaires privés.
Quant à la forme, ce projet de loi est manifestement l'expression d'une frustration, certainement compréhensible, ressentie par un entrepreneur qui s'est vu refuser un crédit. Sa demande a ainsi connu le même sort que celui des 10% - en moyenne - de demandes de crédit qui sont refusées chaque année. On ne saurait reprocher à notre banque cantonale une certaine prudence dans l'octroi de ces crédits, en particulier dans un domaine extrêmement concurrentiel et sensible.
D'autre part, sur un plan purement institutionnel, il ne nous paraît pas sain que notre Grand Conseil impose à notre banque cantonale des contraintes supplémentaires dans un domaine financièrement et commercialement concurrentiel - contraintes qui, de surcroît, violeraient des dispositions légales relatives au droit de la société anonyme et exposeraient l'Etat à des procédures judiciaires longues et coûteuses. Les différentes auditions ont montré que ce projet de loi était boiteux, contraire au droit supérieur, susceptible de spolier les actionnaires - collectivités publiques, entreprises ou personnes privées. On soulignait également l'attitude potentielle de la FINMA qui, si elle ne fait pas de prévention, se ferait fort d'intervenir dans le cas où cet objet serait accepté.
Cela ne vaut donc pas la peine d'avancer dans deux directions qui de toute façon amèneront à des recours auprès des tribunaux ou à une décision de la FINMA qui coulerait définitivement ce projet. Pour éviter cela, je vous enjoins de suivre la grosse majorité de la commission et de refuser l'entrée en matière.
Le président. Merci. Je passe la parole au futur ex-député, M. Marc Fuhrmann. (Commentaires. Rires.)
M. Marc Fuhrmann (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce sera ma dernière intervention !
Une voix. Ouf !
M. Marc Fuhrmann. Un sujet que je connais bien, le monde bancaire. C'est le deuxième sujet sur les banques qu'on a traité ces derniers temps. Je pense qu'il est vraiment important de relever et de ne pas oublier qu'une banque n'est pas un outil de politique économique: c'est un outil économique, mais pas de politique économique. On ne va pas changer une économie ou développer quoi que ce soit - peu importe ce qu'on veut - à travers une banque qu'on force à faire des choses. Une banque, comme la BCGE, se doit de gérer son bilan de façon libre, sans contrainte de mode ou de pression politique. Il existe, et nous l'avons entendu, d'autres organismes qui sont mieux organisés, mieux adaptés pour soutenir et développer les jeunes pousses, dont Genève, naturellement, a bien besoin.
Maintenant, c'est aussi une réalité que pas loin de 50% de ces jeunes entreprises disparaissent au bout de cinq ans; il y a donc en gros une perte, on peut le dire ainsi, de pas loin d'un dossier sur deux, ce qui est un risque évidemment inacceptable pour un établissement bancaire. Ne l'oublions pas non plus, une banque engage l'argent de ses épargnants, de ceux qui justement lui ont prêté, et la banque se doit de gérer cela au plus serré. Par ailleurs, la Banque cantonale de Genève, et je terminerai par là, est déjà très engagée auprès du tissu économique genevois, avec, nous l'avons entendu, pas loin de 20 000 entreprises de la région qui sont clientes et qui bénéficient donc de ses crédits. Ce projet de loi doit être fermement rejeté. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, nous nous sommes déjà exprimés lors de la dernière séance à travers la bouche de l'excellent député Mathias Buschbeck sur l'autonomie de la BCGE. Malgré son statut de droit public, cette banque est soumise à la concurrence face à un bouquet de banques privées très actives sur le marché. De plus, comme les autres banques, la BCGE se trouve strictement contrôlée par la FINMA. Les Verts ont initialement soutenu ce projet de loi, mais les débats en commission les ont convaincus que certains articles, notamment ceux qui concernent la répartition du bénéfice, sont incompatibles avec les conditions-cadres de la banque.
Le groupe des Verts acceptera donc l'amendement du parti socialiste affiché ici, qui consiste à renoncer à ces clauses et à maintenir une modification uniquement à l'article 2, alinéa 1, en ajoutant le membre de phrase suivant: «notamment en soutenant le développement et la création des micro, petites et moyennes entreprises». Cette formulation nous paraît mieux refléter les besoins du tissu économique genevois, les grosses entreprises possédant bien d'autres moyens de financement. La formulation n'est d'ailleurs pas bien contraignante, puisqu'elle est introduite par le terme «notamment» et que, comme cela a été déjà dit, de facto, la Banque cantonale de Genève agit déjà en bonne partie selon ces principes.
Ainsi, les Verts vous recommandent d'entrer en matière sur ce projet de loi et d'accepter l'amendement affiché. En cas d'acceptation de cet amendement, nous voterons le projet de loi. En cas de refus, nous nous abstiendrons. Je vous remercie.
M. Thierry Cerutti (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, pour le MCG, ce projet de loi avait un sens. D'ailleurs, pour rebondir sur les propos de notre camarade Wenger, qui disait tout à l'heure que le MCG proposait des motions qu'on pourrait taxer pour arriver à zéro franc de déficit, moi je pense que quand le parti socialiste dépose ce type de textes, on devrait aussi les taxer, mais à défaut d'être à zéro, on serait bénéficiaires ! On aurait des comptes positifs et l'Etat vous en remercierait.
Pour notre part, nous pensons que cela part d'un bon sentiment. Bien sûr qu'il faut défendre les petites entreprises, bien sûr qu'il faut défendre les PME et les favoriser ! Cela va d'ailleurs de pair avec l'emploi des résidents genevois ! Cela a du sens ! Défendons nos résidents genevois, défendons nos PME, amenons la Banque cantonale de Genève - qui doit beaucoup aux contribuables genevois notamment - à faire profiter nos entreprises de cette manne financière qu'elle produit. Cela étant, la majorité l'a dit et redit, et les Verts, par la voix de M. Pierre Eckert, l'ont très bien dit, ce projet va à l'encontre de plein d'interdictions, et on s'expose à plein de procès si on l'accepte. Pour cette raison-là, le MCG s'abstiendra, mais garde quand même quelque chose en tête pour rebondir ultérieurement sur ce sujet.
Le président. Merci. Je passe la parole à M. le député Cyril Mizrahi pour une minute dix.
M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Je tâcherai d'être bref. C'est toujours très intéressant, Mesdames et Messieurs, chers collègues, d'entendre notre collègue Cuendet nous donner des leçons de respect du droit fédéral, alors qu'en ce qui concerne la réévaluation fiscale des immeubles, ce même collègue s'assied allégrement sur le droit fédéral. Lorsque nous parlions du petit crédit, cette activité nocive contre laquelle il convient de lutter, notre ami Cuendet se prévalait au moins d'une jurisprudence du tribunal cantonal d'un estimé autre canton; dans le cas présent, il ne s'embarrasse pas de cela, invoquant simplement des principes généraux du droit privé. Mais ici, Mesdames et Messieurs, nous parlons du droit public ! Nous parlons de la banque cantonale mise sur pied par notre constitution et par le peuple et qui a pour but, selon la constitution cantonale, de contribuer au développement économique du canton et de la région. Elle n'a pas de but lucratif en soi ! On n'a donc pas besoin de dire que cette banque renonce à son but lucratif, ce n'est pas son but ! Elle a une visée de politique publique. Il n'y a donc pas un droit inaliénable...
Le président. Je vous remercie, Monsieur Mizrahi. Je passe la parole...
M. Cyril Mizrahi. ...pour une banque publique - j'en finis par là, Monsieur le président - d'avoir... (Le micro de l'orateur est coupé.)
Le président. ...à M. le député François Baertschi.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi pose des questions de fond. Bien évidemment, il faut soutenir les PME. Malheureusement, la manière efficace de le faire, c'est d'agir sur les conditions-cadres et non pas principalement sur le financement. Il faut également soutenir l'emploi genevois, ce qui constitue un problème de fond. Cela nous a été rappelé aujourd'hui par le départ d'un de nos députés qui, malheureusement, se trouve face au dumping créé notamment, et principalement, et très principalement par les frontaliers, qui l'oblige...
Des voix. Rooh ! (Commentaires.)
M. François Baertschi. ...qui l'oblige à traverser l'Atlantique pour aller de l'autre côté. (Brouhaha.) On se trouve face à un cas réel où...
Le président. Un instant, Monsieur Baertschi ! (Le silence revient.) Voilà, je vous repasse la parole.
M. François Baertschi. Merci, Monsieur le président. On se trouve face à un cas réel, un cas concret de dumping du fait des frontaliers. Nous sommes directement dans ce Grand Conseil touchés par le cas d'une compétence qui doit quitter notre pays parce que le marché de l'emploi est asséché dans certains secteurs par cette surconcurrence dénoncée par le MCG depuis des années et des années et que la majorité de ce Grand Conseil refuse de voir, malheureusement ! Chers députés, chères députées, ouvrez les yeux ! Je crois que c'est la meilleure des choses que nous puissions faire.
Le président. Merci. Je passe la parole au rapporteur de majorité pour une minute quarante.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. La majorité vous demande de refuser l'entrée en matière. Ce projet de loi est contraire au droit, et la personne qui le dit, c'est M. Bahar, professeur d'université, spécialiste du droit des obligations et du droit bancaire. En plus de cela, ce projet de loi est inutile et n'apporterait pas grand-chose. Encore une fois, à Genève, nous avons des organismes comme la FAE, la Fondetec, etc. Un jeune entrepreneur qui a une formation et un bon projet trouve un financement à Genève. Pour finir, je citerai les propos du directeur général de la Banque cantonale de Genève: «Pour une approche et une activité de financement saine»... (Brouhaha.)
Une voix. Chut !
M. André Pfeffer. J'arrête ?
Une voix. Continue !
M. André Pfeffer. ...«il faut absolument respecter la règle suivante: le financement des PME doit répondre à un impératif économique et de viabilité de l'entreprise et non selon un impératif de subventionnement.» Pour ces raisons, je vous recommande de refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, certains semblent penser ici que la BCGE devrait non plus faire du financement mais du subventionnement. Or, la BCGE est certes une banque et une entité soumise au droit public cantonal, mais elle a la faculté, à ce titre, d'exercer et de déployer toutes les activités d'une banque universelle. Tout ce qui concerne le financement doit aussi répondre des impératifs de rentabilité. Parce que si la BCGE, dont le canton et les communes sont actionnaires, venait à décider de subventionner chaque demandeur de financement sans veiller à ce que le projet du demandeur soit viable et rentable, nous, collectivités publiques, le canton, les communes ainsi que l'ensemble des autres actionnaires, nous retrouverions les grands perdants ! Et nous serions les premiers à nous plaindre de cette pratique d'une banque qui en définitive ne veillerait pas à s'assurer que les financements qu'elle octroie soient basés sur des conditions solides.
Alors, Mesdames et Messieurs, outre le fait - cela a été dit - que le professeur de droit Rashid Bahar a considéré que ce projet de loi était contraire au droit supérieur; outre le fait qu'il s'agit d'empiéter sur le droit de la BCGE, respectivement sur son droit constitutionnel de faire des profits; outre le fait que ce texte vise une fois de plus à impliquer le politique pour décider ce que fait un établissement bancaire de droit public dans notre canton, ce qui suggère aussi que celui-ci peut favoriser certains types d'entreprises...
Mesdames et Messieurs, le canton est fier de compter la BCGE sur son territoire. Il se félicite chaque année d'en recevoir les dividendes. Il faut que le politique s'occupe de ce qui le regarde ! Et qu'il cesse d'imposer des règles à un établissement bancaire qui est déjà lui-même soumis à des règles de surveillance par son autorité de surveillance naturelle, la FINMA. La BCGE aujourd'hui remplit son rôle, la FAE ainsi que les autres partenaires l'ont dit. Cela a été rappelé, la banque cantonale consacre aujourd'hui un montant extrêmement important aux crédits en faveur des milieux économiques locaux, y compris des petites entreprises. Elle a d'ailleurs déployé de petits crédits professionnels - entre 20 000 et 150 000 francs - justement à disposition de ces entreprises. Notre Grand Conseil - votre Grand Conseil - doit s'occuper de ce qui le regarde. Laissez la banque cantonale s'occuper de ce qui la concerne, de sorte que nous puissions continuer, communes, actionnaires et canton, à recevoir les dividendes qui nous sont versés aujourd'hui ! Je vous encourage donc à refuser non seulement l'entrée en matière sur ce projet de loi, mais aussi l'ingérence que celui-ci représenterait, et ce en dépit de l'amendement que s'obstine à vouloir déposer le parti auteur du texte. Merci, Monsieur le président, merci, Mesdames et Messieurs les députés. (Applaudissements.)
Le président. Merci. Je mets aux voix l'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 12020 est rejeté en premier débat par 49 non contre 37 oui et 10 abstentions.