Séance du
vendredi 22 novembre 2019 à
16h15
2e
législature -
2e
année -
7e
session -
39e
séance
PL 12017-A
Premier débat
Le président. L'ordre du jour appelle le PL 12017-A, classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité est de Mme Sophie Forster Carbonnier, remplacée par M. Yvan Rochat, et le rapport de minorité de M. Sandro Pastis.
Des voix. Pastis ?!
Le président. Pistis, pardon ! (Hilarité.) Toutes mes excuses ! (Brouhaha.)
Une voix. Elle est nouvelle celle-là ?
Le président. Non, non !
Mme Salima Moyard. Je crois pas ! (Brouhaha.)
M. Pierre Vanek. M. Ricard va pouvoir répondre ! (Rires. Brouhaha.)
Le président. Un peu de silence ! Je passe donc la parole au rapporteur de majorité.
M. Yvan Rochat (Ve), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président Vermouth... Euh, pardon ! (Rires.) Je défends le rapporteur de minorité ! Ce projet de loi a été étudié les 23 et 30 mai 2017, le 6 mars 2018 et le 10 avril 2018. La rapporteure de majorité Sophie Forster Carbonnier ne siégeant plus au Grand Conseil mais dans une autre cour, c'est à moi qu'échoit l'honneur de reprendre son rapport. Ce projet de loi vise, selon ses auteurs, à favoriser l'emploi des résidents à Genève en instaurant une taxe dite de solidarité à l'encontre des entreprises qui engageraient des permis G - frontaliers, donc - le produit de cette taxe devant alimenter un fonds pour la réinsertion professionnelle. La majorité de la commission étendue à l'ensemble des groupes sauf celui des signataires, le MCG, refuse cette proposition, avec les arguments suivants.
Ce projet de loi impliquerait une surcharge administrative inutile pour les entreprises avec des tâches supplémentaires. Par ailleurs, il risque de causer des reports de cette taxe sur l'ensemble des salariés et surtout sur l'ensemble des salaires de l'entreprise. Il renforcerait également la fiscalité sur le travail, là où les salaires sont les plus bas. En réalité, ce projet de loi renforcerait les risques de dumping salarial. Il pose également un problème important et grave de discrimination entre les travailleurs et crée un dangereux précédent. Il n'est sans doute pas compatible avec le droit fédéral ni avec les accords signés par la Suisse et l'Union européenne. Il pose un problème pour les accords internationaux signés par la Suisse, c'est même un UDC qui l'a dit: ce texte affaiblira en effet la convention qui existe entre le canton de Genève et la France voisine. Il faut rappeler que c'est une des meilleures conventions parmi celles signées par les cantons frontaliers, et si l'on commence à toucher à ce domino, cela signifie qu'on commence à jouer avec des millions de francs et à discriminer des gens que l'économie ira chercher d'une manière ou d'une autre.
Enfin, pour aborder de façon beaucoup plus efficace le problème que ce projet de loi clame vouloir régler, d'autres mesures sont bien plus utiles, notamment toutes celles visant à limiter le dumping salarial, par exemple le salaire minimum et le renforcement des conventions collectives. Pour ces raisons parfaitement raisonnables, la majorité vous propose de la suivre en rejetant fermement ce projet de loi. Merci.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi est pétri de bon sens. Il prévoit une taxe de solidarité prélevée par les caisses de compensation pour le compte de l'Etat pour chaque permis G, pour chaque frontalier, au pro rata de la durée de l'emploi. Le montant de la taxe serait de 5% sur le salaire brut par employé concerné, un montant assez raisonnable.
Mesdames et Messieurs les députés, Genève a le taux de chômage le plus élevé de Suisse. Nous avoisinons, si nous additionnons certains chiffres, les 11%. A contrario, les deux départements qui entourent Genève, l'Ain et la Haute-Savoie, affichent, eux, le taux de chômage le plus bas de toute la France. Clairement, Genève subit la problématique des travailleurs frontaliers, puisqu'un certain nombre de nos résidents sont en recherche d'emploi. Ce projet de loi prévoit dès lors, pour favoriser une taxe de solidarité, de permettre de prélever ces 5% sur la masse brute des salaires afin de pouvoir générer un fonds et de favoriser également la réinsertion des nôtres, de celles et ceux qui sont à la recherche d'un emploi. Cette proposition est remplie de bon sens. Elle est tout à fait praticable et va dans le sens voulu pour maintenir une certaine équité dans le monde du travail, ce qui aujourd'hui n'est pas le cas, puisque Genève se voit fortement déséquilibrée sur le plan social en termes d'emploi. Mesdames et Messieurs, le groupe MCG vous invite dès lors à soutenir ce texte tel que sorti de commission.
M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi déposé par le MCG et qui sort de la commission fiscale prévoit une taxe de soi-disant «solidarité» - à lire dans le texte de l'objet - qui consiste à prélever 5% sur les salaires des permis G travaillant dans nos entreprises au pro rata de la durée de l'emploi. Dois-je vous rappeler que dans notre pays - je ne le répéterai jamais assez - ce sont les PME et les PMI qui sont l'essence même de notre économie et qui créent des emplois, et qu'il convient de ne pas les pénaliser ? Genève et sa région, l'arc lémanique, se caractérisent par un fort dynamisme et une économie saine et diversifiée. Il ne faut pas la plomber. Ce projet de loi introduit une nouvelle taxe, par conséquent un nouvel impôt, qui va plomber encore un peu plus le coût du travail, déjà parfois fort élevé dans notre canton. Enfin, ce texte implique une discrimination au sein des employés et des travailleurs dans nos propres entreprises, ce qui ne peut pas se faire; c'est purement et simplement inadmissible. Pour toutes ces raisons, le groupe UDC refusera cet objet. Je vous remercie.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, chers collègues, le rapporteur de majorité a souligné avec beaucoup de pertinence la surcharge administrative inutile qui serait imposée aux employeurs - alors qu'ils ont déjà assez à faire - et l'alourdissement inutile et insupportable du coût du travail que générerait ce projet de loi.
J'aimerais rappeler quelques chiffres - que nous connaissons, mais un rappel est toujours bienvenu. Les cotisations pour l'AVS, l'AI, l'APG, l'assurance-chômage, l'assurance-chômage solidarité, les allocations familiales et l'assurance-maternité représentent déjà plus de 9% du salaire. Si on y ajoute la LPP, les assurances perte de gain, l'assurance-accident, on arrive à un taux de près de 17%. Avec la part des vacances, on ajoute 8% et on arrive à 25%. Avec les 5% supplémentaires proposés par ce projet de loi, on arrive à 30% de charges salariales à la seule charge des employeurs. Cela devient tout simplement invivable et insupportable, alors que partout on répète qu'il faut alléger les charges des entreprises afin qu'elles bénéficient de conditions-cadres plus favorables et favorisant également l'emploi. C'est donc un mauvais projet de loi, qui risque de créer beaucoup de problèmes sur le marché du travail et de freiner essentiellement l'emploi. Le MCG, et plus particulièrement l'auteur de ce texte, sont généralement plus sensibles aux questions liées au chômage. Je m'étonne donc qu'il ait réussi à sortir un projet de loi qui manque à ce point sa cible.
Pour répondre au problème du chômage, il faut travailler sur d'autres paramètres, notamment l'adéquation entre la formation et les personnes qui sont en recherche d'emploi, et non pas ajouter des taxes ou introduire de la bureaucratie supplémentaire. C'est à ce titre d'ailleurs que la commission de l'économie a réclamé au Conseil d'Etat à plusieurs reprises, en vain, une étude plus fouillée du chômage à Genève, afin que nous puissions prendre les mesures les plus adéquates possible. Fort de ces arguments, je vous recommande de refuser ce projet de loi, avec la presque unanimité de la commission fiscale. Je vous remercie.
M. Jean Batou (EAG). Chers collègues, ce projet part, comme souvent, d'une bonne intention: défendre l'emploi local. En réalité, il est affaibli par une extraordinaire contradiction, qui est celle du MCG. Taxer à hauteur de 5% les emplois donnés à des travailleurs frontaliers... Bon, la mesure que propose le MCG est sans doute incompatible avec le droit supérieur. Mais, en même temps, ce parti ne soutient pas ce qui est l'essentiel de la bataille pour l'emploi local, à savoir les conditions de travail, les conditions salariales, le salaire minimum - vous avez toujours refusé la loi sur le salaire minimum - les conventions collectives de travail et la formation. Aujourd'hui, le MCG vient de signer avec la droite un accord pour un budget au rabais qui fait essentiellement des économies dans la formation. Est-ce que vous pensez une seule seconde qu'en réduisant les subventions à la formation pour les résidents du canton de Genève, auquel vous dites être très attachés, en réduisant les subventions ou le soutien à l'office cantonal de l'emploi, vous allez permettre la réinsertion des chômeurs ou défendre les gens qui ont un emploi précaire ou fragile ? Pas du tout ! Ce sont des effets de manche, avec toujours le même slogan: «Tous les problèmes viennent des frontaliers.» Non ! Ils viennent de budgets qui sont rabotés systématiquement...
M. Daniel Sormanni. C'est pas vrai !
M. Jean Batou. ...pour réduire le soutien à la formation, pour réduire le soutien aux chômeurs, et vous nous payez de bonnes paroles sur les frontaliers, qui seraient cause de tous nos malheurs. Nos malheurs, s'il y en a - et il y en a - ce sont ces politiques d'austérité qui ne suivent pas avec les recettes publiques les besoins de la population en dispositifs de formation, les besoins dans la prise en charge des personnes âgées, dans la prise en charge de la précarité. Dans ces domaines, vous êtes, avec la droite, pour la politique des caisses vides et pour une politique de restriction de la protection des travailleurs. Nous voterons donc contre cette mesure qui est une mesure alibi pour ne pas prendre celles qui s'imposent. Merci.
M. Yvan Zweifel (PLR). Ce projet de loi laisse à penser que l'immense majorité des patrons genevois ont comme priorité en matière d'embauche d'engager massivement des frontaliers. J'aimerais battre cet argument en brèche et rappeler quelle est la réalité d'un patron qui cherche à embaucher quelqu'un. La première préoccupation d'un patron, c'est d'engager la personne la plus compétente pour le poste qu'il cherche à pourvoir. C'est le principal critère d'un patron, il n'y en a pas d'autres. Après, à compétences égales, peuvent intervenir d'autres critères, mais la question n'est pas de savoir si on veut plutôt un frontalier ou plutôt un résident: la question est de savoir quelle est la meilleure personne pour un poste. Alternativement, l'autre considération d'un patron, c'est d'avoir le moins de bureaucratie possible de manière générale dans son entreprise. Or, à compétences égales, si vous avez un résident suisse et un permis G, la réalité, c'est que le permis G amène une lourdeur bureaucratique plus importante pour le patron, puisqu'il faut l'inscrire, payer l'impôt à la source et possiblement engager des fiduciaires pour s'occuper de toutes les démarches administratives nécessaires en matière d'impôt à la source. Donc, à compétences égales, le patron n'a aucun intérêt à engager un permis G plutôt qu'un résident suisse, bien au contraire.
Quelques chiffres doivent être donnés - M. Guinchard en a cité quelques-uns, j'aimerais en donner d'autres. Selon les chiffres qu'on nous a fournis, nous avons à Genève 375 110 postes de travail. Nous avons par ailleurs 233 376 résidents actifs en âge et en capacité de travail. Le premier moins l'autre donne 141 734 places de travail qu'il faut encore combler. Si vous soustrayez à cela les 83 207 permis G actifs, on a encore un solde à combler de 58 527 places. Si vous soustrayez à cela enfin les 16 711 demandeurs d'emploi - nombre qu'on pourrait même encore augmenter, puisque M. Pistis nous dit que le taux de chômage est de 11% - on arrive encore à un solde de 41 816 places qu'il faut combler. Mesdames et Messieurs, il y a assez de postes de travail pour tous les résidents ! Le fait est qu'il faut évidemment que ces résidents aient une formation qui soit en adéquation avec les emplois existants, on ne va pas inventer des emplois exprès. Il faut que les résidents aient une formation en adéquation avec les emplois proposés, faute de quoi, dans certains secteurs, on a évidemment l'obligation d'aller chercher des employés ailleurs, que ce soit de l'autre côté de la frontière nationale ou de l'autre côté de la frontière cantonale. Ce n'est pas une envie du patron, c'est la réalité du terrain. Mesdames et Messieurs, une taxe supplémentaire, une couche de bureaucratie supplémentaire ou un salaire minimum n'y changeront strictement rien, ce qu'il faut avant tout, c'est une formation en adéquation avec le marché du travail.
Une voix. Bravo !
M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, chers collègues, une taxe de 5% du salaire brut de base sur tous les permis G à Genève - donc sur les frontalières et les frontaliers - voilà la nouvelle idée du MCG, qui continue, année après année, avec sa vieille rengaine anti-frontaliers. Cette taxe, cela a été dit par mes préopinants, est bien entendu discriminatoire, elle est certainement contraire au droit fédéral et elle est assurément contraire aux accords bilatéraux signés par la Suisse avec l'Union européenne.
Au-delà de ce point, mon collègue Zweifel vient de le relever, Genève a besoin de frontalières et de frontaliers. Je redonne les chiffres qui ont été mentionnés, parce que c'est important de les redonner à chaque fois qu'on aborde ce sujet: aujourd'hui, Genève compte 375 000 emplois, 233 000 personnes actives - si on enlève les enfants et les personnes à la retraite - et 83 000 frontaliers et frontalières. Du coup, comme l'a dit mon collègue, des emplois sont encore disponibles, notamment pour les personnes qui habitent le canton de Vaud ou d'autres cantons.
Derrière ces chiffres, Mesdames et Messieurs, il y a des personnes qui exercent des professions dont nous avons besoin. Dans le service public, on peut prendre les hôpitaux universitaires; l'IMAD, pour tout ce qui concerne les soins à domicile; on peut prendre bien entendu les EMS, qui ont un besoin énorme de personnel, et également les TPG, qui nécessitent du monde pour conduire nos bus et nos trams tout au long de l'année. (Remarque.) Si on se penche sur le privé, on a des frontaliers notamment dans le commerce de détail, dans la restauration et l'hôtellerie ou encore dans le nettoyage et d'autres secteurs. Les frontaliers sont donc indispensables à Genève ainsi qu'à sa vie économique.
Par conséquent, comme je l'ai dit, ce n'est pas avec une telle taxe que nous arriverons à régler le problème du chômage aujourd'hui dans notre canton. Nous n'avons actuellement pas de taxe poubelle, nous allons peut-être abolir la taxe sur les chiens, et vous voulez instaurer une taxe sur les frontaliers ? (Commentaires.) Alors moi je vous dis, Mesdames et Messieurs, et je le dis au MCG, vous transmettrez, Monsieur le président: ce sont bien les projets de lois, les motions et les résolutions anti-frontaliers du MCG qu'il faudrait taxer ! Si on le faisait, le déficit du canton serait à zéro ! (Rires. Commentaires.) Merci.
M. Daniel Sormanni (MCG). Quelle jolie note comique ! Mesdames et Messieurs, il faudrait d'abord rappeler un élément: contrairement à ce que certains prétendent ici, nous ne sommes pas du tout contre les frontaliers, parce qu'il y en a un certain nombre qui est nécessaire. Mais nous sommes pour les résidents ! Et c'est ça qui fait la différence. Nous devons, c'est notre devoir, donner un coup de main aux résidents genevois qui sont au chômage, en recherche d'emploi ou à l'Hospice général. Si toutes les entreprises de notre canton jouaient le jeu et faisaient l'effort de chercher des résidents, de s'adresser à l'office cantonal de l'emploi, on ne se trouverait pas dans cette situation et on n'aurait pas un taux de chômage absolument énorme à Genève, alors que nos voisins, cela a été dit et je le confirme, ont le taux de chômage le plus bas de France ! Il y a quand même bel et bien un lien de causalité. Or pour arriver à cet objectif, il faut être un peu incitatif, puisqu'on n'y arrive pas autrement !
Dans l'année qui s'est écoulée, je crois qu'il y a eu entre 2000 et 3000 frontaliers de plus. Je ne crois pas qu'il y ait eu 3000 emplois supplémentaires. Par conséquent, à un moment donné, il faut arrêter d'oublier ceux qui recherchent un emploi ici et faire l'effort de leur donner un coup de main, quand ils sont au chômage, à l'Hospice ou à la charge de la collectivité ! Ils sont à la charge de ce budget - un budget, voté par la commission des finances, déficitaire de 584 millions; et, évidemment, ils ne paient pas d'impôts, puisqu'ils ne travaillent pas. Nous avons un besoin évident de cohésion sociale. On peut fournir cet effort d'annoncer ces postes à l'office cantonal de l'emploi et leur donner une priorité, dans la mesure où ils correspondent au poste qui est recherché.
Pour un certain nombre de professions et de secteurs économiques, on ne trouve pas le personnel ici. Mais il n'y a pas de problème ! Les entreprises vont engager ces personnes qui viennent de l'extérieur et elles ne paieront pas la taxe ! Elles ne paieront pas la taxe ! Alors arrêtez de dire que cette taxe va s'adresser à tous les permis frontaliers, c'est parfaitement faux ! Elle s'adresse aux nouveaux et à ceux qui n'ont pas fait l'effort de rechercher un résident via l'office cantonal de l'emploi... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...et puis, si on peut démontrer que c'est une profession qu'on ne peut pas trouver, on ne paiera pas la taxe. Alors arrêtez de dire qu'on arrivera à plus de 30% de charges sociales... (Remarque de M. Christo Ivanov.) Voilà, exactement, le chiffre qui a été cité tout à l'heure par M. Guinchard et qui est faux. Par conséquent - et c'est aussi le slogan de l'UDC, me semble-t-il: «D'abord les nôtres avant les autres !» Je pense que nous pouvons faire cet effort-là. Donc, cette taxe...
Le président. Je vous remercie, Monsieur Sormanni. Le temps est écoulé. Je passe la parole à M. le député... (Rires.)
M. Daniel Sormanni. Bon, d'accord, OK ! (L'orateur rit. Commentaires.)
Le président. ...Sandro Pistis pour cinquante-neuf secondes. (Brouhaha.)
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je suis quand même assez effaré d'entendre dans ce parlement que Genève n'est pas capable de former correctement les siens. Je pense que ce sont des propos qui ne peuvent pas être tenus. Ce qui n'est pas non plus acceptable, c'est de voir que certaines entreprises engagent quasiment 95% de frontaliers. Ça, ce sont des réalités genevoises. Quant à ce que dit le représentant d'Ensemble à Gauche - vous transmettrez, Monsieur le président - le salaire minimum n'a pas été soutenu par le peuple: il est passé au vote, nous en avons pris acte - effectivement, nous ne sommes pas pour réduire la masse salariale de notre canton et pour proposer un salaire minimum à toutes et tous de 4300 francs. Enfin, pour les propos aberrants du même représentant d'Ensemble à Gauche, selon qui le MCG aurait diminué les montants pour la formation, c'est faux ! C'est vraiment nous prendre pour des imbéciles et ce n'est pas correct. Merci.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Le Conseil d'Etat vous invite à refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Il pose des problèmes de conformité avec le droit supérieur et d'application: comment une entreprise va-t-elle pouvoir prouver, démontrer avoir recherché, en vain, un collaborateur ou une collaboratrice qui ne serait pas frontalier ou frontalière ? Ce projet de loi va nécessiter, le cas échéant, des moyens supplémentaires pour sa mise en oeuvre, il nécessitera d'engager du monde pour faire ces vérifications - je vois quelques députés qui retiennent leur souffle.
Ce qu'il faut viser en la matière, Mesdames et Messieurs, c'est évidemment le travail de conviction auprès des employeurs. M. Poggia, reçu par la commission au printemps 2018, a lui-même indiqué que le problème principal jusqu'à présent avait été l'efficacité de l'office cantonal de l'emploi; or il s'est réjoui, lorsqu'il a été auditionné, d'annoncer que suite à une enquête réalisée par le SECO, il était apparu que les entreprises qui avaient fait appel en 2017 à l'OCE avaient été satisfaites à plus de 79%, alors que la moyenne suisse des entreprises qui font appel à leurs offices cantonaux de l'emploi ne sont satisfaites qu'à 73%.
Mesdames et Messieurs, oui, il est important, lorsque c'est possible, d'avoir une priorité cantonale, de s'assurer que les chômeurs qui sont inscrits chez nous soient choisis en premier lieu, évidemment lorsqu'ils remplissent les critères liés aux compétences et qu'ils répondent aux besoins de l'employeur. Cela ne peut se faire que par une amélioration - encore, si c'est possible - des rapports entre l'office cantonal de l'emploi et les employeurs. Taxer les employeurs qui sont déjà soumis à énormément de taxes revient à taxer l'emploi, ce n'est pas la meilleure solution pour résoudre ce problème. Le Conseil d'Etat vous invite donc à refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Merci.
Le président. Merci bien. Nous passons au vote d'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 12017 est rejeté en premier débat par 80 non contre 9 oui et 1 abstention.