Séance du
vendredi 30 août 2019 à
14h15
2e
législature -
2e
année -
3e
session -
15e
séance
PL 12501-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. Nous passons aux deux projets de lois concernant les TPG. Je donne la parole au rapporteur, M. André Python.
M. André Python (MCG), rapporteur. Merci, Monsieur le président. La commission des transports a adopté à l'unanimité les deux projets de lois sur les états financiers consolidés et la gestion des TPG. Tous les problèmes des TPG ont été largement évoqués hier lors du traitement de la politique publique de la mobilité. Les TPG doivent notamment être attentifs aux dépenses ainsi qu'aux prestations offertes aux usagers et utiliser les compétences locales lors de l'engagement de nouveaux collaborateurs. Je vous remercie.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, après plusieurs années très difficiles pour les TPG, une éclaircie, une embellie est apparue à l'horizon en 2018 grâce au vote de la loi 12128, qui augmente la subvention octroyée aux transports publics de manière à maintenir un très haut niveau de prestations. Cette augmentation a eu lieu après quatre ans de baisse de l'offre; c'est de très bon augure à l'aube d'une révolution à Genève en matière de transports, notamment collectifs, soit évidemment le Léman Express, qui va véritablement dynamiser notre réseau de transports en commun et notre mobilité. Mais pour que cette nouvelle infrastructure puisse pleinement réaliser son potentiel, il est nécessaire de renforcer aussi le reste de notre réseau de bus et de trams. On se réjouit d'ailleurs de pouvoir étudier très prochainement le nouveau contrat de prestations pour les transports collectifs, qui augmente le financement, et donc l'offre.
Face à tout cela, on pourrait croire à un bilan idyllique pour les TPG en 2018. Mais ce n'est pas tout à fait le cas, il y a une face plus sombre dans la gestion de cette régie publique, notamment les énormes problèmes liés à la sous-traitance: de plus en plus de lignes sont sous-traitées, on arrive d'ailleurs au plafond prévu par la loi. Cela signifie une détérioration massive des conditions de travail de ces chauffeurs. On relève aussi un taux d'absentéisme extrêmement élevé aux TPG, reflet de conditions de travail faites de souffrance pour une partie du personnel. J'évoquerai enfin les problèmes observés sur le chantier du dépôt d'En Chardon, dont on a largement débattu et qui montrent que les TPG doivent et devront à l'avenir être plus prudents et avoir un regard plus attentif non seulement sur les conditions de travail de leur personnel mais aussi sur celles qui sont offertes par les entreprises qui travaillent en sous-traitance.
Cela étant, les commissions des finances et des transports ont décidé d'accepter ces deux rapports.
M. François Lance (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, les TPG ont connu en 2018, en effet, un développement important de l'offre. Dans le même temps, la vitesse commerciale a malheureusement diminué: dans le cadre d'une augmentation de la cadence, le moindre incident provoque des blocages. L'encombrement des voies réservées par d'autres véhicules ou obstacles représente aussi un élément de ralentissement et de stress pour les conducteurs, comme on l'a dit au cours du débat sur la mobilité, hier après-midi.
Pour le PDC, il est important de maintenir, voire d'augmenter les prestations pour les usagers qui doivent prendre les transports publics pour leurs obligations journalières et d'encourager les personnes qui ne les utilisent jamais à changer d'habitudes. Pour cela, il faut aussi améliorer la priorité et l'avancement des véhicules sur la voie publique.
Il est intéressant de relever que le nombre de voyageurs a quelque peu diminué sur les lignes 12 et 15, en raison, d'une part, de la mise au quart d'heure du Léman Express entre Coppet et Lancy-Pont-Rouge, et d'autre part, de la mise en service de la voie verte. Malgré toutes ces mesures - cela a été dit hier aussi - la fréquentation n'a augmenté entre 2017 et 2018 que de 0,2% en voyages-kilomètres et de 1,4% en nombre de voyageurs. Du coup, les recettes par voyageur n'ont pas retrouvé leur niveau de 2014, avant la baisse des tarifs.
Les TPG ont enfin commencé à développer une approche commerciale plus dynamique de toutes les offres tarifaires existantes. Il serait bon de redire que les Transports publics genevois sont les moins chers de Suisse. Il faut donc encourager les habitants de notre région à utiliser les transports en commun, et ainsi augmenter les recettes par passager. Il faut aussi rappeler que les transports publics sont un élément important pour la bonne santé de notre économie et pour notre qualité de vie.
Seuls points noirs en 2018: les mauvais résultats de TP Publicité SA ainsi que la gestion des marchés, attribués dans le cadre de l'AIMP, du chantier d'En Chardon. Par ailleurs, avec une perte de plus de 3 millions de francs au 31 décembre 2018, l'équilibre budgétaire des TPG sera difficile à atteindre ces prochaines années vu les nouvelles prestations qui devront être mises en place, sans parler de la caisse de prévoyance. Néanmoins, le groupe PDC votera le rapport de gestion et les états financiers et vous encourage à faire de même.
M. Mathias Buschbeck (Ve). Chères et chers collègues, la qualité des prestations fournies par les TPG est au coeur d'une politique efficace de la mobilité. A ce titre, on peut se réjouir que 2018 ait été marqué par le retour au niveau de l'offre qui existait en 2014. Tout en disant cela, on voit aussi le problème: on doit se réjouir d'avoir mis fin à la spirale de baisse des prestations qui a marqué la dernière législature, alors qu'elles auraient dû fortement se développer au vu de l'urgence écologique, mais aussi de ce que montre un autre indice, le taux de remplissage - dit trivialement, les bus et les trams sont bondés et ne répondent pas à l'attente de la population qui souhaite prendre les transports en commun.
Autre événement marquant de l'année passée: l'évolution de la vitesse commerciale. Avant de vous en parler, je ferai une incise en disant que celle-ci n'est malheureusement pas considérée comme un indice dans la politique publique de mobilité. On le regrette, car c'est un marqueur très intéressant, tout d'abord parce que, bien sûr, il dit si les transports publics sont efficaces et performants, mais aussi parce qu'il donne une indication sur l'état général d'engorgement de la circulation à Genève. C'est quand même un élément important pour juger de cette politique publique. Cela étant dit, on peut constater que malgré les grandes déclarations, la vitesse commerciale baisse inexorablement depuis 2014 - on n'avait pas les chiffres auparavant. Elle se monte à 16,33 km/h, alors que la loi sur le réseau des transports publics en impose une de 18 km/h.
Dernier point d'inquiétude, le taux d'absentéisme de 9,8%, extrêmement élevé. Cela nous inquiète: au-delà des problèmes d'efficience que cela pose aux TPG, il révèle aussi les souffrances du personnel. Nous sommes ravis de voir qu'un plan d'action a été mis en place il y a deux ans. Nous ne voyons toujours pas les effets de cette politique de lutte contre la souffrance au travail et nous souhaiterions vraiment les voir en 2019.
Hormis ce dernier point, ce n'est pas la faute des TPG si les chiffres ne sont pas atteints, que ce soient ceux de la vitesse commerciale ou de l'offre, dont les manques viennent de ce qu'on ne leur met pas assez à disposition: cela relève bien d'une volonté du Grand Conseil et du Conseil d'Etat que de mettre en oeuvre la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée, qui demande de donner la priorité aux transports publics au centre-ville par des feux préférentiels et des voies de bus. On attend de voir venir tout ça pour pouvoir enfin augmenter la vitesse commerciale. Mais comme ces manquements ne sont pas dus aux TPG, nous vous appelons à accepter leur rapport de gestion. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Pierre Vanek (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai pas grand-chose à ajouter, si ce n'est qu'à l'évidence, la priorité accordée aux TPG dans nos rues est insuffisante. Genève est un des rares endroits au monde où les trams s'arrêtent aux feux rouges, et je pleure encore l'initiative des Verts qui prévoyait une priorité effective et portait sur ce point-là et sur la matérialisation d'une avancée en matière de circulation des véhicules des TPG.
J'ai entendu avec un plaisir que je ne dissimule pas notre collègue Lance évoquer le fait qu'il faut rappeler, et fièrement, que Genève est une des villes de Suisse, ou la ville de Suisse qui a les tarifs les plus bas. Je rappelle que cette situation, sans péjoration des prestations, est le fruit d'une bataille politique dans un canton qui a voté il y a peut-être une quinzaine d'années sur la gratuité des TPG - un tiers des citoyens à peu près s'étaient déjà prononcés à l'époque, avec lucidité et clairvoyance, pour une gratuité totale. Bien sûr que cette gratuité a un coût: elle doit être financée comme politique publique, mais ça fait partie des éléments qui doivent être mis en place pour aller vers une rupture avec une politique des transports qui veut ménager la chèvre et le chou, avec quatre piliers considérés identiquement, transports individuels motorisés, mobilité douce, transports publics, etc. Non, il faut une rupture en faveur des transports publics, et ça passe par une politique tarifaire, celle que François Lance vantait à l'instant: une réduction des prix pour les usagers. C'est très important. Nous nous sommes battus dans cette enceinte pour cela, avec des propositions modérées, comme celle que nous avions reprise d'un membre du MCG - je ne sais plus qui l'avait déposée à l'époque - la gratuité pour les jeunes jusqu'à 18 ans. Même celle-ci, bien que très modérée, n'a pas eu l'heur de plaire. Il s'est trouvé des Verts ici pour ne pas la voter ! On croit rêver, parfois.
J'insiste sur la nécessité d'un soutien indéfectible au développement des TPG, pas un développement progressif, linéaire, sur les cinquante prochaines années, mais une rupture allant dans le sens d'une priorité claire aux transports en commun. Merci, Mesdames et Messieurs. (Applaudissements.)
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, quelques commentaires sur les propos qu'on vient d'entendre. Le taux d'absentéisme, d'abord, est un élément-clé de la gestion des TPG. On observe depuis une année environ une baisse graduelle de ce taux. Elle est lente, trop lente, aussi à mes yeux, mais elle me semble durable; on est sur la bonne voie, si je peux le dire ainsi. On aura l'occasion d'en parler, j'imagine, au cours d'autres débats.
Ensuite, la vitesse commerciale représente en effet une déception des résultats de l'année 2018. On n'a pas obtenu les améliorations escomptées, quand bien même, sur le terrain, des améliorations notables ont été apportées: je pense en particulier au point noir, ou rouge, que constituait la place des XXII-Cantons, où, il n'y a pas si longtemps, cinq ou six trams étaient englués dans le trafic motorisé complètement bloqué. Depuis de nombreux mois, ce genre de situation n'arrive plus, parce que de vraies mesures ont été prises, notamment pour la régulation, qui permettent d'éviter ces écueils. Les trams progressent, il n'y a plus d'altération de la vitesse commerciale ou en tout cas de la progression. Je note en particulier que cela est rendu possible grâce à la modernisation de la signalisation lumineuse mise en place progressivement. On a pu noter également, et cela a pu être démontré en particulier aux associations d'automobilistes, que l'avantage créé pour les trams n'a pas rendu plus difficile le trafic individuel motorisé sur ces noeuds importants.
M. le député Buschbeck a évoqué le fait que la vitesse commerciale n'est pas un indice. Je trouve que ça doit être un indice, c'est quelque chose de très important, ça montre la performance de notre réseau, en plus des passagers transportés, et ça nous permet aussi de juger des effets de la mise en oeuvre progressive de la LMCE.
Vous allez prochainement être saisis d'un projet de loi très important qui a reçu, je l'ai déjà dit hier, une belle majorité en commission, qui permettra de modifier les règles de compensation du parcage: nous pourrons ainsi agir de manière efficace pour la mise en oeuvre de la LMCE. J'espère que dans le rapport de gestion 2019, on pourra mesurer les effets concrets de cette disposition.
Un dernier mot concernant les recettes et l'effet escompté de la baisse des tarifs: hélas, hélas, cet effet ne s'est pas produit. Plusieurs d'entre vous l'ont constaté, la progression des voyageurs n'est pas à la hauteur de ce qu'espéraient ceux qui prônaient la baisse des tarifs, tant s'en faut. Ça montre bien que ce qui compte pour un réseau de transports en commun, c'est sa qualité ou encore la vitesse commerciale. A ce titre, à la fin de cette année, le réseau TPG, en particulier les lignes de bus, sera complètement remanié pour assurer sa complémentarité avec le Léman Express. Nous espérons que ces améliorations amèneront une augmentation de la fréquentation; personnellement, j'en suis convaincu. En tout cas, quand bien même la baisse des tarifs a été confirmée à plusieurs reprises par le peuple - ce que nous respectons, bien évidemment - cette baisse se traduit par une seule conséquence, la baisse des recettes, qui porte préjudice à l'augmentation et à l'amélioration de l'offre. Il conviendra de réfléchir à cela en particulier lorsque cette offre aura été largement améliorée.
Voilà, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, les commentaires que je souhaitais faire après les interventions qu'on a pu entendre.
Le président. Merci bien. Nous passons au vote sur ces deux projets de lois.
Mis aux voix, le projet de loi 12501 est adopté en premier débat par 81 oui et 4 abstentions.
L'article unique du projet de loi 12501 est adopté en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12501 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 79 oui et 6 abstentions.
Mis aux voix, le projet de loi 12502 est adopté en premier débat par 73 oui contre 7 non et 2 abstentions.
L'article unique du projet de loi 12502 est adopté en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12502 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 75 oui contre 4 non et 3 abstentions.