Séance du
vendredi 22 mars 2019 à
14h
2e
législature -
1re
année -
10e
session -
60e
séance
P 2040-A et objet(s) lié(s)
Débat
Le président. Pour le point suivant de notre ordre du jour, qui englobe les pétitions 2040-A à 2045-A et la pétition 2047-A, nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je passe immédiatement la parole à Mme la députée Anne Marie von Arx-Vernon, rapporteure de majorité.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC), rapporteuse de majorité. Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, dans le cadre des travaux sur ces pétitions, il a été question d'options spécifiques, de disciplines obligatoires, de grilles horaires, de semaines décloisonnées et de concertation - ou plutôt d'absence de concertation. Ces pétitions demandent, très clairement, l'abandon du projet d'absorption des heures d'informatique par la philosophie en troisième année et l'abandon du projet de co-enseignement philosophie-informatique en troisième année également. Les travaux de la commission des pétitions ont naturellement été tout à fait sérieux. Nous avons reçu avec grand intérêt les pétitionnaires, bien sûr, mais aussi les personnes concernées, dont évidemment Mme la conseillère d'Etat.
La commission des pétitions a pris très au sérieux le malaise des enseignants, qui ont eu besoin, semble-t-il, d'une pétition pour se faire entendre de leur magistrate. Cette dernière a pu expliquer à la commission combien les craintes des enseignants allaient être prises au sérieux, et que la mise en place des enseignements s'effectuerait avec le maximum de concertation possible. Mais il était aussi important que Mme la conseillère d'Etat rappelle que le système en place ne fonctionne pas sur le principe de l'autogestion et que les consignes devront être appliquées. C'est pour s'assurer de cette conclusion positive que la commission a voté dans sa grande majorité le renvoi de ces pétitions au Conseil d'Etat; elle vous remercie de bien vouloir en faire autant.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis ici de sept pétitions ayant trait au même objet: l'introduction de cours d'informatique et la peur, pour les enseignants pétitionnaires, de son impact sur les grilles horaires. Les pétitions ont joué leur rôle en faisant pression, soit par leur effet redondant avec un processus de concertation interne, soit en étant lancées au moment où les décisions allaient être prises. Quoi qu'il en soit, comme elles ne sont plus d'actualité, le dépôt de ces pétitions pour information sur le bureau du Grand Conseil s'impose.
Pour rappel, l'objectif de la réforme porte sur une clarification et une amélioration de la cohérence de la maturité gymnasiale: jusqu'à présent, les options spécifiques de langues débutent la première année, les autres options spécifiques dès la seconde. Dorénavant, toutes les options spécifiques commenceront la première année. L'informatique sera introduite au collège en tant que discipline obligatoire. Cette branche se déclinera sous la forme à la fois d'une introduction à la science informatique et d'un apprentissage de la culture numérique, ce avec quoi tout député sera évidemment plutôt d'accord. L'informatique est une matière bien adaptée pour travailler par projet et de manière transversale entre les disciplines. C'est sur cette base que les directrices et directeurs ont travaillé à une proposition de grille horaire.
Suite à certaines rumeurs, des enseignants ont appris que de possibles mesures allaient impacter l'organisation de leur temps de travail. Ils ont alors lancé ces pétitions de manière extrêmement rapide, juste avant l'été 2018, ce qui explique le petit nombre de signatures recueillies. Entre-temps, on a appris qu'il n'était finalement pas question de supprimer l'une ou l'autre discipline, mais de rajouter une période sous forme interdisciplinaire. Il n'y aura donc pas de suppression d'heures de droit, d'économie ou de philosophie, mais uniquement de l'heure dédiée à l'introduction à la démarche scientifique. Les professeurs de philosophie avaient peur que l'informatique empiète sur leur enseignement, mais c'est une crainte infondée. Ces pétitions n'ont donc simplement pas lieu d'être, ou ont plutôt été le fruit d'une rumeur.
L'union des enseignants a confirmé qu'il n'était plus nécessaire d'appuyer ces pétitions. On a constaté que le travail interne a été fait: un travail entre les enseignants et leur hiérarchie a permis de faire évoluer la situation, et les malentendus et rumeurs ont été dissipés. Il ne nous semble pas que ce soit aux députés de s'immiscer dans la question des grilles horaires, et ce ne serait pas, à notre avis, un bon signal que de valoriser le lancement de pétitions préventives par des fonctionnaires craignant de ne pas être entendus. Nous sommes évidemment attachés à la concertation et défendons l'expertise des enseignants, mais il est à noter que, dans ce cas précis, la dynamique interne et les mécanismes internes existent.
Il nous semble notamment que M. Jean Romain était un peu intransigeant en commission et qu'il y a une certaine instrumentalisation politique, disons-le comme ça, de ces pétitions. Ce n'est pas une manière sereine de travailler; c'est une manière qui est coûteuse pour les enseignants. Pour ces raisons, nous vous proposons de classer ces pétitions, car ce serait un mauvais signal que de les soutenir. Merci.
M. Pierre Nicollier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, lors de la conférence générale de mai 2018, une information a été communiquée selon laquelle l'informatique serait introduite au collège au détriment d'autres disciplines. La conférence des directeurs d'établissements du secondaire II, sans concertation avec les disciplines concernées, avait en effet prévu plusieurs modifications d'ici 2020, dont le remplacement de l'introduction au droit par un cours interdisciplinaire droit-informatique en troisième année.
Le département, dans un courrier, a expliqué aux enseignants qu'une consultation et un large consensus avaient mené à ce résultat. Ce n'était pas l'avis des pétitionnaires: ils ont remarqué que lors de la dernière conférence des présidents, 21 personnes s'étaient prononcées contre cette option alors que seules quatre étaient en sa faveur. Après avoir été sollicités par les pétitionnaires, les directeurs ont répondu aux enseignants ne pouvoir agir et leur ont recommandé de se tourner vers les syndicats ! La tonalité a toutefois changé depuis lors grâce à ces pétitions, qui ont joué un rôle d'aiguillon.
L'équilibre des heures et des programmes est extrêmement difficile à maintenir, et notre rôle de parlementaires n'est pas de nous immiscer là-dedans. Cependant, si le programme doit répondre aux exigences de la CDIP, des changements sans concertation nous interpellent. Ces pétitions ont permis un assouplissement de la situation et il serait regrettable de les retirer maintenant que la tendance s'est inversée. Nous vous invitons donc à les renvoyer au Conseil d'Etat.
Mme Adrienne Sordet (Ve). Les enseignants et les enseignantes du collège avaient des craintes légitimes quant à la modification du programme scolaire lorsqu'ils et elles ont rédigé ces pétitions. Suite à leur dépôt, différentes auditions ont eu lieu et ont permis de nous rassurer: si les nouveaux horaires semblaient figés, Mme la conseillère d'Etat chargée du DIP nous a confirmé le contraire et nous a dit que toutes les instances de consultation avaient été mises en place. De plus, à la rentrée, en réponse notamment à la pétition, une lettre a été envoyée pour informer les enseignants et les enseignantes.
Il est en outre important de rappeler que l'ensemble des projets passe par les présidents et présidentes de discipline et que la commission de maturité a été réactivée. Rassurez-vous donc: les horaires ne peuvent pas être modifiés au bon vouloir de la conseillère d'Etat. Enfin, nous avons également reçu l'union des enseignants et des enseignantes, qui nous a expressément dit que les revendications et inquiétudes exposées par les pétitions pouvaient être relayées par d'autres biais, en interne.
Ainsi, le rôle d'aiguillon qu'ont joué les pétitions dans cette situation est terminé puisque les discussions sont en cours. Le groupe des Verts estime donc que le reste du débat doit se dérouler en interne et vous recommande de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Nous resterons cependant attentifs et attentives aux craintes exprimées et aux résultats émergeant des échanges qui se déroulent à l'interne, et espérons vivement qu'il en ressortira du positif. Merci. (Applaudissements.)
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC), rapporteuse de majorité. Monsieur le président, vous transmettrez à mon collègue rapporteur de minorité qu'il n'y a pas de bons pétitionnaires, éventuellement de gauche, et de mauvais pétitionnaires, qui ne seraient éventuellement pas de gauche. Au terme de nos travaux, la confiance de la commission envers Mme la conseillère d'Etat est entière et c'est pourquoi nous lui renvoyons cette pétition. C'est aussi le meilleur moyen de rassurer les pétitionnaires - ils ont bien été entendus - et puis ça montre surtout que ce n'est justement pas à nous de nous immiscer dans la gestion des horaires des enseignants. La meilleure preuve de notre respect envers notre magistrate, c'est de lui renvoyer cette pétition. Je vous remercie beaucoup.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de minorité. Je voudrais juste répondre à Mme von Arx-Vernon sur les enjeux: la conseillère d'Etat a déjà répondu aux pétitionnaires. Des mesures ont été prises à la satisfaction des enseignants, qui l'ont signalé en commission. On peut donc refaire une boucle et re-renvoyer ces textes au Conseil d'Etat, mais ça nous semble un prolongement inutile et stérile de la démarche.
Il n'y a évidemment pas de bons et de mauvais pétitionnaires. Mais il y a des employés de l'Etat qui appliquent des décisions et qui, quand ils n'en sont pas contents, utilisent les mécanismes internes. Ils en réfèrent à leur hiérarchie plutôt que de solliciter des députés, qui parfois - heureusement ou malheureusement - instrumentalisent certains combats à des fins politiques. Merci.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous savez que vouloir modifier une grille horaire, c'est un peu comme ouvrir une boîte de Pandore. Je vous donnerai un exemple pour l'illustrer: imaginez qu'une instance externe à votre Grand Conseil décide de regrouper des commissions parlementaires ou d'en supprimer. Il y aurait immédiatement une réaction de votre part ! C'est un petit peu ce qui s'est passé avec ces pétitions, à savoir que le travail était en cours - il n'était pas du tout terminé - et des enseignants se sont inquiétés d'un certain nombre de rumeurs.
De quoi s'agit-il ? Il s'agit en fait de deux choses différentes, ce qui me permet d'ailleurs une petite parenthèse: que vous optiez pour le classement, le dépôt sur le bureau du Grand Conseil ou le renvoi des pétitions au Conseil d'Etat, ça ne changera in fine pas grand-chose. Nous avons en effet reçu de votre parlement une motion à laquelle nous devons répondre, mais dont le rapport est en attente pour des questions liées précisément à l'informatique. La réponse à la motion sera de toute façon détaillée, et la réponse aux pétitions, si vous nous les renvoyez, sera probablement une référence à la motion. Peu importe donc l'usage que vous ferez de votre droit quant à ces pétitions.
Sur le fond, deux éléments sont à considérer en parallèle. Le premier est pendant depuis plusieurs années: la volonté d'introduire au collège de Genève ce qu'on appelle l'option spécifique - c'est-à-dire ce qui colore un peu, ce qui particularise la maturité - dès la première année. Cette introduction, décidée il y a déjà plusieurs années, devrait être en vigueur. Entre-temps, et c'est le deuxième aspect de cette question, la CDIP, soit l'ensemble des conseillères et conseillers d'Etat chargés de l'instruction publique en Suisse, a décidé de rendre obligatoire l'informatique au collège. Nous n'allions par conséquent pas changer la grille horaire pour l'option spécifique sachant que nous allions introduire l'informatique deux ou trois ans après - ce sera en l'occurrence pour la rentrée 2020; c'est donc tout proche.
A partir de toutes ces données, j'ai demandé aux directeurs et directrices des collèges de faire des projections, de me proposer différentes versions de grilles horaires avec comme consigne - et je pense que ça intéressera le PLR, que j'ai en face de moi - que ce soit le moins coûteux possible. Il aurait pourtant été plus simple, Mesdames et Messieurs les députés, et a priori personne n'aurait rien dit puisque la Confédération nous demande quatre périodes d'informatique, de rajouter durant le parcours scolaire des élèves quatre périodes d'informatique en plus de tout le reste ! Mais vous connaissez la situation financière du canton; je ne le souhaitais pas pour cette raison-là mais aussi pour une deuxième raison. C'est qu'une grille horaire n'est pas extensible à l'infini: on ne va pas rajouter indéfiniment des heures et gaver les élèves comme des oies !
L'idée était donc que les directeurs me fassent des propositions, si possible pas trop coûteuses, et à partir de là, il y a eu plusieurs variantes. Les enseignants, qui savaient que ces discussions étaient en cours, ont demandé aux directeurs où elles en étaient. En toute transparence, ceux-ci leur ont donné un exemple de ce que pourrait être la grille horaire, alors que rien, mais rien, n'avait encore été validé ni d'ailleurs n'avait fait l'objet d'une concertation à ce moment-là. C'est alors que ces pétitions ont surgi.
Entre-temps, que s'est-il passé ? Nous avons poursuivi le travail. Le coût de l'introduction à l'informatique pour quatre périodes se limitera au demeurant à deux périodes; pour le reste, nous avons des réallocations à l'interne. Je crois que les différents groupes de discipline se sont calmés, si j'ose dire, parce que nous avons pu expliquer les choses. Et puis surtout - Mme Sordet, sauf erreur, l'a rappelé - il existe une commission consultative de la maturité gymnasiale, où siègent des délégués des enseignants. C'est cette commission consultative qui a été chargée d'étudier les grilles horaires proposées et de faire, le cas échéant, remonter les difficultés. Lorsque les pétitions ont été déposées, celle-ci n'avait pas encore été saisie parce que je n'avais moi-même pas pris de décision quant à ce que nous allions proposer à ladite commission.
Ces pétitions sont donc arrivées trop tôt. Je ne suis pas sûre qu'elles aient eu l'influence que les pétitionnaires leur prêtent - si ça leur fait plaisir de le penser ainsi, eh bien laissons-leur ce plaisir. Ce que je peux vous dire en l'état, c'est que la grille horaire est maintenant prête. Des groupes de travail composés d'enseignants, notamment d'informatique, préparent le programme, et nous pourrons avoir une nouvelle grille horaire pour le collège de Genève à la rentrée 2020. Je rajouterai, parce que je sais que ça suscite parfois aussi de l'inquiétude, que l'introduction de l'informatique à l'ECG est prévue en principe en 2021. Voilà, Mesdames et Messieurs les députés. Vous aurez donc une réponse circonstanciée quel que soit votre choix, ne serait-ce que par le biais de la réponse à la motion.
Le président. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Nous passons aux votes - un par pétition - sur les recommandations de la majorité de la commission, à savoir le renvoi au Conseil d'Etat.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2040 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 50 oui contre 37 non.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2041 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 49 oui contre 38 non.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2042 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 50 oui contre 38 non.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2043 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 49 oui contre 39 non.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2044 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 48 oui contre 39 non.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2045 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 48 oui contre 39 non.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2047 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 49 oui contre 38 non.