Séance du
vendredi 25 janvier 2019 à
14h
2e
législature -
1re
année -
8e
session -
46e
séance
PL 12382-A
Premier débat
Le président. Nous nous penchons maintenant sur le PL 12382-A. La parole est à M. Mathias Buschbeck.
M. Mathias Buschbeck (Ve). Merci, Monsieur le président. J'ai demandé à prendre la parole au dernier moment, pensant que si je ne l'avais pas fait, personne ne se serait exprimé sur cet objet qui met enfin un terme à la saga - je dirais même au scandale - de la tranchée couverte. Ce projet, issu des années soixante-septante, une époque où on en était encore au «tout à la voiture», n'aurait en effet jamais dû voir le jour. Mais, dans les années nonante, la commune de Collonge-Bellerive a décidé de déterrer le projet. Première erreur: au Grand Conseil, alors que le Conseil d'Etat n'en voulait pas, une troupe de députés de droite a demandé un crédit d'investissement de 35 millions pour construire cette tranchée, disant que grâce au financement fédéral qu'on ne manquerait pas d'avoir, la tranchée pourrait se faire.
Bien sûr, ce qui devait arriver arriva. Les Verts déposèrent un premier rapport de minorité; ils perdirent. Mais à Berne - comme c'est étonnant - on trouva le projet mauvais ! Qu'est-ce qu'on fait normalement à Genève - on le fait toujours - quand Berne trouve un projet mauvais ? On l'abandonne ? Non, on insiste ! On insiste et on vote un deuxième crédit ! Deuxième crédit de 21 millions cette fois-ci, de nouveau demandé par des députés emmenés par le député Amsler, lui-même mandataire du projet. C'est assez affolant de voir que dans cette histoire, à l'incompétence, on ajoute l'affairisme et les magouilles ! Ce crédit est à nouveau voté. Il est attaqué par référendum mais la population l'accepte de justesse. Mais ça ne suffit toujours pas: il faut un troisième crédit ! Un crédit de 7 millions, puisque les montants approximatifs calculés par les députés successifs qui ont déposé ces projets de lois n'ont pas suffi à financer la tranchée couverte. Et ce n'est pas fini: il a fallu un quatrième crédit, peut-être un peu utile celui-là, de 1 million pour des mesures complémentaires afin de renforcer les transports publics lors des travaux.
C'est ainsi que, pour un projet qui n'aurait pas dû exister, à partir d'un premier crédit de 35 millions, on se retrouve avec un montant total de 68 millions à la charge du contribuable pour enterrer 500 mètres de bouchons ! On aurait pu espérer aujourd'hui que le village de Vésenaz soit au moins apaisé. Pas du tout: nous nous retrouvons avec des charges de trafic semblables à celles d'avant le début des travaux ! Ces travaux n'ont donc servi à rien et ont fait dépenser de l'argent inutilement. Ne comptez pas sur les Verts pour accepter ce crédit de bouclement; nous voterons non ! Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Jean Burgermeister (EAG). Le député Mathias Buschbeck a très bien résumé l'historique de la situation, qui montre à quel point la droite peut soudain perdre ses réflexes en faveur des économies lorsqu'il est question du «tout à la voiture». En réalité, cette tranchée a été dès le début un gouffre financier ! Un gouffre annoncé dès le départ - on l'a rappelé - par celles et ceux qui s'y sont opposés, pour un projet qui ne devait profiter au final qu'à une toute petite partie de la population, à Vésenaz. Mais il n'a même pas porté ses fruits puisque, comme on l'a dit, le trafic est tout aussi important, voire plus important encore. D'un autre côté, il y avait et il y a toujours beaucoup à faire dans cette zone-là en matière de transports en commun pour permettre aux personnes qui vivent à la campagne et de l'autre côté de la frontière également de venir travailler en ville en utilisant les transports publics, conformément au souhait régulièrement rappelé d'une majorité de la population.
Il est lamentable que ce projet ait vu le jour, lamentable qu'il ait coûté aussi cher. Il est maintenant temps de faire le bilan et d'accepter les conclusions qui s'imposent pour enfin tirer un trait sur le «tout à la voiture» et favoriser un peu sérieusement les alternatives en matière de mobilité, à commencer évidemment par les transports publics. Ensemble à Gauche refusera également ces crédits supplémentaires. Je vous remercie.
M. Patrick Dimier (MCG). J'imagine que mes préopinants n'habitent pas cette partie du canton. Il se trouve que moi, oui ! Je peux vous dire que cette tranchée couverte a sérieusement, très sérieusement pacifié la circulation à Vésenaz.
J'entends parler de transports publics; c'est oublier qu'à cet endroit, trois lignes desservent de manière très satisfaisante et dans le quart d'heure les destinations voulues, à savoir Hermance, Veigy et Veigy-douane, de l'autre côté de la frontière. Une nouvelle fois, ce sont ceux qui ont le moins à dire qui parlent le plus !
M. Marc Fuhrmann (UDC). Je tiens à rappeler ici que cette tranchée couverte a certes coûté extrêmement cher, mais a permis une amélioration indéniable, énorme, de la qualité de vie des riverains. Elle a permis de revitaliser le centre du village de Vésenaz et a réduit les nuisances des bouchons dans une région qui est en train de se densifier. N'oublions pas qu'à l'avenir cette zone aura encore plus d'habitants. Ce projet a augmenté la qualité de vie des riverains et des habitants dans une région - ça, ne l'oublions surtout pas - qui semble être une des dernières à payer encore des impôts notamment sur le revenu et sur la fortune ! (Vives protestations.) Je pense donc qu'il faut accepter ce projet de loi.
Une voix. Bravo ! (L'orateur rit.)
M. Alberto Velasco (S). C'est suite à l'intervention de... (Brouhaha.)
Le président. Une seconde, une seconde, Monsieur le député. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Un tout petit peu de silence, s'il vous plaît ! Monsieur Burgermeister, je vous passerai la parole tout à l'heure, mais c'est maintenant à M. Velasco de s'exprimer.
M. Alberto Velasco. Merci, Monsieur le président. C'est suite à la prise de parole de M. Dimier que j'interviens pour lui dire que son constat est vrai: les choses sont pacifiées dans ce joli village que peut être Vésenaz. Mais - mais - vous le savez, la circulation a augmenté. Et où arrive cette circulation, Monsieur Dimier ? Elle arrive en ville ! Elle arrive en ville ! A l'époque où nous étions majoritaires - c'est vrai que ça fait longtemps - nous avions déposé un projet de loi pour permettre à la commune de Genève de limiter la vitesse à 30 km/h dans toutes ses rues. Les mêmes milieux qui ont déposé le projet de loi d'investissement pour la tranchée couverte - une pratique inexistante dans notre Grand Conseil ! - ont lancé un référendum pour s'opposer à cette loi sur la limitation de vitesse. Alors, Monsieur, tant mieux peut-être pour les gens de Vésenaz, mais la réalité, c'est que ce sont les habitants de la ville qui subissent aujourd'hui les conséquences et tous les inconvénients de cette circulation. Voilà la réalité ! La Confédération a d'ailleurs exposé dans un rapport les raisons pour lesquelles elle ne voulait pas financer le projet de tranchée couverte: il n'était pas acceptable, disons, du point de vue environnemental. C'est pourquoi la droite du Grand Conseil a par la suite présenté une demande de crédit, ce qui est totalement inadmissible. Voilà, Monsieur Dimier; j'espère donc que quand il y aura un projet de loi pour limiter la circulation en ville de Genève, vous serez aussi d'accord de le voter. Merci.
Le président. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs, je vous rappelle que nous sommes aux extraits et que chaque groupe a droit à une seule prise de parole. Nous passons au vote sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12382 est adopté en premier débat par 53 oui contre 32 non.
Le projet de loi 12382 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12382 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 55 oui contre 30 non et 1 abstention.