Séance du
vendredi 22 juin 2018 à
14h
2e
législature -
1re
année -
2e
session -
14e
séance
PL 12339-A
Premier débat
Le président. Nous passons au PL 12339-A qui traite de la FTI; il n'y a pas de rapport de gestion. Je cède tout de suite la parole à M. le député Patrick Lussi.
M. Patrick Lussi. C'est une erreur, Monsieur le président.
Le président. Je passe donc la parole à M. André Pfeffer, qui est déjà debout.
M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. La Fondation pour les terrains industriels avait, et a encore, un problème avec l'évaluation et le prix des droits de superficie ! Il y a trois ou quatre ans déjà, un scandale lié à cela avait mené à la démission d'un administrateur. Le dysfonctionnement provenait du fait que la FTI pratiquait des prix similaires pour tous les droits de superficie: ils étaient identiques pour un terrain nu, pour un terrain avec un bâtiment artisanal ou pour un terrain avec un immeuble de plusieurs étages. Ce dysfonctionnement a causé, il y a trois ou quatre ans, un dommage estimé par certains à 50 millions de francs.
Les faits sont les suivants: une société de promotion au bénéfice d'un droit de superficie ultra avantageux a érigé un bâtiment très important de plusieurs étages et l'a revendu après construction avec un gain énorme. Cette société a pu valoriser commercialement le prix du droit de superficie, qui n'était pas en rapport avec la valeur du bâtiment. Cette année, lors de l'audition de la Fondation pour les terrains industriels - je répète bien: lors de l'audition de la fondation, cette année - il nous a été indiqué que cette institution n'a aucune idée du nombre de promotions qui pourraient poser de tels problèmes. Il est évident que le prix des droits de superficie doit être en rapport avec la valeur commerciale des bâtiments érigés sur ces terrains. Sans réforme et sans correction de ce dysfonctionnement, notre Grand Conseil ne devrait pas accepter ces comptes. Merci pour votre attention.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, la Fondation pour les terrains industriels pose effectivement un certain nombre de problèmes qui n'ont à ce jour pas été résolus. D'ailleurs, nous n'avons pas le rapport de gestion de cette fondation; ce n'est pas la seule à ne pas nous l'avoir fourni, il y en a plusieurs dans ce cas, mais j'estime que ce n'est pas normal de devoir voter les comptes, les comptes consolidés de l'Etat, sans avoir de rapport de gestion pour un certain nombre d'institutions. Je pense qu'il y aurait quelque chose à faire à ce sujet - je m'adresse au président de la commission des finances. A mon avis, ces rapports de gestion doivent arriver en même temps que les états financiers.
Cette fondation a effectivement un problème avec le prix des DDP, qui coûte entre cinq et douze francs le mètre carré par an ! Alors c'est peut-être un prix correct si vous érigez un garage - encore que - mais si vous construisez un hôtel industriel tel que celui qui a été cité tout à l'heure par le député Pfeffer et que vous le revendez ensuite 100 millions de francs à une autre société, eh bien, je pense que ce prix n'est pas adapté ! Il faut passer par le conseil de fondation de la FTI lors du transfert du DDP. La FTI a un droit de préemption mais comme elle ne va évidemment pas pouvoir payer 100 millions, elle ne fait rien et elle accepte donc ces transferts sans rien dire ! Ce n'est pas normal !
Il y a un autre problème à la fondation, même si un certain nombre d'améliorations ont été apportées dans son règlement: le contrôle des liens d'intérêts. Le contrôle des liens d'intérêts ! Certains oeuvraient pour cette fondation mais également pour des sociétés appelées à évaluer les terrains, qui étaient aussi soit les intermédiaires, soit les acheteurs, soit les vendeurs. Toujours est-il que ce sont toujours les mêmes ! Ça a d'ailleurs mené à la démission du président de cette fondation il y a un an à peu près ! On ne va pas citer de nom mais tout le monde le connaît. Il y a par conséquent quelque chose qui ne va pas à la FTI, et je suis persuadé qu'il n'y a pas seulement des problèmes de liens d'intérêts mais probablement aussi de collusion.
Il y a encore un autre souci: la fondation n'applique pas les AIMP lors des appels d'offres pour les droits de superficie ! C'est de gré à gré ! Ça ne joue pas de fonctionner comme ça ! En ce qui nous concerne, nous demandons le renvoi de ce rapport d'activité à la commission de contrôle de gestion, qui avait déjà traité ce problème. Je vous demande, Monsieur le président, de mettre cette proposition au vote.
Le président. Nous n'avons pas le rapport d'activité ! Si j'ai bien compris, vous demandez le renvoi du rapport d'activité à la commission de contrôle de gestion alors que nous ne l'avons pas ? (Remarque. Commentaires.) Je ne comprends pas bien ce que vous voulez: nous devons voter sur ces rapports financiers individuels pour pouvoir voter ensuite sur les rapports financiers consolidés. Mais nous n'avons pas le rapport de gestion !
M. Daniel Sormanni. Nous n'avons pas le rapport de gestion mais je pense que nous pouvons renvoyer les états financiers en commission ! Je suis désolé: la FTI devait fournir le rapport de gestion et elle ne le fournit pas ! Je demande donc formellement le renvoi des états financiers à la commission de contrôle de gestion !
Le président. D'accord, ce sont les états financiers que vous voulez renvoyer en commission. Sur ce renvoi, je passe la parole à M. Alberto Velasco.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Monsieur le président, le président de la commission des finances n'est pas là mais je peux parler en son nom - je peux me le permettre. Nous avons travaillé convenablement à la commission des finances; les comptes ont été audités et ils sont corrects. Les comptes de la FTI sont corrects, et ce sont les comptes que nous votons ! S'agissant maintenant du rapport de gestion, la commission de l'économie devait déposer son rapport mais elle ne l'a pas fait. Voilà ! Je demande donc à M. Sormanni d'attendre le dépôt de ce rapport et quand ce sera fait, celui-ci sera renvoyé en commission. Mais nous devons nous prononcer sur les états financiers, sinon nous ne pourrons pas voter le prochain train de lois qui nous sera soumis ! Nous ne pourrons pas le voter; Monsieur le président, vous pourrez arrêter la séance !
Le président. C'est ce que je viens de dire. Monsieur Sormanni, vous maintenez votre demande ? (Remarque.) Très bien. Nous continuons donc l'inspection de ce projet de loi 12339 et je passe la parole à M. le député Serge Hiltpold.
M. Serge Hiltpold (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, je suis obligé de revenir sur certaines approximations de MM. Pfeffer et Sormanni concernant les droits de superficie. Nous avons traité cela - les commissaires à l'économie me corrigeront si c'est faux - en examinant le rapport de gestion. Il y a effectivement eu un problème avec les droits de superficie et M. Pfeffer voulait d'ailleurs les mettre au concours, aux enchères, ce qui est parfaitement illégal ! Je rappelle le principe du droit de superficie: lorsque vous vendez un bâtiment, vous ne vendez pas le droit de superficie puisque vous n'êtes que locataire du terrain ! Le droit de superficie, appelé communément droit distinct permanent, a en général une durée de cinquante à nonante-neuf ans; vous devez avoir amorti votre bâtiment cinq ans avant son terme, avant l'échéance. Et c'est parfaitement normal qu'il y ait de petites différences de prix, entre cinq et dix francs le mètre carré, suivant la zone et les accès.
Ensuite, je vous rappelle que ce n'est absolument pas nécessaire d'appliquer les AIMP puisque les propriétaires, qui sont des industriels ou des artisans, construisent en général leur propre bâtiment avec leur argent ou avec l'argent qu'ils empruntent. Ils entendent donc construire avec les procédures qui sont les leurs ! Voilà, je pense que c'était important de clarifier ces éléments pour ce débat. Cela étant, la FTI a tout un système très carré pour les droits de superficie. Cette fondation travaille maintenant à avoir ce qu'on appelle des hôtels industriels - à essayer de compacter pour maximiser un petit peu la densification et éviter un étalement du territoire. En concentrant les activités, elle vise à créer des liens et à rendre ces zones industrielles un peu plus éco-responsables. Je crois qu'il n'y a pas de raison de renvoyer cet objet en commission. Merci.
M. Daniel Sormanni (MCG). Monsieur le président, j'entends bien ce que dit M. le député Hiltpold - vous lui transmettrez - mais il y a une différence entre un artisan qui finance sa propre infrastructure et des promoteurs qui financent des infrastructures pour ensuite les revendre. Ce n'est pas tout à fait la même chose, et tous ces hôtels industriels - vous le savez pertinemment - sont financés par diverses sociétés immobilières, j'en passe et des meilleures. Une fois qu'elles ont érigé l'immeuble, elles le revendent à d'autres entités suisses ou étrangères avec un important bénéfice, comme l'a signalé tout à l'heure le député Pfeffer. C'est ça qui ne joue pas ! Ce n'est pas la même chose; je ne dis pas que ce sont deux activités différentes, mais ce sont deux situations totalement différentes entre l'artisan qui va financer son atelier et ces promoteurs immobiliers ! C'est le nouveau terrain de jeu des promoteurs immobiliers à Genève, Mesdames et Messieurs les députés ! Et ce ne sont pas forcément des sociétés suisses; pas toujours, en tout cas. Mais ce sont toujours les mêmes acteurs qui se vendent, s'expertisent et se revendent les biens; à chaque fois, bingo, mais pas un sou pour la collectivité publique pour permettre justement à d'autres industriels de se développer - pour nous permettre de les financer avec ces deniers-là !
Il y a donc quelque chose qui ne joue pas, je dirais, sur cette planète: il n'est pas normal qu'une société qui a érigé un bâtiment qui lui a coûté 50 millions le revende 100 millions quelques mois ou quelques années après sans qu'il y ait un centime pour la collectivité, et on recommence à zéro ! Non, ce n'est pas normal et je pense qu'il y a quelque chose à faire ! Puisque je ne peux pas renvoyer ce rapport en commission - je comprends bien que ça va bloquer le vote des comptes consolidés de l'Etat - nous nous opposerons à lui. Et dès que l'occasion se présentera, quand le rapport de gestion arrivera, eh bien, nous demanderons son renvoi à la commission de contrôle de gestion qui va creuser cette problématique, parce que la situation n'est absolument pas normale.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est maintenant à Mme la députée Salika Wenger. (Remarque.) C'est une erreur ! Je passe donc la parole à M. le député Yvan Rochat.
M. Yvan Rochat (Ve). Merci, Monsieur le président. Je voulais simplement indiquer qu'en tant qu'administrateur de la FTI, je m'abstiendrai de participer au vote sur ce point. Merci.
M. André Pfeffer (UDC). J'aimerais revenir sur les propos de M. Hiltpold. A la fin des débats, à la commission de l'économie, il a effectivement été convenu que nous ne demandions aucune procédure, aucune règle, au sujet de l'application de ces droits de superficie. La raison en est que le but de la FTI est évidemment de favoriser certains artisans et certains industriels, des artisans et industriels qui sont souvent au début de leur carrière et n'ont pas les moyens d'investir. Mais comme le dit notre collègue, M. Sormanni, il y a vraiment deux cas de figure: il y a des constructions qui sont faites par et pour des artisans, et il y a des constructions qui sont faites en tant que promotions immobilières. Les sociétés de promotion bénéficient également des terrains en droit de superficie; elles érigent des bâtiments industriels et les revendent avec bénéfice ! Le problème n'est pas que ces sociétés de promotion revendent ces constructions, une fois qu'elles sont terminées, avec un bénéfice: il est évidemment normal que chaque société puisse faire des bénéfices. Mais il n'est pas normal que ces sociétés de promotion puissent valoriser à la fois le prix de vente du bâtiment qu'elles ont construit et les droits de superficie, qui sont un bien public et appartiennent à l'Etat et aux contribuables. C'est ça, le problème. (M. André Pfeffer se rassied.) Je pense qu'il faudrait...
Le président. Il faut rester debout pour parler.
M. André Pfeffer. Pardon, excusez-moi. ...il faudrait régler ce problème avant d'accepter les comptes. Merci.
M. François Baertschi (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le groupe MCG a pris la décision de s'abstenir sur les états financiers de cette institution pour la simple et bonne raison que nous n'avons malheureusement pas le rapport de gestion. Les comptes ont été audités, il n'y a pas, à première vue, de dysfonctionnement grossier en termes purement comptables. Néanmoins, du fait que nous n'avons pas le rapport de gestion, nous avons en tant que groupe pris la décision de nous abstenir. Merci, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie pour cette précision. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12339 est adopté en premier débat par 57 oui contre 8 non et 17 abstentions.
L'article unique du projet de loi 12339 est adopté en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12339 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 56 oui contre 8 non et 17 abstentions.