Séance du
vendredi 15 décembre 2017 à
17h30
1re
législature -
4e
année -
10e
session -
57e
séance
PL 12176-A
Suite du deuxième débat
Budget d'investissement (tome 2)
Le président. Mesdames et Messieurs, nous abordons maintenant l'article 8, c'est-à-dire le budget d'investissement. Je vais énoncer puis mettre aux voix chaque politique publique.
H - SECURITE ET POPULATION
Mise aux voix, la politique publique H «Sécurité et population» est adoptée par 55 oui et 10 abstentions.
I - JUSTICE
Mise aux voix, la politique publique I «Justice» est adoptée par 62 oui et 9 abstentions.
J - MOBILITE
Mise aux voix, la politique publique J «Mobilité» est adoptée par 67 oui contre 3 non et 6 abstentions.
K - SANTE
Mise aux voix, la politique publique K «Santé» est adoptée par 63 oui et 13 abstentions.
L - ECONOMIE
Mise aux voix, la politique publique L «Economie» est adoptée par 70 oui et 14 abstentions.
M - FINANCE ET IMPOTS
Mise aux voix, la politique publique M «Finance et impôts» est adoptée par 68 oui contre 6 non et 8 abstentions.
N - CULTURE, SPORT ET LOISIRS
Mise aux voix, la politique publique N «Culture, sport et loisirs» est adoptée par 77 oui et 11 abstentions.
O - AUTORITES ET GOUVERNANCE
Mise aux voix, la politique publique O «Autorités et gouvernance» est adoptée par 73 oui et 15 abstentions.
P - ETATS-MAJORS ET PRESTATIONS DE MOYENS
Mise aux voix, la politique publique P «Etats-majors et prestations de moyens» est adoptée par 74 oui et 18 abstentions.
Q - ENERGIE
Mise aux voix, la politique publique Q «Energie» est adoptée par 73 oui et 17 abstentions.
A - FORMATION
Mise aux voix, la politique publique A «Formation» est adoptée par 78 oui et 12 abstentions.
B - EMPLOI
Mise aux voix, la politique publique B «Emploi» est adoptée par 78 oui et 13 abstentions.
C - ACTION SOCIALE
Mise aux voix, la politique publique C «Action sociale» est adoptée par 78 oui et 13 abstentions.
D - PERSONNES AGEES
Mise aux voix, la politique publique D «Personnes âgées» est adoptée par 86 oui et 8 abstentions.
E - HANDICAP
Mise aux voix, la politique publique E «Handicap» est adoptée par 89 oui et 5 abstentions.
F - ENVIRONNEMENT
Mise aux voix, la politique publique F «Environnement» est adoptée par 78 oui contre 1 non et 11 abstentions.
G - AMENAGEMENT ET LOGEMENT
Mise aux voix, la politique publique G «Aménagement et logement» est adoptée par 80 oui et 11 abstentions.
VOTE D'ENSEMBLE SUR LE BUDGET D'INVESTISSEMENT
Mis aux voix, l'art. 8 est adopté par 80 oui et 10 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 9 est adopté, de même que l'art. 10.
Le président. Nous faisons une courte pause afin de distribuer le projet de loi tel qu'issu du deuxième débat.
La séance est suspendue à 17h41.
La séance est reprise à 17h43.
Troisième débat
Le président. Mesdames et Messieurs, puisque aucun amendement n'a été déposé en troisième débat, nous pouvons passer aux déclarations finales. Voici un rappel des temps de parole: cinq minutes par groupe, cinq minutes pour les rapporteurs, qui peuvent prendre sur le temps du groupe s'ils le souhaitent, et cinq minutes - cette fois-ci, j'y tiens ! - pour le Conseil d'Etat. Monsieur Vanek, c'est à vous.
M. Pierre Vanek (EAG). Merci, Monsieur le président. Cinq minutes pour une déclaration finale ? Bon, tout a été dit, et même plusieurs fois, mais enfin, quand même, nous nous opposons à ce budget jouissant de la bénédiction du PLR, qui a renoncé à son rapport de minorité pour le contester - il y a là un jeu de frime et de fumée autour de la question: c'est évidemment, pour l'essentiel, le budget d'un gouvernement où l'Entente bourgeoise est majoritaire, un budget de coupes antisociales, un budget qui va dans le sens de l'austérité, un budget qui ne répond pas, pour l'essentiel, aux besoins de la population. Nous avons voté systématiquement contre toutes les politiques publiques, parce que nous n'allions pas les trier à la pincette en disant que celle-ci ou celle-là est un peu moins mauvaise sous prétexte qu'Antonio Hodgers serait sympathique ou qu'Anne Emery-Torracinta disposerait de telle ou telle qualité. Non, nous avons voulu sanctionner la politique du Conseil d'Etat dans son entier. Tout à l'heure, je ne sais plus qui disait... ah oui, François Baertschi disait: «Comment peut-on refuser la politique publique des personnes âgées ? Vous voulez les mettre à la rue !» Mais nous rejetons des politiques précisément parce qu'on n'octroie pas les moyens suffisants pour répondre aux besoins réels des citoyens !
Mme Jocelyne Haller, à ma droite, l'a clairement démontré par toute une série d'interventions sur l'action sociale... (Remarque de Mme Jocelyne Haller.) On me corrige: à ma gauche politiquement, c'est vrai, excusez-moi ! Bien sûr que les charges de l'Etat doivent augmenter plus fortement que la population, puisqu'on assiste à une polarisation sociale, à une croissance des inégalités. A Genève - ça a été mal compris, mais il s'agit bien de ça - les personnes présentant un risque de pauvreté sont de 30% plus nombreuses que dans le reste de la Suisse, alors que nous sommes l'un des cantons les plus riches du pays ! Cette polarisation sociale qu'on relève en matière de revenus et de fortunes devrait se traduire par une hausse des recettes de la collectivité pour y faire face, comme l'a expliqué Jean Batou de manière magistrale - c'est le cas de le dire. Pourtant, ce n'est pas le cas, parce qu'on est invariablement dans une logique de cadeaux fiscaux faits aux plus nantis de cette république.
Nous sommes donc hostiles à cette politique, nous sommes favorables à une majorité qui ne soit pas la majorité «bout de bois» qui va voter tout à l'heure ce budget, auquel nous nous opposerons pour notre part. Et puis... Est-ce que j'ai encore trente secondes, Monsieur le président ?
Le président. Il vous reste même deux minutes dix.
M. Pierre Vanek. Deux minutes dix ? Mais c'est Byzance, c'est Byzance ! Merci, Monsieur le président. Alors je vais me permettre une petite touche personnelle: j'ai été déçu de ne pas avoir obtenu de réponse de la part de M. Barthassat, donc je vais peut-être lui reposer la question... Ah non, il ne me répondra pas, puisqu'il n'y a plus de débat. Bref, s'agissant du projet de loi sur la compensation des baisses de tarifs des TPG, j'ai consulté les tableaux fournis par le département, M. Barthassat nous a signalé que si on votait ce texte, il faudrait injecter 26 millions - c'est en tout cas ce qu'ont indiqué les rapporteurs de minorité François Lance et André Pfeffer lors de leur intervention, ils ne me contrediront pas. Or j'apprends aujourd'hui qu'on ne met que 13 millions ! On nous spolie, on nous vole, qu'est-ce qui se passe ? (Rires. Commentaires.) On vote des trucs dans cette assemblée en faveur des transports en commun et après, on ne veut plus passer à la caisse ?! J'ai donc posé trois fois la question au cours des débats à M. Luc Barthassat, qui nous a offert toutes sortes de...
M. Luc Barthassat. Je n'ai pas entendu !
M. Pierre Vanek. Il n'a pas entendu, parce qu'il est un peu sourd quand on pose des questions précises, et il s'agissait en l'occurrence d'une question précise sur un élément budgétaire concernant la politique des transports publics, qui me tient à coeur.
Maintenant, il me reste quoi, quarante secondes, Monsieur le président ? Eh bien je vais conclure en disant, comme lors de mon intervention de tout à l'heure, que l'essentiel... (Un document est remis à l'orateur.) Le magistrat me fait parvenir une réponse par écrit, mais la forme de nos débats - M. le sautier ne me contredira pas - est orale...
M. Luc Barthassat. Lis-la !
M. Pierre Vanek. Non, je n'ai pas le temps de la lire !
Le président. Il vous faut conclure, cher Monsieur.
M. Pierre Vanek. Je conclus en renvoyant à ce que je disais précédemment sur le PF 17: l'enjeu essentiel est là...
Le président. Merci, Monsieur.
M. Pierre Vanek. ...ce cadeau aux grandes entreprises sera refusé avec notre aide, et nous bâtirons une autre politique qui...
Le président. Merci !
M. Pierre Vanek. ...se fondera sur les ressources dont la population a besoin. (Quelques applaudissements.)
Le président. M. Barthassat n'aurait pas entendu M. Vanek ? Très fort ! La parole revient à M. Buschbeck.
M. Mathias Buschbeck (Ve). Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, les Verts voteront ce budget, et je pourrais en rester là tant c'est l'essentiel - mais je ne le ferai pas. Notre groupe se réjouit de faire partie de la majorité décidée à doter le canton de Genève d'un budget en 2018, assurant ainsi une stabilité aux prestations, en particulier dans le contexte actuel de paupérisation et de vieillissement de la population. Ce budget prévoit des ressources pour les secteurs clés que sont l'éducation, la santé, le social ou les transports publics; les HUG, l'IMAD et l'Hospice général notamment seront dotés de moyens supplémentaires pour leur fonctionnement. Ces dotations financières ainsi que l'annuité complète versée aux fonctionnaires ont convaincu les Verts de soutenir le projet de budget.
En se retrouvant avec la majorité qui avait approuvé le budget à sa sortie de commission, les Verts ne votent pas sur un projet politique, mais sur une volonté de converger avec l'alliance de circonstance composée des trois blocs de ce parlement. En disant cela, j'indique aussi que ce budget ne correspond pas forcément à celui que les Verts auraient souhaité; nous sommes en effet inquiets quant à la croissance des charges qui ne sont pas compensées par de nouvelles recettes: cette situation n'est pas tenable.
Avec le PF 17, les perspectives fiscales sont sombres, il faudra que chacun fasse des efforts. L'adaptation au droit fédéral, c'est également la réévaluation de la valeur fiscale des immeubles non locatifs; nous espérons voir des solutions aboutir pour amener de nouvelles recettes et compenser en partie la réforme de l'imposition des entreprises. L'ensemble du parlement devra également faire un effort s'agissant des niches fiscales dont nous parlons depuis des années et qui sont régulièrement évoquées par le Conseil d'Etat.
S'il y a un motif d'insatisfaction par rapport à ce budget, c'est bien le déficit de 186 millions qui est pratiquement équivalent aux intérêts de la dette, soit les 178 millions que nous paierons l'année prochaine. Nous voyons donc l'importance aujourd'hui de diminuer notre endettement. Considérant la situation actuelle, le seul moyen d'y arriver est de demander la suspension du bouclier fiscal à laquelle vous vous opposez si souvent. C'est pourtant la seule solution, eu égard à la hausse des charges, pour assurer une réduction du déficit et donc des charges dues aux intérêts de la dette.
Quant au Conseil d'Etat, il serait bien inspiré de rétablir un dialogue constructif avec la fonction publique. En effet, outre les mesures indispensables concernant les recettes, le PFQ prévoit également des mesures d'économies qui doivent être négociées avec les représentants du personnel et non pas imposées. L'incapacité chronique du gouvernement à rassembler les partenaires sociaux autour d'une table a des conséquences très néfastes sur le climat de travail au sein de l'administration, mais également sur la qualité des prestations délivrées aux habitants. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG). Actuellement, Genève traverse une période difficile: certaines sociétés se délocalisent, la pression des travailleurs frontaliers sur le marché de l'emploi s'accroît, la hausse des primes d'assurance-maladie pénalise de plus en plus les ménages. Incontestablement, la situation empire pour les Genevoises et les Genevois. Cet état de fait nous impose de prendre des responsabilités, et le MCG y est prêt. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de voter le budget 2018.
Contrairement à ce qui a été dit, il ne s'agit pas d'un budget d'austérité: il est en faveur des plus pauvres, en faveur de la fonction publique. Ceux qui prétendent ça sont de mauvaise foi car ce budget est équilibré, tout simplement. Ceux qui le refuseront disent non à l'annuité, non à des augmentations de postes dans des domaines sensibles de l'Etat, il faut le savoir, il faut le dire, il faut l'assumer. Il serait indécent de vivre sous le régime des douzièmes provisionnels, nous devons faire notre boulot de députés. La réunion de quatre groupes politiques aux opinions différentes ainsi que le soutien de députés indépendants nous permettra de doter Genève d'un budget pour 2018. Le vote de chacun des 51 députés est important ! Pour le MCG, il s'agit d'un acte de responsabilité.
Petite remarque, néanmoins: nous trouvons indécent - nous profitons de le dire et de le répéter, désolé - de forcer les Genevois à se serrer la ceinture alors qu'un demi-milliard est dilapidé chaque année dans les communes françaises et les autres cantons suisses. On parle quand même de plus de 500 millions par an ! A notre sens, le canton fait face à un problème de recettes: ce demi-milliard nous manque en raison d'une générosité hors de propos. Il n'est pas normal que Genève doive, pour compenser, se serrer la ceinture afin de permettre au canton de Vaud de mener la grande vie et de baisser ses impôts et aux communes françaises de gaspiller les millions versés par les contribuables genevois.
De manière plus générale, le MCG considère que la prospérité doit être partagée de la manière la plus large possible entre les habitants de notre république; nous devons défendre ces habitants, tous ces habitants. Les Genevoises et les Genevois doivent avoir la priorité, il serait donc indécent de couper dans les prestations alors que des centaines de millions de francs sont dilapidés. C'est notre analyse, je sais qu'elle n'est pas partagée par les trois autres groupes. Cela dit, ce pour quoi il faut à tout prix se battre ce soir, c'est pour soutenir ce budget, trouver la majorité nécessaire de 51 millions, c'est le signal important que nous devons donner.
Des voix. De 51 millions ?!
Le président. Vous vouliez sans doute dire de 51 députés, Monsieur ?
M. François Baertschi. Oui, de 51 députés, pardon ! Merci de m'avoir repris, Monsieur le président.
M. Bertrand Buchs (PDC). Disons-le d'emblée: pour le PDC, la décision a été extrêmement difficile à prendre... (Exclamations.) Les débats en interne ont été nourris, parfois houleux, mais notre groupe va voter ce budget. (Exclamations.)
Nous nous sommes posé deux questions pour parvenir à cette conclusion. Tout d'abord, il s'agissait de déterminer s'il était vraiment nécessaire d'avoir un budget. On pourrait se dire que non, qu'on a déjà vécu une année sans et que tout semble avoir bien fonctionné - nous avons même obtenu la première place de la gestion cantonale ! Mais non, il nous faut disposer d'un budget, surtout pendant une année électorale, c'est important pour la population, c'est important pour les institutions. L'absence de budget, comme c'est déjà arrivé, doit rester de l'ordre de l'exception, il faut voter ce budget.
Ensuite, nous avons deux magistrats au sein du Conseil d'Etat, et la solidarité gouvernementale est importante... (Commentaires.) Eh oui ! Nous sommes un parti de gouvernement et nous assumons notre solidarité avec les conseillers d'Etat, nous les soutenons, nous discutons avec eux, nous les écoutons. Ce n'est pas une honte que de soutenir le Conseil d'Etat ! Le reste du monde a peut-être honte de notre exécutif, mais pas nous, nous n'avons pas honte de nos deux ministres.
Maintenant, sur le fond, ce budget n'est pas bon, c'est sans doute l'un des pires que nous ayons eu à voter. M. Dal Busco est d'accord avec nous, il s'est battu pendant des mois pour contenir les charges en dessous de 2%, il y est parvenu, et puis la commission des finances a tout chamboulé et a fait augmenter les charges. Or on ne peut pas continuer comme ça, on ne peut pas continuer à augmenter les postes, l'Etat devient trop gros. Il faut se poser la question suivante: à quoi sert l'Etat ? En étant plus gros, l'Etat délivre-t-il des prestations supplémentaires à la population ? Non, ce n'est pas l'impression que nous avons.
Notre grand souci, ce sont les classes moyennes: elles ne perçoivent pas d'aide, elles sont en train de s'appauvrir. L'Etat devra absolument y penser et les soutenir, parce qu'un grand problème social est en train de se créer. Les classes moyennes n'arrivent plus à suivre, elles sont pressurisées par les impôts, les taxes, les primes d'assurance-maladie. Nous devons faire attention, parce que ce sont elles qui financent les dépenses, qui permettent à l'Etat de fonctionner, qui permettent la solidarité entre les différents habitants de ce canton. Nous devons absolument faire attention à cela et insuffler un changement de politique à partir de la législature prochaine. On ne peut pas continuer comme ça, avec un gouvernement qui décide certaines choses et un parlement complètement à l'opposé. Cette situation est d'ailleurs étonnante, puisque tous les groupes politiques à l'exception de deux sont représentés au sein de ce gouvernement. C'est étonnant ! On se rengorge ici en disant qu'on est pour la solidarité gouvernementale, qu'on va voter ce budget, et qu'est-ce qui se passe ? On s'oppose au gouvernement s'agissant de la plupart des projets de lois. Ça ne peut plus continuer !
Quant à nous, nous demandons un changement de majorité: soit la population se décide en faveur d'une majorité de gauche, soit elle se décide en faveur d'une majorité de centre droit, mais il faudra choisir au mois d'avril prochain. Je vous remercie.
M. Cyril Aellen (PLR). Il y a douze mois, le gouvernement nous avait proposé d'adopter un budget déficitaire de 70 millions en nous disant d'une part qu'il permettrait d'apaiser les esprits et permettrait à la gauche de soutenir la RIE III, d'autre part que des réformes structurelles pour réduire les charges nous seraient présentées dans le cadre du budget 2018. Divisé, le PLR avait beaucoup hésité et s'était finalement résolu à ne pas le voter, car les promesses formulées n'étaient pas suffisamment tangibles.
Douze mois se sont écoulés, la réforme RIE III a été refusée, l'accord soumis à la gauche a volé en éclats dès le tout début du mois de janvier, presque quelques minutes après le vote du budget, et les restructurations promises se font toujours attendre. Le PLR avait alors averti que si on continuait sur cette voie, on se retrouverait avec 200 millions de déficit l'année suivante; eh bien nous y sommes: 195 millions de déficit avant dissolution et dotation de provisions, 186,5 millions au final - rien d'étonnant pour nous, malheureusement. Aujourd'hui, une majorité solide s'est constituée dans ce Grand Conseil pour voter les dépenses, une majorité moins solide, je le concède, pour éviter une augmentation d'impôts. La conséquence, c'est que le déficit se creuse et que la situation se complique d'année en année.
Le premier responsable de ce déficit, évidemment, c'est le parti qui fait basculer les choses dans un sens puis dans l'autre, c'est-à-dire le MCG... (Exclamations. Huées.) ...les autres groupes étant divisés selon deux positions différentes: d'un côté, la gauche réclame une hausse des dépenses et de la fiscalité, de l'autre, la droite exige une stabilité des charges et refuse toute augmentation d'impôts. C'est ce choix-là qu'il va falloir faire, et non pas voter la hausse des dépenses quand ça nous arrange, pour des raisons électoralistes, et refuser les augmentations fiscales quand ça nous arrange également.
La vive préoccupation du PLR est toutefois relativisée s'agissant d'un seul élément: il y a douze mois, seuls deux partis étaient inquiets, l'UDC et le PLR; désormais, il y en a trois, le PDC nous ayant rejoints sur cette ligne-là. Les membres de ce groupe ont décidé de voter le budget par fidélité à leurs magistrats, si j'ai bien compris, ce que nous respectons. Cela a au moins un avantage, celui d'éviter que l'incendiaire d'Ensemble à Gauche ne réussisse à obtenir une dépense supplémentaire de 8 millions, comme cela aurait été possible; rien que pour ça, ça en vaut la peine.
Cela dit, le PLR demeure extrêmement inquiet pour la suite, parce que des réformes sont à entreprendre, qui, pour certaines, vont coûter cher, comme la CPEG, et qu'il ne faut pas s'abstenir pour autant d'initier les autres qui permettront de stabiliser les charges. Aussi, nous ne voterons pas le budget, car nous sommes extrêmement préoccupés par la situation actuelle; nous nous opposerons avec toute l'énergie possible aux hausses d'impôts injustifiées et nous nous battrons pour amorcer les réformes qui bénéficieront durablement à la fonction publique et à l'Etat de Genève, comme celles qui seront nécessaires pour les financer autrement que par l'impôt. Nous sommes réellement inquiets. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur. Je passe la parole à M. Florey, que je félicite au passage pour la naissance de son petit-fils, Jayson ! (Applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président... (Un instant s'écoule.) J'ai perdu le fil, désolé ! (L'orateur rit.)
Le président. Vas-y, papy ! (Commentaires.)
M. Stéphane Florey. Non, sérieusement... Fidèle à elle-même, l'UDC rejettera purement et simplement ce budget, car nous refusons la démesure, ainsi que nous l'avons exprimé tout au long des débats. Nous notons que certains partis ici présents sont alignés couverts derrière leurs magistrats, qu'ils ne voteront pas en toute indépendance, ça se voit clairement. Ils se font piloter par leurs ministres pour des raisons électoralistes, au contraire de l'UDC et du PLR, dont je salue d'ailleurs la décision de s'opposer au budget.
Mesdames et Messieurs, ce budget est plus qu'inquiétant: non seulement il ne répond à aucun besoin de la population, mais il va créer des dépenses inutiles, ce qui est alarmant pour la suite. La meilleure des solutions aurait été de se calquer sur le budget 2017, qui était moins mauvais que celui-ci, et de s'en remettre au régime des douzièmes provisionnels, nous l'avons dit également. Nous resterons particulièrement attentifs au plan financier quadriennal qui ne prévoit que des hausses d'impôts et des réductions de prestations à la population, et nous vous invitons malgré tout à prendre vos responsabilités et à refuser ce budget. Je vous remercie.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, en tant que commissaire aux finances, je tenais en préambule à remercier l'ensemble des fonctionnaires des départements et des entités qui ont répondu aux questions de la commission et dont les réponses figurent dans les différents tomes concernant le budget, que je vous suggère de parcourir, parce qu'ils contiennent tout ce qui constitue notre Etat, c'est-à-dire les rapports sur les politiques publiques. J'aimerais saluer plus particulièrement les collaborateurs du département des finances qui nous ont épaulés techniquement pendant ces travaux.
Pour nous, socialistes, les efforts menés depuis 2015 sont trop importants pour l'Etat. Rappelons que la coupe de 5% sur les postes représente un manque de plus de 34 millions sur quatre ans; les économies globales, elles, sont de l'ordre de 500 millions durant cette période. Cependant, nous allons une fois encore accepter le budget ce soir, non pas - on l'a déjà dit - parce que nous adhérons à la politique d'austérité d'un Conseil d'Etat à majorité de droite, mais parce que les socialistes sont responsables et qu'ils prennent au sérieux leur rôle de barrage face aux coupes drastiques que l'Entente veut faire - on l'a vu encore aujourd'hui - dans les moyens octroyés à l'Etat pour réaliser les prestations dans les domaines de l'éducation, de la formation, de la santé, du social, des transports publics et d'autres encore.
Ce matin, c'était assez étonnant, la droite a réagi à un document édité par le parti socialiste qui montre que les coûts à Genève sont loin d'être démesurés. Ces réactions nous montrent que nous touchons aux vraies questions, celles que nous commençons à aborder depuis quelques années: quelle place a l'Etat, quel rôle joue-t-il dans un canton dynamique comme Genève ? Les socialistes ont été renforcés dans leur positionnement par un rapport sur les inégalités dans le monde, paru hier et réalisé par plus de cent économistes illustres. Cette étude indique que la principale préoccupation des années à venir sera la captation des richesses, elle montre que 1% des plus riches du monde ont capté deux fois plus de croissance que 50% des personnes au bas de l'échelle, quatre fois plus que la classe moyenne mondiale - qui correspond aux classes populaires dans les pays européens - que le patrimoine public a été massivement transféré aux privés, ce qui limite justement la capacité des Etats à agir sur les inégalités dont ils sont témoins sur leur territoire, comme c'est le cas dans notre pays, voire dans notre canton où nous sentons émerger ces problématiques. Le canton de Genève est situé dans ce monde globalisé, et donc nous faisons nôtres les recommandations de ce rapport qui pose comme nécessités pour le futur la généralisation de l'impôt progressif - je ne rigole pas, c'est une de ses conclusions - l'instauration d'un registre des titres financiers - là, on aura encore du travail vu que tout se passe dans la financiarisation - la garantie d'un accès égal à l'éducation et à l'emploi, ainsi que des investissements publics forts.
En résumé, Mesdames et Messieurs, les socialistes désirent que les prestations prévues dans ce budget puissent se déployer pour les Genevois, et c'est pour ça que nous allons le voter. Nous avons besoin que l'Etat demeure l'élément fondateur du vivre-ensemble et de l'intégration de notre population, soit le support d'une démocratie plutôt que d'une ploutocratie. Pour cette raison, Mesdames et Messieurs, nous vous demandons d'accepter ce budget.
Le président. Je vous remercie, Madame la députée, et laisse la parole à Mme Meissner pour deux minutes trente.
Mme Christina Meissner (HP). Merci, Monsieur le président. Ainsi, j'apprends que l'acceptation du budget dépend du vote des indépendants, dont je suis; eh bien j'assumerai cette responsabilité en le soutenant. Non qu'il soit bon, ni parce que je suis aujourd'hui PDC comme le ministre des finances... (Rires.) ...non, ce n'est pas le jour du vote final que l'on peut changer quoi que ce soit. On s'attaque certes à une subvention ou à l'autre, on lance des piques émoussées sur le dos d'un budget qui en a connu d'autres à la commission des finances, bref, on s'acharne sur la marge lors de la dernière ligne droite. Mais tout au long de l'année, le parlement vote allégrement des lois qui alourdissent la charge totale, et personne ne bat le rappel pour sonner l'addition.
Cela étant, force est de constater que rien n'est simple à Genève, et pour cause: on reproche à l'administration d'être obèse, mais on oublie que notre canton endosse 80% des responsabilités alors qu'ailleurs, les communes en assument au moins la moitié. Genève dépense davantage par habitant, mais gagne aussi davantage, et donc contribue davantage à la péréquation intercantonale sur laquelle on ne se prononce pas. Enfin, notre situation de canton frontalier entraîne une concurrence exacerbée; certes, les salaires sont plus élevés, mais comme le loyer et le coût de la vie en général. Davantage de personnes se retrouvent ainsi larguées, dans le besoin d'être aidées.
L'attrait économique exercé et voulu par Genève a un prix. Notre canton illustre à son échelle la problématique planétaire: vouloir toujours plus pour toujours plus de monde dans un territoire aux ressources limitées est insensé et nous condamne à nous quereller jusqu'au dernier franc, au dernier mètre carré, à la dernière carotte. Il nous faudrait avoir le courage de remettre en cause notre modèle de croissance infinie dans un monde fini.
Je voterai un budget qui me déplaît, tout en appelant le Conseil d'Etat et mes collègues députés à travailler ensemble tout au long de l'année afin de maîtriser les effets induits par leurs décisions, notamment les coûts, dans tous les domaines. Un budget n'est rien d'autre qu'une autorisation de dépense, il n'empêche aucunement de faire preuve de responsabilité, et pas seulement pour obtenir des comptes équilibrés. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame. La parole revient à M. Baertschi pour une minute trente-cinq.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Je n'avais pas prévu d'intervenir, mais quand j'entends les âneries débitées par le représentant du PLR... Il dit que le problème, c'est le MCG, alors que s'il y a un problème dans ce parlement, c'est bien le MCG... Non, c'est le PDC... (Rires.) ...le PDC... (Applaudissements.) C'est le PDC et le PLR ! Ils ont quatre conseillers d'Etat qui savent sourire, mais pas gouverner avec leur groupe parlementaire, ils sont totalement incapables de mener la gestion de l'Etat, ce sont des tartufes ! Oui, Messieurs du PLR, vous êtes les tartufes de Genève, c'est vous qui créez les dysfonctionnements de la république ! Vous les créez et vous les cultivez, et c'est à cause de vous si on se retrouve avec ce déficit !
Une voix. Ta gueule !
Le président. Silence, s'il vous plaît !
Une voix. Arrête de boire !
Une autre voix. Alcoolique !
Le président. Un peu de calme ! Madame Engelberts, c'est à vous pour deux minutes trente.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Merci beaucoup, Monsieur le président. Pour ma part, j'ai l'habitude de voter le budget - parfois toute seule, donc je suis ravie que vous l'acceptiez en majorité ce soir, Mesdames et Messieurs ! J'ai l'impression, compte tenu de tous les besoins qu'on a évoqués, d'avoir acheté une robe en taille 36 alors que je fais un 42: ça ne va tout simplement pas... (Remarque de M. Michel Ducret.) C'est une image, et je ne vous ai pas demandé votre avis ! (Rires.) C'est une image, mais M. Michel Ducret, député, n'a pas compris la symbolique; vous lui expliquerez, Monsieur le président. Bon, cela va nous demander de faire des efforts, c'est certain, on en a beaucoup parlé. Mais même si je me sens assez à l'étroit, on est loin de l'austérité ! L'austérité, Mesdames et Messieurs, c'est vraiment autre chose, et je trouve malhonnête d'employer ce terme, surtout en regard de la fonction publique qui est quand même bien lotie. Allez en Grèce ou ailleurs: pas besoin de partir très loin pour voir ce qu'est véritablement l'austérité.
Maintenant, j'aimerais remercier les conseillers d'Etat. Vous direz que c'est facile; non, ça ne l'est pas. M. Poggia, notre ministre de la santé, a fait une remarque très importante, il a dit qu'on n'entendait jamais dire qu'à Genève, par exemple, il n'existe pas de système de santé à deux vitesses. En effet, et pour qu'il n'y en ait pas, Dieu sait ce qu'il faut se bagarrer dans ce bas monde ! Sans quelqu'un qui agit comme pivot à la santé, il y a longtemps que nous aurions pu tomber dans ce type de dérive.
J'aimerais remercier chacun d'entre eux, parce que même si on ne peut pas faire tout ce qu'on veut - par exemple pour l'école inclusive, on ne peut pas engager tout le personnel qu'on souhaiterait... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Je sais qu'il me reste peu de temps, Monsieur le président. ...ils ont fait preuve de rigueur, de cohérence, de sérieux et d'éthique. Je crois que nous ferions bien de travailler de la même manière, je me sentirais moins à l'étroit. Merci beaucoup, mes collègues !
Le président. Merci, Madame. La parole est à M. Riedweg pour deux minutes quarante.
M. Bernhard Riedweg (UDC). Merci, Monsieur le président. En ce qui concerne les dépenses à venir, il faudra penser à la hausse des charges due à la recapitalisation de la CPEG pour 4,7 milliards, qui nous coûtera à elle seule 73 millions d'intérêts par année ! Pour les TPG, 30 millions de plus par année seront nécessaires, et le projet de budget 2018 prévoit 161 millions de déficit. Le Projet fiscal 17 anticipe une baisse des recettes de 350 millions tandis que SCORE occasionnera 60 millions de charges salariales supplémentaires par an.
Gouverner, c'est imprimer un cap, et non aller dans le sens du vent. Les partis ne font pas tous preuve de la même cohérence, certains étant capables de vouloir tout à la fois, des baisses d'impôts et des hausses de prestations. En caricaturant, nous pourrions dire que jusqu'ici, ça va, mais l'avenir est inquiétant: dans notre chute libre, le trottoir se rapproche ! Merci, Monsieur le président.
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, en tant que membre de la commission des finances et rapporteur de deuxième minorité qui s'oppose au budget, je voudrais présenter mes remerciements non seulement à l'équipe du département des finances, mais aussi à l'ensemble des personnes qui nous ont aidés durant nos travaux. Nous avons obtenu des réponses à toutes nos questions; on l'a déjà dit, mais je crois que ça mérite d'être relevé. Ces gens ne sont aucunement responsables des décisions politiques que l'un ou l'autre des groupes vont prendre, ils nous fournissent un excellent travail, et c'est ce qui compte.
J'aimerais commencer par une lapalissade - une lapalissade, parce que tout le monde l'a compris, Mme Meissner l'a dit, je l'avais noté avant, je le répète: nous sommes en train de discuter pendant un jour et demi d'un budget qui n'est autre qu'une autorisation de dépense maximale, il ne s'agit en rien d'une obligation. Si, par impossible, ce budget n'était pas voté, l'Etat ne cesserait pas de fonctionner, ce n'est pas comme si plus rien n'allait se faire. Il existe en effet ce qu'on appelle les douzièmes provisionnels, c'est-à-dire qu'on reprend les chiffres de l'exercice précédent.
Mesdames et Messieurs les députés, dire que nous sommes dans la démesure constitue une argumentation politique - pourquoi pas ? Je l'ai utilisée, je l'utiliserai encore; mais oser affirmer qu'on entre dans une période d'austérité, c'est ce qui s'appelle enfumer la population ! Nous ne sommes pas dans l'austérité, même si le budget se voyait refusé ! La vraie austérité viendra quand nous n'aurons plus les moyens de nos ambitions, quand les rentrées fiscales ne permettront plus de financer toutes nos charges.
On entend parler de vivre-ensemble, et ce concept de société commence à m'effrayer. Certaines personnalités des bancs d'en face, si ce n'est tout le mouvement politique, sont en train de nous dire que les riches sont méchants, qu'il faut les tondre, leur confisquer leurs biens, qu'une seule catégorie de citoyens mérite notre soutien, ceux qui ont besoin d'aide. Or est-ce que notre société laisse les gens sur le trottoir ? Je n'en ai pas l'impression. Je ne crois pas que rien ne se fasse, nous avons eu de larges discussions à ce sujet. Ce qu'il faut maintenant déterminer, c'est si le «toujours plus» est vraiment nécessaire, car c'est bien là ce que nous avons entendu durant toute la session: toujours plus. Ça a peut-être pu aller ces derniers temps, mais la dette se creuse. Cette année, avec un excédent de dépenses de 185 millions, nous ne pourrons plus nous autofinancer; le rapporteur de majorité, que je remercie pour sa sincérité, l'a relevé. Or le sort d'une société, la prospérité, l'avenir de la jeunesse se jouent dans les investissements; nous n'avons plus investi pendant un moment, nous n'avons fait que creuser notre dette en cumulant les déficits de fonctionnement.
Mesdames et Messieurs les députés, à l'Union démocratique du centre, nous ne sommes pas des «Nein-Sager», comme beaucoup aiment nous dépeindre, nous essayons simplement de vous expliquer notre concept de l'équilibre. Dans tous les ménages, dans toutes les sociétés privées, lorsqu'on dépense plus que ce que l'on gagne, ça va un petit moment tant que les gens ne s'en rendent pas compte, mais le jour où on vous demande d'assumer votre responsabilité, ça ne joue plus.
Pour conclure, je souhaiterais répondre aux propos du parti qui s'estime le seul responsable ce soir: on parle de responsabilité politique, pas de responsabilité civile ! La responsabilité politique, à mon sens, c'est de proposer une continuité du début de l'élection jusqu'à la fin du mandat. Si de nombreuses personnes n'apprécient pas les positions de l'UDC - nous l'entendons - nous avons au moins la cohérence d'aller jusqu'au bout. La responsabilité politique, pour un UDC, c'est de dire ce que nous répétons depuis des années: ces budgets successifs ne vont pas, il faut viser un équilibre. Nous le maintenons et nous n'en avons pas honte, nous refusons toute culpabilisation venant des bancs d'en face - vous êtes tous dans cette posture, vous n'êtes pas d'accord avec moi, même si, c'est vrai, vous défendez votre responsabilité face aux gens qui vous ont élus. Monsieur le président, l'Union démocratique du centre ne votera pas ce budget.
M. Jean Batou (EAG), rapporteur de première minorité. Ce soir, chers collègues, nous sommes confrontés à un choix: quel bouclier voulons-nous pour Genève ? Un bouclier fiscal pour les multimillionnaires - 2009 - pour les gros actionnaires - 2011 - pour les très grandes entreprises - peut-être 2020, nous mettrons tout en oeuvre pour que ce ne soit pas le cas - ou un bouclier social pour les usagers des services publics, les bénéficiaires des prestations, les travailleurs et tous les petits de ce canton, petites sociétés, petits propriétaires, petits employés qui doivent chercher un logement en France voisine et qu'on menace de rétorsion avec le plan financier quadriennal ? Pour notre part, nous avons choisi, nous optons pour le bouclier social.
Ce bouclier social ne sera défendu que par la mobilisation de la société, et on la sent monter, celle des collaborateurs de la fonction publique, des travailleurs des EMS, du personnel d'ABB Sécheron. Nous espérons que ces exemples seront suivis car, sans eux, nous ne sommes rien au parlement. Que faisons-nous ici ? Nous posons des digues en nous battant pour l'accroissement des droits populaires: aujourd'hui, avec un tiers de signatures en moins, on peut déposer un référendum et une initiative, c'est un résultat que nous devons à Ensemble à Gauche. Nous posons des digues en défendant les droits des pensionnés de la plus grande caisse de prévoyance de ce canton, la CPEG, menacée d'importantes baisses de prestations, nous posons des digues en refusant par un projet de loi constitutionnelle des cadeaux fiscaux éhontés aux plus grandes entreprises de Genève, en refusant la diminution des prestations des TPG quand les tarifs baissent, en refusant la réduction des subsides d'assurance-maladie, en exigeant enfin que la Banque cantonale rembourse, en prenant le temps, les 3,1 milliards qu'a coûté à notre collectivité le sauvetage de cet établissement. Nous posons des digues, et vous aurez remarqué qu'entre 2005 et 2013, lorsque Ensemble à Gauche ou l'Alliance de gauche n'étaient pas présents dans cette enceinte, nous les posions à l'extérieur. Maintenant, nous sommes ici et nous entendons y rester, mais cela implique d'être responsables politiquement, et là je parle à mes amis socialistes et Verts: y rester, c'est parler clairement à la population, c'est dire que nous allons être confrontés à des décisions fondamentales. Ne croyez pas que ce budget 2018 va vous épargner la hargne de ceux qui en veulent toujours plus et veulent enlever à ceux qui ont toujours moins. Demain, quand ils seront élus, s'ils le sont - parce qu'il s'agit là d'un budget d'austérité électorale, c'est-à-dire d'une austérité soft - ils mèneront une politique d'austérité beaucoup plus dure, et vous le savez.
Le PLR est en embuscade avec l'UDC; aujourd'hui, il va s'abstenir... (Commentaires.) Il s'est abstenu au deuxième débat ! On a joué à se faire peur autour de ce budget, mais il va sans doute être accepté, non pas grâce au vote des indépendants de ce Grand Conseil, mais en raison d'une volonté politique de mener une austérité soft avant la vraie question qui se posera dès avril et mai 2018, à savoir: comment financer la baisse de l'imposition des grandes entreprises qui coûtera au moins 350 millions par an à notre canton ? A ce moment-là, ce sera l'heure de vérité. Pour répondre à cette problématique, et je m'adresse maintenant aux gens en dehors de cette enceinte, il faut renforcer la présence d'Ensemble à Gauche dans ce parlement... (Rires.) ...comme à l'extérieur de ce parlement, il faut fortifier la mobilisation sociale pour la défense des prestations de l'Etat. Merci.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Mes collègues ont remercié le secrétariat du Grand Conseil, je l'avais déjà fait pour ma part dans mon rapport de majorité. Je tiens encore à rendre hommage à l'ensemble des employés de la fonction publique, parce que ce sont eux qui, tout au long de l'année, fournissent les prestations nécessaires à ce canton, que ce soit à travers l'économie, les écoles, la santé, le social.
Je relève ensuite l'acte de contrition du PDC qui regrette de ne pas être suffisamment à droite pour voter comme son allié de toujours - mais bien plus à droite, lui - le PLR. Je constate aussi que le MCG a pris la place du centre dans ce parlement, c'est extraordinaire. Il y a dix ou douze ans, le centre était représenté par le PDC qui faisait basculer les majorités d'un côté ou de l'autre, et qu'est-ce qui s'est passé pendant cette législature ? Le MCG a pris la place du centre tandis que vous, le PDC, vous avez viré à droite. Annoncer que vous allez accepter ce budget parce qu'on est en période électorale et que vous devez soutenir vos magistrats, c'est tout de même indélicat pour nous, socialistes, dans la mesure où nous avons fait un gros effort pour le voter. Dans le cadre de ce budget, on observe beaucoup de changements au sein du Grand Conseil !
Mesdames et Messieurs, il y a deux refus du budget: le premier d'Ensemble à Gauche, qui estime qu'il n'est pas assez généreux en prestations à la population, le second du PLR, qui est différent. Le PLR dit non, parce qu'il préférerait voir mis en oeuvre les douzièmes provisionnels. Avec ce régime, en effet, il obtiendrait une partie des coupes qu'il souhaite. C'est ça, la vérité ! Mesdames et Messieurs de la droite, je vous l'ai déjà dit en commission: vous voulez redimensionner l'Etat, vous exigez des mesures structurelles - au moins, vous êtes clairs là-dessus, ce que je salue - seulement vous demandez que celles-ci soient lancées par le Conseil d'Etat. Or vous savez bien que chaque fois que le gouvernement a déposé une réforme, il y a eu un référendum, et le peuple l'a baffé. Ce fut le cas à plusieurs reprises, donc il n'ose plus rien proposer.
Aussi, Mesdames et Messieurs du PLR, je vous engage à venir vous-mêmes avec des projets de réformes sociales, de réformes de l'enseignement... (Remarque.) Oui, mais osez ! Un seul l'a fait, c'est M. Zacharias - il n'est pas là actuellement - il est venu avec des projets de lois sur le logement; eh bien on s'est retrouvés devant le peuple, et le peuple a choisi. Voilà la réalité aujourd'hui ! Mesdames et Messieurs, vous voulez redimensionner l'Etat à travers des coupes de charges et des diminutions de revenus; la question que je pose est la suivante, mes chers amis, et je la pose aussi au PDC: une fois que vous aurez diminué les dépenses et qu'on se retrouvera avec un excédent au budget, qu'allez-vous faire de cet argent ? (Commentaires.) Non, non ! Baisser à nouveau les impôts !
Une voix. Eh bien oui !
Une autre voix. Pour les riches !
M. Alberto Velasco. Voilà, exactement ! Monsieur Lussi, vous avez dit quelque chose de très intéressant tout à l'heure: vous voulez toujours plus, la gauche...
Une voix. Toujours moins !
M. Alberto Velasco. Ce sont eux qui en veulent toujours plus ! (Commentaires.) Non, ce sont les riches qui en veulent toujours plus, ma collègue l'a indiqué, l'étude le démontre. Le problème des pauvres, c'est que même s'ils en voulaient plus, ils n'obtiendraient rien, tandis que les riches, ils en veulent plus et ils l'obtiennent ! Voilà le problème de ce système, Mesdames et Messieurs ! (Quelques applaudissements.) Ce sont eux qui détiennent le pouvoir, pas nous. Nous, qu'est-ce que nous faisons ? Nous essayons simplement de doter cette république d'un budget, parce que nous pensons que c'est important pour la fonction publique, pour garantir un minimum de prestations, et c'est la raison pour laquelle nous allons adopter ce budget ce soir, nous l'assumons.
Pour conclure, en tant que rapporteur de majorité, je tiens à remercier énormément le PDC de faire cet acte de contrition et de soutenir ce budget avec nous. Nous espérons que lors de la prochaine législature, une autre majorité qui assume ses responsabilités se dessinera, et pas un truc aussi hétéroclite que ce que nous vivons en ce moment. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur. Avant de donner la parole au conseiller d'Etat, je la laisse rapidement au président de la commission des finances, M. Cuendet.
M. Edouard Cuendet (PLR). Merci, Monsieur le président. C'est vrai que c'est la tradition, et on ne m'enlèvera pas ce privilège ! Pour une fois que je peux dire du bien de l'administration, ce sera avec grand plaisir; certains l'ont déjà fait avant moi, mais de manière peu solidaire, puisqu'ils n'ont pas inclus tous les groupes dans leurs témoignages de reconnaissance.
En tant que président de la commission des finances, je tiens donc à adresser nos plus vifs remerciements à l'ensemble des collaborateurs qui nous ont soutenus durant nos travaux, qui se sont montrés d'une patience angélique face à nos caprices multiples, variés, divers et répétés. Je remercie chaleureusement les procès-verbalistes, qui se sont succédé et ont rempli des pages et des pages de nos logorrhées, tout comme MM. Béguet et Fornallaz, du département des finances, qui étaient présents à chaque séance et nous ont été d'une grande aide. Une mention spéciale à Raphaël Audria, notre secrétaire scientifique, sans lequel nous ne serions pas grand-chose. Enfin, comme l'ont mentionné mes collègues Velasco, Lussi et Schneider Hausser, merci à tous les membres de l'administration qui ont défilé semaine après semaine pour répondre notamment aux questions transversales. C'est un remerciement collectif et sincère ! (Applaudissements.)
Le président. Merci. Monsieur le conseiller d'Etat, c'est à vous pour cinq minutes.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Merci également à vous, Monsieur le président de la commission des finances, pour la reconnaissance que vous adressez à nos collaborateurs, lesquels réalisent en effet un travail absolument fantastique; je la transmettrai bien volontiers et je me joins à ces remerciements.
Mesdames et Messieurs, je vous l'avais déjà indiqué en septembre au moment de présenter le projet de budget, je l'ai répété hier: ce budget n'est ni réjouissant ni satisfaisant, mais ce n'est pas non plus un budget antisocial ou d'austérité, c'est certain. Je vous disais hier, en débutant ce long débat, que le Conseil d'Etat n'était pas très satisfait de sa péjoration, notamment via l'augmentation notable des charges décidée en commission. Je vous disais aussi, cependant, que si cette augmentation des charges constituait véritablement la limite supérieure, et que cette limite n'était pas dépassée, le Conseil d'Etat pouvait vivre avec ce budget. C'est le cas de figure qui semble se dessiner juste avant le vote, si j'en crois les déclarations des uns et des autres. Nous constatons avec satisfaction qu'une majorité de ce parlement prend ses responsabilités et permet de doter l'Etat de Genève d'un budget, ce qui représente un acte politique majeur. Certes, il serait possible de vivre sous le régime des douzièmes provisionnels, comme ce fut le cas en 2016, mais ce n'est pas un système convenable: on peut s'en sortir pour le fonctionnement, mais du point de vue institutionnel, ce n'est pas du tout satisfaisant.
Malgré les bémols que je viens d'indiquer, même si les conditions ne sont pas réjouissantes, nous sommes heureux de voir l'Etat doté d'un budget. Le déficit ne me fait pas plaisir du tout, soyez-en convaincus. Depuis que j'ai pris mes fonctions, je travaille à diminuer le déficit, à maîtriser les dépenses, à réduire la dette - elle a diminué, ce qui me ravit, tout comme le Conseil d'Etat - à obtenir en somme des finances saines, non pas pour la beauté du geste, non pas par idéologie, mais tout simplement parce que des finances saines permettent d'assurer les prestations, d'éviter l'écueil de coupes brutales, de garantir une marge de manoeuvre afin de faire face aux imprévus, et déjà simplement aux choses qui sont prévues et indispensables. Je pense en particulier au projet de loi déposé par le Conseil d'Etat pour recapitaliser la caisse de pension. En effet, le gouvernement porte une responsabilité à l'égard de ses collaboratrices et collaborateurs qu'il entend assumer; si ce que nous proposons n'est pas institué, ceux-ci verront les prestations diminuer, ce que nous ne pouvons tolérer. Il en va de notre responsabilité, et c'est la raison pour laquelle nous cherchons à créer une marge de manoeuvre.
Nous cherchons également à créer une marge de manoeuvre s'agissant de la fameuse réforme fiscale des entreprises, qui permettra de mettre toutes les sociétés sur le même plan et qui est tout simplement nécessaire. Si nous ne la mettons pas en oeuvre, ce n'est pas uniquement un manque à gagner - temporaire, à notre avis - qui risque de survenir, mais surtout des pertes massives d'emplois qui se chiffreront en milliers, voire en dizaines de milliers. Voilà pourquoi nous répétons inlassablement que nous devons nous y préparer, et que d'aucuns dans cette salle continuent à prétendre le contraire ne changera rien à notre détermination.
Mesdames et Messieurs, je vais m'arrêter là. Au final, le vote auquel vous vous apprêtez à procéder satisfait le Conseil d'Etat, car il s'agit d'un acte de responsabilité. Merci de votre attention.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, c'est le moment de voter l'entier du projet de loi budgétaire.
Mise aux voix, la loi 12176 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 55 oui contre 39 non.