Séance du
vendredi 24 novembre 2017 à
14h
1re
législature -
4e
année -
9e
session -
48e
séance
RD 1201
Débat
Le président. Nous commençons notre séance des extraits avec le RD 1201. Monsieur Riedweg, vous avez la parole.
M. Bernhard Riedweg (UDC). Merci, Monsieur le président. Je sais que nous sommes aux extraits, mais le rapport divers 1201 est quand même trop important pour que nous le laissions passer comme ça. (Brouhaha.) L'objectif premier du plan directeur quadriennal...
Le président. Ecoutez, Monsieur, en principe, c'est pour un renvoi en commission ! Alors demandez-le si vous voulez, ce sera plus simple !
M. Bernhard Riedweg. Non, il paraît qu'on ne demande pas le renvoi en commission ! C'est ce qu'on vient de me dire il y a une quinzaine de secondes. Je me permets quand même de prendre la parole, vous me l'autorisez, Monsieur le président ? (Commentaires.) L'objectif premier du plan financier quadriennal est de montrer le chemin du retour à l'équilibre financier, ce que nous ne demandons qu'à croire. (Brouhaha.) En ce qui concerne le passé, le plan de mesures 2015-2018 du Conseil d'Etat a permis une amélioration du résultat de 455 millions de francs calculés jusqu'au projet de budget 2018: il faut lui en être reconnaissant. Dans le même registre, le plan d'assainissement 2019-2021 contient une trentaine de mesures et il faut espérer que le résultat 2021 s'améliorera de 301 millions de francs grâce, pour moitié, à des augmentations de revenus et, pour l'autre moitié, à des diminutions de charges. Les communes devraient pouvoir soulager le canton de 80 millions de francs dans le cadre de la contribution du canton à la péréquation estimée à 399 millions de francs. La CPEG, le PF 17 et SCORE constituent les grands défis qui attendent notre grand argentier durant les quatre prochaines années et cela représente autant de risques majeurs identifiés par le Conseil d'Etat. Il y a un potentiel d'économies de 44 millions de francs dans la fonction publique à l'horizon 2021 grâce à une collaboration avec les organisations syndicales dans le cadre de la caisse de prévoyance de la police et des établissements pénitentiaires, mais aussi grâce à la réduction de l'absentéisme. (Brouhaha.) Des mesures structurelles devront être adoptées, comme cela a été fait pour la CPEG en 2016 et 2017, pour arriver à un projet de budget avec un excédent de recettes de 71 millions de francs en 2021, alors que pour les années précédentes, depuis le budget 2017, ces budgets présentent tous des résultats négatifs. Trois mesures structurelles devraient permettre d'améliorer les revenus, dont la limitation de la déductibilité de l'assurance-maladie, l'augmentation de la taxe sur la plus-value foncière réalisée lors de déclassements de terrains, mais aussi la réévaluation du patrimoine immobilier. Les mots que je vous dis maintenant seront importants pour vous-mêmes car vous serez certainement tous réélus jusqu'en 2021, alors que ce n'est pas le cas pour moi. L'ensemble des impôts, taxes et droits ainsi que les mesures structurelles présentent une augmentation de 718 millions de francs entre le budget 2017 et le budget 2021. En fait, beaucoup de contribuables - tant les personnes physiques que morales - seront davantage sollicités, ce qui devrait plaire à certains députés. (Brouhaha.) Le Conseil d'Etat s'est engagé à trouver un équilibre entre les dépenses pour assurer les prestations nécessaires à la population dont il a la responsabilité et les mesures affectant les recettes sans augmenter les impôts. Ce qu'il faut relever, c'est que la plus grande partie des augmentations des charges prévues par le PFQ 2018-2021 découlent d'obligations contraignantes et mécaniques résultant de l'application de lois en vigueur pour les mécanismes salariaux, les cotisations aux caisses de pension, les prestations d'aide sociale et les effets induits des engagements...
Le président. Monsieur Riedweg, nous sommes aux extraits ! Il y aura certainement une demande de renvoi en commission ! S'il vous plaît !
M. Bernhard Riedweg. Il n'y en a pas, Monsieur le président ! Il n'y en a pas !
Le président. Même le parapluie bulgare, c'est sans espoir !
Une voix. Donne ta décision, ras-le-bol !
M. Bernhard Riedweg. Ils disent qu'ils en ont ras-le-bol de m'écouter, alors je vais vous donner la décision de l'Union démocratique du centre: tout en restant attentive, l'UDC demande le renvoi du rapport divers au Conseil d'Etat. Merci, Monsieur le président ! Connard de merde !
Le président. Misère... Monsieur Buchs, c'est à vous !
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. C'est un débat important, mais il y a un tel brouhaha, c'est regrettable. Le PDC va suivre l'UDC et demandera le renvoi de ce rapport au Conseil d'Etat pour deux raisons. (Commentaires.) Il est vrai qu'on a demandé au Conseil d'Etat de présenter ce rapport avec célérité. Il a dû être préparé dans l'urgence, on aimerait que des choses plus précises soient énoncées. La première chose qui nous déplaît, c'est qu'on ne sait pas à quoi vont correspondre les 44 millions d'économies dans la fonction publique. Il est inadmissible pour nous de décider de couper 44 millions de francs sans savoir où et comment; on aimerait quand même le savoir, c'est la moindre des choses pour nous, députés. L'autre point essentiel pour le PDC, parce que ça concerne son électorat, c'est la revalorisation immobilière de plus de 100 millions de francs. Là-dessus, nous ne sommes pas d'accord; nous ne sommes absolument pas d'accord, même si, semble-t-il, la loi nous y oblige. Nous ne sommes pas d'accord qu'il y ait une augmentation, qu'il y ait un impôt supplémentaire. Une augmentation de cette valeur immobilière va péjorer la classe moyenne basse... (Commentaires.) Oui, on pourrait quand même le dire aussi: on n'est pas d'accord là-dessus et on aimerait que le Conseil d'Etat revoie sa copie avant que le rapport ne soit renvoyé en commission !
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je suis un peu surprise par les discours tenus dans cette enceinte en ce moment: on peut ne pas apprécier le plan financier quadriennal, mais il me semble que la moindre des choses est d'abord d'en discuter en commission, de dire ce qui nous plaît et ce qui ne nous plaît pas dans ce plan avant de prendre une décision de renvoi au Conseil d'Etat. Si vous renvoyez aujourd'hui la copie au Conseil d'Etat, le message qu'il recevra sera très peu clair et il ne saura pas ce qui vous plaît et ce qui ne vous plaît pas dans ce PFQ.
Ensuite, j'entends dire qu'il serait exclu d'effectuer une réévaluation des biens immobiliers. Je vous rappelle juste qu'on est en dehors des clous en ce qui concerne la loi fédérale: on devra de toute façon effectuer à nouveau cette évaluation. Donc, si vous voulez que cette évaluation se fasse différemment, renvoyez ce projet en commission, qu'il puisse être discuté et amendé si nécessaire; la discussion doit véritablement avoir lieu et ce n'est pas en renvoyant simplement la copie que vous obtiendrez, à mon avis, quelque chose qui ressemblera à ce que vous désirez. Je demande donc un renvoi à la commission des finances. (Quelques applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). On assiste à un débat complètement surréaliste: certains veulent renvoyer ce plan financier quadriennal qui est un indicateur et qui n'a pas la précision propre au budget. C'est quelque part un exercice vain. Le pompon va au PDC ! Le PDC trouve que ce plan quadriennal est vraiment très mauvais. Mais qui a préparé ce plan financier quadriennal ? Qui est le grand architecte de ce plan financier quadriennal ? M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat PDC ! (Commentaires.) C'est-à-dire que le PDC reconnaît qu'il est incompétent dans la gestion de l'Etat de Genève et dans la gestion des finances de Genève. C'est un aveu d'échec total ! Un aveu d'échec total du PDC qui démontre qu'ils sont d'une incompétence totale ! C'est bien de l'avoir dit: nous en avons pris bonne note et nous le retiendrons. Le PDC est nul, c'est lui qui le dit, ce n'est pas nous ! Ce n'est pas le MCG, ni personne d'autre ! (Commentaires.) Le PDC est nul - bravo pour votre aveu ! (Applaudissements.)
M. Cyril Aellen (PLR). C'est assez piquant et agréable d'entendre celui qui a passé sa soirée d'hier à voter contre son magistrat donner des leçons au PDC qui est probablement le parti de cette enceinte qui vote le plus comme ses magistrats ! (Applaudissements.)
Des voix. C'est nous !
M. Cyril Aellen. Non, je ne suis pas sûr que chez les Verts vous votiez comme votre magistrat, mais c'est une autre discussion ! (Rires.) Cela étant, je crois que ce n'est pas là un débat partisan, mais institutionnel. La question est de savoir si le parlement souhaite entrer en matière sur le plan financier quadriennal qui lui a été présenté et si, dans son ensemble, il souhaite le considérer comme une bonne base de discussion pour parvenir à quelque chose. Je crois qu'on en a déjà largement parlé à la commission des finances, puisqu'il nous a été présenté et qu'aucun des groupes n'a considéré que la proposition faite constituait un projet suffisant pour un débat serein. Maintenant, pour des raisons politiques, il y a des positionnements distincts; mais pour ce motif-là, le groupe PLR acceptera la proposition qui nous est faite par le groupe PDC.
M. Jean Batou (EAG). Pour le groupe Ensemble à Gauche, ce plan financier quadriennal n'est pas satisfaisant du tout. Nous nous sommes battus pour l'obtenir, nous l'avons obtenu; nous avons là une série de mesures dont les principales sont des attaques répétées et redoublées contre la fonction publique, avec des compressions des prestations et la réaffirmation que la priorité stratégique va être la baisse massive de l'imposition des grandes entreprises. En prime, sans doute pour faire plaisir au MCG, ce plan comporte des mesures contre les Suisses, bien sûr aussi contre les Français, mais principalement contre les Suisses qui résidaient à Genève et qui sont obligés aujourd'hui d'habiter en France parce qu'il n'y a pas de logements à Genève pour ceux qui ont un revenu modeste. Ces personnes vont être pénalisées par ce plan financier quadriennal. Accessoirement, on va revaloriser les biens immobiliers pour que les propriétaires paient un peu plus d'impôts. Cela donne juste l'indication que, pour obtenir le PF 17, but stratégique de ce Conseil d'Etat, c'est-à-dire soulager les grands actionnaires des grandes sociétés, on va mettre les personnes physiques à contribution: les petits propriétaires immobiliers aujourd'hui, les salariés demain, paieront plus d'impôts pour payer ce que les grandes entreprises se mettront dans les poches sous forme de dividendes redoublés. Eh bien, Mesdames les députées, Messieurs les députés, le groupe Ensemble à Gauche vous appelle à renvoyer cette mauvaise copie au Conseil d'Etat !
M. Roger Deneys (S). Vous connaissez l'esprit de dialogue et de consensus qui anime le parti socialiste et notre recherche de solutions pragmatiques pour résoudre les problèmes de Genève, jour après jour, session après session. Pour nous, il n'y a pas de sujet tabou, il n'y a pas de discussion qui doive être éludée au prétexte qu'elle pourrait déplaire. Si on a eu une présentation de ce PFQ à la commission des finances tardivement, il n'empêche que l'exercice est de toute façon compliqué, et la question d'équilibre entre les efforts des uns et des autres se pose. Le minimum serait quand même de regarder plus en détail ce document, de voir aussi si, à ce stade, le Conseil d'Etat a renoncé à certaines hypothèses qu'il avait peut-être imaginées dans un premier temps et, de façon pragmatique, d'étudier ces pistes, plutôt que de jeter l'opprobre sur ce Conseil d'Etat en fin de législature par préoccupation électoraliste. Moi, je pense que ce n'est pas très raisonnable, et le parti socialiste vous invite à étudier pragmatiquement ce PFQ en commission puis à vous faire une opinion en fonction des réponses qui nous seront données.
Le président. Je vous remercie, Monsieur. La parole est à M. Stauffer, avec moins de quatre-vingts décibels, je vous remercie.
M. Eric Stauffer (HP). Ça va être difficile, Monsieur le président, mais je vais faire de mon mieux ! Chers collègues, on verra quelle est l'issue du débat sur ce plan financier quadriennal, s'il va en commission ou au Conseil d'Etat, mais je pense que les majorités sont déjà assez claires. J'aimerais juste vous amener sur un autre terrain; j'aimerais qu'on puisse tous prendre conscience que Genève est un canton de moins de 500 000 habitants et que, si on cumule le budget cantonal avec les budgets des communes, on avoisine les 13 milliards de francs de budget par année - pour un canton de moins de 500 000 habitants, juste pour remettre les choses à leur place dans l'équation. Il faut, à un moment donné, se poser les vraies questions. Je voudrais dire au Conseil d'Etat que je souhaiterais, beaucoup, énormément...
Une voix. Passionnément ?
M. Eric Stauffer. Passionnément, même ! ...que, durant la prochaine législature, le gouvernement puisse faire ce qu'il a été incapable de faire durant cette législature: de l'arbitrage. Je sais, Monsieur le président du Conseil d'Etat, que vous n'en serez plus; peu importe, la continuité de l'Etat doit avoir lieu. Ce gouvernement s'en est lavé les mains à chaque fois et il incombait au Grand Conseil de trouver des économies que le Conseil d'Etat n'était pas capable de nous proposer. Evidemment, quand le Grand Conseil voulait donner une subvention ou mettre en place une innovation, il devait trouver des économies par ailleurs. Je m'en étais déjà ouvert lorsque j'étais président de la commission des finances. Il faut absolument que le prochain gouvernement assume ses responsabilités et fasse de l'arbitrage; faute de quoi, chers collègues, entre les caisses de pension des fonctionnaires qui ont un déficit de 7 à 8 milliards de francs et la dette du canton de Genève qui avoisine les 13 milliards, je pense que l'horizon s'assombrira. Il nous appartient de trouver des solutions pour revenir à la lumière et retrouver des comptes positifs, comme l'ont fait nos voisins du canton de Vaud.
Le président. Merci, Monsieur Stauffer, c'était parfait. Monsieur le conseiller d'Etat Longchamp, c'est à vous.
M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais part de mon grand étonnement d'apprendre que tout le monde a absorbé en quelques minutes le plan financier quadriennal au point de pouvoir déjà en débattre aux extraits. C'est une chose qui ne manque évidemment pas d'étonner mes collègues - j'excuse d'ailleurs ici Serge Dal Busco avant que chacun n'émette quelque hypothèse farfelue sur son absence, il a de très bonnes raisons d'être absent: il est à la conférence des directeurs des finances de notre pays, précisément pour essayer de faire en sorte que la prochaine péréquation financière fédérale nous soit plus favorable. Comme vous le savez du reste - vous l'avez déjà vu à la lecture du budget - la principale cause d'augmentation des dépenses dans le budget 2018 de l'Etat de Genève, c'est la facture de la péréquation financière fédérale, en vertu de laquelle le canton de Genève figure parmi les six cantons qui paient. Tous les autres cantons reçoivent, y compris le canton de Vaud que vous venez de citer, Monsieur Stauffer.
Vous appeliez aussi ce gouvernement - ou le prochain, dont je ne serai plus - à procéder à des arbitrages. C'est précisément le but du plan financier quadriennal: nous avons procédé à un certain nombre d'arbitrages. Ceux-ci se veulent équilibrés puisque, lorsque nous avons présenté ce plan financier quadriennal, nous avons expliqué qu'il se composait de dispositions en équilibre parfait entre augmentations de revenus et diminutions de charges. Nous avons également expliqué que toutes les propositions de ce plan ressortissaient au droit cantonal. Parmi ces mesures, 84% d'entre elles, ou, plus exactement, les effets financiers de 84% d'entre elles dépendent de votre Grand Conseil. Vous aurez donc largement le temps de débattre de ces mesures pour les accepter, les refuser, les amender, les renvoyer aux calendes grecques ou encore substituer des propositions à d'autres.
Mesdames et Messieurs, je crains le refus du plan financier quadriennal par ces méthodes peu orthodoxes. En douze ans au Conseil d'Etat, Monsieur le président, j'ai appris qu'on traitait aux extraits les éléments qui faisaient l'objet d'une adhésion large, tandis que les objets qui, eux, méritaient des débats profonds étaient discutés lors des autres séances du Grand Conseil. Je vois que le renvoi en commission se débat maintenant selon cette méthode, de manière quelque peu inélégante. C'est à vous qu'il reviendra d'en juger, Mesdames et Messieurs les députés, mais je crains que la presse - dont on parlera tout à l'heure quant à son soutien - interprète mal votre position, ce refus pur et simple d'examiner tout cela, avec des arguments totalement contradictoires: pas un seul instant je ne peux penser que le PLR auquel j'appartiens et auquel je suis fidèle... (Remarque.) ...refuse ce PFQ pour les mêmes raisons qu'Ensemble à Gauche et pour les arguments qui viennent d'être annoncés. Non, c'est évidemment la démonstration malheureuse que ce processus parlementaire - et c'est peut-être là aussi, Monsieur Stauffer, une des particularités de cette législature - est relativement complexe; les majorités sont difficiles à trouver et il y a bientôt plus d'indépendants qu'il n'y a de groupes constitués. (Rire.) Ma foi, les choses paraissent bien compliquées à Genève, Mesdames et Messieurs... (Remarque.) ...mais le peuple aura le dernier mot: Dieu merci, il est là pour corriger les errances politiques ! Le peuple aura le dernier mot sur tout cela début avril et début mai, à mon souvenir ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Nous allons donc voter la première proposition, c'est-à-dire le renvoi de ce rapport à la commission des finances.
Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat RD 1201 à la commission des finances recueille 41 oui, 41 non et 1 abstention.
Le président. Je tranche en faveur du renvoi à la commission des finances.
Le renvoi du rapport du Conseil d'Etat RD 1201 à la commission des finances est donc adopté par 42 oui contre 41 non et 1 abstention. (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer. Carlos, c'est de ta faute !
M. Carlos Medeiros. Je sais, c'est normal !
Une voix. Discutez en commission !
Le président. S'il vous plaît ! Oh ! (Commentaires. Rires.)