Séance du
jeudi 6 avril 2017 à
17h
1re
législature -
4e
année -
2e
session -
6e
séance
Déclaration du Conseil d'Etat sur la CPEG
Déclaration du Conseil d'Etat sur la CPEG
Le président. La parole est à M. Longchamp, président du Conseil d'Etat.
M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, à l'instar de la plupart des caisses de pension publiques suisses mais de manière plus accentuée, la caisse de pension de l'Etat de Genève - née de la fusion, le 1er janvier 2014, de deux caisses déjà convalescentes - est confrontée à une situation délicate. Son plan de financement présenté lors de vos débats parlementaires en 2012 envisageait, sur une base historique avérée, un taux technique de 3,5% et un rendement de la fortune de 4,1%.
Une première baisse du taux technique de référence à 3% a été effectuée en 2014, mais celle-ci n'a pas impliqué de diminution des prestations en raison des performances exceptionnelles de la fortune de la caisse en 2013 et 2014. Puis, comme vous le savez, la Banque nationale suisse a mis fin au taux plancher le 15 janvier 2015 et introduit des taux de référence négatifs. Cette décision a eu des répercussions immédiates sur l'ensemble des caisses de prévoyance, affectant en particulier les plus faiblement capitalisées comme la CPEG. Aussi, la Chambre suisse des experts en prévoyance a une nouvelle fois abaissé le taux de référence de 0,5% le 3 octobre 2016.
Dix jours plus tard, l'expert actuariel agréé de la CPEG constatait que «sur un horizon temps de dix ans, la caisse ne serait pas en mesure de respecter le chemin de croissance sans mesures structurelles importantes sur les prestations et/ou sans financement supplémentaire [...]». Dans son rapport, il recommandait au comité de la CPEG, seul organe compétent à teneur des dispositions légales en vigueur, d'envisager trois décisions: premièrement de fixer un taux d'intérêt technique cible de 2,5%, deuxièmement d'augmenter le plus rapidement possible l'âge pivot d'une année, c'est-à-dire de faire passer de 64 à 65 ans l'âge permettant d'obtenir une rente pleine, et troisièmement de restaurer l'équilibre à long terme de la caisse en adoptant des mesures structurelles qui «pourraient engendrer des baisses de rentes de l'ordre de 20%».
Les 4 novembre et 20 décembre 2016, le comité de la CPEG a informé par courrier le Conseil d'Etat de ses décisions conformément aux recommandations de cet expert: l'abaissement de 0,5% du taux technique de la CPEG au 31 décembre 2016, l'élévation de l'âge pivot de 64 à 65 ans avec effet au 1er janvier 2018 et la sélection d'un catalogue d'autres mesures pour compenser la baisse du taux technique de 0,5% dans un délai qui reste à déterminer.
En décembre 2016, le Conseil d'Etat a indiqué à votre commission des finances sa volonté de présenter, avant la fin du printemps 2017, un projet de loi proposant une solution durable pour les assurés de la caisse et les employeurs. Cette démarche était mue par une quintuple motivation: offrir une solution durable et pérenne, veiller à l'attractivité des prestations pour les actuels et futurs employés qui garantirait une solution équitable entre les générations, assurer que les discussions préparatoires avec les organisations représentatives du personnel se fassent dans le respect du partenariat social qui fait la richesse et la force de la Suisse, garantir que les décisions parlementaires que vous serez amenés à prendre s'inscrivent dans une volonté de trouver des solutions équilibrées et consensuelles, et enfin certifier à la population genevoise, qui sera probablement appelée à se prononcer sur cette importante réforme, que les mesures retenues seront justes, équitables et financièrement supportables pour l'Etat de Genève.
Dès la mi-janvier 2017, une série de rencontres ont été programmées entre le Conseil d'Etat et les organisations représentatives du personnel. Six séances ont déjà eu lieu, et deux autres sont agendées d'ici la fin du mois. Les deux parties partagent les mêmes constats: tout d'abord, les performances de la caisse et la qualité de sa gestion sont reconnues et avérées, mais la CPEG est structurellement pénalisée d'une part par sa faible capitalisation, d'autre part par l'inertie inhérente à son système de fonctionnement. Cette double faiblesse structurelle est accentuée par la proportion très importante d'engagements envers les rentiers. Ensuite, à teneur des dispositions légales fédérales, les mesures structurelles que peut prendre le comité de la CPEG ne sauraient porter que sur les engagements envers les actifs, soit moins de la moitié des engagements totaux, ce qui nécessite d'agir massivement sur cette catégorie d'assurés. Objectivement, cela est très inéquitable et affaiblira durablement, si on ne peut l'éviter, l'attractivité et le fonctionnement de l'Etat et de ses différentes entités dans la réalisation des politiques publiques essentielles pour nos concitoyennes et concitoyens. Enfin, les deux parties partagent l'objectif commun de s'accorder sur une réforme durable visant à diminuer les risques pour les employeurs et l'Etat-garant.
Différents scénarios ont été envisagés; seules les solutions durables permettant de rétablir l'équilibre financier à long terme ont fait l'objet de discussions, les solutions à court terme ayant été systématiquement écartées. Lors de la séance d'hier, 5 avril, la délégation du Conseil d'Etat aux ressources humaines, composée de M. Serge Dal Busco, vice-président du Conseil d'Etat, de Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat, et de votre serviteur, a indiqué aux organisations représentatives du personnel que le gouvernement genevois était prêt à envisager avec elles une solution s'articulant autour des axes cumulatifs suivants: la recapitalisation de la caisse publique ainsi que l'ont fait d'autres cantons suisses, l'atténuation des baisses de prestations afin de veiller à long terme à leur attractivité auprès des actuels et futurs employés, et le passage à la primauté des cotisations permettant une gestion plus durable de la caisse.
Aux yeux du Conseil d'Etat, la réussite de cette réforme est essentielle, et cette réussite dépendra tant de notre détermination que de la sérénité du climat dans laquelle elle s'inscrira. Notre Conseil d'Etat constate avec satisfaction que votre Grand Conseil, conscient lui aussi de l'importance de l'enjeu, a déjà pris les dispositions lui permettant d'organiser les travaux parlementaires dans le meilleur climat possible. C'est le minimum que nous devons tant à nos concitoyens qu'aux collaborateurs de l'Etat à l'aube d'une réforme fondamentale. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat.