Séance du
vendredi 13 mai 2016 à
16h
1re
législature -
3e
année -
4e
session -
19e
séance
PL 11700-A
Premier débat
Le président. Nous revenons à notre ordre du jour avec le PL 11700-A. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Le rapport de majorité est de M. Yvan Zweifel, que je ne vois pas... Il est remplacé par M. Jacques Béné, à qui je passe la parole.
M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Je reprends l'excellent rapport de M. Zweifel pour vous dire que ce projet de loi vise l'impôt à la source par le biais d'une modification de la composition de la commission consultative. On connaît le credo du MCG à propos des frontaliers; malheureusement, cette proposition rate complètement sa cible, puisque cette commission consultative que le MCG aimerait politiser n'a pas de pouvoir décisionnaire. Cette commission tripartite n'a jamais fixé le barème d'impôt, puisqu'elle ne vote jamais. Il s'agit purement d'un lieu d'échange, d'un forum, suite à une proposition faite en 2008 par M. David Hiler. Si le but de ce projet de loi est de revoir le barème de l'impôt à la source pour taxer encore plus les frontaliers, malheureusement, ce n'est pas par le biais de cette commission consultative que cela pourrait se faire.
En commission, on nous a présenté des exemples. On pourrait en effet penser que le barème de l'impôt à la source est insuffisant par rapport aux impôts prélevés sur les revenus d'un contribuable domicilié sur le canton: les arguments qui nous ont été donnés par l'administration fiscale nous ont bien démontré qu'au franc près et à situation égale, un frontalier est taxé exactement de la même manière qu'un résident suisse. Cette commission est donc une commission de spécialistes, uniquement là pour mettre de l'huile dans les rouages sur les modalités d'application; il n'y a donc, Mesdames et Messieurs, aucune raison de modifier sa composition, et la majorité de la commission vous recommande de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi que seul le MCG défend. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Il s'agit en effet d'une commission consultative où des contribuables peuvent en quelque sorte autogérer, c'est-à-dire faire preuve d'influence, agir indirectement sur l'administration, avoir un poids politique, un poids décisionnel sur cette administration, et parmi les membres de cette commission se trouve le Groupement transfrontalier, c'est-à-dire le groupement des employés frontaliers, et certains milieux économiques; il n'y a aucun représentant de forces diverses, il n'y a que des intérêts particuliers, de certains contribuables. J'aimerais bien qu'il existe le même type de commission pour le contribuable ordinaire: cela n'existe pas, parce que le contribuable ordinaire est toujours discriminé par rapport au contribuable frontalier qui gagne de plus en plus d'argent, qui fait perdre de l'argent à l'Etat de Genève: c'est de l'argent que nous n'avons pas pour la formation, pour l'aide sociale, de l'argent que les autres contribuables doivent payer. Nous avons donc des hausses d'impôts à cause des frontaliers. Ce sont les faits, c'est la réalité, le gros problème que nous avons: les pertes fiscales. Nous devons nous battre. Il s'agit là d'une des pistes. Bien évidemment qu'il faut retravailler la manière dont on calcule l'impôt à la source, qui est tout à fait scandaleuse: on a en fait bâclé cette question, on ne l'a pas examinée de manière complète... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...je me souviens même qu'en commission, nous avons reçu un seul exemple dont j'ai pu prendre connaissance uniquement à la fin de la séance. Après, on nous en a donné deux ou trois pour compléter le rapport, alors qu'une des commissaires présentes avait quelques exemples qu'on aurait pu examiner, qu'on aurait dû examiner, face auxquels on se rend compte que des personnes taxées avec l'impôt à la source, qui ont un permis B et ensuite un permis C, voient leur déclaration d'impôts. On a des exemples précis, concrets, et non pas des exemples théoriques tels que ceux présentés à la commission. Malheureusement, on comprend bien qu'il y avait une volonté de ne pas examiner ce genre de choses. Pour cette raison, on a tout fait pour évacuer la question, pour ne pas la voir. L'enjeu global de ce projet de loi est d'obtenir une équité pour les contribuables, que certains principes fiscaux soient respectés; c'est le principe de base. Il y a un problème plus large, des pertes fiscales qui se montent à plusieurs dizaines de millions, je dis bien dizaines de millions, voire davantage peut-être, parce que des pertes fiscales sont très difficiles à évaluer. On a des pertes gigantesques qui se font au travers des travailleurs frontaliers, de l'impôt à la source, bien évidemment. On se trouve face à un système désastreux, et je trouve très dommage qu'il n'y ait aucune volonté de s'occuper de manière modeste ou plus ambitieuse des finances genevoises pour arrêter de se faire plumer. Je reviendrai sur la question, Monsieur le président, si j'ai encore un peu de temps.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, avec son titre racoleur, «Mettons fin au racket fiscal organisé en faveur des frontaliers, avec la complicité du patronat et des syndicats !», ce projet de loi voulait modifier profondément l'impôt à la source et réparer une injustice faite aux Genevois. Or, que lit-on dans ce texte ? Qu'il s'agit tout d'abord de politiser une instance qui fonctionne bien et qui est un lieu d'échange et d'information, et non pas de décision, et d'aller y toucher des jetons de présence. Ce projet de loi ne répond à aucune des préoccupations de ses auteurs, car ce n'est pas dans cette commission que se décide le barème de l'impôt à la source ni des déductions possibles. Tous les participants à cette commission consultative nous ont confirmé ces faits. De plus, à propos du barème, justement, le grand complot dénoncé par le MCG s'est vite dégonflé: l'administration fiscale nous a en effet démontré que le barème de l'impôt à la source était identique à celui de l'impôt ordinaire. (Remarque.) Bref, la théorie du complot s'effondre, même si M. Baertschi essaie de la réanimer avec tous les efforts qu'on lui connaît. Il n'y a aucune base légale à ce qu'il dit, ni aucun fait qui le corrobore. Bref, ce projet de loi aurait dû être retiré, tant il rate sa cible, tant il est inutile et tant il est basé sur des informations erronées. Mais puisque ses auteurs n'ont pas eu la bonne idée de le retirer, j'invite le Grand Conseil à le rejeter et à passer à un point de l'ordre du jour qui sera un petit mieux préparé et élaboré. Je vous remercie, Monsieur le président. (Exclamations. Quelques applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Pierre Vanek (EAG). Mesdames et Messieurs, nous ne nous rallions pas à ce projet de loi. Le rapporteur de minorité, qui est l'un des auteurs du projet, François Baertschi, indique à la fin de son rapport qu'il y a des baisses majeures de recettes pour l'Etat de Genève qui seraient dues à ce qu'il décrit comme une inégalité de traitement, des avantages octroyés aux frontaliers - il parle d'une cinquantaine de millions de francs. Mesdames et Messieurs, il y a bien un complot pour faire baisser les recettes de la collectivité, un complot dont le Conseil d'Etat est complice... (Commentaires.) ...un complot qui exerce ses effets depuis une bonne quinzaine ou vingtaine d'années, un complot qui se traduit, Monsieur Baertschi, avec votre appui parfois, par des baisses de recettes pour la collectivité qui se montent à 1 ou 1,3 milliard par année. Ce sont bien d'autres chiffres, et cela se fait à travers les cadeaux fiscaux systématiquement accordés aux nantis, et à travers le refus même des propositions les plus modestes du Conseil d'Etat pour un éventuel complément de recette qui pourrait être obtenu en comblant telle niche fiscale. Eh bien non, Mesdames et Messieurs, le complot qui a son coeur du côté du PLR... (Exclamations. Le président agite la cloche.) ...ce complot-là existe bien, il existe bien et déploie ses effets. Par contre, il s'agit ici d'un nuage de fumée, d'abord, Mesdames et Messieurs, parce que s'il y avait un problème concret concernant la fiscalité des frontaliers et l'impôt à la source, il faudrait faire des propositions législatives concernant l'imposition des frontaliers et la fiscalité à la source. Ici, il s'agit de la composition d'une commission consultative, et on nous présente comme un scandale et un déni de démocratie ou une infraction aux règles républicaines le fait que des frontaliers puissent participer à une commission consultative qui se réunit... quoi ? On connaît ces commissions, on connaît le Conseil d'Etat et sa faculté de parfois ne pas les convoquer; elles se réunissent quoi ? Trois ou quatre fois par an, M. Dal Busco me confirmera que j'ai raison - sur ce point, pas sur le complot de tout à l'heure ! (Rires.) C'est une commission consultative, qui est donc consultée, et en dernière instance, les lois fiscales sont votées dans ce parlement, les décisions votées ici sont censées être exécutées par les élus des citoyens genevois qui siègent sur la banquette devant nous, et nous avons en effet une fonction de haute surveillance de l'activité de ce Conseil d'Etat. S'il y a des problèmes, il faut les identifier, mettre le doigt dessus et les corriger ! Mais quant à ce projet de loi, il y a de grands roulements de tambours, mais le fond de l'affaire est qu'on veut simplement modifier la composition d'une commission consultative à laquelle appartiennent deux représentants du Groupement transfrontalier européen, l'organisation des frontaliers - et c'est surtout cela qui est visé, on considère que c'est inadmissible. Mais enfin, quand même ! Ces gens-là paient l'impôt dans ce canton, la moindre des choses est d'entendre leur avis sur la question. Nul n'est obligé de le suivre, nul n'est obligé de voter des lois qui correspondent aux intérêts...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Pierre Vanek. Merci, Monsieur le président, je vais conclure. Nul n'est obligé de voter des lois issues des travaux de cette commission consultative, dont d'ailleurs on a appris l'existence pour l'essentiel à travers ce projet de loi. Ce débat n'a donc pas lieu d'être, à mon avis, et du côté d'Ensemble à Gauche, nous refuserons ce texte.
M. Vincent Maitre (PDC). Tout a déjà été dit, et très bien dit, sur un projet de loi aussi creux. En réalité, le racket dont on parle concerne seulement un revenu fiscal dans le canton de Genève à hauteur de 600 à 650 millions de francs par année - c'est ce que paient en impôts les frontaliers à Genève chaque année. Je suis à peu près convaincu que le conseiller d'Etat en charge des finances et bien d'autres dans cette salle seraient prêts à signer tous les jours des rackets de ce type-là. Quant au projet de loi même, il prétend s'attaquer à une injustice et modifier un taux d'imposition, ou plutôt un barème d'imposition, or la meilleure méthode qu'il a trouvée pour ce faire est de modifier la composition d'une commission qui est bien consultative, comme on l'a dit. Ma foi, si sous prétexte de faire des économies on entend à l'inverse engraisser le mammouth, le politiser pour y faire siéger des parlementaires de milice qui n'auront finalement pour seule vocation que d'aller cachetonner dans cette commission consultative, eh bien c'est en effet la meilleure façon d'y arriver. Mais contrairement à ce qu'on prétend, on est assez loin de la mesure d'économie en termes de fonctionnement. Cela laisse également d'autant plus songeur quant au degré de connaissance de nos institutions de la part des auteurs de ce projet de loi, puisque de nouveau, ils prétendent faire une révolution fiscale tout simplement en s'attaquant à un organe qui n'est que consultatif. La seule conclusion qui s'impose est qu'en raison du côté parfaitement outrancier, pour ne pas dire insultant, de ce projet de loi, sa seule destinée est évidemment la corbeille, et j'invite toutes et tous ici à m'imiter.
M. Daniel Sormanni (MCG). Monsieur le président, vous direz à M. Vanek que j'adore les roulements de tambour, surtout quand, à la fin, ils aboutissent à quelque chose. J'ai entendu tout à l'heure le rapporteur de majorité dire que cette commission consultative ne décide finalement de rien. Alors si elle ne décide de rien, il faut la supprimer, Mesdames et Messieurs les députés ! (Exclamations.)
Une voix. Mais oui !
Une autre voix. Bravo !
M. Daniel Sormanni. Qui est-ce qui décide... (Remarque.) Je vous ai écouté, Monsieur Béné, alors ayez l'obligeance de m'écouter ! Alors qui décide du barème ? Un règlement du Conseil d'Etat, à moins que ce ne soit autre chose. Je crois donc qu'il y a une inégalité de traitement patente, parce qu'un certain nombre d'employés taxés à la source paient zéro franc d'impôts - tant mieux pour eux, ce n'est pas la question, ils ont une famille, des enfants, mais la même famille, au moment où elle obtient le permis C, avec les mêmes prérogatives, avec le même nombre d'enfants, ne paie pas zéro franc d'impôts, mais entre 2000 F et 3000 F. Il y a une inégalité, quelque chose ne joue pas dans le système, par conséquent, il faut le corriger. Peut-être que ce n'est pas par cette commission consultative, puisqu'on nous dit qu'elle ne sert à rien, ou en tout cas ne décide de rien. Vous transmettrez, Monsieur le président, à M. Maitre: puisqu'elle ne sert à rien, ça ne sert à rien d'envoyer des gens qui cachetonnent; à l'heure actuelle, ce ne sont pas les députés, ce sont les syndicats et autre Groupement transfrontalier européen qui y siègent et qui peut-être cachetonnent. A un moment donné, il faut aussi avoir l'honnêteté de reconnaître que quelque chose ne joue pas et d'empoigner le problème. Toucher à cette commission consultative ne représente peut-être pas la solution, mais il y a bel et bien un problème, et j'invite en tout cas les députés à y réfléchir, et le Conseil d'Etat aussi, parce que je crois qu'il doit y avoir une égalité de traitement. On nous dit que l'impôt à la source représente 650 millions: on va se reposer la question de savoir pourquoi on ristourne près de la moitié de cela à la France; c'est une question qu'en tout cas le MCG remettra sur le tapis. Nous vous invitons à voter ce projet de loi. J'ai dit. (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Stéphane Florey (UDC). A ce stade de la discussion, je ne peux que confirmer les propos tenus par mes collègues de la majorité: il n'y a aucune inégalité de traitement avérée... (Remarque.) ...que l'on soit frontalier ou résident; c'est une évidence. J'inviterai M. Baertschi - vous lui transmettrez, Monsieur le président - s'il a décelé un véritable problème, une véritable malversation, à en alerter la Cour des comptes, afin qu'elle aille voir ce qui se passe dans cette commission que vous croyez tellement occulte que ça sent les magouilleurs à plein nez. Je vous invite à le faire ! Sur le fond de ce projet de loi, le véritable racket, c'est tout simplement l'auteur de ce projet de loi qui l'instaure... (Vives protestations. Commentaires. Le président agite la cloche.) ...en voulant aller racketter des jetons de présence inutiles puisque notre Grand Conseil n'a aucune prérogative pour aller siéger dans une commission, et il a surtout autre chose à faire. Refusons donc ce projet de loi et passons à autre chose. Je vous remercie.
M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, beaucoup de mes préopinants l'ont déjà dit: quand on lit «Mettons fin au racket fiscal organisé en faveur des frontaliers», on s'attend à quelque chose d'incroyable, des débats à la commission fiscale, des exemples de racket qu'on va nous montrer, etc. (Remarque.) Mais rien du tout ! Rien ! Ils ne sont pas dans votre rapport, et j'y reviendrai. C'est vraiment scandaleux. On lit dans le rapport de minorité, Monsieur le président: «Quand on entend certains [...] se féliciter des cadeaux fiscaux ou autres faits aux frontaliers», or il n'y en a aucun... (Vives protestations.) ...et cela a été dit en commission. On lit: «Il ne faudra pas se plaindre quand viendra le temps des augmentations d'impôts ou des baisses drastiques de prestations.» Mais c'est le MCG qui vote ces baisses de prestations avec la droite libérale de ce parlement ! (Vives protestations. Commentaires. Le président agite la cloche.) C'est vraiment hallucinant de lire: «Comme ceux qui développent les transports publics avec la France voisine ne doivent pas se plaindre quand le chiffre d'affaires du commerce genevois baisse.» Mais ce sont ceux qui nous disent à longueur d'année que personne ne va faire des courses en transports publics, que personne ne fait des courses à vélo, tout le monde utilise sa voiture pour faire des courses ! (Exclamations. Commentaires.) Et ici, on dit totalement le contraire, parce qu'on parle de la France voisine - c'est simplement hallucinant ! C'est du vent, ce sont des âneries, Monsieur le rapporteur de minorité, et franchement, ce sont aussi des mensonges, parce qu'on a vu - c'est inscrit dans le rapport - que cette commission consultative ne prend aucune décision et n'a jamais voté, Monsieur le rapporteur de minorité... (Remarque.) ...sur un quelconque barème de l'impôt à la source. Vous écrivez dans votre texte qu'il y a des exemples, Monsieur le rapporteur de minorité...
Le président. Monsieur le député, adressez-vous à la présidence !
M. Thomas Wenger. Oui, Monsieur le président, excusez-moi, vous transmettrez ! Il y a «des exemples accablants que la commission a refusé d'examiner»: mais où sont-ils, vos exemples, dans le rapport de minorité ? (Remarque de M. François Baertschi.)
Le président. Monsieur Baertschi, vous aurez la parole à votre tour en tant que rapporteur ! (Remarque de M. François Baertschi.)
M. Thomas Wenger. Monsieur le président, si M. Baertschi - vous lui transmettrez - a des exemples accablants, pourquoi ne les a-t-il pas mentionnés dans son rapport ? Pourquoi ne les envoie-t-il pas à la Cour des comptes, comme on l'a suggéré ? Le seul but de ce projet de loi, qui est vraiment scandaleux, c'est de poursuivre la tactique du MCG: on dépose à peu près n'importe quoi comme projet de loi... (Commentaires.) ...c'est ensuite refusé à la majorité écrasante d'une commission, on prend un rapport de minorité, on crache et on crache encore sur les frontaliers - c'est tout ce qu'on sait faire - et après on dit: «C'est nous qui défendons les Genevois !» Mais les Genevois ne tombent plus dans votre panneau, ce truc est un ramassis de mensonges, Monsieur ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la députée Magali Orsini.
Mme Magali Orsini (EAG). Merci, Monsieur le président. Il me reste deux secondes, ou bien quelque chose comme ça ?
Le président. Six secondes !
Mme Magali Orsini. Je voulais juste dire que le racket était souvent dans l'autre sens: beaucoup de frontaliers omettent de réclamer ce qui leur est dû parce qu'ils ont été trop taxés. On demande... (Vives protestations.) On demande aux employeurs d'appliquer le taux maximum...
Le président. C'est terminé, Madame la députée !
Mme Magali Orsini. Ils m'ont bouffé mon temps de parole, Monsieur le président ! (L'oratrice rit. Commentaires.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Patrick Dimier pour trois minutes.
M. Patrick Dimier (MCG), député suppléant. Merci, Monsieur le président. Je voulais simplement remercier le camarade Vanek pour la cure de jouvence qu'il nous a offerte: il nous a rappelé les heures de gloire du PCF et de son vociférateur de l'époque, le camarade Waldeck Rochet. Il accuse le MCG d'enfumage: il nous accordera toutefois que nous enfumons peut-être, mais depuis moins longtemps que le rêve marxiste bien dépassé. Il y a, c'est un fait, un problème; mais c'est à la source de l'impôt qu'il faut s'attaquer plutôt qu'à l'impôt à la source, car à la fin de l'histoire, c'est forcément le peuple qui paie l'impôt cassé ! (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Vincent Maitre pour deux minutes.
M. Vincent Maitre (PDC). Merci, Monsieur le président. J'aurai besoin de bien moins de temps que ça. Pour anticiper l'argument sur les fameux exemples que s'apprête à nous fournir M. Baertschi, qui vous affirmera en vous regardant droit dans les yeux que la commission a refusé de les examiner, et pour que les choses soient parfaitement claires, la commission a accepté que des documents soient transmis, ces fameux exemples, un délai a été fourni aux auteurs, ils ne l'ont pas respecté, un deuxième délai leur a été proposé pour qu'ils nous donnent ces fameux exemples: la commission les attend toujours, nous n'avons jamais eu de nouvelles depuis, et c'est le président d'alors, relativement bien placé pour le savoir, qui vous parle.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, je la passe pour une minute au rapporteur de minorité.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je vais être assez rapide, je ne m'abaisserai pas aux arguments misérables de M. Wenger - vous transmettrez, Monsieur le président. Si je m'abaissais à son niveau, je le traiterais d'imbécile...
Le président. Monsieur Baertschi !
M. François Baertschi. ...mais je ne vais pas m'abaisser à ce niveau-là, je ne vais pas être aussi bas que lui dans la bêtise. Je n'ai pas le temps de répondre sur tous les éléments. L'un est important et beaucoup de gens ne l'ont pas compris au sein de la commission, malheureusement: il s'agit de barèmes du Conseil d'Etat, et on a accès uniquement aux éléments de type législatif. Je suis très surpris que des gens dont certains se prétendent juristes n'aient pas compris la chose. A part cela, concernant les délais, on a procédé au vote à un certain moment, on nous a demandé des documents. Ces documents doivent être étudiés, ils ne peuvent pas être livrés comme ça, il y a des données personnelles, un ensemble de choses. Nous avons les preuves. D'ailleurs, le député Sormanni a eu lui-même un exemple qui va tout à fait dans ce sens-là. Ce sont des exemples précis que nous avons de favoritisme envers les personnes qui paient l'impôt à la source, les frontaliers. On perd énormément d'argent; je pourrais encore développer sur d'autres thèmes similaires que je développerai d'une autre manière, seulement on a un travail législatif qui doit être précis, avec un certain nombre d'éléments. Il s'agit ici d'un élément, d'une commission consultative. Tous ces éléments sont reliés, il faut être stupide pour ne pas le comprendre. (Remarque.)
Ce que je vois, c'est qu'il y a un dogme, on défend les frontaliers, même des partis qui prétendent défendre la préférence nationale, des partis qui prétendent défendre les Suisses sont contre les résidents genevois, tous autant qu'ils sont, ils tiennent un double discours. Il faut avoir le courage de dire que nous faisons des cadeaux fiscaux aux frontaliers; nous le faisons et laissons faire, nous ne faisons rien pour lutter là-contre. Le MCG se bat, fait des propositions, cela dérange, alors que beaucoup de gens ne font rien. Si on se retrouve ensuite avec des fonctionnaires qui n'arrivent pas à être bien payés, des contribuables qui sont rackettés - parce qu'ils sont rackettés - si on se trouve avec des déséquilibres financiers, il ne faudra pas s'étonner qu'on en arrive là. On en arrive là parce qu'il y a un laxisme général, un esprit de connivence dans ce parlement pour défendre... je ne sais pas, une sorte de paresse intellectuelle, pour être poli - je vais rester poli, contrairement à certains des préopinants. Il y a un élément central à ce niveau-là, qui doit être traité de diverses manières. Nous l'avons traité au travers d'un certain point, d'une certaine proposition, la proposition est faite, et preuve est faite que la majorité écrasante de ce parlement soutient les frontaliers parce qu'elle veut le faire. Si on se trouve dans une situation financière, sociale, d'emploi catastrophique... (Commentaires.) ...c'est cette majorité qui en porte l'entière responsabilité. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Je passe la parole au rapporteur de majorité pour quarante-trois secondes.
M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Très rapidement, en commission, nous avons effectivement reçu des exemples de trois situations qui démontrent très clairement que l'impôt à la source est totalement équitable qu'il soit payé en France ou par une personne résidant en Suisse. J'en veux pour preuve - et je regrette que le rapporteur de minorité, qui a eu six mois jusqu'à maintenant pour présenter des cas différents de ceux que l'administration fiscale a présentés, ne l'ait pas fait - qu'un certain nombre, plusieurs milliers, de quasi-résidents se sont maintenant déclarés auprès de l'administration fiscale: c'est donc bien qu'il y a un intérêt à être taxé au niveau suisse, avec le barème ordinaire, plutôt que de l'être sur la base d'un impôt à la source. (Commentaires.)
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'interviens pour rappeler quelques faits au terme de ce débat enflammé. D'abord, le projet de loi est très mal intitulé, je n'y reviens pas. Cette fameuse commission consultative, que j'ai l'honneur de présider, se réunit trois à quatre fois par année. C'est véritablement un forum, un lieu d'échange, au sein duquel on discute de la pratique, de questions vraiment très terre-à-terre auxquelles sont confrontées les personnes imposées à la source, qui ne sont pas que des personnes qui résident à l'étranger, mais aussi des résidents genevois au bénéfice d'un permis B - il y en a plusieurs milliers, il ne s'agit donc pas uniquement d'une affaire de frontaliers. Au sein de cette commission consultative, dans ce lieu d'échange, on discute précisément des modalités de mise en application, de questions très pratiques. Il n'y a jamais été question des barèmes, cela n'a jamais été abordé, ni de l'autogestion à quoi M. Baertschi fait allusion. Il n'y a aucun aspect politique ni même fiscal, sur le calcul des barèmes, qui y soit abordé; cette commission n'a aucun pouvoir décisionnaire, c'est de la pure affabulation, Monsieur Baertschi, permettez-moi de vous le dire. (Remarque de M. François Baertschi.) Non, c'est la réalité... (Remarque de M. François Baertschi.)
Le président. Monsieur Baertschi, vous n'avez pas la parole, s'il vous plaît ! (Remarque de M. François Baertschi.) Vous n'avez pas la parole, je regrette !
M. Serge Dal Busco. Monsieur le président, j'ai l'honneur de présider cette commission, je sais parfaitement ce qui s'y passe, ce qui malheureusement n'est pas le cas de M. Baertschi. Je vous dis que c'est ce genre de question qui est discuté au sein de cette commission consultative. C'est la réalité.
En ce qui concerne cette idée - je ne dirai pas cette affabulation - apparemment persistante malgré les réponses, malgré les éléments clairement chiffrés apportés en commission, selon laquelle le barème de l'impôt à la source serait plus avantageux que l'imposition ordinaire, elle est évidemment totalement fausse. Il existe d'ailleurs une base légale, la loi sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales, qui décrit de quelle manière les barèmes sont établis. Ils le sont sur la base des barèmes ordinaire. Le fait évoqué par le rapporteur de majorité, à savoir que de plus en plus de contribuables demandent à être considérés comme quasi-résidents, démontre parfaitement qu'il y a un avantage pour eux à demander l'imposition ordinaire, probablement, sinon ils ne se déclareraient pas comme tels. Il faut donc vraiment arrêter d'affirmer ce genre de choses. Je vous ai demandé, Monsieur Baertschi - permettez-moi de vous le rappeler - de m'apporter les éléments auxquels vous faites allusion. Je suis prêt à les examiner avec mon administration, pour savoir si les cas que vous avez identifiés sont abusifs, comme vous semblez le prétendre. A ma connaissance, et dans l'absence de vérification de ces éléments-là, je ne peux pas imaginer qu'il en soit ainsi. Ainsi, Mesdames et Messieurs, il faut véritablement aller dans le sens de la majorité, refuser d'entrer en matière sur ce projet de loi qui, on le voit, ne contient que des éléments qui ne sont pas vérifiés et sont parfaitement critiquables. Je vous remercie de votre attention.
Une voix. Très bien !
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. J'invite l'assemblée à se prononcer sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 11700 est rejeté en premier débat par 74 non contre 16 oui. (Commentaires et rires à l'annonce du résultat.)