Séance du
vendredi 26 février 2016 à
16h
1re
législature -
3e
année -
1re
session -
4e
séance
M 2282-A
Débat
Le président. Nous sommes en catégorie II, cinquante minutes. Je donne la parole à M. le rapporteur de majorité Patrick Saudan.
M. Patrick Saudan (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Cette proposition de motion nous a occupés durant sept séances de commission à l'automne 2015. Je vous redis l'invite de la motion qui est une demande au Conseil d'Etat de prendre des mesures urgentes pour que les élèves de l'école obligatoire travaillent jusqu'au terme des années scolaires. En fait, cette proposition de motion est le prolongement de la question urgente 222, posée par le premier motionnaire en 2014, et, celui-là ne voyant rien venir, il a déposé cette proposition de motion qui reprend les termes de cette question urgente.
Le constat fait dans l'exposé des motifs était que l'activité scolaire était fortement réduite tant au niveau du primaire que du secondaire durant le mois de juin et, de surcroît, il mettait aussi en exergue le fait que, durant la période des EVACOM au niveau du secondaire, certains cycles d'orientation libéraient totalement les élèves durant cette période. Les auditions qui ont eu lieu durant ces séances ont concerné autant les associations des directeurs d'école que les syndicats d'enseignants, les associations de parents d'élèves du primaire et du secondaire. En résumé, ce qui est ressorti de ces auditions c'est que les associations des parents d'élèves tant du primaire que du secondaire soutiennent l'esprit et la lettre de cette proposition de motion. Les associations professionnelles réfutent tout problème au niveau du degré primaire mais considèrent que la problématique des EVACOM au niveau secondaire est tout à fait réelle, mais que le problème est très complexe, et la résolution difficile. Quant aux associations des directeurs d'école, elles estiment que l'état réglementaire et législatif est très contraignant et qu'il est donc difficile de trouver une solution à la problématique des EVACOM. Le département, lui, reconnaît qu'il y a une problématique sérieuse au niveau du secondaire quant à la poursuite du travail des écoliers durant le mois de juin.
De nos travaux sont ressorties deux problématiques connexes que je me permets de mentionner, parce qu'elles sont assez importantes pour notre population. Il s'agit d'abord de la répartition des périodes de vacances scolaires qui a été incriminée comme étant inadéquate et pouvant expliquer une baisse de l'attention des écoliers durant le mois de juin. L'autre problématique concerne les demandes de congés des parents au début de ces périodes de vacances scolaires. Certains parents ne comprenaient pas que les congés leur étaient refusés par les autorités scolaires alors que l'activité enseignante était réduite au minimum. Il faut reconnaître d'ailleurs que durant les séances nous nous sommes rendu compte qu'il n'y a pas une réponse institutionnelle satisfaisante par rapport à ces demandes de congés des parents.
Autre point important: le département, à la demande de la commission, a effectué un benchmarking - un étalonnage, pour faire plaisir à mon collègue Gabriel Barrillier - par rapport aux autres cantons romands et, ce qu'il en est ressorti, c'est que de manière générale il y a à Genève trop d'évaluations, trop de conseils et qu'un allégement des charges administratives permettrait probablement de rallonger le temps dévolu à l'enseignement durant le mois de juin tant au niveau du primaire que du secondaire. Il en est aussi ressorti clairement - et là c'est un constat qui a été partagé quasiment par tout le monde - que les EVACOM, à l'heure actuelle, ne donnent pas satisfaction tant au niveau des dates qu'au niveau du nombre ou de l'importance qu'elles ont dans la tête des parents et des élèves. Par ailleurs, elles engendrent une surcharge administrative relativement importante.
Pour ces deux principales raisons, la majorité de la commission vous recommande donc le renvoi de cette proposition de motion au Conseil d'Etat. Je vous remercie.
Le président. Merci. Monsieur le conseiller d'Etat Mauro Poggia, vous avez demandé la parole ? Ah, c'est une erreur. La parole est donc à M. Florian Gander. Ah pardon ! Non, je passe d'abord la parole au rapporteur de première minorité, Mme Isabelle Brunier.
Mme Isabelle Brunier (S), rapporteuse de première minorité. Merci, Monsieur le président. Dans cette affaire, les tenants de la minorité ont été choqués surtout par la forme. Je pense à titre personnel, et nombre de mes camarades seront d'accord avec moi, que l'on peut parler de tout mais encore faut-il le faire courtoisement. Et cette motion, relativement mal rédigée, qui sème le doute sur la fonction publique, qui mêle les sujets, comme on a pu le constater au fil des auditions - mais on pouvait déjà le savoir avant si on connaît un peu l'école genevoise - mélange visiblement des situations très différentes qui sont celle de l'école primaire et celle du secondaire I. Cette motion avait plutôt pour objectif de jeter un pavé dans la mare, et d'ailleurs je sais que M. Romain, premier signataire, se dispose à continuer dans le même registre et prépare ses effets de manche, ce que je trouve un peu dommage. Ce n'est pas de bonne politique que de mettre d'emblée sur les pattes arrière ceux qui devraient être les interlocuteurs privilégiés, en l'occurrence les enseignants et, d'une manière plus générale, la fonction publique. Tout à l'heure, le président du Conseil d'Etat concernant le «personal stop» a évoqué l'abnégation des fonctionnaires. Eh bien oui, je pense que les fonctionnaires en général et les enseignants en particulier, confrontés jour après jour à des situations difficiles face à leurs élèves, font preuve d'abnégation. Lorsque ces critiques, ces mots malvenus, cette manière désinvolte voire méprisante de s'adresser à eux sont véhiculés par une motion, qui plus est rédigée par un ancien enseignant, c'est effectivement une mauvaise politique, un mauvais départ et, comme fonctionnaire, je m'associe à eux pour trouver que c'est usant, débilitant, démobilisant et, en fin de compte, contre-productif.
Ce problème de forme a donc justifié en partie les deux rapports de minorité, parce que, s'il est vrai qu'un problème semble exister au niveau du cycle d'orientation, au niveau du primaire, comme cela a d'ailleurs été rappelé dans le rapport de minorité de mon collègue Olivier Baud, les élèves vont à l'école jusqu'au dernier jour. On espère qu'ils participent également à la fête des promotions, cette tradition genevoise. Visiblement, au fil de tout ce qui nous a été dit en commission, pour l'école primaire, cette motion est carrément nulle et non avenue.
Concernant le secondaire, effectivement cela renvoie au problème des évaluations, du moment où les placer dans l'année scolaire, de l'effet qu'elles ont sur les élèves et, surtout, sur les parents qui en attendent visiblement beaucoup trop. Cet élément mériterait à l'avenir une meilleure explication et une vérification du rôle de ces évaluations. Comme cela a été dit la semaine passée dans la presse, il est visible que le département de l'instruction publique s'est emparé de cette problématique, et c'est donc peut-être un petit effet positif de cette motion mais, pour le reste, malheureusement le ton utilisé, les imprécisions véhiculées, la manière de s'adresser aux fonctionnaires et aux enseignants en particulier, à titre personnel, et je ne suis pas la seule, je les déplore, et nous aimerions que d'une manière générale les motions soient basées sur davantage d'informations réelles, de statistiques, plutôt que sur des allégations qui tiennent vraiment des on-dit, des rumeurs, du café du commerce... Merci !
M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Cette motion visant à garantir que les élèves étudient jusqu'à la fin de l'année scolaire ne concerne de fait pas l'école primaire, donc les huit premiers degrés de l'école. Toutes les auditions réalisées par la commission - et elles ont été nombreuses - l'ont démontré. Il ne saurait donc être question d'englober tout l'enseignement obligatoire, comme le prétend le titre de la motion. Il est surtout regrettable que pour soulever un problème récurrent, qu'on ne nie pas, il faille jeter l'opprobre sur l'ensemble du corps enseignant. L'auteur de la motion a beau jeu d'affirmer qu'il ne parle que des élèves. Mais quand on accuse de laisser les élèves effectuer la fin de l'année en «roue libre», je cite, c'est extrêmement violent à l'égard des professionnels qui assurent au quotidien et tout au long de l'année leur travail avec une conscience irréprochable. Enfin cette motion, on l'a vu, est fort mal rédigée. Mais je ne vais pas m'attarder sur la forme.
Cette motion permet en effet de relever deux problématiques distinctes: la libération des élèves du cycle en fin d'année scolaire ou durant le passage des évaluations communes, les EVACOM, et la période même de l'année scolaire réservée à ces EVACOM. Il semblerait quand même réalisable, pour le cycle d'orientation, si les autres cantons romands le font ainsi que l'enseignement primaire depuis toujours, de renoncer à libérer les élèves les jours qui précèdent le début officiel des vacances d'été. Le DIP aurait pu prendre cette mesure depuis longtemps. Quant aux EVACOM, elles auraient pu être placées à un autre moment de l'année, par exemple au premier trimestre, car elles perdraient ainsi l'importance exagérée qu'on a tendance à leur accorder sur les résultats des élèves et ne constitueraient plus une forme de découragement à poursuivre des études, comme c'est le cas en fin d'année, car ces épreuves ne concernent pas que les élèves. La loi sur l'instruction publique, qui vient d'entrer en vigueur il y a moins de deux mois, je vous le rappelle, le précise fort bien à son article 19, ces évaluations communes ont pour but de mettre à la disposition des enseignants des repères extérieurs à la classe permettant d'harmoniser les pratiques d'enseignement et de mettre également à disposition des établissements des repères extérieurs permettant d'évaluer leurs résultats et enfin d'harmoniser les exigences de l'enseignement et les pratiques d'évaluation des acquis des élèves dans le canton.
Malheureusement, le DIP a décidé de manière unilatérale - et on l'a appris durant les vacances de février - de supprimer les EVACOM en 9e et 10e année du cycle d'orientation, leur trouvant tous les défauts possibles. Cette forme de réponse à cette motion, avant même qu'on en ait débattu en plénière, est étrange. Loin de moi l'idée de défendre ces EVACOM qui n'ont pas que des qualités, cela fait longtemps qu'on le dit. Mais peut-on ainsi renoncer sans autre alternative aux repères qu'elles constituent ? Des épreuves de référence romandes sont prévues depuis la conception du plan d'études romand, le PER, dont on parle beaucoup. La convention scolaire romande, que Genève a signée, les mentionne explicitement, ainsi que la loi sur l'instruction publique que je viens de citer. On supprime bien, Mesdames et Messieurs les députés, ce que l'on remplace. Le département pourrait ainsi utiliser les épreuves intercantonales - elles sont censées exister - en lieu et place des EVACOM au primaire comme au secondaire I. Et il est bizarre qu'il n'en ait pas été touché un seul mot dans cette affaire.
Bref, Mesdames et Messieurs les députés, au vu des éléments non pertinents de cette motion et de la manière inadéquate dont le département y répond hâtivement, le groupe Ensemble à Gauche vous invite à la refuser, quitte à en présenter une nouvelle qui appellera sûrement de meilleures réponses. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Florian Gander (MCG). Le groupe MCG, durant les travaux de la commission, a évidemment compris la demande de notre cher collègue Jean Romain avec cette motion. Cependant, avec les auditions que nous avons eues, le groupe MCG, même si au final il y reste favorable, émet un petit bémol au sujet de cette motion. Et je vais vous remettre tout à l'heure un amendement que je suis en train de terminer. Nous souhaiterions modifier l'invite pour que ce texte ne concerne que l'enseignement du secondaire I et pas le primaire, ce qui nous paraît beaucoup plus logique, puisque nous avons vu que pour l'enseignement primaire les élèves ont des cours jusqu'à la fin. Le problème concerne davantage le secondaire I où là, avec les EVACOM, on constate que les élèves ont beaucoup plus de liberté et se retrouvent davantage livrés à eux-mêmes.
M. Jean Romain (PLR). C'est avec intérêt que j'entends une fois encore, une fois de plus, l'habituelle ritournelle de ceux qui défendent l'indéfendable. Tout va très bien, Madame la marquise. Passez ! Et c'est ce que l'on entend aussi dans les rangs maintenant du MCG, en tout cas pour le primaire, il n'y a rien à voir. On la connaît, la musique. On vient d'entendre la même ritournelle de la part de M. Baud, lui qui, claquemuré dans sa position dogmatique, psalmodie qu'il n'y a pas de problème. Tenez, chers collègues, il écrit en page 84: «[...] la problématique évoquée par la motion, à savoir modifier les pratiques actuelles et faire en sorte que les élèves étudient jusqu'à la fin de l'année scolaire, ne concerne pas l'école primaire. En effet, les élèves des huit premiers degrés vont en classe jusqu'au dernier jour de l'année scolaire, c'est un fait avéré.» Oui, bien sûr, mais où la motion prétend-elle que les élèves ne vont pas en classe au primaire jusqu'à la fin ? Où dit-elle cela ? Elle affirme qu'ils n'étudient pas jusqu'au bout. En aucun cas, ça ne touche les professeurs, ça touche les élèves. Comment peut-on écrire cela ? Et puis, la fin de son rapport, mal écrite en revanche, confine à la divagation. Mais vous avez raison, Monsieur Baud, vous avez raison de ne pas vous relire. Vous vous ennuieriez. (Commentaires.) Mal rédigée, Madame Brunier, ma motion ? C'est-à-dire qu'au fond elle ne suit pas exactement les règles des Bisounours que l'on aimerait entendre. Elle dit les choses clairement et, en aucun cas, elle ne touche les profs. Or problème, chers collègues, problème il y a. Et nous devons appuyer les parents, nous devons appuyer les associations de parents d'élèves inquiets de la vacuité - de la vacuité - de ces fins d'année. On ne travaille pas jusqu'au bout au CO. Il y a des libérations en rafale. Au primaire, on regarde parfois des films. Bref, on remplit son temps comme on peut. Cependant, Madame la présidente, au CO vous avez commencé à trouver une solution. Je vous en sais gré. Réduire le poids des EVACOM, comment vous le ferez, ça c'est votre problème. Réduire le poids des EVACOM de façon à ne pas siffler la fin de la partie, dès lors qu'on les a passées au mois de mai. C'est un premier pas. A mon sens, il est insuffisant. On doit lui ajouter d'autres mesures afin de profiter jusqu'au bout des 38,5 semaines scolaires de Genève.
Au primaire, si les choses sont différentes, cela ne signifie pas que cette motion, au fond, introduit la confusion. Différence et confusion sont deux concepts différents. Cela signifie que les remèdes à trouver doivent être différents. Je n'ai pas encore entendu le DIP nous en parler, lui qui reconnaît que problème il y a. Dans les autres cantons, chers collègues, si les derniers jours de classe sont effectivement moins denses, on parvient à faire travailler les élèves jusque-là au moins. On ne place pas les conseils de classe durant les heures de cours mais après les cours de l'après-midi. Les impératifs de ces cantons, y compris le problème délicat, et j'en suis tout à fait conscient, de l'orientation des élèves, ne sont pas de nature différente des nôtres. Et, que je sache, ces autres cantons ne sont pas plus malins que nous. Faisons chez nous, pour que notre école élève son niveau, ce qu'ils sont capables de faire chez eux et transmettons, chers collègues, cette motion au Conseil d'Etat. Je vous remercie.
M. Stéphane Florey (UDC). Les problématiques soulevées dans cette motion vont beaucoup plus loin qu'il n'y paraît au premier abord, puisque, si la problématique principale du cycle d'orientation a été nettement avérée en commission, il y a aussi les autres réalités. Ce qui se passe, depuis de nombreuses années au cycle d'orientation, tend maintenant à arriver à l'école primaire. Cela est aussi une réalité parce que, bien souvent, maintenant, les 8P vont demander à leurs parents des DVD en disant qu'une séance de cinéma est prévue l'après-midi. C'est la réalité d'aujourd'hui. Les enfants, à l'école primaire, les dernières semaines, n'étudient plus. C'est la réalité des faits. Il y a encore d'autres problèmes qui n'ont pas été vraiment évoqués en commission. Par exemple, il existe des conseils de classe, non pas seulement en fin d'année, mais aussi en milieu d'année scolaire. On a très peu parlé de ce problème, alors que c'est aussi une réalité. A chaque remise de carnet, il y a des conseils de classe et bon nombre d'élèves sont libérés. Eh oui ! Cela reporte la problématique à plusieurs niveaux. C'est déjà compliqué pour certains parents en fin d'année de savoir comment ils vont gérer tous ces congés mais, à chaque remise de carnet, les mêmes questions se posent à propos de la libération des élèves et du fait qu'ils ne vont pas à l'école. C'est aussi cela la réalité.
Très franchement, cette motion avisée est juste. Elle a visé là où il fallait. Nous attendons maintenant - et je me réjouis des déclarations de Mme Torracinta qui a déjà esquissé certaines solutions comme l'abandon pour quelques niveaux des EVACOM mais, maintenant, il faudra aussi aller plus loin au niveau des conseils de classe. Il faut faire admettre que la journée est faite pour enseigner et faire ces conseils de classe comme dans d'autres cantons... Le Tessin y arrive très bien. Pourquoi Genève n'y arriverait pas ? Ils font ces conseils de classe le soir, hors temps scolaire. Et ça c'est enseigner ! C'est pour le bien-être des enfants, parce qu'ils vont à l'école pour apprendre, pas pour être libérés ou regarder des DVD tout l'après-midi ou toute la journée en fin d'année voire même en milieu de l'année scolaire. Bien évidemment nous soutiendrons cette motion en la renvoyant au département concerné. Je vous remercie.
M. Mathias Buschbeck (Ve). Une fois de plus voici un débat typique de notre Grand Conseil. Sur le fond, nous n'avons que peu de divergences, mais nous arrivons à nous écharper en faisant le procès de cette motion. Intuitivement nous avons tous envie de dire que, si les élèves ne travaillent pas jusqu'à la fin de l'année alors qu'ils sont à l'école obligatoire, il y a des choses à faire pour que la situation s'améliore. Le département en est parfaitement conscient. Il y travaille depuis longtemps, et la récente décision de supprimer les EVACOM en 9e et en 10e du cycle va dans ce sens. Et c'est également dans ce sens-là que les Verts pourront accepter cette motion pour soutenir le travail que le département fait actuellement et la réflexion qu'il mène sur le temps scolaire.
Nous ne soutiendrons pas cette motion dans le sens où les élèves devraient travailler jusqu'au 30 juin sans s'arrêter et sans répit, puisqu'une partie du groupe est également sensible à l'argument qu'un peu de liberté à l'adolescence au moment de l'arrivée de l'été est aussi un apprentissage dont nous tous, dans un passé plus ou moins lointain, avons aussi su profiter. Je vous remercie.
Le président. Merci. La parole est à M. Guy Mettan, qui n'est pas là. Je la donne donc à Mme Salima Moyard.
Mme Salima Moyard (S). Merci, Monsieur le président. Pour le groupe socialiste, peut-être bien que nous n'irons pas jusqu'à dire que la motion de M. Romain est mal rédigée. On dira toutefois qu'elle est réductrice, qu'elle est simpliste, qu'elle est manichéenne... J'avais déjà pris la parole lors de la première discussion sur cette motion pour savoir s'il fallait la renvoyer en commission en soulevant que la problématique était complexe - et j'avais donné un certain nombre d'exemples. J'avais également redit - cela devient une habitude dans ce Grand Conseil - que ce domaine traitait assez peu des prérogatives de ce Grand Conseil justement, mais qu'il relevait bien davantage des prérogatives du gouvernement, et plus précisément de Mme Anne Emery-Torracinta en charge de l'instruction publique. Mais visiblement, comme le soulevait le président du Conseil d'Etat il y a quelques minutes dans le cadre d'un autre débat, cela devient une habitude de traiter de tout et de rien, en pensant qu'on est infiniment plus intelligents que les professionnels sur le terrain, que les chefs de service et, également, en l'occurrence, que la cheffe du département.
Nous n'avions pas été opposés au renvoi en commission dans l'idée que c'était bien que tout le monde puisse se rendre compte que l'organisation du temps de travail est compliquée et que, peut-être, les solutions ne sont pas si simples... D'ailleurs M. Romain a posé des questions que d'autres s'étaient posées bien avant lui et de manière plus précise, mais il s'est bien gardé, à quelque moment que ce soit, d'amener la moindre réponse. Et c'est normal, car il n'en a pas ! Pas plus que son groupe, car cette réponse est extrêmement complexe. Les différentes couches de responsabilité, les différents moments qui se succèdent ne sont pas si simples à réorganiser. Et, si la solution était si facile, elle aurait déjà été mise en oeuvre.
Cette motion visait juste, disait M. Florey. Peut-être bien... C'est pour cela que Mme Emery-Torracinta s'occupe déjà de cette question, et, honnêtement, que ce Grand Conseil renvoie ou non cette motion au Conseil d'Etat, ce n'est pas cela qui va changer grand-chose, ni au travail du département, ni, heureusement, à celui des professionnels sur le terrain, et encore moins aux élèves qui ont, heureusement aussi, bien d'autres choses à faire que d'écouter nos passionnants débats !
Il ne faudrait néanmoins pas oublier deux éléments dans ce débat. Le premier c'est effectivement les décisions - quant à savoir si ce sont vraiment des décisions, Mme Emery-Torracinta pourra peut-être nous le préciser - les orientations prises par le département récemment sur le fait de supprimer un certain nombre d'évaluations communes au niveau du cycle d'orientation. Cela réglera éventuellement certains problèmes, mais il serait faux de croire que cela réglera tout. En effet, et c'est un deuxième élément, les élèves sont des adolescents et, cette année par exemple, ils retourneront en classe le 4 avril après leurs vacances de Pâques et auront ensuite trois mois d'école. L'état dans lequel ils seront à partir de fin mai-début juin sera certes acceptable et nous pourrons tout à fait travailler, mais ce travail ne sera pas d'aussi grande qualité que début septembre. Le nier serait vraiment se voiler la face. Il y a encore bien d'autres critères à prendre en compte. On ne peut pas penser que l'on peut tout résoudre au niveau de l'organisation et encore moins via ce Grand Conseil.
Le groupe socialiste soutiendra bien entendu sa rapporteuse de minorité et fera confiance à sa ministre pour trouver les meilleures solutions possibles, sans croire néanmoins que la solution miracle est entre ses mains ou entre les nôtres. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Jean-François Girardet (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le MCG soutiendra cette motion, parce qu'elle invite le Conseil d'Etat à faire le point sur une situation dont tout le monde s'accorde à dire qu'elle est problématique. Elle est problématique essentiellement pour le cycle d'orientation. M. le rapporteur de minorité Baud vient de le préciser: à l'école primaire les élèves n'étudient pas - c'est un terme particulier au postobligatoire. Etudier pour être à l'école... Est-ce qu'un enfant d'école primaire qui participe à une journée sportive dans ses dernières semaines juste avant les vacances étudie ? Non, il n'étudie pas. Il se perfectionne en sport mais il n'étudie pas. Ce n'est pas ainsi que l'on conçoit le verbe «étudier». Est-ce que lire ou regarder un film - comme le disait M. Florey tout à l'heure, est étudier ? Non, ce n'est pas étudier. La motion n'a donc pas de sens pour l'école primaire, parce que ce terme d'étudier ne correspond pas à une réalité matérielle, physique, expérimentée dans la dernière semaine d'école ou les quinze derniers jours. Par exemple, durant une course d'école, est-ce que l'on étudie ? Non, on n'étudie pas. Et les parents, lorsqu'un enfant revient de sa course d'école, ne lui demandent pas ce qu'il a étudié ce jour-là. Mais les enfants ont été encadrés, surveillés, invités par l'enseignant à se perfectionner, à vivre quelque chose qui renforce aussi ses connaissances. Pour un enseignant primaire, organiser une grillade au bord de l'Allondon, est-ce étudier ? Non, ce n'est pas étudier, mais les enfants apprennent énormément de choses au bord de l'Allondon en faisant une grillade. Eh bien, des parents pensent que ces activités c'est s'amuser, ne rien foutre, perdre son temps... Eh bien non ! J'estime que, pour l'école primaire, c'est aussi se perfectionner et progresser dans ses connaissances.
On pourrait changer l'invite et mettre «restent encadrés», mais dans ce cas cette motion s'adresserait aux enseignants et M. Romain a bien veillé à ce qu'elle s'adresse aux élèves et que ce soient les élèves qui étudient... Est-ce qu'un étudiant qui travaille à la maison étudie ? Ou doit-il être à l'université pour le faire ? Non, ce n'est pas nécessaire... (Applaudissements.) Il a besoin d'être encadré, et l'élève, à l'école obligatoire, doit être encadré.
Le problème subsiste pour le cycle d'orientation, et j'estime que l'on doit renoncer à libérer les élèves durant les quinze jours qui précèdent la date officielle de la fin de l'année scolaire. Demandez aux collégiens...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Jean-François Girardet. Merci, Monsieur le président. ...du collège Rousseau...
M. Roger Deneys (S). A la lecture de cette motion, on peut effectivement constater qu'elle répond à une problématique réelle de savoir comment la fin de l'année scolaire se déroule tant à l'école primaire qu'au cycle. Mais, une fois de plus, avec les motions de M. Romain, on a un peu l'impression qu'il y a un amalgame entre les méthodes éducatives, les règlements de comptes, peut-être sa façon de voir l'éducation à Genève et les problèmes avérés. Mesdames et Messieurs les députés, d'une part, nous soutiendrons l'amendement déposé par le MCG et, d'autre part, sur la question de la sémantique, est-ce que le verbe «travailler» jusqu'au terme de l'année scolaire est-il réellement pertinent ? Je pourrais aller faire casser des cailloux dans la cour de l'école ou détruire quelques véhicules mal garés dans le quartier, je les ferais travailler... Le verbe «étudier» serait donc préférable. Mais là encore qu'est-ce que l'on étudie ? Comment on l'étudie...
Le président. Il vous reste quinze secondes.
M. Roger Deneys. Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, la formulation reste quand même problématique. Il n'empêche que la question de l'information tant aux parents qu'aux élèves ainsi qu'aux enseignants...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Roger Deneys. ...doit être améliorée.
M. Guy Mettan (PDC). Une fois n'est pas coutume, je suis assez d'accord avec les propos de M. Girardet sur cette motion. Je suis aussi étonné par certaines déclarations qui semblent considérer que cette motion serait une déclaration de guerre à Mme Torracinta, au DIP, aux enseignants, etc. Je tiens à le dire: ce n'est absolument pas le cas. Ce n'est pas une motion pour faire plaisir à M. Jean Romain. Ce n'est pas une motion de défiance à l'égard du DIP. Ce n'est pas une motion de défiance à l'égard des enseignants ni de Mme Torracinta.
Cette motion part simplement d'un constat qui donne l'impression, partagée par un grand nombre de personnes à Genève, qu'il y a une espèce de flottement à partir des 3 ou 4 juin au niveau des écoles et de l'occupation des enfants des écoles primaires et secondaires. C'est tout ! Alors il est vrai que Mme Torracinta nous a déjà partiellement expliqué les raisons des occupations données aux élèves pendant la fin de la période scolaire. Mais nous estimons qu'il est tout à fait raisonnable de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, ne serait-ce que pour permettre à la présidente du DIP de nous faire une réponse circonstanciée. Nous sommes parfaitement d'accord qu'il n'est pas obligatoire d'occuper les élèves avec des cours jusqu'au 30 juin. Il peut y avoir d'autres occupations, sportives par exemple, ou des activités plus ludiques. Cela fait aussi partie de l'enseignement, comme cela a été rappelé. Mais, dans ce cas, que cela nous soit précisé. Et je crois que cette motion, qui a effectivement un ton non pas vindicatif mais un peu directif, se prête à l'examen de cette problématique. Je vous engage donc à la renvoyer au Conseil d'Etat et à suivre le rapport de majorité, comme M. Saudan vous l'a dit.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Florey, à qui il reste deux minutes.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Ce qui est dommage avec l'amendement proposé, c'est qu'il ne vise qu'à réduire le champ de la motion. Finalement - vous transmettrez, Monsieur le président - M. Girardet l'a dit, cette motion vise essentiellement le cycle d'orientation. Oui, pour l'essentiel... Mais essentiellement ne veut pas dire uniquement. Et c'est précisément là que cette motion a un double intérêt. Elle vise justement non seulement le cycle d'orientation, mais elle vise aussi à ne pas reproduire à l'école primaire ce qui se passe au cycle et qui commence déjà à arriver à l'école primaire. Et c'est précisément là qu'elle a donc une certaine importance. Sur un autre plan, je suis désolé, mais je trouve que la journée sportive n'est pas une journée de récréation. Elle fait partie de l'éducation. L'éducation physique est une matière, et que les cours se déroulent en salle de gym durant trois quarts d'heure ou toute une journée dans un stade, pour moi, c'est de l'éducation... Finalement, notre groupe refusera l'amendement et nous vous recommandons d'en faire de même. Et nous renverrons la motion au Conseil d'Etat. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Romain, à qui il reste une minute et trente-quatre secondes.
M. Jean Romain (PLR). Merci, Monsieur le président. Je parlerai de l'amendement. Evidemment, le PLR va le refuser. Je comprends que les profs du primaire disent qu'il n'y a pas de problème chez eux. «Allez voir à côté, chez nous tout va bien !» Je crois que c'est un peu plus compliqué que cela. On a évidemment eu droit, dans la bouche de M. Deneys autant que dans celle de M. Girardet, à un cours de sémantique entre «travailler» et «étudier». J'ai pris des notes, je me relirai ce soir, parce que je n'ai pas tout compris. Il se trouve que l'on est en train de peser des ailes de mouche dans des balances de toile d'araignée. Ce que l'on doit faire au fond, c'est donner un signal clair au département, parce qu'à Genève on étudie ou travaille... Moi je veux bien qu'au bord de l'Allondon ce soit du travail. Je veux bien ! Je ne suis pas en train de discuter de cela. Quand vous comparez l'école primaire, Monsieur Girardet, à l'université, on peut toujours se demander comment cette comparaison fonctionne, mais enfin, ce sont vos propos ! J'ai eu un peu de peine, dans la confusion qui était la vôtre, à comprendre quelle était la direction, à part évidemment soutenir l'amendement. Moi ce que je constate, c'est que problème il y a, c'est que tout le monde reconnaît le problème, à part évidemment les profs du primaire qui...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Jean Romain. C'est largement suffisant et j'en termine là-dessus. Je crois que le bon sens, et M. Mettan comme M. Buschbeck ont parlé de ce bon sens, veut que l'on transmette tout simplement cette motion au département. Il a commencé à prendre le taureau par les cornes. Il a commencé à prendre des mesures. Nous verrons si elles sont suffisantes ou si elles ne le sont pas. Mais il y a en tout cas une chose, chers collègues, qui n'est pas suffisante, c'est de dire que chez nous tout va bien, passez votre chemin, il n'y a rien à voir...
Une voix. Bravo !
M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de deuxième minorité. C'est effectivement facile de dire que tout va mal. Ça ne mange pas de pain. Or nous ne disons pas que tout va bien, puisque j'ai relevé des problématiques que cette motion mettait en évidence. Mais, malheureusement, M. Romain ne m'a pas entendu. En revanche, j'ai bien écouté M. Mettan qui faisait état du fait qu'en fin d'année les élèves, et c'était tout à normal, pouvaient avoir d'autres occupations. Mesdames et Messieurs les députés, je vous engage à relire l'invite de cette motion qui demande à prendre des mesures urgentes pour que les élèves de l'école obligatoire travaillent - «travaillent», ce n'est pas marqué «étudient» - jusqu'au terme des années scolaires. Pour ma part, je prétends, Mesdames et Messieurs les députés, que les élèves de l'école primaire travaillent jusqu'au dernier jour d'école qui sera cette année, puisqu'il y a 39 semaines d'école, le 1er juillet. Durant les travaux de la commission, il y a d'ailleurs eu un commissaire qui n'est pas enseignant mais qui, de par son métier, est appelé à passer dans toutes les écoles primaires qui en a témoigné. Je cite M. le député Gander qui est d'ailleurs l'auteur de l'amendement, et on le comprend. Vous n'avez peut-être pas voulu écouter...
Mesdames et Messieurs les députés, j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire: la meilleure manière de vérifier ce que je dis - plutôt que de dire que c'est faux et que ce sont des mensonges, ce qui est un peu facile - c'est d'aller avec votre carte de député au département de l'instruction publique qui est tout prêt à vous accorder le droit prévu par la LIP - je crois que c'est à l'article 7 - de visiter les établissements scolaires. Alors allez-y ! Faites-vous votre opinion, et vous verrez bien ! Je pense que c'est beaucoup plus simple ainsi. Pour Ensemble à Gauche, on peut soutenir la demande d'amendement, parce que - c'est ce que j'entends - tout le monde s'accorde à dire, même si on tergiverse sur les termes «essentiellement» et «pas uniquement», que cette problématique relève essentiellement du secondaire I. Je vous remercie.
Le président. Merci. Comme Mme la rapporteure de première minorité ne prend pas la parole, je la cède à M. Patrick Saudan.
M. Patrick Saudan (PLR), rapporteur de majorité. Quel temps me reste-t-il, Monsieur le président ?
Le président. Il vous reste quarante-huit secondes.
M. Patrick Saudan. Je vais donc être très bref. Je pense que la problématique la plus importante qui a été mise en évidence durant les travaux de la commission c'est que dans les autres cantons romands on consacrait environ une semaine au temps administratif pour les évaluations, les annotations et les jugements sur la carrière future des écoliers et qu'à Genève cette période prend jusqu'à trois semaines, ce qui explique probablement - probablement, ce n'est pas la seule explication - que durant le mois de juin on a l'impression d'un certain flottement tant au niveau du cycle d'orientation qu'au niveau de l'école primaire. Je pense que c'est un enseignement qu'on doit tirer...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Patrick Saudan. On évalue plus, on note plus et on a plus de conseils de classe à Genève, et je pense qu'il faut réduire cette charge administrative. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la conseillère d'Etat Anne Emery-Torracinta.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Je profite de l'occasion qui m'est donnée aussi pour vous féliciter pour votre élection au perchoir. Mesdames et Messieurs les députés, d'abord il faut que vous sachiez que le département prend très au sérieux cette question et qu'il y travaille depuis un certain temps. A la suite de la question urgente qu'avait posée M. Jean Romain il y a déjà un petit moment, j'avais demandé à l'interne du département qu'un groupe se mette en place avec à la fois la direction générale notamment du cycle, parce que c'était surtout le cycle qui était visé, et les enseignants. J'ai été très surprise quand le rapport m'a été rendu, et je vous en avais parlé à la toute fin de l'année scolaire. D'ailleurs, le rapport définitif était arrivé après la fin de l'année scolaire. C'était donc beaucoup trop tard pour pouvoir prendre des décisions qui pouvaient impacter l'année scolaire qui est en cours aujourd'hui. C'est pour cela que je vous avais dit, au moment où la motion est arrivée, que je n'avais aucun souci à ce que cette motion soit renvoyée en commission, parce que mon objectif était aussi de pouvoir vous expliquer les différentes problématiques et vous dire que, dans ce domaine, rien n'est simple. La pire des choses serait de penser qu'il suffit d'une motion ou qu'il suffit d'un «y a qu'à» pour régler des questions qui sont beaucoup plus complexes, et les exemples donnés par M. Girardet sont assez probants à cet effet.
Deuxièmement, il y a une question, je vous l'ai dit, de calendrier; que cette motion soit acceptée ou non aujourd'hui, in fine cela ne changera rien. Nous avançons sur le sujet, mais nous ne pouvons rien changer, je vous l'ai dit, pour la fin de cette année scolaire là, parce qu'il est important notamment de prévenir les enseignants, les parents en début d'année scolaire pour qu'ils sachent comment les choses vont s'organiser. Vous aurez une réponse écrite probablement d'ici la fin de l'année ou au pire en septembre, mais toujours est-il que c'est au début de l'année prochaine que nous annoncerons les mesures qui seront prises pour la fin de l'année scolaire 2016-1017.
Maintenant quelques éléments par rapport à ce que vous avez soulevé. Le problème principal concerne quand même à mon sens le cycle d'orientation. Pourquoi ? Parce qu'au cycle la problématique est différente du primaire. Au primaire, les élèves sont gardés jusqu'au dernier jour. Donc les parents ne se plaignent aucunement de libérations, ce qui est le cas au cycle. Ils se plaignent éventuellement, dans certains cas peut-être, d'avoir le sentiment que les élèves font des activités moins d'apprentissage. Cela dit, vous ne pourrez jamais - jamais - imaginer que jusqu'au dernier jour on arrive à enseigner au sens strict du terme, puisqu'il y a des évaluations à faire, à corriger, et que dans tous les cantons romands la dernière semaine est consacrée à des activités plus ludiques ou différentes, des activités sportives, des courses d'école, etc. On ne fait plus forcément des fiches de maths, de français, etc. jusqu'au dernier jour de l'année. Donc le problème au primaire est un peu différent. Par contre, au cycle, on a effectivement un vrai souci, puisqu'on est encore dans l'école obligatoire. On a de fait des élèves qui sont libérés, et qui étaient aussi libérés en cours d'année scolaire avec le passage des fameuses EVACOM.
La décision qui a été prise - et là j'aimerais que M. Baud en soit conscient - ce n'est pas une décision qui tout à coup est tombée du ciel de la part du département, c'est une décision qui fait suite à des discussions qui étaient récurrentes depuis un moment sur le poids de ces fameuses évaluations, un poids qui est beaucoup trop important et qui est dénoncé aussi par les enseignants eux-mêmes. La décision qui a été prise c'est de les garder uniquement en 11e année, à l'exception, je ne sais pas pour combien d'années, des sciences que l'on maintient en 10e année en lien avec le plan que le département a et qui vise à développer tout ce qui est sciences. Vous savez que l'on a un problème: les universités regrettent parfois le manque de bagage scientifique des élèves. C'est important pour nous d'avoir quand même un oeil là-dessus. C'est pourquoi nous la maintenons en 10e. A cette exception près, les EVACOM auront lieu en 11e année, ce qui veut dire que nous les aurons diminuées en gros de moitié. Et ce qui veut dire, en tout cas déjà par rapport à ce qui se passait dans les faits, plus de libération en cours d'année en 9e ou en 10e. Cela signifie que nos élèves étudieront plus au lieu d'être libérés.
Maintenant, concernant les épreuves elles-mêmes, ces EVACOM, elles m'amènent à une autre réflexion sur le sens qu'on doit leur donner. Je ne suis pas sûre que l'on puisse vous répondre en deux coups de cuillère à pot. Est-ce que ces évaluations certifient au fond la fin d'un cycle, le travail accompli à la fin d'un cycle ? Alors elles doivent avoir lieu, dans ce cadre, relativement tard à la fin de l'année scolaire de 11e année. Là où j'aimerais vous faire part d'une certaine réflexion, d'une certaine interrogation que j'ai, c'est pourquoi - bon Dieu pourquoi ! - l'orientation de nos élèves devrait à tout prix, à la fin du cycle d'orientation, avoir lieu après la fin des cours et uniquement par le biais de conseils de classe et de conseils d'école. La grande erreur de Genève c'est de croire qu'il faut attendre l'ultime fin pour enfin, éventuellement, sauver quelques élèves qui, par malheur, pourraient peut-être aller en apprentissage dual. Je ne fais que traduire - M. Barrillier me regarde... - je ne fais que traduire ce que pensent certains. Alors que l'orientation des élèves devrait se construire bien avant. Et si on se compare aux autres cantons, la plupart des élèves se sont inscrits dans différentes filières déjà au printemps. Et les choses sont réglées. On n'a pas tout ce cirque lié aux épreuves de fin d'année, aux conseils de classe, aux conseils d'école, etc. Et si les autres cantons ont bien des conseils de classe en fin d'année, ils n'ont en tout cas pas cette invention genevoise qu'est le conseil d'école où, après les conseils de classe, les enseignants de toutes les classes se rencontrent, et on a encore un conseil de toute l'école qui avec tous les enseignants de l'école va préaviser pour la direction qui, in fine, va trancher pour savoir ce qui va se passer pour les élèves.
Ce que j'aurais envie de vous dire - certains d'entre vous sont certainement aussi des parents - c'est qu'on a peut-être un travail à faire à Genève sur le sens qu'on donne à l'orientation, sur le moment où cette orientation doit se passer, et on ne doit en tout cas pas imaginer que ce n'est qu'au mois de juin à la fin de l'année qu'on va la faire. C'est une erreur à mon sens.
Concernant le primaire, j'aimerais vous dire que nous travaillons sur l'évaluation, Monsieur Baud, à la demande d'ailleurs des syndicats. J'ai «L'Educateur» sous les yeux et on y fait allusion aux demandes, depuis un moment, que font les associations professionnelles pour qu'on réfléchisse à l'évaluation, parce que là aussi on a beaucoup trop d'épreuves communes, beaucoup trop d'épreuves qui sont lourdes, qui ne servent pas forcément à grand-chose si ce n'est à inquiéter les parents et les élèves inutilement.
Mesdames et Messieurs les députés, en conclusion, je vous dis que nous travaillons sur ces problématiques, qu'il n'y a pas de réponse simple, que peut-être ces réponses nous allons devoir les construire aussi sur plusieurs années, mais que dans un premier temps déjà pour l'année 2016-2017, donc la prochaine rentrée, vous aurez des réponses concrètes qui seront données par le département. En ce qui concerne l'amendement du MCG, comme je vous l'ai dit, à mon sens le problème se situe essentiellement au cycle d'orientation pour les libérations, moins au primaire. J'ai aussi envie de vous dire que la responsabilité de savoir si on travaille et ce que l'on entend par «travaille» jusqu'à la fin de l'année incombe aux directions d'établissement. Vous pensez bien que ce n'est ni une motion, ni un parlement, ni une conseillère d'Etat, ni même l'administration du secrétariat général du DIP qui vont pouvoir être derrière les milliers d'enseignants pour vérifier si, effectivement, chaque activité est suffisamment pédagogique. Là j'ai envie de dire qu'il faut faire confiance aux directeurs d'établissement et, pour le reste, vous pouvez tout à fait aller dans le sens de l'amendement du MCG.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, je vous soumets tout d'abord l'amendement déposé par M. le député Florian Gander que vous avez reçu et que je vous lis. Cet amendement change ainsi l'invite: «invite le Conseil d'Etat à prendre les mesures pour que les élèves de l'école secondaire I travaillent jusqu'au terme de l'année scolaire».
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 44 oui.
Le président. Je soumets maintenant la proposition de motion à vos suffrages.
Mise aux voix, la motion 2282 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 70 oui contre 26 non et 1 abstention.