Séance du
vendredi 18 septembre 2015 à
17h05
1re
législature -
2e
année -
8e
session -
52e
séance
PL 11575-A
Premier débat
Le président. Nous traitons le PL 11575-A en catégorie II, trente minutes. Monsieur le conseiller d'Etat, vous souhaitez intervenir à ce stade ? (Remarque.) Très bien, je vous cède la parole.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. J'aimerais intervenir très brièvement, Monsieur le président, afin de clarifier et de simplifier les débats. Le Conseil d'Etat, ainsi qu'il le proposait dans son projet de loi initial, visait le transfert du différentiel entre les 66% et les 87% de sa participation aux Ports Francs au patrimoine financier, ceci afin de pouvoir l'aliéner le moment venu. Si le Conseil d'Etat a perdu en commission, il pense pouvoir, entre guillemets, «gagner» maintenant dans cette enceinte. Mais il pense surtout que c'est un autre débat que celui, fondamental, traité ici sur le transfert d'actifs. C'est la raison pour laquelle, à la faveur des réflexions que nous avons menées, nous nous réservons la possibilité de revenir sur cette question avec un projet de loi ultérieur, et je retire formellement l'amendement déposé hier, Monsieur le président, pour en revenir au projet sorti de commission et à propos duquel je m'exprimerai sur le fond à l'issue de ce débat.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Il est pris acte du retrait de l'amendement. Je passe la parole au rapporteur, M. Cyril Aellen.
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Quelques constats, d'abord: les Ports Francs sont une institution publique de qualité, favorable à l'économie locale, qui doit donc faire l'objet d'une attention toute particulière de notre parlement. Pour l'essentiel, les Ports Francs sont locataires des immeubles qu'ils occupent, le propriétaire étant l'Etat. Un rapport de l'ICF fait état d'observations parmi lesquelles figure la critique des investissements effectués par le locataire sur les biens du propriétaire. Enfin, des immeubles sont en mauvais état et nécessitent donc des travaux et des investissements financiers.
Par voie de conséquence, quatre possibilités s'ouvrent à nous. Premièrement, l'Etat investit massivement au détriment d'autres investissements, scolaires ou de transport, par exemple. Deuxième option: l'Etat vend les immeubles dont il est propriétaire à son locataire mais perd alors la maîtrise du foncier, les Ports Francs s'endettent et ne peuvent plus opérer les investissements nécessaires. Troisièmement, on ne fait rien, seulement l'un des atouts économiques du canton s'affaiblit lentement mais sûrement.
La dernière possibilité, celle qui a été retenue tant par le Conseil d'Etat que par la commission, consiste en un transfert d'actifs via un droit de superficie: l'Etat reste propriétaire, et ce sont les Ports Francs qui peuvent investir dans les bâtiments et ont la capacité d'emprunter. L'Etat pourra investir ailleurs - dans les transports, les bâtiments scolaires ou ce qu'il estimera nécessaire dans l'intérêt public de notre canton - tandis qu'une rente de superficie lui sera versée, qui permettra d'améliorer, certes modestement, mais d'améliorer tout de même, sa situation financière. Mesdames et Messieurs, si vous êtes des défenseurs de l'économie genevoise et d'une saine gestion des deniers publics, si vous êtes partisans d'une solution pragmatique et équilibrée, alors il faut soutenir ce projet de loi !
Mme Magali Orsini (EAG). Evidemment, Ensemble à Gauche s'oppose vigoureusement à ce transfert. Il s'agit d'un montant de 92 millions qui n'améliorera d'aucune manière la trésorerie de l'Etat puisque les Ports Francs n'ont pas le financement nécessaire pour le payer. Les actionnaires minoritaires profiteraient d'un avantage inouï venant d'un Etat créancier. Si la SA a, comme on nous le dit, la capacité de faire les travaux d'entretien et les investissements nécessaires, elle doit pouvoir accepter de payer le loyer correspondant. Il nous est dit qu'elle fera désormais partie du périmètre de consolidation; les amortissements continueraient donc d'être à la charge du grand Etat, ce qui fait que l'argument des amortissements ne tient pas. La durée du droit de superficie est beaucoup trop longue dans un quartier si convoité, à une époque où l'on s'efforce au contraire de liquider des droits de superficie pour pouvoir construire des logements. Nous ne comprenons pas pourquoi les Ports Francs ne déménageraient pas dans une zone industrielle en laissant l'Etat bâtir en hauteur.
En ce qui concerne le transfert de 1500 actions du patrimoine administratif au patrimoine financier, nous prenons acte du fait que le Conseil d'Etat retire son amendement. Toutefois, s'il a l'intention de le redéposer par la suite, nous confirmons qu'il s'agirait de perpétuer le privilège accordé à la minorité actuelle, de l'étendre à tous les nouveaux actionnaires, qui bénéficieraient de la propriété des bâtiments dans des conditions totalement inacceptables. La droite fait remarquer, à juste titre, que le problème est politique et concerne l'idée qu'on se fait du rôle de l'Etat et l'autonomie qu'on entend donner à des entités qui, au départ, ont été financées par les contribuables, et souligne que lorsqu'une institution a 10 millions de fonds propres, elle ne peut pas demander 92 millions à la BCGE. C'est pourtant ce que la SA demande à l'Etat de Genève, à son seul bénéfice.
La présidente des Ports Francs nous a expliqué que les anciennes normes comptables permettaient à ceux-ci, selon le contrat de bail, d'avoir les activités du propriétaire. Elle s'est précipitée sur l'argument des nouvelles normes comptables pour demander ce transfert alors qu'il serait tellement plus simple de revenir à des rapports normaux entre propriétaire et locataire. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. le député François Baertschi... qui n'est pas là. Je la donne donc à M. Eric Stauffer... qui n'est pas là non plus. Monsieur Lussi, vous êtes là, vous avez la parole.
M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'imagine que vous avez pris le temps de lire ce rapport de M. Cyril Aellen, très bien rédigé, vous avez donc pu mesurer la complexité du sujet et observer les tergiversations de bien des commissaires, d'autant plus que ce projet, on peut le dire, a été pollué par une affaire liée aux Ports Francs, dont je ne citerai pas le nom mais qui a défrayé la chronique. L'Union démocratique du centre elle-même, à un moment donné, s'est montrée très réticente à ce projet, mais il est vrai que beaucoup de choses ont été faites et que les bonnes questions ont été posées, notamment celle-ci: faut-il réellement laisser les Ports Francs à cet endroit ? Nous avons eu des réponses, qui figurent dans le rapport, signifiant que les Ports Francs ne sont pas si facilement déplaçables que cela, nous avons compris que toute la zone des Ports Francs ne se trouvait pas dans le projet PAV et qu'il n'était donc pas possible qu'ils le rejoignent.
En définitive, ce qui a été le plus difficile à comprendre - mon Dieu, il faut de temps en temps faire preuve d'humilité - était le mécanisme réel du transfert d'actifs, à savoir qu'il est en fait doublé et que c'est nous qui prêtons l'argent. Pour l'Union démocratique du centre, il s'agit d'une transaction gagnant-gagnant - de nouveau, c'est inscrit dans le rapport, et tout le monde le dit - et même si on fait ce prêt, il sera rémunéré à hauteur de 2,5% - c'est le pourcentage actuel, qui sera peut-être modifiable voire révisable. Aujourd'hui, quand on a des montants pareils, c'est nous qui devons payer de l'argent ! Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut sortir un peu des sentiers battus et pour une fois bien analyser les propos des experts venus nous parler - une fois de plus, ça figure dans le rapport. Il ne s'agit pas de faire confiance au Conseil d'Etat mais de bien surveiller ça. En tout cas, en ce qui concerne l'Union démocratique du centre, nous accepterons l'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts soutiendront ce projet de loi puisque le Conseil d'Etat, dans sa grande sagesse, a décidé de retirer son amendement, lequel nous posait en effet problème. Nous le soutiendrons par pragmatisme, tout simplement, parce que, comme cela vous a été expliqué, ce transfert va d'une part occasionner une certaine rentrée d'argent pour l'Etat, d'autre part permettre aux Ports Francs de préserver leurs ressources de manière qu'ils puissent investir et rénover eux-mêmes leurs bâtiments, et enfin, ce qui n'est pas le moindre des avantages, nous épargner cette rénovation. En effet, au vu de la situation financière actuelle de l'Etat, nous imaginons qu'il serait extrêmement compliqué de devoir encore ajouter à la longue liste des investissements de rénovation que l'Etat doit mener celle des Ports Francs. Je vous rappelle que de nombreuses écoles sont en attente urgente de rénovation, et nous estimons que c'est là une manière pour nous de nous décharger d'un problème et d'avoir une rénovation de moins sur notre liste. Comme je vous l'ai dit, nous soutiendrons ce projet de loi par pragmatisme, et je vous invite à en faire de même.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Je serai très brève puisque l'excellent rapport de M. Cyril Aellen permet de comprendre, même si elle est complexe, toute la procédure qui nous a été proposée. Les travaux ont été vraiment approfondis en commission, Monsieur le président, et non, il n'y a pas d'autre surface plus intéressante, moins chère et plus pertinente à disposition dans le canton de Genève, voilà tout ! Nous avons posé les questions, auditionné les personnes compétentes et obtenu les réponses.
Maintenant, il y a peut-être des enjeux politiques, mais qui n'ont rien à voir avec l'intérêt de Genève d'avoir des Ports Francs qui, en assumant leurs responsabilités, sont très précieux pour l'économie genevoise. Dans le cadre de ce projet de loi, l'Etat est plutôt gagnant parce que nous sommes dans une situation qui nous permet de tirer des avantages tout en gardant le contrôle. Voilà où nous sommes gagnants, Monsieur le président: nous avons les sous et nous avons le contrôle ! Je vous remercie d'accepter ce projet de loi.
Le président. Merci, Madame la députée. Je laisse la parole à M. Roger Deneys... qui n'est pas là. Elle revient donc à M. le député Eric Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, lorsque la commission des finances a auditionné pour la première fois la présidente du conseil d'administration des Ports Francs et Entrepôts de Genève SA, qui n'est autre qu'une ancienne membre du parti socialiste, le MCG a eu l'impression d'entendre la duchesse de Windsor et sa cour qui, dans un moment de faiblesse, venaient discuter avec les gueux de la commission des finances. Evidemment, on ne traite pas ainsi les députés de la commission des finances, tous partis confondus ! Et lorsque, modestement, je me suis offusqué à cause des actions au porteur et que j'ai demandé à Mme Sayegh, présidente du conseil d'administration, s'il y avait des actionnaires qui étaient locataires des Ports Francs et qui, par hasard, siégeaient au conseil d'administration, voici la réponse qui nous a été donnée: «c'est le secret des affaires» - inutile de vous dire ma réaction, vous me connaissez, depuis dix ans ! Or, manque de bol pour eux, la semaine suivante, les Ports Francs ont défrayé la chronique avec l'affaire Bouvier à Monaco, et nous avons découvert par la presse - merci au quatrième pouvoir ! - qu'un actionnaire, un administrateur et un locataire des Ports Francs étaient impliqués dans des affaires internationales d'oeuvres d'art. Au MCG, nous avons d'abord décidé de refuser ce projet de loi; mais nous devons saluer là - nous critiquons souvent, mais quand les choses sont bien faites, nous le relevons aussi - l'action du conseiller d'Etat Pierre Maudet, qui a saisi l'importance de la chose, a licencié tout ce beau monde et placé M. David Hiler, ancien conseiller d'Etat, à la tête des Ports Francs. Du coup, le MCG va accepter le projet de loi proposé par le Conseil d'Etat... (Exclamations.) Eh oui, quand les choses sont bien faites, il faut le reconnaître et avoir l'humilité de le dire. Nous le disons: elles ont été bien faites ! Cela dit, nous surveillerons les Ports Francs à l'avenir au travers de la commission des finances. J'en ai terminé, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député, et cède la parole à M. François Baertschi pour cinquante secondes.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Je vais tenter d'être rapide. Nous avons déposé un amendement et nous allons voir si nous le maintenons parce qu'il s'agit d'une question de confiance que nous devons témoigner envers la nouvelle direction. Il est inacceptable de verser une somme sur nonante ans sans avoir aucune garantie, et c'est pour ça que nous avons proposé à la place une durée de soixante ans. Mais notre objectif n'est pas de mettre des bâtons dans les roues à la nouvelle direction, qui est en train de faire le ménage grâce à M. David Hiler. Au cas où nous obtiendrions un élément que nous estimerions vraiment fort et convaincant, nous retirerons cet amendement sur ce point. Il faut juste savoir que nous avons eu affaire à une bande de radins qui ne voulaient rien payer, qui voulaient se servir dans la dette...
Le président. Il vous faut conclure.
M. François Baertschi. ...avec une présidente socialiste à la direction...
Le président. C'est terminé...
M. François Baertschi. ...et toute une partie...
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député.
M. François Baertschi. ...de l'intelligentsia genevoise... (Le micro de l'orateur est coupé.)
Le président. Monsieur Roger Deneys, vous avez la parole.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes accepteront le projet de loi tel que sorti des travaux de commission. Nous remercions évidemment le conseiller d'Etat d'avoir, avec la sagesse qui peut le caractériser en certaines circonstances, retiré son amendement et donc permis ce transfert d'actifs avec les Ports Francs. La première leçon à tirer de ce projet de loi, c'est le constat que l'Etat de Genève n'entretient malheureusement pas correctement son patrimoine. Dans ce projet de loi, ce problème est particulièrement bien illustré, puisqu'on signifie en somme: il serait mieux de transférer la propriété des bâtiments en question aux Ports Francs pour qu'ils puissent les entretenir; comme ça, on ne pourra pas dire qu'on n'a pas les moyens. Aujourd'hui, indépendamment de ce projet de loi, la question de la capacité de l'Etat à entretenir son patrimoine est un véritable problème.
On peut évidemment se demander, s'agissant d'une entité composée d'actionnaires - l'Etat et des privés - et puisque c'est une société anonyme, pourquoi on ne ferait pas en sorte que les Ports Francs deviennent propriétaires de leurs immeubles. C'est déjà le cas pour certains immeubles, et on pourrait imaginer qu'ils soient propriétaires de l'ensemble de leur patrimoine, l'entretiennent et le développent selon leurs besoins. Or une discussion différente est venue perturber les travaux de la commission, soit celle des affaires qui se déroulent aux Ports Francs, parfois considérées comme amorales ou pas correctes d'un point de vue économique parce qu'elles pourraient échapper à une certaine fiscalisation des transactions; je crois que ce n'est pas le débat aujourd'hui. Si on veut s'attaquer au problème des Ports Francs, il faut agir avec un autre instrument que ce projet de loi. Ici, le transfert d'actifs aux Ports Francs semble tout à fait raisonnable, qui leur permettra d'avoir des bâtiments en état et fonctionnels afin d'exercer leurs activités correctement, sans les aléas que peut comporter le traitement budgétaire des investissements de l'Etat devant ce Grand Conseil.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Je voudrais juste intervenir suite aux propos totalement déplacés de M. Stauffer. Je m'inscris en faux contre ce qu'il a dit s'agissant de la présidente des Ports Francs que nous avons reçue, qui est une remarquable ancienne présidente de ce Grand Conseil, Monsieur le président. Mme Sayegh a répondu à toutes les questions, mais la manière grossière dont elle a été traitée par le cuistre et très arrogant M. Stauffer dans ce contexte a dû la surprendre. En effet, elle a siégé ici avant que le MCG n'existe et elle a pu mesurer la différence. La seule chose qu'il y avait à faire de la part du MCG, c'était de lui présenter des excuses ! Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Eric Leyvraz (UDC). J'aimerais juste répondre à l'une de mes préopinantes, qui trouvait que les actionnaires minoritaires avaient des avantages extraordinaires: ce n'est pas le cas et quelles que soient les conditions, l'Etat reste majoritaire et garde la maîtrise. Je reviens maintenant sur l'amendement proposé concernant ce texte. On ne peut pas accepter la durée de soixante ans, qui remet en cause tout le calcul du transfert d'actifs; il faudrait reprendre tout le projet de loi, et ce n'est pas ce que nous voulons. Pour une fois que l'Etat trouve une solution, fait des économies sur le long terme et, par-dessus le marché, gagne de l'argent ! Nous demandons des économies à l'Etat et il va dans ce sens-là, donc on ne peut qu'accepter ce texte. Il est vrai que nonante ou nonante-deux ans, ça peut paraître long, ce n'est pas tellement dans nos habitudes. Mais il y a beaucoup d'endroits où on trouve des baux emphytéotiques de nonante-neuf ans et où ça se passe très bien, je crois donc qu'on peut sans autre accepter ce projet de loi, sans l'amendement.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. La parole va à Mme la députée Salika Wenger, à qui il reste quarante-cinq secondes.
Mme Salika Wenger (EAG). Merci, Monsieur le président. Abus fiscaux, contournement des embargos, trafic d'oeuvres d'art et de valeurs... Même le Contrôle fédéral des finances estime qu'il n'y a pas assez de transparence au sein des Ports Francs. Pensez-vous réellement qu'en les privatisant quasi totalement, on va faire mieux en termes de contrôle que ce qui se passe en ce moment ? Cette institution, qu'on le veuille ou non, est publique et doit le rester. C'est pourquoi nous ne voterons pas ce projet de loi !
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Baertschi, vous souhaitez vous exprimer ? Je vous passe la parole juste deux secondes. (Un instant s'écoule. Remarque.) Bon, je donne le micro à M. Roger Deneys pour cinquante-trois secondes.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Je tiens d'abord à préciser qu'il ne s'agit pas d'une privatisation mais d'un transfert d'actifs, donc de bâtiments, aux Ports Francs. Ce ne sont pas des actions qui seraient vendues au secteur privé, et c'est bien pour ça que nous sommes heureux que l'amendement du Conseil d'Etat ait été retiré car cela lève cette ambiguïté.
L'autre chose sur laquelle je voudrais insister, c'est le fait que la présidente, Mme Sayegh, n'a pas été licenciée, contrairement à ce qu'a affirmé un virulent député du MCG, elle est simplement parvenue à la fin de son mandat, et je pense qu'il faut le rappeler. Ce n'est pas parce qu'elle a répondu de façon sérieuse et sans se laisser impressionner par M. Stauffer qu'elle n'a pas fait correctement son travail, et je pense qu'il faut le relever: le travail a été parfaitement effectué par la précédente présidente des Ports Francs et Entrepôts de Genève SA.
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur. Quelques remarques à l'issue de ce premier débat: tout d'abord, je souhaite souligner les propos contradictoires d'Ensemble à Gauche qui, par la voix de Mme Orsini, a critiqué le fait que l'Etat investisse dans ce type d'activités et, via celle de Mme Wenger, s'est opposé à ce que les Ports Francs soient privatisés, selon les termes de cette dernière. En réalité, le contrôle sera accru puisque ce transfert d'actifs... (Remarque de Mme Salika Wenger.) Laissez-moi finir, Madame, je ne vous ai pas interrompue ! ...permettra aux Ports Francs de figurer dans le périmètre consolidé de l'Etat et donc de faire l'objet du contrôle de la commission des finances, ce qui n'est pas le cas actuellement. Voilà une information qui vient contredire vos propos.
Ensuite, je remercie M. Deneys pour ses propos constructifs malgré les attaques dont son parti a fait l'objet, mais je ne partage en revanche pas son analyse s'agissant de l'entretien. En effet, je pense que l'Etat a précisément bien fait son travail: il réalise que des travaux d'entretien sont à faire et prend des mesures positives dans ce but. Il faudra vraiment qu'on se demande plus souvent dans le cadre de ce parlement quelle est la capacité, quelle est la volonté et quelles sont les priorités de l'Etat à ce sujet. Voilà ce qu'il en est.
J'aimerais encore rappeler qu'on n'attendra pas soixante ans pour faire un premier bilan puisque le projet de loi prévoit qu'il en soit effectué un après une période de dix ans: c'est la première échéance inscrite dans le texte. Je confirme enfin que la commission a fait un grand travail, notamment à la demande de l'UDC, s'agissant de la localisation des Ports Francs, et que nous sommes unanimement parvenus à la conclusion que leur implantation actuelle était la seule possible.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, le député Aellen m'ôte les mots de la bouche s'agissant des quelques arguments que je voulais opposer à ce qui aurait pu apparaître comme des objections mais n'en constitue pas, de toute évidence, puisque, visiblement, une large majorité de cette assemblée s'apprête à voter ce projet de loi, ce qui ravit le Conseil d'Etat et ce qui me ravit au titre de responsable de l'économie. En effet, Mesdames et Messieurs, on en a peut-être peu parlé ces dernières années, mais les Ports Francs, de même que Palexpo ou l'aéroport, représentent l'un des joyaux de la couronne de notre dispositif économique, un élément essentiel qui, je le rappelle, existe depuis plus de cent vingt-cinq ans. Cette institution permet non seulement au marché de l'art - qui, il est vrai, s'est beaucoup développé ces derniers temps - de fonctionner, mais aussi à des commerçants et artisans, je pense notamment aux domaines de la joaillerie et de l'horlogerie. Genève est une plaque tournante de biens qui sont déclarés et pour lesquels il n'y a pas suffisamment, non pas de transparence - c'était le reproche du Contrôle fédéral des finances - mais en réalité, de contrôles. Ce projet, Mesdames et Messieurs, a également été porté par le département des finances, et c'est en réalité le coeur de ce que nous vous proposons ce soir, à savoir de contrevenir à trois risques, que nous avions peut-être oubliés. Je concède volontiers, Mesdames et Messieurs, que le passage à la commission des finances nous a fait du bien à tous, notamment grâce aux questions qui ont été posées.
Le premier risque qui est apparu - ainsi que M. Lussi l'a relevé, il y a eu une certaine pollution du débat en raison d'une autre affaire - est celui de réputation. Après le passage à la commission des finances, nous, le Conseil d'Etat, avons décidé de proposer de convertir, et nous le pouvons grâce aux statuts des Ports Francs, les actions au porteur en actions nominatives, à l'instar d'une démarche que nous faisons pour la Banque cantonale, qui est toutefois un peu plus lourde parce qu'elle passe par une disposition légale. Nous souhaitons en effet davantage de traçabilité, et l'on peut reconnaître à la commission des finances la vertu d'avoir amené le Conseil d'Etat à demander, par sa qualité d'actionnaire majoritaire, à 87%, la modification des statuts. Cela est réalisé depuis le mois de juin, c'est-à-dire depuis l'assemblée générale.
Le deuxième risque est celui de gestion, et nous répondons ici à une injonction du département des finances en satisfaisant aux normes comptables, à la consolidation nécessaire au bilan de l'Etat. Le fait que les Ports Francs disposent de leur outil de production est essentiel non seulement pour une bonne gestion mais également, le député Aellen l'a mentionné, pour pouvoir rétablir des priorités dans les dépenses de l'Etat en matière d'investissements, de bâtiments et d'entretien des infrastructures. Nous nous donnons ainsi davantage les moyens de construire ici une école, là une prison ou d'autres bâtiments par ailleurs éminemment importants pour notre collectivité.
Le troisième risque, celui que vous courez en soutenant l'amendement du MCG, est le risque financier, et il est bien réel, Mesdames et Messieurs. La précarité de l'ensemble a été démontrée en commission, et si nous avons envisagé une période de nonante ans, ce n'est pas pour des prunes. Aujourd'hui, sur la base des chiffres, avec l'outil de production que nous connaissons, avec les quelque 60 millions qu'ont investis les Ports Francs dans le nouveau bâtiment qu'ils ont inauguré l'année passée, nous en sommes à ces calculs-là. Mais, comme l'a dit le député Aellen et comme je le répète ici à l'auteur de l'amendement, je proposerai très rapidement, à savoir dans les mois qui viennent, une audition du nouveau président des Ports Francs par la commission des finances, et à l'horizon fixé dans le rapport, soit après une durée de dix ans, nous pourrons peut-être rééchelonner dans le temps la capacité de remboursement.
Un mot enfin pour dire combien le Conseil d'Etat est reconnaissant à la présidente sortante, laquelle est en effet partie au terme de son mandat lors d'une assemblée générale ordinaire, d'avoir durant dix ans tenu la barre d'un établissement qui a peu fait parler de lui, mais qui, ce sont les circonstances, fait aujourd'hui beaucoup jaser. Le Conseil d'Etat salue également l'arrivée de l'ancien ministre des finances de la république dans une phase où il s'agira de porter davantage d'attention aux risques évidents de réputation, de gestion, financiers et autres qui se dressent devant nous concernant, je le répète, un élément clef de notre dispositif économique. Nous nous réjouissons de pouvoir faire confiance à ce nouveau président et à son conseil d'administration. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, nous vous remercions de faire droit à l'excellent travail de la commission des finances et de donner bonne suite à la proposition qui vous est faite d'approuver ce projet de loi. Merci de votre attention.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Monsieur Baertschi, vous sollicitez la parole pour retirer votre amendement, c'est bien ça ?
M. François Baertschi (MCG). Oui, je retire l'amendement au vu des explications, merci.
Le président. Très bien, je vous remercie, Monsieur le député, et invite l'assemblée à se prononcer sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 11575 est adopté en premier débat par 84 oui contre 8 non et 1 abstention.
La loi 11575 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11575 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 81 oui contre 8 non et 4 abstentions.