Séance du
jeudi 29 janvier 2015 à
17h10
1re
législature -
2e
année -
1re
session -
7e
séance
PL 11065-A
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs, nous attaquons notre ordre du jour avec le PL 11065-A. Monsieur le rapporteur de majorité Christo Ivanov, vous avez la parole.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la commission fiscale s'est réunie à quatre reprises en 2013 pour examiner ce projet de loi, qui vise à créer un nouvel impôt - un de plus ! Il était lié à d'autres projets de lois - sur les bateaux à moteur, les véhicules polluants, etc. - destinés à faire entrer plus d'argent dans les caisses de l'Etat. Il y en avait quatre en tout, celui-ci est le quatrième. L'idée est d'imposer les piscines privées de plus de 40 m3, avec pour objectif de générer 10 à 20 millions de recettes fiscales supplémentaires. La majorité de la commission rejette ce nouvel impôt et vous demande de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les dépités... (Rires. Applaudissements.) Les députés, pardon ! Hormis l'aspect un peu tropical et exotique voire décalé de ce projet de loi sur la fiscalité des piscines, c'est en fait un sujet des plus sérieux - je dirais même plus: des plus intéressants ! Le PL 11065 vise à créer un impôt sur les piscines privées basé sur une taxation échelonnée par rapport au volume des piscines: on parle de tranches de 10 m3 en 10 m3. Le principe sous-jacent à ce projet de loi, excepté le fait qu'il s'inscrit dans une recherche de revenus supplémentaires pour l'Etat - ce qui est récurrent, et je crois qu'on ne peut pas nier ce besoin - est que plus les piscines sont grandes, plus ce bien essentiel qu'est l'eau potable est touché et plus la capacité financière des propriétaires est importante. Aujourd'hui... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Aujourd'hui, nous ne savons pas combien de piscines compte le territoire genevois. Vous me direz que cela ne nous empêche pas de vivre. Cependant, il s'agit tout de même d'un sujet qui touche l'eau, et l'eau potable.
Durant les quatre séances de commission dédiées à ce projet de loi, nous nous sommes penchés sur la question du nombre de piscines pour essayer de déterminer combien il pouvait y en avoir à Genève. Le résultat le plus exhaustif qu'on ait trouvé est celui communiqué par la direction de la mensuration officielle, qui recense 4119 piscines et estime leur volume à 287 millions de litres, soit 56 millions de mètres cubes en 2011. En considérant que l'eau est complètement changée deux fois par année, cela représente 1% de la quantité d'eau potable qui finit dans les piscines. On a aussi essayé de chiffrer le volume d'eau chauffée utilisé dans les piscines et estimé qu'il y en avait 69 m3 en moyenne par piscine - c'est tout ce qu'on a pu tirer de l'audition. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Voilà un sujet qui semble vraiment vous passionner !
Le président. Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît !
Mme Lydia Schneider Hausser. Je vais tout de même aller jusqu'au bout. Nous nous sommes rendu compte que la gestion des piscines découle d'au moins trois lois distinctes, dans le cadre desquelles les piscines n'interviennent qu'indirectement. Il y a tout d'abord la loi sur les constructions et installations diverses, qui demande que les piscines soient spécifiées lors de la demande d'autorisation de construire, mais il n'y a pas de répertoire à ce sujet: nulle part n'apparaissent leur nombre, leurs spécificités, leur volume, leur profondeur, leur emplacement intérieur ou extérieur. Ensuite, il y a la loi sur les eaux, qui traite principalement de l'écoulement des eaux usées. Là, on estime que 300 à 500 piscines par année environ sont soit rénovées soit installées, mais on n'en sait pas plus. Enfin, il y a la loi sur l'énergie. Avec l'augmentation du nombre de contrôles de conformité, les nouvelles piscines sont maîtrisées en termes de nombre, mais on n'a pas de chiffres s'agissant des anciennes.
A l'heure actuelle, il n'y a pas de taxe sur les piscines car les taxes au raccordement d'eau sont calculées selon la surface brute habitable, et la piscine n'est pas prise en compte là-dedans. Les piscines font tout au plus partie des indices permettant de déterminer la valeur locative des logements.
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Lydia Schneider Hausser. Pour les propriétaires, la valeur locative entre dans la détermination du revenu imposable. Il n'y aurait donc pas de doublon entre l'imposition sur la fortune et celle, nouvelle, qu'on pourrait prélever sur les piscines. Pour les socialistes, le refus d'entrer en matière tel qu'il a été voté en commission fiscale est dommageable, car ce projet de loi aurait pu occasionner non seulement des revenus supplémentaires mais au moins l'occasion de créer un répertoire cantonal.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, à l'heure où l'on prône une société à 2000 watts et où les Services industriels font beaucoup de publicité pour économiser l'eau et vanter la qualité de notre eau potable, le MCG est très partagé quant à l'issue à donner à ce projet de loi, qui représenterait évidemment une taxe supplémentaire ciblée sur une clientèle fiscale particulière. Du coup, afin d'avoir toutes les informations nécessaires quant aux mètres cubes d'eau, aux coûts énergétiques ou encore à l'impact sur l'environnement, le groupe MCG, en attendant d'avoir pris une position finale, demande le renvoi de ce projet de loi à la commission de l'environnement - parce qu'il s'agit bien ici d'environnement. Monsieur le président, je sollicite formellement le renvoi de ce projet de loi à la commission de l'environnement.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Les rapporteurs peuvent s'exprimer sur cette demande de renvoi en commission. Madame Schneider Hausser ?
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. Oui, Monsieur le président, comme je viens de l'indiquer, ce projet de loi a un intérêt d'un point de vue fiscal mais aussi, à moyen et long terme, d'un point de vue environnemental. Il est quand même étonnant de constater qu'on ne possède pas de répertoire, qu'on ignore combien de mètres cubes d'eau potable partent dans les piscines, comment tout cela est géré de manière globale. Il vaut donc la peine de renvoyer cet objet en commission, nous soutiendrons donc cette requête.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Les nombreuses auditions avec des experts nous ont renseignés sur tous ces éléments. Si je rejoins la rapporteuse de minorité sur la problématique d'un répertoire cantonal, je ne vois toutefois pas la nécessité de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'environnement, ce que je vous propose donc de refuser.
Le président. Merci, Monsieur le député. J'invite l'assemblée à s'exprimer sur la demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11065 à la commission de l'environnement et de l'agriculture est adopté par 49 oui contre 33 non.