Séance du
jeudi 22 janvier 2015 à
17h
1re
législature -
2e
année -
1re
session -
1re
séance
RD 1076
Le président. Nous avons reçu de notre collègue, M. Michel Ducommun, sa lettre de démission de son mandat de député. Je prie M. Lefort de bien vouloir lire le courrier 3420.
Le président. Il est pris acte de cette démission. Mesdames et Messieurs les députés, M. Michel Ducommun a été élu en 2013 sur la liste d'Ensemble à Gauche et a siégé plus d'une année au Grand Conseil.
Durant son mandat, il a participé aux travaux de la commission des finances et de l'environnement et de l'agriculture. On lui doit en outre le dépôt d'un projet de loi sur le rétablissement social des finances publiques cantonales, actuellement à l'étude en commission fiscale. Il a également été rapporteur sur un projet de loi visant à promouvoir des mesures en faveur de la biodiversité et de la qualité du paysage en agriculture.
Ses nombreuses interventions en plénière portèrent sur différents thèmes tels que le dumping salarial ou la traversée de la rade, mais plus particulièrement sur des sujets liés à l'écologie comme l'énergie verte, la pollution ou la protection de l'air.
Nous lui adressons nos voeux les meilleurs et lui remettrons à la prochaine occasion, fidèles à la tradition, un stylo souvenir.
Je vais maintenant laisser la parole à M. Pierre Vanek.
M. Pierre Vanek (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la lettre de Michel Ducommun dit les combats qui étaient et sont toujours les siens. Je pourrais bien sûr m'asseoir et lui laisser la parole en dernier sur la question de sa démission. Mais quand même ! Je pourrais dire beaucoup de choses: je pourrais rappeler le parcours de Michel Ducommun, les combats qu'il a menés, à l'époque où il était président du Cartel intersyndical, pour défendre le secteur public et les travailleurs du service public. Je pourrais rompre une lance en faveur de ses engagements, s'agissant de la caisse de pension de l'Etat, contre un système par capitalisation à 100% et pour un système solidaire et par répartition. Je pourrais rappeler d'autres aspects de sa carrière politique - carrière, c'est un grand mot, disons plutôt engagement politique institutionnel - comme son élection en qualité de magistrat suppléant à la Cour des comptes, où il a fonctionné de 2006 à 2012, ou encore son élection au sein de la Constituante, dans le cadre de laquelle il a travaillé précisément sur ces bancs en tant que chef du groupe solidaritéS, toujours pour défendre les idées démocratiques et de justice sociale et écologique qui étaient les siennes et sont toujours les nôtres.
Je pourrais dire beaucoup de choses: je pourrais dire que Michel Ducommun, en revenant siéger dans cette salle, marchait sur les pas de son père, qui a siégé après guerre sur les bancs du parti du Travail dans cette même salle, de ce même côté, ce qui apporte une dimension de fidélité et de durée à son engagement, une durée dont je suis le témoin puisque la première fois que je suis entré dans cette salle, c'était avec Michel Ducommun en 1993: nous étions quatre ou cinq à avoir été élus malgré le fait que nous travaillions dans le secteur public - et c'était à l'époque considéré comme une tare qui justifiait que nous soyons bannis de cette salle ! En 1993, il a été élu ici et a été obligé de sortir. Il est revenu, et vous avez vu la manière dont il s'est battu pour ses idées.
Je regrette infiniment, pour nous et pour la république, que Michel Ducommun s'en aille, et avec lui l'exemple qu'il donnait, les compétences qu'il apportait, la fougue avec laquelle il défendait ses idées - encore une fois, des idées de justice sociale, de justice écologique, de démocratie. Evidemment, c'est une perte pour la république que de voir partir le député Michel Ducommun, et ça m'émeut beaucoup de devoir lui dire au revoir ici. Mais, d'un autre côté, je crois qu'il a eu parfaitement raison de privilégier sa santé et de dire qu'il continuerait ses engagements - il l'a dit dans sa lettre, je crois - parce que, pour l'essentiel, ceux-ci ont été marqués par un combat au quotidien, dans la rue, dans les mouvements sociaux, à travers des contributions qui n'étaient pas parlementaires. Cette activité politique là, Michel Ducommun la continuera jusqu'au bout, et j'aimerais dire combien je salue cette personnalité aujourd'hui et combien, à mon avis, Genève a besoin de ce type d'engagement de la part de ses citoyennes et citoyens. (Applaudissements.)
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai eu l'occasion de siéger avec Michel Ducommun au sein de la commission de l'environnement et de l'agriculture et surtout au sein de la commission des finances. J'ai ainsi pu assister à quelques-uns de ses coups de colère lorsqu'il voulait exprimer son mécontentement quant à la façon dont nos travaux se déroulaient ou à l'attitude parfois peu élégante de certains collègues. Mais ses compétences, son intelligence et sa sensibilité face aux problèmes environnementaux et sociaux étaient réellement bienvenues au sein de la commission: il a su amener des préoccupations fondamentales pour l'avenir non seulement de Genève mais aussi de notre planète, à savoir les enjeux écologiques et sociaux. Michel, avec son sens de la logique, avait parfois de la peine à accepter la façon dont les débats se déroulaient au sein de la commission des finances, avec une mauvaise foi assez crasse, il faut le dire.
Mais j'ai également eu l'occasion de partager avec lui certains combats, que ce soit sur les caisses de pension ou à l'occasion du budget, et sa présence à mes côtés ainsi qu'à ceux des socialistes et des Verts était franchement bienvenue au sein de la commission. Nous avons apprécié sa pugnacité, son intelligence, et je crois qu'on peut dire qu'il va réellement nous manquer au sein de ce Grand Conseil, que ce soit pour les valeurs qu'il portait ou son sens de l'éthique et de la morale, lesquels sont nécessaires parce qu'on ne peut pas se contenter d'un matérialisme de bas étage. Avec Michel Ducommun, je pouvais également partager certaines préoccupations écologiques et sociales. Comme Hervé Kempf le préconisait, je dirais que face à cette crise écologique et à cette crise sociale, qui sont en fait les deux faces d'une même crise, il faut certainement consommer moins et partager plus pour changer le monde et créer un monde meilleur. Merci, Michel, pour tout ce que tu nous as amené lors de ton petit passage au Grand Conseil, et on se réjouit de te revoir en dehors de cette salle ! (Applaudissements.)
M. Jean-Michel Bugnion (Ve). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, accompagnez-moi pour un rapide voyage dans le temps: nous sommes quarante ans en arrière, le cycle d'orientation des Coudriers vient juste d'ouvrir ses portes - enfin, ça fait deux ou trois ans qu'il est ouvert - et pratique ce qu'on appelait alors la réforme II, c'est-à-dire la classe hétérogène et les niveaux. A l'époque, je suis un tout jeune prof fringant qui vient d'être engagé, mes collègues tous âges confondus se donnent à fond pour la démocratisation des études et là, il y a une voix qui s'élève, puissante, avec certainement de forts échos syndicaux - déjà à l'époque ! - c'est celle de Michel Ducommun. C'était - naturellement, j'allais dire - le président de l'association des maîtres; il liait, à juste titre, à mon sens, la qualité de l'enseignement à la qualité du statut de l'enseignant, et la qualité de la vie à la qualité de la fonction publique. Par la suite, il a grimpé la hiérarchie syndicale, est devenu président du Cartel et président de la CIA. C'est ainsi que, durant toute ma carrière, j'ai entendu sa voix, toujours puissante, toujours convaincue et souvent convaincante. J'ai ensuite eu l'immense plaisir de la retrouver, cette voix, il y a un peu plus d'une année sur nos bancs. Hélas, cette voix doit maintenant se taire, et j'en suis triste. Je tenais à exprimer ici mes remerciements à M. Michel Ducommun pour ces quarante ans de compagnonnage. (Applaudissements.)
Mme Christina Meissner (UDC). J'avais envie de dire un mot pour Michel Ducommun, que je n'ai pas beaucoup côtoyé avant de le rencontrer dans ce Grand Conseil et de découvrir cette sensibilité qu'il avait pour l'environnement et la nature. Son parcours a été largement décrit par mes préopinants. Pour ma part, je me rappellerai surtout - c'est vraiment très récent, d'ailleurs - Michel Ducommun venant voir mes hérissons, prenant soin d'un hérisson à tel point qu'il s'est même improvisé menuisier pour l'accueillir dans son jardin. Je suis donc convaincue que c'est un homme sincère, engagé et déterminé pas seulement par les paroles, mais également par les actes. Dans ce sens-là, je ne peux m'imaginer qu'un homme tellement entier et plein de convictions comme lui se taise et se repose. Je crois qu'il occupera son temps de manière sans doute beaucoup plus productive que dans ce Grand Conseil et que ses convictions, il ne les lâchera pas et continuera à les défendre. Alors je lui souhaite le meilleur et bon vent ! (Applaudissements.)
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Je voudrais associer mon collègue Cerutti à cet hommage à Michel Ducommun puisqu'il a été son élève - je ne sais pas s'il était discipliné ou non ! En tout cas, il a gardé de Michel Ducommun un excellent souvenir en tant que professeur aux Coudriers. Pour ma part, je voudrais m'associer à tout ce qui a été dit, parce qu'une carrière et un chemin aussi investis que ceux de Michel Ducommun, c'est assez rare. C'est vrai que c'est un homme de conviction. Combien de fois, pendant les quatre ans qu'a duré la Constituante et ici au parlement, je lui ai dit: «S'il te plaît, ne t'énerve pas autant !» Mais je crois que c'est impossible, même si son médecin le lui dit. Je pense qu'il aurait pu rester parmi nous parce qu'il sera toujours le même. C'est un homme tellement engagé, tellement investi ! Parfois, j'admirais vraiment son engagement: même quand on n'était pas d'accord, il me poursuivait encore dans la rue pour essayer de me convaincre. Au sein de la commission 5, ils étaient quelques-uns à être comme ça, et avec Benoît Genecand qui la présidait, on a des souvenirs véritablement très chauds, si j'ose dire. Vous lui transmettrez en tout cas nos amitiés. Je sais qu'il va continuer de la même manière mais qu'il puisse quand même profiter d'un peu d'apaisement, en tout cas par rapport à ses convictions. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'ai eu l'honneur et la joie de connaître Michel Ducommun à l'époque où j'étais secrétaire général de l'Union des associations patronales genevoises et lui président du Cartel, puis de le côtoyer ensuite au sein de la commission 5 dans le cadre de la Constituante, comme cela a été rappelé par notre collègue Engelberts. Je vous laisse imaginer que cela a été relativement houleux et que j'ai rarement eu des convergences d'opinion avec Michel Ducommun. Mais j'ai toujours apprécié son franc-parler, même si le ton était parfois un peu dur, et je garde des souvenirs assez impressionnants de ses empoignades, notamment avec notre collègue suppléant Patrick-Etienne Dimier à la commission 5. Je ne sais pas si notre collègue Thierry Cerutti était un bon élève, mais ce que je sais, c'est que M. Ducommun était un remarquable enseignant et qu'il s'est toujours consacré à 100% à ses élèves, à tel point que même Michel Barde, l'ancien directeur général de la FER, lui avait confié ses enfants avec plaisir. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Gabriel Barrillier (PLR). Chers collègues, c'est en tant que député mais aussi en tant qu'ancien secrétaire patronal de la construction que je m'exprime, parce que notre collègue Ducommun était un vrai syndicaliste. J'allais dire, si vous me le permettez, qu'on perd avec lui un homme combatif. Je me souviens des grèves du Cartel: il était vraiment en tête, il a défendu - il faut le reconnaître - les membres de son syndicat avec pugnacité, avec un esprit combatif. Mais ce que j'aimerais dire aussi, c'est qu'on perd, avec le départ de M. Ducommun, un vrai marxiste-léniniste, un vrai dialecticien ! (Rires.) Je me souviens encore des premières séances de la commission de l'environnement et de l'agriculture, où M. Ducommun nous a expliqué son point de vue, sa conception du danger vers lequel notre planète se dirige. Il a mis en doute la protection de l'environnement et a déployé son analyse dialectique en vrai marxiste, et je dois dire que ça nous fait du bien, de temps en temps, de redécouvrir cette dialectique. Pourquoi pas ? Je voulais presque dire qu'on perd avec lui le Souslov du Grand Conseil. Mais les jeunes ne savent plus qui était Souslov ! Avec humour et amitié, je lui souhaite, au nom du PLR, de vivre encore longtemps en bonne santé et de suivre ses idées. Je vous remercie. (Applaudissements.)