Séance du
vendredi 5 décembre 2014 à
17h15
1re
législature -
1re
année -
14e
session -
88e
séance
M 2247
Débat
Le président. Nous passons à notre dernière urgence, la motion 2247. Monsieur Mizrahi, vous avez la parole.
M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, tout d'abord j'aimerais vous remercier, au nom de mon groupe mais également des associations de personnes handicapées et de leurs proches, d'avoir accepté l'urgence sur cette motion inter-groupes, signée, donc, par des représentants de tous les partis de ce Grand Conseil. Cette motion vise trois objectifs et demande que le Conseil d'Etat fasse trois choses: tout d'abord, effectuer un inventaire de ce qui se fait actuellement au niveau de l'école inclusive. Beaucoup de choses ont déjà été réalisées, il ne s'agit pas de dire que rien n'a été mis en place, mais il reste évidemment beaucoup à faire. Il y a donc lieu de faire le point. Ensuite, présenter rapidement les bonnes pratiques en matière d'école inclusive à l'extérieur de Genève, pour éviter de réinventer la roue ou de créer des «Genfereien», comme le dit l'expression à la mode. Et puis enfin, que le Conseil d'Etat revienne devant ce Grand Conseil avec un plan d'action sur l'école et la formation inclusives. Vous me connaissez, Mesdames et Messieurs, je pourrais vous citer des conventions internationales, la constitution, etc., mais je ne le ferai pas. En ce surlendemain du 3 décembre, journée internationale des personnes handicapées, je souhaite vous rendre attentifs aux familles qui attendent non seulement le 3 décembre, mais tous les jours de l'année, et depuis longtemps, ces changements en matière d'école inclusive. Finalement, donner la chance à chaque enfant, à chaque jeune de suivre une formation certifiante, au-delà des différences, c'est une question de bon sens; c'est une question de bon sens que chaque enfant puisse fréquenter l'école de son quartier, avec tous les autres, bien entendu avec l'appui nécessaire selon le handicap, et des locaux scolaires accessibles. En somme, une seule école, adaptée à tous, c'est ce que demande cette motion. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. J'ai oublié de préciser que nous étions en catégorie II, trente minutes. La parole est à Mme la députée Marie-Thérèse Engelberts.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Merci, Monsieur le président. Je crois que personne ne peut être contre une telle motion. La conseillère d'Etat nous a fait part, en commission de l'enseignement, du fait que le travail était en cours à ce sujet. C'est vrai que nous n'avons pas encore les chiffres, l'état des lieux, le nombre d'enfants, les possibilités des écoles, l'évaluation des besoins, etc. Mais c'est quelque chose qui est en train de se faire: je pense qu'il est important de se rendre compte, déjà, que nous sommes dans un train qui avance.
En revanche, il est nécessaire de faire remarquer que nous sommes à Genève bien en deçà des possibilités de réponses que nous devrions offrir. La plupart des institutions spécialisées sont en dehors du canton, à une grande distance de Genève. Par ailleurs, nous ne respectons pas les droits fondamentaux de l'enfant en continuant à travailler de cette manière dans la plupart des écoles.
Cela étant, dire que ces mesures n'auront pas d'incidence sur le coût de l'école - je ne parle pas du coût pour les parents - c'est méconnaître le travail que nécessite l'accompagnement d'un enfant handicapé. Mais plus nous le ferons, et plus nous apprendrons à le faire. Et à ce moment-là, nous pourrons davantage généraliser cette approche. Je crois aussi qu'il est important de distinguer - et c'est pour cela que l'état des lieux est très important - les catégories de handicaps. Je n'aime pas utiliser cette expression, mais il y a quand même, quelquefois, des situations liées à une problématique d'intégration et non pas à une question d'inclusion scolaire. Mais nous devons absolument, dans les prochaines années, faire en sorte de répondre véritablement aux besoins de la population d'enfants en situation de handicap - et pas seulement d'enfants, parce que si les enfants ne sont pas scolarisés, les adolescents et les adultes, ensuite, se retrouveront avec des problèmes d'exclusion. Et ça, c'est inacceptable. Nous ne pouvons pas, nous n'avons pas le droit de travailler dans ce sens-là. Nous nous réjouissons donc, au MCG, de voir quelles seront les réponses apportées par la conseillère d'Etat, puisqu'elle nous a dit qu'elle les donnerait dans le courant de cette année. Cette motion a donc pour sens de faire prendre conscience au Grand Conseil de la problématique générale...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Marie-Thérèse Engelberts. ...et en même temps de soutenir la conseillère d'Etat dans son travail actuel.
Le président. Je vous remercie, Madame la députée. La parole est à M. Christian Frey.
M. Christian Frey (S). Pour combien de temps ?
Le président. Pour trois minutes.
M. Christian Frey. Eh bien c'est parfait ! Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, effectivement, la proposition qui vous est faite parle d'inclusion. J'ai discuté avec plusieurs personnes de cet auditoire, et on m'a demandé ce qu'il en était de l'inclusion, ce que voulait dire ce terme, comment il s'opposait à l'intégration, etc. L'inclusion est un terme utilisé à l'étranger depuis pas mal de temps. Pour preuve, il y a deux ans je me suis rendu au Burkina Faso, dans une école pour enfants polyhandicapés, où on utilisait déjà cette expression, qu'un certain nombre d'entre vous dans cette salle soutiennent. Il ne s'agit donc pas du tout d'un terme qui vient du jargon des professionnels, mais bien d'un concept qui veut que, dans la mesure du possible, et partout où c'est possible, on essaie de faire participer les enfants handicapés, même polyhandicapés - ce qui fait que je nuance un tout petit peu les propos de ma préopinante - au minimum à une récréation, à des activités communes, même s'ils ne peuvent pas suivre la plupart des enseignements.
Le paradoxe de la situation, à Genève, est que nous avons beaucoup d'institutions très spécialisées pour les enfants handicapés. Peut-être qu'il y en a trop, peut-être que la spécialisation a été poussée un peu trop loin par rapport à cette vision selon laquelle c'est possible partout. Et ça l'est dans la plupart des cas; il faut inclure les enfants handicapés dans la scolarité normale, habituelle. Dans la mesure où l'école s'ouvrira davantage à l'inclusion d'enfants qui, peut-être, sont en institution et n'ont pas absolument besoin d'y être, en tout cas pas à 100%, cela libérera des places pour les personnes qui doivent vraiment y être. Cela nécessitera un accompagnement qualifié; on pense en particulier aux assistants à l'intégration scolaire, qui doivent disposer d'une formation et ne pas simplement être, comme c'est le cas pour le moment, des employés de solidarité qui, à défaut d'une autre proposition, sont actifs à l'école. Cela étant, encore une fois, Genève fait beaucoup dans le domaine du handicap, il faut aussi le relever.
Le président. Il vous reste trente secondes !
M. Christian Frey. Le département de l'instruction publique et sa présidente font beaucoup; elle-même est particulièrement touchée par cet aspect-là. Mais un état des lieux, un plan d'action, qui ne se feront pas d'un jour à l'autre mais qui viendront, permettront aux personnes handicapées non pas d'être sur une île loin de nous, qu'on cherche à rapprocher...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Christian Frey. ...mais d'être incluses à 100% dans nos écoles.
Mme Beatriz de Candolle (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, il y a vingt-cinq ans, on m'annonçait que mon fils de trois ans était sourd. On me rassurait en disant qu'il allait être très bien dans une école spécialisée, qu'il n'aurait pas de formation mais qu'il serait heureux. Mon mari et moi avons fait un autre choix: son intégration. Comme l'école publique mettait les pieds au mur, nous nous sommes tournés vers l'enseignement privé. Aujourd'hui, après un CFC de dessinateur architecte et une maturité professionnelle, mon fils exerce son métier; il s'assume à 100% et paie ses impôts. Voilà ce qu'est l'école inclusive. Mesdames et Messieurs les députés, en tant que membre du PLR, je souhaite une société où chacun ait sa place, où chacun ait des droits et des devoirs, et où chacun participe activement à notre prospérité. Mesdames et Messieurs, je vous prie de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
Mme Béatrice Hirsch (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, j'aimerais remercier le premier signataire de cette motion, M. Cyril Mizrahi, d'avoir joué le rôle de chef d'orchestre et réussi à rassembler tous les partis autour d'une motion qui vise à ce que notre système public puisse offrir à ces enfants ce que le système privé a pu offrir au fils de M. et Mme de Candolle. M. Mizrahi l'a dit: une école pour tous. Oui, une école pour tous, mais une école inclusive est aussi une école qui accompagne l'enfant qui a des besoins éducatifs spéciaux, et qui ne lui demande pas de s'intégrer dans une école dite normale; c'est une école qui propose à des enfants dits normaux de côtoyer des enfants à besoins éducatifs spéciaux; c'est une école qui propose un reflet de la société et de toutes ses diversités, non pas juste d'une normalité, et qui n'exige plus des parents de devoir rechercher des méthodes alternatives. Pour toutes ces raisons, le parti démocrate-chrétien soutiendra le renvoi de cette motion directement au Conseil d'Etat, pour recevoir les résultats demandés. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Jean-Michel Bugnion (Ve). L'un des principaux bénéfices de cette motion est d'éviter à ce parlement le syndrome de l'autruche. L'accord intercantonal du 25 octobre 2007 sur la pédagogie spécialisée, suivi par la LIJBEP, entrée en vigueur le 1er janvier 2010 et qui sera d'ailleurs intégrée dans la future loi sur l'instruction publique, institue l'école inclusive. Les bons sentiments de tout un chacun sont là, mais cela ne suffit pas à faire une bonne politique, et cela ne suffit pas à une bonne mise en application. Il est maintenant nécessaire de regarder la problématique dans son ensemble à l'aide d'un état des lieux détaillé, assorti d'un plan d'action précis et de mesures, afin de nous permettre d'empoigner efficacement ce défi humain. Si au contraire nous gardons la tête dans le sable, bricolons de-ci, de-là, au coup par coup, sans vision globale, nous allons fatiguer, décourager, démotiver ceux qui sont les acteurs véritables de l'inclusion sur le terrain, et nous allons provoquer des désillusions chez les élèves à besoins spécifiques et leurs familles. Il est donc temps d'avoir un plan d'action et surtout une identification des moyens nécessaires et de l'ampleur du programme, car je vous ferai remarquer que rater une inclusion parce que les conditions nécessaires à sa réussite n'ont pas été réunies peut être aussi grave, voire pire, que ne pas pratiquer l'inclusion du tout. En conséquence, je vous prie effectivement, comme mes préopinants, de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. Je vous remercie !
Présidence de M. Antoine Droin, président
M. Stéphane Florey (UDC). J'ai été quand même assez surpris lorsque j'ai découvert que cette motion avait été déposée, motion qui est non pas inter-groupes mais inter-députés. Cela a été fait dans un délai relativement court, et nous n'avons pas pu en parler au sein de notre caucus pour savoir, sur le fond, quel était le problème. Ça, c'est une première chose.
La deuxième chose, c'est que je trouve que cette motion arrive un peu comme un cheveu sur la soupe, dans le sens - on l'a dit - où la commission de l'enseignement révise actuellement l'entier de la LIP. Mme la conseillère d'Etat, comme nous le savons tous, a particulièrement retravaillé cette loi pour ajouter, justement, tout un chapitre qui parle de l'école inclusive. Or, une des invites de la motion demande de faire un constat de ce qui existe; alors oui, c'est vrai, actuellement il n'y a pas grand-chose. Mais il ne faut pas se baser là-dessus ! Il faut voir ce qui est justement inclus dans la nouvelle LIP ! Peut-être y a-t-il des choses à améliorer, oui, peut-être que Mme la conseillère d'Etat fera elle-même, en commission, des amendements, et ce serait peut-être même souhaitable. Mais demander un rapport sur ce qui est du passé, pour moi, je le dis franchement, cela ne sert absolument à rien.
Et je suis surpris à un autre titre: en tant que président de la FéGAPH, pourquoi l'auteur de cette motion n'a-t-il pas écrit à la commission de l'enseignement pour être auditionné par la commission et nous faire part de sa préoccupation ? Je suis extrêmement surpris de cela et peut-être même déçu, et je le suis pour notre propre conseillère d'Etat, parce que pour moi vous faites carrément un déni de son travail, alors qu'on sait qu'elle se bat au jour le jour spécialement sur cette question. (Commentaires.) Mais je précise bien une chose, c'est que personne ici, et personne à l'interne de la commission, n'est opposé à l'école inclusive; c'est juste la façon de faire qui nous dérange. C'est pour cela que je demande le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement, afin qu'on connaisse vraiment les tenants et aboutissants du problème. Si ce renvoi est refusé, nous aurons la liberté de groupe sur le vote final. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je ferai voter votre demande tout à l'heure. Je passe la parole à Mme Jocelyne Haller.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion est explicite, et beaucoup de choses ayant déjà été dites, je ne reviendrai pas sur le fond. En revanche, Mme Hirsch a relevé tout à l'heure que le premier signataire, M. Mizrahi, avait réussi à mettre quasi tout le monde d'accord, sauf en ce qui concerne la dernière intervention. Je crois effectivement que c'est une bonne chose, et personne ici - M. Florey l'a lui-même rappelé - n'est opposé à l'école inclusive. Alors j'aimerais simplement vous rappeler ceci: au moment où il faudra voter les moyens de l'école inclusive, j'espère que nous conserverons cette même belle unanimité. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Cyril Mizrahi, à qui il reste cinquante secondes.
M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. J'aimerais répondre très brièvement, Mesdames et Messieurs les députés, au député Florey - vous transmettrez, Monsieur le président. En tant que député, je considère que mon rôle n'est pas de demander à des commissions de m'auditionner; si la commission de l'enseignement, et si vous en particulier, Monsieur Florey, vous souhaitez auditionner l'association que je préside, il vous est évidemment loisible d'en faire la demande. Pour le surplus, sur le fond, mon rôle de député est de faire des propositions, et je pense que vous n'avez pas très bien compris, cher collègue, que l'objectif de la révision totale de la LIP n'est pas de mettre en oeuvre l'inclusion, mais justement de réviser la loi dans son intégralité et d'y ajouter le volet sur l'inclusion scolaire ! Alors c'est bien de l'intégrer dans le texte, mais après il y a la réalité des faits. (Remarque.) Et là, il y a des choses à faire, il y a des moyens à donner, et cette motion vient clairement appuyer le travail de notre conseillère d'Etat. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Béatrice Hirsch, pour une minute et trente-deux secondes.
Mme Béatrice Hirsch (PDC). Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, juste un mot pour répondre à M. Florey concernant le renvoi en commission: si on regarde les invites de cette motion, on voit qu'elles demandent principalement au Conseil d'Etat de présenter ce qui se fait aujourd'hui et ce qui pourrait se faire dans le futur. Que ferait, aujourd'hui, une commission ? En fait, elle évaluerait chacune des invites, recevrait le Conseil d'Etat, le Conseil d'Etat lui ferait déjà à ce moment-là un rapport sur les invites, puis la commission rendrait un rapport, qu'on choisirait ensuite de renvoyer au Conseil d'Etat, qui nous renverrait enfin une réponse. En l'occurrence, il s'agit d'être un peu plus efficient, de demander au Conseil d'Etat de directement répondre à ces invites, et selon les réponses, à ce moment-là, Monsieur Florey, de renvoyer le rapport en commission pour que celle-ci puisse mesurer...
Le président. Il vous reste trente secondes, Madame.
Mme Béatrice Hirsch. ...regarder et évaluer les différents plans de mesures qui auront été proposés. Pour ces raisons-là, le parti démocrate-chrétien, ainsi que, je le sais, la majorité des groupes autour de cet hémicycle, vous demande de renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Voumard, je vous passerai la parole après le vote, si vous le voulez bien. La parole est à Mme la conseillère d'Etat, Anne Emery-Torracinta.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, bien évidemment vous connaissez tous mon passé associatif et familial, et donc tout l'attachement que j'ai pour la cause que vous défendez ce soir. Mais avant, peut-être, de parler précisément de cette motion et de ses invites, j'aimerais rectifier une ou deux choses que j'ai entendues, et je voudrais quand même vous dire que je ne peux pas, en tant que cheffe du département, cautionner ce que je lis dans l'exposé des motifs, à savoir que des enfants sont à la rue parce qu'on ne les accueille pas. Nous accueillons tous les enfants, même si ce n'est peut-être pas toujours dans le lieu souhaité par les parents, pas toujours dans le lieu idéal; et nous ne les laissons bien évidemment pas dans la rue: ils sont tous scolarisés. Au fond - je ne sais plus lequel d'entre vous l'a dit - peut-être que Genève est un peu victime, aujourd'hui, d'avoir été historiquement un pionnier: si nous avons beaucoup d'institutions spécialisées, c'est parce que relativement tôt, au XXe siècle, à une époque où personne, pratiquement, ne s'intéressait à la pédagogie spécialisée et aux élèves handicapés, Genève a fait office de pionnier en mettant en place, justement, des centres, des institutions, pour ces élèves-là. C'était nouveau, et cela nous a finalement presque plombés plus tard, parce que les institutions étaient là et qu'il est toujours difficile de changer un système. Les pays ou les régions du monde où l'inclusion est en avance - c'est également le cas en Suisse et même à Genève - sont souvent des endroits où il n'y avait rien ou quasiment rien, et où on a donc passé du rien à l'inclusion, sans l'étape institutionnelle. C'est donc vrai qu'il y a un travail à faire, qui prend du temps, mais on ne peut pas dire non plus que le DIP ne fait rien. Pour vous donner des exemples très récents, liés à cette rentrée scolaire ou à la précédente, un des mouvements que l'on est en train de mettre en place depuis quelques années et qu'on cherche à poursuivre en fonction des lieux disponibles est déjà de mettre les institutions dans des locaux scolaires ordinaires, dans la mesure du possible. En effet, c'est ce qui facilite l'intégration des enfants ensuite, parce que même si on ne peut pas les intégrer à 100%, quand vous êtes dans un bâtiment scolaire ordinaire, il y a toujours des ponts et des moyens de pratiquer l'intégration. Je peux citer le CMP d'Aïre, à l'école primaire d'Aïre, qui a ouvert il n'y a pas très longtemps, ou une classe un peu particulière qui vient d'être créée à Geisendorf - je vois d'ailleurs une maman d'élève ici présente, dans le public. Et puis au cycle d'orientation, une nouvelle classe intégrée s'est ouverte au cycle de Cayla cette année. C'est donc un mouvement qui est en route et que nous allons poursuivre.
Maintenant, si je reviens aux invites de la motion elles-mêmes, je vois que la première d'entre elles demande une présentation succincte des bonnes pratiques existant en Suisse et dans le monde. On peut vous donner, bien sûr, quelques éléments, mais vous comprendrez - surtout par les temps qui courent - que l'administration, et celle du DIP comme les autres, n'a pas le temps de rédiger ou de faire une synthèse de toutes les thèses de doctorat qui existent sur le sujet. On préfère donc aller dans l'action directement plutôt que de vous exposer les détails. Concernant l'accessibilité des établissements publics scolaires et des lieux de formation, on pourra répondre pour ce qui est du secondaire, mais pour le primaire cela dépend des communes; je ne sais donc pas très bien si c'est de notre ressort, au fond, de vous donner un état des lieux de ce qui se fait dans les différentes communes du canton. Concernant - et cela me paraît plus important - les enfants qui devraient ou pourraient être intégrés et qui ne le sont pas, faute, peut-être, de lieux adaptés ou de moyens suffisants, là aussi, le chiffre est quasi impossible à donner. Je pourrais vous dire qu'il se situe entre 0 et 1774. Pourquoi ? Parce que 0, ce serait partir du principe que tous les enfants sont à la bonne place aujourd'hui, qu'il n'y a pas de problème. Or, je pense qu'il y a probablement des choses à faire. Et puis 1774, c'est le nombre total d'élèves actuellement dans l'enseignement spécialisé, mais parfois déjà en intégration. Ce serait donc le nombre maximum d'enfants à replacer. La vérité est probablement entre les deux, mais on ne peut pas faire ce travail ! Parce que cela impliquerait de prendre chaque situation individuelle, de l'observer en détail, et qui pourrait ensuite évaluer le bien-fondé du choix qui a été fait ? Ainsi, objectivement, je crois qu'on ne pourra pas vous donner de chiffre; on pourra vous donner des tendances, mais pas forcément des résultats précis.
En revanche, la quatrième invite est essentielle. Elle correspond parfaitement à ce que fait le département puisque nous sommes en train de préparer un plan d'action, qui sera rendu public probablement d'ici la fin du premier semestre 2015, avec un calendrier et des moyens. Parce que je crois que c'est essentiel de le rappeler - Mme Haller l'a très bien dit, M. Bugnion aussi - les bons sentiments sont une chose, mais à un moment donné il faudra voter des budgets. Et pour vous donner un exemple très concret, nous n'avons actuellement pas assez d'assistants à l'intégration scolaire - cela correspond aussi à une des invites de la motion. Nous n'en avons pas assez, et le département a donc fait le choix de réallouer des moyens à l'interne pour permettre la stabilisation de ces postes qui, jusqu'à ces dernières semaines, étaient occupés par des personnes en emploi de solidarité. Ces personnes vont donc être engagées à l'Etat, même si, faute de postes ETP inscrits au budget, elles seront dans un premier temps des auxiliaires - que nous payons, évidemment, ça ne va pas vous coûter plus cher. Mais j'espère qu'un jour ou l'autre vous accepterez la stabilisation de ces personnes en ETP réels. Et puis surtout, nous n'avons pas tout à fait assez de personnes; nous avons dû trouver des solutions, je dirais presque bricoler, parce que nous avons eu par exemple l'arrivée dans une école primaire d'un petit enfant handicapé qui venait de l'étranger, qui a été adopté à Genève, et pour qui il a fallu trouver une solution: il faut parfois pouvoir répondre au pied levé, et actuellement on doit bricoler. On a donc des besoins urgents, concrets, et j'espère que ce parlement, très vite - le vote du budget, c'est bientôt, vous pouvez aussi y penser au cours de vos nombreuses discussions - nous donnera les moyens de poursuivre ce que nous faisons, d'accentuer le mouvement, parce qu'il y a aussi toute une catégorie d'enfants qui ne sont pas du tout ou très peu intégrés parce qu'ils ont trop de problèmes de comportement, ce qui requiert des moyens assez conséquents. Je compte donc sur vous ces prochains mois et ces prochaines années pour soutenir la politique du département, et je vous remercie de nous renvoyer cette motion parce que je pense que vous avez besoin de réponses, notamment sur le plan d'action, et pas forcément d'un long travail en commission à ce propos. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous avons une demande de renvoi à la commission de l'enseignement, que je mets aux voix.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2247 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 76 non contre 5 oui et 8 abstentions.
Mise aux voix, la motion 2247 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 81 oui et 7 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Je passe brièvement la parole à M. Voumard.
M. Jean-Marie Voumard (MCG). Merci, Monsieur le président. Dans la continuité de ce brillant résultat de vote, je me permets de vous rappeler à tous de ne pas oublier d'acheter votre peluche, demain, dans le cadre du Téléthon. Merci ! (Quelques applaudissements.)