Séance du
jeudi 15 mai 2014 à
20h30
1re
législature -
1re
année -
8e
session -
47e
séance
M 2194
Débat
Le président. Nous arrivons à la M 2194-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à l'auteur de cette motion, M. Jean Romain.
M. Jean Romain (PLR). Merci, Monsieur le président. Il s'agit de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement supérieur, comme tout à l'heure pour la pétition 1900. En gros, que se passe-t-il ? Il se passe qu'à Genève, pour devenir instituteur, il faut quatre ans, alors que dans tous les autres cantons de Suisse romande il faut trois ans. (Brouhaha.) Quatre ans ou trois ans, cela fait une grande différence, d'autant que les deux sortes de diplômes ouvrent exactement aux mêmes prestations.
Le deuxième problème, c'est qu'à Genève tout comme dans certains cantons - mais pas tellement en Suisse romande - on obtient sa maturité à 19 ans et non à 18 ans. Alors si, à Genève, les étudiants ont leur maturité à 19 ans, plus quatre ans de formation, nous perdons deux années par rapport aux autres candidats au travail d'instituteur. C'est pourquoi nous demandons de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement supérieur, afin que nous puissions étudier à la fois la pétition et la motion pour voir ce qu'il en est et faire une pesée d'intérêts. Je vous remercie.
Présidence de M. Antoine Droin, président
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la formation des enseignants ne doit pas être proportionnelle à la taille des élèves ! Plus les élèves sont jeunes et plus l'enseignement implique des difficultés, si on le prend au sérieux. C'est Jean Piaget qui disait cela en 1971. Vingt ans plus tard, en 1991, Jacques-André Tschoumi, alors directeur de l'IRDP, signait un article dont le titre était formulé comme une question: «Moins qu'un canari ?» Il faisait ainsi allusion au fait que si l'on n'hésite pas à faire appel à un vétérinaire qui a fait de longues études universitaires pour soigner un quelconque volatile jaune, en revanche, nous ne voyons pas trop de problèmes à confier nos enfants à une nurse, à une jardinière d'enfants ou à un maître enfantin, tous moins bien formés. Pendant combien de temps encore le soin d'un canari va-t-il postuler plus de compétences que le soin des enfants ? Vingt-trois ans après cette interrogation, on continue à appeler le vétérinaire pour faire euthanasier sa perruche, alors qu'un simple coup de talon suffirait. (Exclamations.) Mais pour enseigner aux enfants du primaire, certains prétendent que c'est avant tout le bon sens qui compte, l'amour du métier, des enfants, et autres balivernes, niant l'importance de la recherche en éducation, la complexité du métier et surtout le fait que vu la somme impressionnante d'acquisitions que vont réaliser les enfants entre quatre et six ans - peut-être apprendront-ils davantage pendant cette période que durant le reste de leur vie - c'est à ce moment-là qu'ils devraient être entourés par des professionnels de l'éducation qui ont suivi les études les plus longues et complètes possibles. (Brouhaha.) Il est, Mesdames et Messieurs les députés, particulièrement absurde et irresponsable de simultanément exiger l'élévation du niveau de formation des élèves... (Remarque.) ...et de prôner la réduction de celui des enseignants. Comment peut-on, d'une part, se plaindre de manière récurrente...
Le président. Excusez-moi, Monsieur le député. Je rappelle à tous les députés qu'ils ne sont pas autorisés à aller à la tribune ! (Commentaires.) Voilà, vous pouvez poursuivre.
M. Olivier Baud. C'est fort intéressant, Monsieur le président ! Je disais, comment peut-on, d'une part, se plaindre des résultats moyens de Genève aux tests PISA de manière récurrente, pour ne pas dire monomaniaque, et de l'autre mépriser le métier d'enseignant, notamment en minimisant l'importance de la formation initiale ? Mesdames et Messieurs les députés, cette motion sera sûrement étudiée par la commission de l'enseignement supérieur, mais il convient, pour Ensemble à Gauche, de la refuser et d'arrêter de tirer à tout va sur les enseignants primaires... (Protestations.) ...alors que c'est peut-être la chose la plus importante...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Olivier Baud. ...pour les enfants en bas âge que d'avoir l'enseignement le plus adéquat possible. (Applaudissements.)
M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, j'espère que les amis des animaux auront apprécié la petite remarque de M. Baud disant qu'on peut tuer sa perruche d'un coup de talon; je l'ai trouvée très sympathique. (Rires.) Effectivement, c'est plus facile avec le talon qu'en appelant le vétérinaire !
Mis à part ça, Monsieur le président, pour revenir sur cette motion 2194, nous avions demandé l'urgence pour qu'elle rejoigne une pétition qui traitait du même sujet et que la commission des pétitions a décidé de renvoyer à la commission de l'enseignement supérieur. Nous pensons qu'effectivement, il sera plus utile de travailler ces deux objets ensemble, de les lier et de nous faire un joli rapport circonstancié, approuvant cette motion que notre ami Jean Romain nous a proposée, avec laquelle nous sommes tout à fait d'accord et que le MCG va soutenir.
Juste une petite remarque, Monsieur le président, concernant les propos de M. Cyril Aellen tout à l'heure... (Exclamations.) ...qui reprochait au groupe qui était dans son dos d'avoir changé de position entre son vote en commission et celui d'aujourd'hui. Si on se met à la place de M. Aellen, on se dit que visiblement il nous visait, mais malheureusement, soit M. Aellen a un dos large, soit il vise très mal, parce que nous n'avons pas changé d'avis et nous maintenons la position que nous avions en commission, c'est-à-dire le renvoi de la motion au Conseil d'Etat, ce que nous avons défendu d'ailleurs. Merci, Monsieur le président. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Si on pouvait rester sur le sujet en cours, ce serait parfait ! Je passe la parole à M. le député Philippe Morel.
M. Philippe Morel (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous voulons des enseignants de qualité et ne pas brader la formation des enseignants de l'école primaire, afin qu'ils permettent à nos élèves d'être parmi les meilleurs du pays. Mais cette formation ne se mesurera pas en années, pas en quantité, mais en qualité. Et de l'avis d'un certain nombre de spécialistes, la première année de ces quatre ans de formation à Genève paraît superflue, alors que la dernière année, actuellement la quatrième, est très importante. Il faut donc redimensionner ce cursus, il faut l'adapter à ce que d'autres cantons font, et plus que de favoriser la quantité, nous préférons favoriser la qualité, avec des enseignants dont les performances vont dépendre de l'intensité de leur formation. Nous recommandons donc de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement supérieur pour qu'elle soit évaluée... (Remarque.) ...et discutée dans l'optique de diminuer la quantité, tout en maintenant ou en augmentant la qualité de la formation des enseignants du primaire.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Daniel Sormanni, à qui il reste une minute et quarante secondes.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'effectivement, il n'y a pas de raison qu'à Genève le cursus soit beaucoup plus long que dans les autres cantons. Je ne pense pas que dans les autres cantons les enseignants soient mal formés et pas capables d'assumer leur mission ! Il me semble que souvent, à Genève, on a l'impression qu'il faut rallonger les cursus; or, à mon avis, la qualité de l'enseignement ici n'est pas supérieure à celle de la Suisse ou des autres cantons suisses ! C'est malheureux, peut-être, mais c'est tout de même une réalité. Donc je pense qu'il faut aussi savoir raison garder, que c'est une très bonne motion, et nous vous invitons à la renvoyer à la commission de l'enseignement supérieur de façon que nous puissions l'étudier plus en détail. Je vous en remercie.
M. Jean-Michel Bugnion (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, réduire d'une année la formation des enseignants du primaire, c'est clairement en changer le statut; on passe d'un statut universitaire de bachelor +1 à un statut de HEP. Cela a donc beaucoup d'incidences variées, qu'il va falloir étudier en détail. D'autre part, si on sait ce qu'on gagne en termes d'économies, on ne sait pas ce qu'on perd en termes de contenu. Là encore, avant de conclure, il s'agit de réaliser une analyse détaillée et d'auditionner les personnes qui pourront répondre à ces questions. Les Verts ne soutiennent pas cette motion mais acceptent son renvoi à la commission de l'enseignement supérieur.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes prennent acte que l'objectif est de renvoyer cette motion en commission pour un traitement simultané avec une pétition qui, semble-t-il, se trouve à la commission des pétitions. Donc il faudra déjà se mettre d'accord... (Protestations.)
Des voix. Non !
M. Roger Deneys. Non ? C'est déjà renvoyé ? C'est parfait. Donc ce sera traité simultanément. Il n'empêche que si, a priori, nous sommes prêts à étudier une proposition comme celle-ci - pourquoi pas - nous avons quand même quelques doutes et quelques craintes quant aux intentions réelles des auteurs, en tout cas du premier signataire de cette motion. On peut effectivement se demander si c'est vraiment nécessaire d'avoir des formations pour les enseignants plus longues à Genève que dans certains autres endroits de Suisse - peut-être pas partout, d'ailleurs - ce d'autant plus que c'est ce Grand Conseil qui, il y a quelques années, a souhaité cette formation de quatre ans, avec le soutien du PLR, d'ailleurs. (Remarque.) Oui, du parti libéral. En l'occurrence, je crois que c'était vraiment une volonté de disposer d'enseignants capables de gérer les particularités d'un canton-ville comme celui de Genève, qui connaît des caractéristiques socio-économiques bien précises et dont la population ne s'apparente en tout cas pas à celle d'un canton de la Suisse primitive. Donc de ce point de vue là, la gestion de la diversité des élèves des écoles genevoises mérite sans doute une attention spéciale de la part des enseignants et une capacité particulière d'apprendre à apprendre. Dans ce sens-là, M. le premier signataire de cette motion est aussi un partisan de l'école du XIXe siècle ! (Protestations.) Il a déjà eu à maintes reprises l'occasion de dire que ce qu'il souhaitait, c'était des notes, de la discipline stricte comme au XIXe siècle, du latin partout... (Brouhaha. Commentaires.) ...et un certain nombre de projets éducatifs qui sont complètement dépassés dans une société comme la nôtre ! (Protestations.) Mesdames et Messieurs les députés, on peut se poser la question des coûts, de l'efficacité de la formation, de la pertinence de certains enseignements: cela, on pourra peut-être y réfléchir en commission, mais si le but est de faire des économies, de faire comme easyJet, de la easyFormation pour des résultats easyCatastrophiques, eh bien, Mesdames et Messieurs, les socialistes seront contre !
Une voix. Il y a déjà des résultats easyCatastrophiques ! (Rires.)
M. Stéphane Florey (UDC). Genève, à l'époque, avait le choix entre un IUFE et une HEP, elle a fait le choix d'une HEP sur quatre ans. (Exclamations. Commentaires.) D'un IUFE, pardon, sur quatre ans. Or, on s'aperçoit, comme le dit le texte, que les cantons qui, eux, ont choisi l'option d'une HEP le font sur trois ans. Divers témoignages dont on nous a fait part durant l'élaboration de cette motion nous ont clairement démontré que bon nombre d'étudiants de l'IUFE en première année se sentaient totalement démotivés, pour la simple raison qu'ils estimaient que la moitié des cours suivis cette année-là n'apportaient absolument rien à la formation d'enseignant. Pour cette raison, une grande partie de ces élèves démissionnent de l'IUFE et se réinscrivent dans une HEP, parce qu'ils jugent que la formation y est meilleure et que le contenu des cours est supérieur à ce que leur offre l'IUFE. C'est donc essentiellement pour cette raison qu'il vaut la peine de faire le point sur cette motion en commission et d'étudier quelles sont les réelles différences entre l'IUFE et la HEP, ainsi que de savoir ce qui a conduit Genève à se croire toujours mieux que les autres et à faire croire à la population que ses profs sont mieux formés, alors que ce n'est absolument pas vrai ! Il n'y a qu'à voir les résultats de nos élèves qui sont catastrophiques... (Brouhaha.) ...contrairement à des cantons qui, eux, offrent des formations sur trois ans et dont les élèves ont des résultats nettement supérieurs à ceux que nous obtenons ici. C'est pour ça que nous soutiendrons le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement supérieur, et nous nous réjouissons de l'étudier. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Patrick Saudan.
M. Patrick Saudan (PLR). A qui il reste trente secondes, j'imagine, Monsieur le président ? (Commentaires.) Que je calibre mon intervention...
Le président. Non, non, vous avez de la marge car il y avait le temps réservé à l'auteur du texte.
M. Patrick Saudan. D'accord, merci, Monsieur le président, je serai très bref. Mesdames et Messieurs les députés, juste pour répondre à M. Deneys - qui n'est pas là - j'aimerais dire que le projet de loi sur la formation des enseignants avait été soutenu, à l'époque, par un grand nombre de députés radicaux et libéraux dont je faisais partie, et personnellement je suis opposé à la motion de M. Jean Romain - que je respecte énormément - et je me réjouis d'en débattre à la commission de l'enseignement supérieur. (Remarque.) Je pense qu'on peut discuter du contenu de la formation, mais à mon avis c'est donner un très mauvais signal que de vouloir réduire sa durée à trois ans, alors qu'on a alourdi l'enseignement des enfants à l'école primaire en leur imposant deux langues étrangères. Par ailleurs, nous en discuterons en commission mais j'aimerais simplement vous faire remarquer qu'on a aussi voté une loi d'autonomie pour l'Université, et que notre Grand Conseil n'est pas censé s'occuper de la pertinence des programmes. Mais nous en discuterons en commission. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Jean-Charles Rielle, pour quarante secondes.
M. Jean-Charles Rielle (S). Merci, Monsieur le président, il ne m'en faudra pas plus. Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire que je suis content de parler après M. Bugnion, qui a été directeur d'un cycle d'orientation. On ne veut pas d'une formation au rabais. Oeuvrant dans quarante écoles primaires et quatre cycles d'orientation en tant que médecin scolaire, je peux mesurer l'importance de ce cursus de quatre ans. Je vous rappelle qu'à présent il y a une direction générale de l'enseignement obligatoire, et qu'il ne s'agit pas de créer un fossé qui serait extrêmement important entre les enseignants du primaire et ceux du cycle d'orientation.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Jean-Charles Rielle. Quatre ans est une durée nécessaire. (Brouhaha.) Nous serions pour évacuer ce genre de motion, mais nous irons en commission de l'enseignement supérieur où nous pourrons traiter cela de manière plus poussée. Merci, Monsieur le président.
M. Jean Romain (PLR). Je ne veux pas en rajouter quant au débat, nous l'aurons durant les semaines où nous en discuterons. Simplement, nous ne voulons pas revenir au XIXe siècle, nous ne voulons pas l'école traditionnelle, mais nous voulons la tradition scolaire. Quand j'écoute les arguments de M. Deneys, je m'aperçois que ce sont pratiquement les mêmes qu'on nous a vendus contre les notes, pratiquement avec les mêmes notions ! Je crois que maintenant nous devons aller de l'avant; renvoyons cette motion à la commission de l'enseignement supérieur, étudions-la, entendons les sons de cloche différents, votons et nous verrons bien ce qui se passera. Mais je crois que le débat ne pourra pas être fait ici de manière sereine. Voilà, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Eric Stauffer, pour cinquante et une secondes.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Selon la vision des socialistes sur l'enseignement, on a toute la Suisse qui forme ses enseignants en trois ans, Genève en quatre, donc la traduction des propos de M. Deneys - vous transmettrez, Monsieur le président - c'est qu'en Suisse ce sont tous des imbéciles qui ne savent pas instruire ! Mais rappelez-moi, Monsieur Deneys, qui était en charge de l'instruction publique quand, dans les scores PISA, Genève était en dernière place et avait le bonnet d'âne ! (Brouhaha.) Alors vous voyez, Monsieur le député socialiste, c'est bien la démonstration que tout ce qui vous intéresse dans l'enseignement public, c'est de mettre des fonctionnaires, et encore des fonctionnaires, des directeurs d'école et encore des directeurs d'école...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député, s'il vous plaît.
M. Eric Stauffer. ...pour contrôler les directeurs d'école ! Nous, ce dont on a besoin, c'est d'enseigner de manière performante, de former en trois ans, comme dans le reste de la Suisse ! Merci ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Bertrand Buchs. Il vous reste deux minutes, Monsieur le député.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Je crois que ce sera très intéressant de débattre de cette motion à la commission de l'enseignement supérieur, parce qu'à mon avis il n'y a pas de relation entre la longueur de la formation et sa qualité. Personnellement j'ai suivi seize ans de formation. (Rires.) Est-ce que je suis de bonne qualité ou pas ? On ne peut pas le savoir ! J'ai l'impression qu'on parle de temps universitaire; à l'université, il faut toujours du temps supplémentaire. Mais je signale qu'il faudra aussi demander l'avis des personnes qui ont été formées en trois ans - ma soeur est institutrice et s'est formée en trois ans avec l'ancien système - pour savoir si elles ont eu l'impression d'avoir été mal formées et d'avoir dispensé un enseignement au rabais. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Pierre Weiss.
M. Pierre Weiss (PLR). J'ai quelques secondes ?
Le président. Il vous reste une minute et quarante-huit secondes.
Des voix. Oh là là !
M. Pierre Weiss. Merci beaucoup, Monsieur le président. Monsieur le président, il se trouve que lorsque nous avions décidé de ce projet de loi à l'époque, je faisais partie, pour d'excellentes raisons, de ceux qui pensaient qu'il fallait une formation en quatre ans. Je ne vais pas revenir ici sur les motifs, je le ferai en commission. Je dirai simplement que quand j'entends ce soir M. Deneys faire, lui, la critique de la motion déposée par mon admirable collègue Jean Romain, j'aurais plutôt tendance à changer d'avis. Et j'expliquerai aussi en commission pour quelle raison il conviendrait maintenant de faire un bilan des pour et des contre du système actuel et du système que nous n'avons pas voulu, de s'intéresser à ceux qui vont faire des études à Lausanne ou en Valais et à ceux qui viennent des autres cantons romands à Genève, attirés par l'excellence de notre système. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Stéphane Florey, pour quarante secondes.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Il y a juste un élément que j'aimerais ajouter, qui est à mon sens assez surprenant: quand nous avons adopté cet IUFE avec une formation sur quatre ans alors que dans les autres cantons elle était de trois ans, il a fallu au Conseil d'Etat bon nombre d'années de négociation avec les autres cantons, parce que la formation sur quatre ans que vous jugez vous-mêmes meilleure n'était même pas reconnue ! Donc là il y a quand même un problème, et savoir si c'est mieux en quatre ans ou en trois ans, ce sont les résultats des travaux de la commission qui le diront. (Commentaires.) Et pour ce qui est de l'école du XIXe siècle - vous transmettrez à M. Deneys, Monsieur le président - c'est quand même cette école-là qui a fait qu'aujourd'hui nous sommes ici...
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît, Monsieur le député.
M. Stéphane Florey. ...et que nous sommes devenus ce que nous sommes. Alors pourquoi dénigrer cet enseignement, je vous le demande ? Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Baud, il vous reste huit secondes.
M. Olivier Baud (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, juste pour vous rappeler que le peuple a voulu le mercredi matin supplémentaire à l'école parce qu'on lui a vendu qu'il fallait du temps supplémentaire...
Le président. Voilà, il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Olivier Baud. ...pour les élèves parce qu'effectivement il y a plus de matières, et il faut donc évidemment que les profs soient aussi mieux formés. Merci ! (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai qu'il y a quelque chose d'un petit peu étonnant dans le fait de voir ressurgir, quatre ans et demi après, le débat sur cette formation: trois ans, quatre ans, université, HEP... C'est un peu cyclique. Cela dit, le renvoi en commission aura au moins l'avantage de permettre de faire un bilan, et d'ailleurs - je me fais un peu l'avocat du diable - on aurait peut-être dû élargir cela à la question du secondaire, parce que fondamentalement c'est toute la question de la formation des enseignants qui est posée. Mais j'aimerais quand même vous dire qu'il y a quelque chose d'un peu paradoxal dans le fait d'en attendre toujours plus de l'école, toujours plus des enseignants, et puis de penser qu'on va pouvoir les former en moins de temps. Actuellement, on demande aux enseignants de devenir des spécialistes de l'enseignement des langues, on leur demande aussi - c'était le sujet de tout à l'heure - d'intégrer des enfants en situation de handicap, des enfants qui viennent parfois de milieux sociaux qui présentent de grandes difficultés, etc. On confie une mission de plus en plus éducative à l'école, et plus seulement une mission d'instruction, donc ça complique les choses ! Et si on veut une école de qualité, il faut certainement former les gens suffisamment. Vous avez d'ailleurs parlé de PISA; on aura l'occasion de revenir sur les chiffres, parce qu'on a entendu beaucoup de choses un peu étonnantes ce soir, mais je crois savoir qu'en Finlande et en Corée du Sud, pays qui avaient les meilleurs résultats PISA, la formation des enseignants dure cinq ans ! Alors peut-être, Monsieur Romain, que c'est cinq ans qu'il faudra nous proposer... (Commentaires.) ...à l'issue des travaux de commission ! Cela dit, trêve de plaisanterie: si une majorité de ce parlement renvoie la motion en commission, nous aurons l'occasion, tranquillement et sereinement, de faire le bilan de l'expérience IUFE.
Une dernière remarque, peut-être, pour M. Saudan: même si c'est l'Université qui forme, en réalité c'est le DIP qui confie cette formation à l'Université. En conséquence, cela se fait par le biais de conventions d'objectifs, et l'Université n'est pas libre d'inventer ce qu'elle veut n'importe comment. On n'est pas tout à fait dans la même situation que celle d'autres facultés.
Je me réjouis donc d'en parler avec vous en commission, si tel est votre souhait.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous avons donc une demande de renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement supérieur.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2194 à la commission de l'enseignement supérieur est adopté par 60 oui contre 24 non et 3 abstentions.