Séance du vendredi 14 février 2014 à 17h
1re législature - 1re année - 5e session - 26e séance

M 2163
Proposition de motion de Mmes et MM. Ivan Slatkine, Daniel Zaugg, Jacques Béné, Nathalie Fontanet, Jacques Jeannerat, Alain Meylan, Christiane Favre, Beatriz de Candolle, Pierre Weiss, Francis Walpen, Gabriel Barrillier, Pierre Conne, Michel Ducret, Nathalie Schneuwly, Charles Selleger, Cyril Aellen, Pierre Ronget : Fluidifier le trafic à la douane autoroutière : faisons sauter le bouchon de Bardonnex !
Ce texte figure dans le «Recueil des objets déposés et non traités durant la 57e législature».

Débat

Le président. Nous attaquons maintenant notre dernière urgence, soit la proposition de motion 2163. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. La parole est à M. Ivan Slatkine.

M. Ivan Slatkine (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je ne crois pas utile de faire un débat sur cette motion. Il faudrait simplement la renvoyer à la commission des transports. Hier, on a parlé longuement - enfin, on a tenté de parler - de mobilité. Il y a un point sur lequel on est tous d'accord dans ce parlement, c'est qu'il faut élargir l'autoroute de contournement. Une résolution a d'ailleurs été renvoyée dans ce sens lors de la précédente législature. Le constat est le suivant: s'il est très bien d'élargir l'autoroute de contournement, il faut aussi permettre aux véhicules de franchir la douane de Bardonnex de manière fluide, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Aux heures de pointe, les bouchons remontent de la douane de Bardonnex jusqu'au tunnel de Vernier, et il devient juste impossible de se déplacer. Hier, on est arrivés à un magnifique autogoal, puisqu'on a voté non à l'initiative 152 et non au contreprojet. Essayons au moins de faire en sorte que notre autoroute de contournement soit fluide. Pour qu'elle soit fluide de manière intégrale, il faut faire en sorte que la douane de Bardonnex soit réaménagée. On vous a mis un petit cliché aérien pour vous montrer le problème. Ça n'a pas l'air d'être très compliqué, mais un petit débat en commission des transports serait néanmoins utile. C'est la raison pour laquelle je vous invite, Mesdames et Messieurs, à renvoyer cet objet à la commission des transports.

M. Christian Frey (S). Mesdames et Messieurs, on reprend probablement certains éléments de la discussion d'hier soir. Fluidifier signifie irrémédiablement apporter plus de voitures, plus de pollution, plus de... (Exclamations. Commentaires.) Voilà, on se répète ! Mais effectivement, il y a un choix de société à faire. Il ne faut d'aucune manière favoriser la circulation routière. Il y a d'autres perspectives, on les a dites hier soir et on ne va pas les répéter. Il y a le CEVA, il y a des possibilités de transports publics, etc. La commune de Bardonnex ainsi que certains habitants de Perly-Certoux sont inquiets quant au développement de la plateforme autoroutière de Bardonnex. Il a été question d'y construire un restoroute avec un hôtel, des possibilités de logement, etc. A ma connaissance, ce projet n'est pas encore abandonné. Actuellement, on nous dit qu'il y a trois voies existantes - j'habite cette commune, je connais la région - et qu'il s'agirait simplement de faire en sorte que les Français en particulier ne bloquent pas la troisième voie. C'est vrai que le développement a été spectaculaire. On cite des chiffres absolument extraordinaires. En dix ans, la circulation a pratiquement doublé. Or pour éviter qu'elle ne double encore une fois ces prochaines années, le groupe socialiste vous recommande de refuser cette motion. J'amène encore un dernier élément. Je ne suis pas sûr, puisqu'il s'agit de discuter avec nos voisins français, qu'après ce qui s'est passé le week-end dernier, ces derniers soient particulièrement intéressés à nous faciliter la tâche. C'est la raison pour laquelle, encore une fois, le groupe socialiste vous propose de refuser cette motion.

M. Bernhard Riedweg (UDC). Lors de la construction de la plateforme de Bardonnex, des contrôles douaniers systématiques des personnes étaient en vigueur. En ces temps-là, l'économie genevoise ne faisait pas l'objet d'une attention particulière de la part des frontaliers, car le canton de Genève bénéficiait d'une saine situation de plein-emploi. Actuellement, grâce à une économie florissante, une grande partie des 80 000 frontaliers qui travaillent dans notre canton passent par la douane autoroutière de Bardonnex et viennent s'ajouter aux véhicules de passage. On dénombre plus de 43 000 véhicules par jour en semaine. Lors de la construction de cette douane, il n'a pas été tenu compte du fait qu'avec les accords de Schengen, la libre circulation des personnes ferait augmenter le trafic routier de telle manière que des bouchons quasi quotidiens se formeraient sur plusieurs kilomètres aux heures de pointe en semaine, tant du côté français que suisse. Un aménagement peu coûteux consistant à établir trois voies de circulation sur toute la longueur au passage de la douane permettrait de fluidifier le trafic en direction de la France et d'éviter l'effet d'entonnoir qui est la cause principale du sensible ralentissement du trafic à cet endroit. Pour ce faire, une présélection permettant aux camions de rejoindre leur parking sur la plateforme devrait être créée. La solution est à rechercher du côté de l'OFROU, de la DGM, de l'AFD et des autorités françaises dans un délai raisonnable. Notre groupe est pour le renvoi de cette motion à la commission des transports. Merci, Monsieur le président.

M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien va soutenir le renvoi de cette motion à la commission des transports. L'idée semble tout à fait logique, puisqu'on peut déjà utiliser la troisième voie autoroutière à de nombreux endroits en Suisse et que la Confédération le permet. Il est tout à fait logique - on a parlé hier des problèmes de pollution et de ceux liés à la santé - qu'on lutte contre un bouchon qui se forme tous les soirs à partir de 16h ou 17h sur plusieurs kilomètres avant la douane de Bardonnex. Il faut trouver une solution. Il y a une chose que je ne comprends pas de la part du parti socialiste, c'est qu'il a soutenu l'agrandissement de l'autoroute. L'agrandissement de l'autoroute, tout le monde l'a soutenu. Il y aura donc l'agrandissement de l'autoroute. S'il y a l'agrandissement de l'autoroute, il y aura une troisième voie à Bardonnex, c'est logique. Il ne faut donc pas venir nous dire maintenant que vous n'êtes pas d'accord et que vous ne voulez pas de route supplémentaire. Tout le monde l'a soutenu, tous les partis politiques ont soutenu cette autoroute de contournement agrandie. On regrette, nous aussi, de ne pas avoir fini l'autoroute de contournement en votant le contreprojet hier. C'est dommage, mais c'est ainsi. Merci beaucoup.

Mme Lisa Mazzone (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, la première invite de cette motion pourrait nous convenir. On parle de mettre en place des concertations avec l'Administration fédérale des douanes, la DGM et les autorités françaises pour des mesures utiles permettant une meilleure régulation du trafic à la douane de Bardonnex, notamment pour éviter la formation de bouchons. En l'état, cela pourrait nous convenir puisque éviter la formation de bouchons, c'est avant tout encourager un transfert modal et un report des usagers de la voiture vers d'autres modes de transport plus durables, tels que les transports collectifs ou d'autres types de transport. Or, malheureusement, la deuxième invite parle d'une augmentation de la voirie. On se retrouve donc dans le cas qu'on évoquait hier soir en long et en large, soit le mythe de la nouvelle route comme solution aux problèmes de mobilité, alors que l'on sait qu'augmenter la voirie aura pour seul effet d'augmenter le trafic et les nuisances qui l'accompagnent. On peut lire dans l'exposé des motifs qu'il s'agit d'un «classique des difficultés de circulation genevoises». A titre personnel, je dirais plutôt qu'il s'agit d'un classique du dogme selon lequel augmenter la voirie résoudra les problèmes de mobilité. Certes, il y a aujourd'hui une problématique. Le problème est là, on le reconnaît, il existe. Mais la mesure proposée n'engendrera qu'une augmentation du trafic et des bouchons. Aujourd'hui, il faut investir et développer de réelles alternatives - que les usagers de cette route n'ont actuellement pas - pour faire des choix plus durables et plus à même de répondre aux enjeux environnementaux et de santé publique. Comme on l'a vu dans le cas de l'autoroute Annecy-Genève, la seule conséquence de la création d'une nouvelle voirie est l'augmentation parallèle du trafic. L'effet de délestage n'existe pas.

J'aimerais dire pour finir, puisque M. Buchs, en tant que médecin, a parlé de pollution - et effectivement, la pollution a des effets extrêmement néfastes sur la santé de la population - que ce n'est pas en augmentant le trafic qu'on réduira la pollution. Bien au contraire, il me semble qu'il va de soi que l'augmentation du trafic aura pour seul effet d'augmenter parallèlement la pollution même si, dans un premier temps, on aura effectivement un petit peu moins de bouchons. Mais ceux-ci se reformeront tout autant et tout aussi rapidement. C'est pourquoi le groupe des Verts vous engage à refuser cette proposition de motion. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG). Tout d'abord, il est évident que nous soutiendrons cette motion, parce que face au trafic frontalier qui explose, il est nécessaire de se préoccuper de cette question et de résoudre le problème des bouchons. Comme il faut voir le problème de manière globale, nous avons déposé un amendement qui demande que l'on s'occupe également des petites douanes, notamment de la fermeture de certaines de ces petites douanes pour lutter contre les nuisances que subissent les riverains. Mais il y a un autre élément qui m'étonne beaucoup dans cette affaire, c'est que l'on ne respecte pas la constitution. En effet, le Bureau du Grand Conseil, avant de nous soumettre le texte, aurait dû le soumettre à un préavis du Conseil d'Etat, comme il est nécessaire de le faire d'après l'article 92 de la constitution. Et je remarque là qu'il y a deux poids, deux mesures. Il y a quelques semaines, j'ai en effet déposé une résolution concernant les traités internationaux - qui figure d'ailleurs dans la législation genevoise - et elle a été retenue du simple fait qu'il fallait respecter l'article 92 de la constitution demandant un préavis du Conseil d'Etat pour toute demande concernant nos relations avec l'extérieur ! Or dans ce cas-là, il y a une demande concernant les douanes françaises qui figure de manière précise. Avant même qu'il y ait un examen de ce texte, nous devons avoir un préavis du Conseil d'Etat. C'est quelque chose qui manque à ce niveau-là. Je pense qu'il faut une équité. Soit on respecte la constitution pour tous les textes, soit on ne la respecte pas. Je pense qu'il faut respecter la constitution, donc demander un préavis du Conseil d'Etat avant d'examiner la question. Merci, Monsieur le président.

M. Patrick Lussi (UDC). Ce sera rapide, Monsieur le président. Je trouve quand même paradoxal que les Verts viennent nous dire qu'il faut supprimer des véhicules et faire passer des trains. J'aimerais simplement rappeler qu'à l'époque, le MCG et l'UDC étaient les seuls à dire que le tracé actuel du CEVA, qui va à Annemasse, était une hérésie et qu'il fallait aller à Bardonnex. Je voulais simplement relever ceci parce que ça donne parfois du piquant aux finalités de discussions que nous avons dans ce parlement.

M. Pierre Weiss (PLR). Je remercie un des préopinants d'avoir parlé des petites douanes. Je vis à 80 mètres de l'une de ces petites douanes et je dois dire qu'il m'arrive aussi de prendre la douane de Bardonnex pour me rendre dans la commune de Soral. Vous aurez évidemment reconnu ma commune d'origine. Je voulais simplement vous dire que la douane de Bardonnex est une douane où le radar fonctionne très bien et ajouter que nous sommes dans une situation de trafic qui a été très bien décrite dans l'éditorial du Touring Club Suisse d'aujourd'hui, dont je vous conseille la lecture. En ville, c'est le parcours du combattant. Dans les villes suisses, tout est fait pour bloquer le trafic. Je conseille à notre ministre des transports de jeter un coup d'oeil à cet éditorial ainsi qu'à tous les autres membres de ce parlement de l'apprendre par coeur, car il est excellent. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Ivan Slatkine, à qui il reste une minute et quarante-trois secondes.

M. Ivan Slatkine (PLR). Merci, Monsieur le président. Comme je l'avais dit, l'idée n'était pas d'ouvrir un long débat lors de cette séance. Mais quand on entend les propos socialistes et ceux des Verts ce soir, excusez-moi, il y a de quoi tomber par terre ! Que souhaitent le parti socialiste et les Verts ? On parle d'une traversée du lac, ils n'en veulent pas ! On parle d'une fluidification du trafic sur une autoroute, ils n'en veulent pas ! Que veulent-ils ? Plus de bouchons, plus de pollution, la dégradation de la qualité de vie des habitants, celle des habitants des petits villages ? C'est à se tirer des balles ! C'est à se tirer des balles, je ne peux pas parler autrement. Je pensais que sur une autoroute, l'idée était quand même de rouler. C'est fait pour les voitures !

Une voix. Eh bien non !

M. Ivan Slatkine. Eh bien non ! Il faut croire qu'aujourd'hui, il faudrait remettre les chevaux et les carrosses sur l'autoroute. On sait que c'est la politique des Verts, on découvre que c'est celle du parti socialiste. C'est consternant. J'espère que les Genevois seront attentifs à cela. Et pour une fois, je citerai mon préopinant MCG: j'espère que dans quatre ans, les Genevois sauront encore mieux comment il faut voter. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Michel Amaudruz pour cinquante et une secondes.

M. Michel Amaudruz (UDC). Il y a une chose qui m'interpelle, Monsieur le président. Ici, j'ai entendu dire: «Pas de troisième voie, ça augmente le trafic.» Je reprends donc votre équation: pourquoi ne proposez-vous pas de fermer l'autoroute ? Comme ça, vous serez sûrs de ne plus avoir de voitures !

Le président. Merci, Monsieur le député. Madame Mazzone, vous n'avez plus de temps de parole, je ne peux donc pas vous la transmettre. La parole est à M. le conseiller d'Etat Luc Barthassat.

M. Luc Barthassat, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'accueille de manière positive cette motion et ces invites. Après tous les débats qu'on a eus, avec tous les problèmes de trafic à nos frontières - on en a déjà parlé passablement avant - je pense que c'est le moment, en début de législature, de faire un petit point de la situation en commission. Nous pourrons ainsi répondre aux invites et faire le point sur tous ces problèmes. L'un d'entre vous a parlé de ce qui se passait aux petites douanes en déposant un amendement. Pourquoi ne pas faire justement un point de situation ? Je me réjouis de le faire en commission. Il n'y a pas lieu de faire le débat ici aujourd'hui. Il faut le faire en commission et revenir devant cette assemblée avec un rapport concret sur ce qu'on a pu faire, sur ce qui se fait déjà et sur ce qu'on peut faire, soit du côté suisse, soit du côté français. Il est important qu'on puisse en parler de manière sereine et définir des priorités. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission des transports, que je soumets aux votes de l'assemblée.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2163 à la commission des transports est adopté par 71 oui contre 15 non et 6 abstentions.