Séance du vendredi 14 février 2014 à 15h
1re législature - 1re année - 5e session - 25e séance

M 1949
Proposition de motion de Mme et MM. Eric Stauffer, Mauro Poggia, Jean-François Girardet, Pascal Spuhler, Sandro Pistis, Henry Rappaz, Dominique Rolle, Fabien Delaloye, André Python, Guillaume Sauty, Olivier Sauty, Jean-Marie Voumard, Florian Gander : Rendons à la police la maîtrise de son informatique : non à un CTI défaillant qui sous-traite la maintenance de la centrale d'appel 117 à une entreprise américaine établie en France
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes» de la session XI des 22 et 23 septembre 2011.
Délai de traitement en commission dépassé (cf. article 194 LRGC)

Débat

Le président. Nous passons aux objets dont le délai de traitement en commission est dépassé. Il s'agit toujours de la catégorie II, trente minutes. Nous pouvons traiter les motions sur le siège ou les renvoyer en commission. Dans ce cas, la commission a six mois pour traiter l'objet. Nous abordons la M 1949. La parole est à M. Eric Stauffer.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, c'est toujours très désagréable qu'un texte revienne en plénière parce que le délai de traitement est dépassé. Cette motion a été déposée le 12 avril 2010, c'est-à-dire il y a presque quatre ans, lorsque l'horreur avait été découverte. La maintenance du service informatique de la police était confiée à une société qui sous-traitait. Deux techniciens informaticiens d'Aix-en-Provence montaient à Genève et avaient accès à l'ensemble des données informatiques de la police, voitures banalisées, fichiers des policiers, coordonnées, etc. Vous comprendrez aisément que cette situation n'est qu'une genevoiserie de plus, mais il est vrai qu'à l'époque, le CTI était rattaché au département des constructions sous l'égide de Mark Muller, que depuis, quelques conseillers d'Etat ont coulé sous les ponts... euh, pardon, que de l'eau a coulé sous les ponts ! (Rires.) Cela relève aujourd'hui de la responsabilité de Pierre Maudet, mais la situation n'est pas encore tout à fait réglée.

Compte tenu du fait que c'est une motion, Mesdames et Messieurs, et qu'elle concerne tout de même la sécurité intérieure, puisque ce sont des données sensibles, il serait peut-être bien de la renvoyer au Conseil d'Etat afin qu'il nous rende réponse dans les six mois pour voir où nous en sommes quatre ans après son dépôt. Mais je sais que pour mes amis de gauche, la sécurité intérieure est peu importante. (Protestation.) Que les systèmes informatiques soient ouverts au monde entier, transparents et en licence libre vous sied parfaitement. Mais je sais que parmi mes amis de droite, il y a quand même quelques personnes sensibles aux aspects sécuritaires et informatiques de notre canton. Nous sommes un canton souverain, nous sommes dans une Confédération, et il est tout simplement impensable que la maintenance soit confiée à des employés de sociétés étrangères qui pourraient avoir ainsi accès à des informations sensibles. On se souvient de quelques fichiers de la Banque cantonale qui avaient fini au fisc français: ce n'est pas acceptable. A tout le moins, il serait intéressant d'avoir la réponse du Conseil d'Etat aujourd'hui, valeur 2014, sur la question posée en 2010. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Pierre Vanek (EAG). Deux mots. Bien entendu, le long traitement par une commission d'un objet comme celui-ci, de n'importe quel objet, est insatisfaisant. Je pense en effet que cet objet peut repartir en commission. Mais j'aimerais ajouter que nous ne sommes évidemment pas d'accord avec le raisonnement qui nous est présenté ici: on nous dit que le CTI dysfonctionne de manière grave, ou a dysfonctionné, puisque cela date d'il y a deux ans. (Brouhaha.) Fort bien, il s'agit en effet de le faire fonctionner. La réponse consistant à dire qu'il faut confier l'informatique à la police plutôt que d'utiliser le CTI me semble inadéquate. Si nous avons un centre pour les technologies de l'information et qu'il ne fonctionne pas, la réponse n'est pas de confier l'informatique à la police, mais de faire fonctionner l'informatique. La police a toutes sortes de qualités et de compétences, mais pas à priori celle de gérer au mieux les systèmes informatiques. (Brouhaha.) Il y aura lieu de discuter de tout ceci sur pièces en commission, une fois que l'objet aura été renvoyé, le cas échéant.

Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Je voudrais juste corriger quelques éléments. Cette motion a été étudiée par la commission de contrôle de gestion. Nous avons mené un certain nombre d'auditions, je crois que nous sommes tous prêts à voter et à refuser cette motion. Je vous remercie.

M. Patrick Lussi (UDC). En effet, je suis obligé d'abonder dans le sens des paroles de ma préopinante: en commission de contrôle de gestion, nous avons étudié ce sujet. Je crois que la proposition faite par le MCG est très sage; elle a été étudiée, le rapport n'a pas été rendu pour plusieurs raisons de surcharge, mais c'est un problème qui date déjà de quatre ans - Monsieur Vanek, excusez-nous - et qu'est-ce qui est demandé ? Que le Conseil d'Etat considère la situation et nous dise où en sont les améliorations. (Commentaires.) C'est plein de bon sens, l'UDC appuiera le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, cela a été dit, cette motion date. Entre-temps, les choses ont passablement évolué en matière informatique pour l'Etat en général et pour la police en particulier. En l'occurrence, la question de fond soulevée par les motionnaires est intéressante: hormis bien sûr les fonctionnaires de police dans l'accomplissement de leurs fonctions, quelles sont les personnes dotées de compétences techniques et informatiques qui ont accès aux données sensibles que possède la police en matière informatique afin de faire fonctionner ces systèmes ? Cette question a largement été étudiée, notamment à travers les auditions à la commission de contrôle de gestion, et aujourd'hui la réponse apportée semble satisfaisante du point de vue de l'Etat: l'informatique n'est pas intégrée à la police, car cette solution serait de la mauvaise gouvernance. Nous avons une direction générale des systèmes d'information - d'ailleurs rattachée au même département que celui de la sécurité - qui aujourd'hui accomplit ce travail. Mais cette délégation à la DGSI est limitée: le nombre de personnes qui ont accès aux informations sensibles détenues par les systèmes de police est restreint et contrôlé. Ainsi, je crois que le souci des motionnaires est atteint.

Au surplus, si vous souhaitez renvoyer cette motion en commission, le Conseil d'Etat vous expliquera la même chose que je vous dis là, mais certainement avec davantage de détails: c'est une option. Dans le cas de son adoption pour obtenir une réponse, Mesdames et Messieurs les députés: si vous adoptez une motion, c'est pour que le Conseil d'Etat suive ses invites. Or, les invites de cette motion ne demandent pas au Conseil d'Etat de rendre un rapport, mais de sortir la gestion du système informatique de la police de la CTI, qui n'existe d'ailleurs plus. Le Conseil d'Etat a adopté un règlement prévoyant que le système reste au sein de la DGSI, a donné mandat au corps de police pour s'organiser intra-muros, etc., soit un certain nombre d'actions que même les personnes qui sont aujourd'hui intervenues sur cette question ne demandent pas. Il y a donc trois possibilités: soit vous modifiez les invites pour que le Conseil d'Etat donne une réponse informative à ce Conseil; soit vous renvoyez cette motion en commission pour avoir plus de détails sur ce que je vous ai brièvement présenté ici; soit encore, vous refusez cette motion et suivez finalement les recommandations qui ont été faites dans le cadre de la commission de contrôle de gestion.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

Mise aux voix, la proposition de motion 1949 est rejetée par 50 non contre 28 oui et 1 abstention.