Séance du jeudi 2 mars 2017 à 10h20
1re législature - 3e année - 13e session - 75e séance

La séance est ouverte à 10h20, sous la présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président.

Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Mauro Poggia, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Serge Dal Busco, Pierre Maudet et Anne Emery-Torracinta, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Sandra Golay, Lionel Halpérin, Norbert Maendly, Bernhard Riedweg, Patrick Saudan, Pascal Spuhler et Ronald Zacharias, députés.

Députés suppléants présents: Mme et MM. Gilbert Catelain, Christian Decorvet, Jean Fontaine, Nathalie Hardyn, Patrick Hulliger et Pascal Uehlinger.

Communications de la présidence

Le président. Je salue à la tribune une classe d'apprentis du collège et école de commerce Emilie-Gourd qui vient assister à notre session dans le cadre de son cours d'éducation civique. Les élèves sont accompagnés par leur enseignant, M. David Pillonel. (Applaudissements.)

Je profite également de l'occasion pour souhaiter un excellent anniversaire à notre collègue, M. le député Michel Baud. (Applaudissements.)

Correspondance

Le président. Le Bureau et les chefs de groupes ont trouvé à leurs places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.

Ordonnance de classement du Ministère public du 20 février 2017 à la suite du dépôt de plainte pénale du Grand Conseil du 17 mai 2016 pour violation du secret de fonction (transmis à la Commission de contrôle de gestion) (C-3624)

Arrêt du 24 février 2017 du Tribunal fédéral rejetant le recours en matière de droit public déposé par MM. GERMANN Christophe et KÜNZI Daniel contre l'arrêt de la Chambre constitutionnelle du 15 juin 2015 relatif à l'aide financière à la Fondation romande pour le cinéma pour les années 2013 à 2016 (transmis à la Commission des finances) (C-3625)

Annonces et dépôts

Néant.

R 797
Proposition de résolution de Mmes et MM. Jean-Marie Voumard, André Python, Ronald Zacharias, Pascal Spuhler, Carlos Medeiros, François Baertschi, Christian Flury, Thierry Cerutti, Jean-François Girardet, Bernhard Riedweg, Sandro Pistis, Sandra Golay, Danièle Magnin, Henry Rappaz, Florian Gander : Maintenons le service de dédouanement de Thônex-Vallard
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 15 et 16 octobre 2015.

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, le présent objet est classé en catégorie II avec trente minutes de temps de parole. Je passe la parole au premier signataire, M. le député Jean-Marie Voumard.

M. Jean-Marie Voumard (MCG). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, le MCG n'est pas opposé au franchissement de nos frontières, mais celles-ci se doivent d'être ouvertes aux échanges économiques et elles doivent permettre un accès facilité pour les négociants et commerçants qui doivent s'affranchir de taxes douanières. Des deux côtés de la frontière, on parle de la mobilité et du Grand Genève: c'est devenu un point d'orgue politique. Avec les suppressions annoncées dans les médias, dont la suppression du service de dédouanement de Thônex-Vallard, on pourra dorénavant parler d'immobilité ! Je vous précise simplement qu'en 2014, 60 000 camions environ sont passés par la douane de Thônex-Vallard. Je vous rends attentifs aux conséquences, si ces camions devaient se rendre à Bardonnex pour effectuer leur dédouanement ou leur taxation douanière: particules fines et bouchons sur l'autoroute de contournement avec les pendulaires. Vous venez d'accepter la motion 2313 pour réduire la pollution par les particules fines: afin d'être cohérent avec votre vote précédent, notre groupe vous demande d'accepter cette résolution !

M. Bertrand Buchs (PDC). Je serai bref, Monsieur le président. Nous sommes d'accord avec cette proposition de résolution, mais il semble qu'elle ne soit plus d'actualité puisque la Confédération aurait accepté de maintenir le service de dédouanement à la douane de Thônex-Vallard. Si c'est le cas, on pourrait donc retirer ce texte.

Mme Nathalie Hardyn (PLR), députée suppléante. Le groupe PLR considère que cette résolution est effectivement une nécessité. Cela étant, il est vrai que le 23 décembre dernier, l'administration fédérale des douanes a annoncé qu'elle renonçait à fermer le bureau de dédouanement de Thônex-Vallard, du fait des multiples interventions des acteurs genevois et du département de l'économie. Ce texte est donc devenu aujourd'hui sans objet.

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Le groupe socialiste a entendu ce que la préopinante PLR a dit, à savoir que cette proposition de résolution n'avait plus d'objet. Au-delà de ça, le groupe socialiste ne serait pas opposé à ce qu'on étudie ce texte. Tout d'un coup, on voit que le groupe MCG se préoccupe finalement aussi des problèmes de mobilité à Bardonnex. Vous savez que c'est un sujet qui préoccupe évidemment cette commune qui se voit envahie par de nombreuses voitures. Nous étions aussi intéressés parce que s'il y a certes la question du dédouanement des marchandises, on voit que votre groupe prend aussi en compte les personnes qui achètent en France voire plus loin et cette problématique du dédouanement peut aussi concerner les privés. On pourrait encore explorer les effets du tourisme d'achat et des autres pratiques des Genevois et des Genevoises par rapport au territoire transfrontalier. Ce que nous avons donc retenu, c'est que le MCG prend en compte les pratiques existantes au niveau de la région, et ça nous réjouit, parce qu'on sent quand même un certain assouplissement envers les résidents de l'autre côté de la frontière, et nous vous en remercions.

M. André Pfeffer (UDC). J'interviens dans l'optique que ce sujet est encore d'actualité. Le canton de Genève dispose de 35 postes de douane sur des routes cantonales et communales ainsi qu'à l'aéroport. Dix postes de douane sont fermés durant la nuit. Durant la journée, seuls quatre postes sont en mesure de dédouaner de la marchandise commerciale et privée: Bardonnex, l'aéroport, Ferney-Voltaire et Thônex-Vallard. Il est tout de même curieux qu'en cette période où le tourisme d'achats bat son plein, suite au renforcement du franc suisse, le service de dédouanement de Thônex-Vallard soit supprimé. Obliger de faire un détour de plusieurs kilomètres - soit à Bardonnex, soit à l'aéroport - est illogique et pas acceptable. Nous insistons donc auprès du Conseil d'Etat pour demander à l'administration fédérale des douanes de maintenir le service de dédouanement à la douane de Thônex-Vallard. Supprimer ces prestations douanières et encore diminuer le contrôle à nos frontières affaiblirait et fragiliserait toute une partie de notre économie.

Pour terminer, je mentionne que ce service n'a aucune incidence sur les finances de notre canton. L'UDC vous demande, dans l'optique où le sujet ne serait pas encore périmé, de bien vouloir accepter cette résolution, et je vous en remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Gilbert Catelain, pour une minute trente-six.

M. Gilbert Catelain (UDC), député suppléant. Merci, Monsieur le président. Je confirme les déclarations de ma préopinante libérale. Je l'ai encore appris ce matin des services: la décision a été prise de maintenir le service de dédouanement à Thônex-Vallard. Je voulais juste dire qu'en parallèle, il avait plutôt été imaginé de transférer tout le trafic sur la Praille, pas forcément sur Bardonnex; c'est-à-dire de faire venir tout le trafic au centre-ville, quasiment. Cette décision est non seulement une décision fédérale, mais aussi internationale, puisque c'est d'abord la douane française qui voulait supprimer le service de dédouanement et qu'en fin de compte, la Confédération ne faisait que se plier à la décision française. Or, les attentats en France font que le ministère des finances français va recruter massivement du personnel, ce qui leur permet aussi de maintenir leur poste de dédouanement.

M. François Baertschi (MCG). Il faut ajouter qu'il y a encore une actualité à cette résolution. Nous ne disions pas que le service de dédouanement de Thônex-Vallard allait fermer; nous disions qu'il pourrait fermer et cette menace est toujours présente. Donc, si on veut exprimer une volonté de garder ce service de dédouanement, il est toujours utile de voter cette résolution: elle est toujours pertinente actuellement. Je vous demande donc de la soutenir. C'est important, quelles que soient les décisions que la Confédération - qui peut changer d'opinion très rapidement - a pu prendre. Donc, il faut que Genève exprime sa détermination et cette détermination, nous pouvons l'exprimer par le biais de cette résolution. Nous avons bien entendu les divers intervenants de la députation et vu qu'il y avait une volonté dans ce parlement de garder ce service de dédouanement à Thônex-Vallard. Le Conseil d'Etat peut en prendre bonne note et, quoi qu'il arrive, défendre ce service au niveau fédéral. Je vous demande donc encore une fois de soutenir cette résolution.

M. Boris Calame (Ve). Chères et chers collègues, cette résolution a effectivement du sens. Sur le principe, oui, il y a un certain nombre de passages à Thônex-Vallard et ils mériteraient que l'on n'abandonne pas le contrôle à cette douane. Aujourd'hui, trois douanes uniquement sont contrôlées dans le canton de Genève. Toutefois, à notre connaissance, il a été dit par le Conseil fédéral que cette douane serait maintenue. Nous proposons donc de renvoyer cette résolution à la commission de l'économie pour écouter le conseiller d'Etat Pierre Maudet d'une part et les services des douanes d'autre part, afin qu'ils puissent nous confirmer la réalité de cette décision.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je vous ferai voter tout à l'heure sur la demande de renvoi à la commission de l'économie. Je passe la parole au président du Conseil d'Etat, M. François Longchamp.

M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, en l'absence de M. Maudet, je m'exprime au nom du Conseil d'Etat pour vous confirmer ce qui a été dit par plusieurs d'entre vous: cette résolution est aujourd'hui sans objet. A la suite des démarches du Conseil d'Etat, nous avons obtenu toutes les garanties de la part de la Direction générale des douanes et des autorités fédérales sur le maintien de cette douane à Thônex-Vallard, avec les services qui lui sont associés. C'est d'autant plus nécessaire qu'il s'agit d'une douane importante, non seulement pour le canton de Genève, mais aussi lorsque l'on compare son activité à celle des autres douanes suisses: c'est l'une des douanes les plus importantes pour Genève, mais aussi pour la Suisse. Toutes les garanties écrites nous ont été données, il n'est donc pas nécessaire - de l'avis du Conseil d'Etat - de continuer à disserter sur une proposition de résolution sans objet manifeste.

Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. La parole n'étant plus demandée, Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais d'abord voter sur le renvoi de ce texte à la commission de l'économie.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 797 à la commission de l'économie est adopté par 57 oui contre 29 non et 2 abstentions.

R 798
Proposition de résolution de MM. François Baertschi, Eric Stauffer, Sandro Pistis, Jean Sanchez, Carlos Medeiros, Thierry Cerutti, Ronald Zacharias, André Python, Henry Rappaz, Francisco Valentin : Renforçons la frontière, pour éviter un flux non maîtrisable de réfugiés !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 15 et 16 octobre 2015.

Débat

Le président. Cet objet de notre ordre du jour est classé en catégorie II, avec trente minutes de temps de parole. Je passe la parole au premier signataire, M. le député François Baertschi.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Nous avons déposé cette résolution il y a déjà quelque temps, mais elle est toujours d'actualité, hélas ! (Commentaire.) Notre frontière de manière générale, c'est-à-dire la frontière de la Suisse, mais également la frontière de Genève, mérite d'être protégée contre une immigration massive - une immigration économique et une immigration de la pauvreté de nombreuses personnes de ce monde. On le voit en particulier à la frontière italienne, mais cette immigration arrive également à la frontière genevoise. Le groupe MCG estime qu'il faut une véritable protection de notre pays qui s'étende également à notre canton, le long duquel on a vu que la frontière était dégarnie parce qu'on a dû faire des arbitrages, notamment en déplaçant des gardes-frontière à l'aéroport. Il serait donc bien qu'on renforce le dispositif autour de Genève, c'est quelque chose d'utile. Nous pourrons choisir en vertu des lois votées démocratiquement les personnes qui ont droit à un asile et non pas subir l'opération portes ouvertes que nous connaissons, hélas, à Genève. Le groupe MCG estime qu'on n'aide pas ces gens; on crée de la misère, on crée de l'exploitation, on crée de l'inégalité par ce biais-là. Il faut défendre les frontières, il faut défendre le pays - notre pays - dans ses structures démocratiques ! C'est une tâche importante, et cette tâche, nous vous demandons de la soutenir avec cette résolution.

M. Bertrand Buchs (PDC). Monsieur le président, le parti démocrate-chrétien ne va pas voter cette résolution. Pour nous, elle est simplement scandaleuse: je ne vois pas où est le problème actuellement. On veut même mettre l'armée aux frontières ! Suivons la politique de M. Trump et construisons un mur, alors ! (Commentaires.) Investissons dans un mur pour protéger notre frontière ! J'aimerais aussi rappeler au MCG que le ministre UDC et conseiller fédéral Ueli Maurer refuse d'augmenter le nombre de postes de douaniers, alors que le Conseil d'Etat n'arrête pas de demander plus de douaniers. Il y a donc deux discours: d'un côté, il y a un discours disant qu'il faut le renfort de l'armée, mais quand on demande plus de douaniers, pas à cause des réfugiés, mais simplement pour contrôler les denrées importées de France d'une façon illégale, là, il n'y a jamais personne ! Il n'y a pas de douaniers ! Mettez-vous donc d'accord au sein de vos partis politiques au sujet de l'engagement d'un peu plus de douaniers et arrêtez de dire qu'on est dans une situation de guerre et qu'il faut fermer nos frontières: c'est n'importe quoi et c'est irresponsable ! (Applaudissements.)

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, des barbelés, des soldats aux frontières: décidément, certains veulent que l'histoire se répète ! Cette vision catastrophiste et ultra protectionniste de nos frontières est proprement inacceptable. En plus, elle induit une vision fausse de la réalité actuelle. Comme si, ainsi que l'a prétendu M. Baertschi, nos portes étaient ouvertes et que tout un chacun pouvait venir s'installer ici et obtenir l'asile ! On pourrait espérer être plus généreux en matière d'hospitalité, mais ce n'est de loin pas le cas ! On l'a dit tout à l'heure, la Suisse est le pays qui met le plus assidûment en pratique les accords de Dublin. Mais ce texte n'est pas uniquement un manquement à nos devoirs d'hospitalité et de générosité, c'est aussi, politiquement, une grave erreur; c'est une manière de ne pas considérer la situation actuelle. Ensuite, on vient dire qu'il concerne l'asile économique et non pas l'asile politique. Vous le savez très bien, la procédure d'asile qui existe aujourd'hui agit d'ores et déjà comme un filtre, de manière drastique et peut-être même plus violemment que ce que nous pourrions souhaiter. Cela étant, on ne peut pas accepter une résolution comme celle-là, et j'aimerais dire que ceux qui, généralement, veulent fermer les frontières et refuser l'accès aux requérants d'asile sont généralement aussi ceux qui soutiennent l'industrie de l'armement, qui acceptent de soutenir ou de négocier avec des gouvernements qui créent ces situations. Alors cessez de parler de devoirs ! Respectez, d'une part, le droit - le droit suisse - et essayez de l'améliorer, mais, de grâce, ne le rendez pas encore plus cruel qu'il ne l'est déjà ! Je vous remercie de votre attention. Nous refuserons résolument cette résolution ! (Applaudissements.)

M. Yves de Matteis (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, sur le plan de la forme, j'aimerais tout d'abord souligner les doutes assez importants qu'on peut avoir au sujet de cette résolution. Une résolution à l'intention des Chambres comme celle-ci, émanant du canton de Genève, se doit de concerner une thématique cantonale, comme la résolution que nous avons votée un peu plus tôt aujourd'hui. Or que dit celle-ci ? Il s'agit de renforcer les frontières du sud et de l'est de la Suisse ! C'est donc d'autres cantons que de celui de Genève qu'il est ici question ! Je ne sais pas si cela a été fait, mais il aurait pour le moins été intéressant de demander l'avis des cantons qui seraient concernés au premier chef par l'établissement de troupes militaires à leurs frontières. On ne voit pas trop en quoi Genève serait en droit de demander à la Confédération d'intervenir dans d'autres cantons en négligeant le principe de souveraineté de ces derniers, que ce soit pour renforcer ou diminuer les contrôles aux frontières sud et est de notre pays.

Ensuite, sur le fond, si on lit le texte, il précise, dans la première ligne de l'exposé des motifs, et je cite, que «l'Autriche vient de recevoir, mi-septembre, plus de 20 000 réfugiés en deux jours seulement, en provenance du Moyen-Orient». Il continue en précisant, et je cite toujours: «Cet afflux massif menace également la Suisse, sans compter les développements de cette crise sans précédent. Nous devons le plus rapidement possible prendre des mesures qui s'imposent», etc. Or, qu'en est-il ? Cette proposition de résolution a été déposée en septembre 2015, soit il y a bientôt un an et demi. Les faits dont le texte reflète la crainte, à savoir un afflux énorme de réfugiés supplémentaires en provenance de l'est et du sud, ne se sont pas réalisés. Au contraire, on a plutôt vu, notamment l'année dernière, une diminution des réfugiés en provenance des régions en conflit ou des pays voisins. Pas trace non plus - loin de là - d'un flux de réfugiés passant nos frontières de manière illégale ! Bref, le catastrophisme de cette résolution a été simplement contredit par les faits. C'est la deuxième raison pour laquelle cette résolution doit être refusée.

La troisième raison, peut-être la plus importante et aussi la plus simple, est une raison de principe voire d'éthique. Il y a quelques dizaines d'années, des réfugiés avaient déjà été repoussés hors des frontières de la Suisse, manu militari pour certains. Mes préopinants l'ont déjà mentionné. A l'époque aussi, on avait prétendu que ces réfugiés représentaient une menace et que la Suisse allait ployer sous le poids de ces nouveaux arrivants: la barque était pleine, selon certains. On parlait aussi d'un afflux massif qui aller menacer la Suisse d'une «Überfremdung». Cette vision des choses n'est pas la nôtre, c'est la troisième et dernière raison pour laquelle nous ne soutiendrons pas ce texte.

En résumé, cette résolution nous semble inadéquate, pour des raisons liées à l'espace: elle concerne des territoires qui ne sont pas situés dans le canton de Genève; pour des raisons liées au passage du temps: ses prévisions catastrophistes ont été contredites par la réalité. Enfin, cette résolution est indigne de la réputation de Genève en tant que tête de pont du droit humanitaire.

M. Marc Falquet (UDC). C'est dommage, la plupart des gens parlent en méconnaissance de cause. Après vingt ans de police, j'ai quelque expérience en ce qui concerne l'importance des douanes et des frontières. Donc, vous souhaitez respecter les droits des personnes qui veulent demander l'asile. Or, en renforçant les douanes, on peut interpeller des personnes qui ne correspondent pas aux critères de l'asile ! De nombreux demandeurs d'asile - la majorité peut-être - viennent sans pièce d'identité, alors qu'ils en ont une ! Simplement, leur identité n'est pas toujours celle qu'ils donnent. Souvent, ils présentent des fausses identités en déposant une demande d'asile afin d'éviter d'être refoulés. On pourrait appliquer plus équitablement la convention de 1951 sur l'asile et, pour l'asile, ce serait un bienfait. Ça permettrait de faire réadmettre en France des gens qui n'ont rien à faire dans le domaine de l'asile - et il y en a énormément avec des fausses identités. Ça, c'est une chose.

Concernant les invites, on peut discuter, mais, sur le fond, je rappelle qu'en 2014, l'UDC a déposé une résolution pour augmenter le nombre de gardes-frontière. Cette résolution avait été démolie au Conseil des Etats et n'a finalement pas été adoptée, et nos deux députés UDC réclament toujours le renforcement des douanes. Pourquoi faut-il renforcer les douanes ? (Brouhaha.) Vous savez qu'à Genève, environ 70% de criminels incarcérés proviennent de la criminalité transfrontalière. Ce sont des gens qui passent la douane et qui ne sont la plupart du temps pas interpellés à ce moment. L'augmentation des effectifs des douanes permettrait d'améliorer considérablement la sécurité des citoyens. Il y a un cambriolage et un vol de voiture par heure à Genève. Ce sont donc tous des gens qui passent la frontière dans les deux sens et le contrôle des douanes est essentiel pour assurer la sécurité des citoyens. Dans les années 1980, nous avions accueilli une conférence sur la Palestine. Nous avions utilisé l'armée et il y a eu 80% de délits en moins à Genève. (Commentaires.) Ça a donc un impact direct sur la sécurité des Genevois ! A ce moment, mieux vaut engager des gardes-frontière que construire une prison. Ainsi, vous réglez le problème à la racine puisque la criminalité est en majorité transfrontalière !

Mis à part le problème de l'asile qui permettrait effectivement de donner un peu plus d'éthique à l'asile, il y a la criminalité liée au trafic de drogue. Que je sache, il n'y a pas de drogues produites en Suisse. Cette mesure pourrait donc également favoriser la lutte contre le trafic de drogue ainsi que la lutte contre la contrebande qui est immense à Genève. Donc, pour la sécurité du citoyen, c'est un bienfait et ça devrait être une nécessité. Chacun le dit, chaque citoyen le dit et demande qu'on renforce le contrôle aux frontières. C'est tellement logique, mais pas pour Genève !

Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, je suis un peu consternée, je dois vous l'avouer, face au contenu de cette résolution. Mesdames et Messieurs les députés, de l'UDC notamment, pensez-vous vraiment que ces requérants d'asile quittent leur maison, leur pays, font plusieurs milliers de kilomètres, parfois à pied, parfois sur des bateaux de fortune, avec leurs enfants, comme ça, pour le fun ? Pour faire une petite balade à travers l'Europe ? Pour partir à l'aventure ? Non, évidemment non ! Ces personnes le font parce qu'elles se prennent des pluies de bombes sur la tronche depuis des années ! C'est ça, la réalité que ces personnes vivent. Je vous montre quelques photos. (L'oratrice montre des photos de bâtiments détruits.) Ça, c'est la situation à Alep dont certains quartiers sont complètement dévastés ! Ils sont rasés et n'existent plus ! Vous voyez l'état des maisons et des habitations à Alep ? (Commentaires.) Les populations civiles sont prises au piège ! (Le président agite la cloche.) La situation est absolument catastrophique, il y a eu plus de 300 000 victimes en Syrie dont 80 000 civils et enfants. Donc, ces personnes ont besoin de notre aide et de notre soutien. Si je vous montre ces photos, ce n'est pas par volonté de donner une tonalité mélodramatique à ce débat, mais c'est bien parce qu'il y a des personnes, notamment à Alep, qui sillonnent cette ville - leur ville - en ruines avec leur appareil photo, souvent au péril de leur vie, pour nous montrer ce qu'est cette situation. C'est tout simplement la dernière chose qu'ils peuvent faire. Bombardés par leur armée nationale, ils n'ont absolument plus de soutien et ils sont délaissés par la communauté internationale. Ils sont en plus stigmatisés par ce genre de résolutions et de textes déposés par vos partis. La dernière chose qu'ils peuvent faire, c'est témoigner et montrer la catastrophe qu'ils sont en train de vivre !

Avec ce type de résolution, Mesdames et Messieurs les députés, vous tentez de distiller la haine, la peur et le rejet. C'est absolument dramatique, vous le faites à des fins électoralistes uniquement et pour mieux vous vautrer là-dedans ! Laissez-moi vous dire que ça ne marchera pas, Mesdames et Messieurs les députés, parce que la population - ou en tout cas son immense majorité - est capable d'empathie, elle est capable de comprendre la situation que vivent les personnes dans les zones de conflit et elle comprend que ces personnes ont besoin d'aide, de soutien et d'accueil. J'en veux pour preuve l'énorme mobilisation qu'il y a eu...

Le président. Trente secondes !

Mme Caroline Marti. Il y a quelques jours, à Barcelone, des centaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues pour demander un accueil immédiat des requérants. Ce qu'on vous demande aujourd'hui, ce n'est même pas de faire preuve de solidarité vis-à-vis de ces personnes, parce que vous n'en êtes manifestement pas capables ! Ce qu'on vous demande, c'est de faire preuve d'un minimum d'humanité ! En tout cas, pour notre part, nous rejetterons cette résolution avec la plus grande vigueur. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur le député Catelain, je suis désolé, vous n'avez plus de temps de parole. Je passe la parole à M. le député Eric Stauffer pour une minute trente.

M. Eric Stauffer (HP). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous assistons encore une fois à une passe d'hypocrisie absolument totale ! Vous venez d'entendre la gauche dire qu'il ne faut pas renforcer le contrôle aux frontières; vous aurez donc tous compris qu'elle préfère que ces flux migratoires viennent en Suisse - sans être encadrés, parce que c'est une des conséquences, Madame la députée Marti ! S'il n'y a pas de contrôle quand ces gens arrivent, on va les retrouver dans les rues, avec les enfants, hein ! On avait presque une larme à l'oeil en vous entendant, mais s'il n'y a pas de contrôle, ces gens seront livrés à eux-mêmes ! Alors oui, il faut des contrôles, ne serait-ce que, du point de vue de la gauche, pour encadrer ces gens qui sont arrivés jusqu'aux frontières. De l'autre côté, du côté de la droite, ça permet aussi, évidemment, d'avoir un contrôle sur les flux migratoires et de demander des moyens à la Berne fédérale, le cas échéant.

A gauche, vous êtes des inconscients - je vous ai traités de Ponce Pilate: vous voulez uniquement vous donner bonne conscience ! Vous êtes en fait les pires pour ces pauvres réfugiés qui vivent un drame humain au quotidien. Les pires ! La preuve, vous venez de la donner: vous ne voulez pas de contrôle, et donc, ces gens sont livrés à eux-mêmes ! Il y a deux semaines, j'étais justement au Caire...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Eric Stauffer. Je vais conclure ! La ville du Caire, c'est 23 millions d'habitants, avec des mendiants venus de ces pays en guerre.

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Eric Stauffer. Evidemment, tout le monde s'en fout de l'immigration, vous avez raison, Monsieur le président ! Il y a un article du règlement du Grand Conseil qui dit aussi que le président s'assure de laisser le temps nécessaire aux députés indépendants, mais je vois que vous en faites fi, surtout sur le sujet migratoire.

Le président. Un temps de parole «équitable», Monsieur le député ! (Commentaires.) Je vous remercie. La parole est à M. le député François Baertschi.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. On voit que les groupes et les philosophies mondialistes - qu'ils soient de gauche ou de droite - sont encore très présents dans ce parlement et dans beaucoup de pays, même s'ils perdent beaucoup d'influence. On le voit dans de multiples pays parce que cette politique n'est pas crédible. On ne peut pas imaginer de laisser la porte ouverte: est-ce que vous laisseriez ouverte la porte de votre logement ? Non ! Est-ce que Genève doit laisser la porte d'accès à son pays ouverte ? Non ! Nous sommes dans une logique où il faut faire au niveau du pays ce que l'on fait chez soi. Cela ne veut pas dire qu'on n'invite pas des gens de passage et qu'on ne se montre pas hospitalier. C'est une autre logique, une autre manière de voir les choses. Seulement, il faut avoir un minimum de logique et, dans la logique de la Suisse, contrairement à ce qui a été indiqué, à Genève, nous sommes un Etat souverain, avec des tâches déléguées à la Confédération. Relisez la constitution et vous verrez que c'est ça ! Donc, on délègue des tâches, mais à cette Confédération à qui on a délégué des tâches, on peut donner des directives, des conseils, lui demander d'agir d'une manière ou d'une autre. C'est quelque chose qui doit être pris en compte, comme sera prise en compte toute volonté d'autres cantons de notre région.

La surveillance des frontières est capitale, on s'en rend compte pourquoi ? Parce qu'elle protège les plus faibles ! Elle protège souvent les derniers arrivés. Elle protège les personnes d'origine étrangère qui n'ont pas encore été intégrées dans notre société. Ceux qui sont contre la frontière, en général, c'est qui ? C'est une élite; c'est une élite économique qui fait du profit; c'est une élite intellectuelle qui vit selon des concepts mondialistes d'autrefois ! (Commentaires.) Je crois qu'il faut se désintoxiquer de ce genre d'idéologies, revenir à la réalité de notre monde et bien se rendre compte que notre pays est axé sur la frontière. C'est ce que nous défendons au sein du MCG. Non pas une frontière imperméable: une frontière perméable mais intelligente, une frontière qui permette aux habitants de notre pays, de notre canton de bien vivre. Le temps du sans-frontiérisme est fini, je pense. Cette croyance que chacun est égal dans le monde entier est une hypocrisie monumentale. Ça ne tient pas compte des réalités locales de chaque pays, des réalités culturelles de chacun et des différences. Et là, quand on reste dans cette vision sans-frontiériste, on va droit dans le mur !

Je remarque que les propos de cette résolution ont été considérés comme inacceptables. Quelque part, je m'en réjouis, parce que ça permet d'avoir un véritable débat sur cette question importante et je crois qu'il ne faut pas faire l'économie de ce débat.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Jocelyne Haller pour une minute.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Je vous remercie, Monsieur le président. Simplement, je veux dire que, lorsqu'on parle de Ponce Pilate, voyons de qui on parle ! Qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui un certain nombre de personnes sont obligées de quitter leur pays pour sauver leurs vies ? Ce sont bien les soutiens que certains gouvernements apportent à ces dictatures qui martyrisent et bombardent leurs propres populations ! Ce sont aussi les multinationales qui affament des populations ! Alors, soyons clairs, ce sont ceux qui défendent les multinationales qui s'en lavent les mains - celui qui en parlait tout à l'heure se reconnaîtra !

J'aimerais dire aussi que ce ne sont pas les douaniers qui encadrent les requérants d'asile. Lorsqu'ils arrivent, les requérants d'asile doivent s'annoncer; ensuite, ce sont les services compétents qui s'en occupent; ce ne sont pas les douanes !

Enfin, cette résolution est mensongère. Vous parlez de réguler le flux des requérants d'asile. Déjà, c'est dommageable, mais en réalité, ce que vous voulez, c'est réguler tous les flux migratoires ! Finalement, ce que vous avez évoqué dans vos propositions, ce sont tous les types de migrants ! Alors dites les choses clairement et évitez de mentir lorsque vous produisez un texte comme celui-là !

Le président. C'est terminé, Madame la députée.

Mme Jocelyne Haller. J'aimerais juste dire une chose, Monsieur le président, je vous remercie. C'est que, dans les années 90, nous avons accueilli bien plus de réfugiés...

Le président. C'est terminé, je suis désolé !

Mme Jocelyne Haller. ...que nous le faisons actuellement sans que cela pose problème ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à Mme la députée Marie-Thérèse Engelberts pour une minute trente.

Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Merci, Monsieur le président. Personnellement, je ne me sens pas comme faisant partie...

Des voix. Micro !

Le président. Plus près du micro !

Mme Marie-Thérèse Engelberts. Je ne me sens pas comme faisant partie d'une bourgeoisie aisée et élitiste. Par contre, j'aimerais dire que, plutôt que Ponce Pilate, je préfère être Marie-Madeleine, ça laisse plus de possibilités. Je trouve quand même la discussion que nous avons aujourd'hui terriblement quantitative. Elle est extrêmement pragmatique; c'est peut-être le seul avantage qu'elle a. Elle est essentiellement matérialiste: on parle de murs, on parle d'engager plus de monde pour arrêter les personnes qui risqueraient d'entrer chez nous sans qu'on les ait vues. On a vu ce qui s'est passé en 1941, 1942, 1943 et 1944 en Suisse. A ce moment, je ne sais pas si vous le savez, mais tout le monde savait alors que la Shoah existait et on n'a rien fait, à part quelques justes, bien entendu.

Le président. Il vous reste trente secondes, Madame la députée.

Mme Marie-Thérèse Engelberts. Vu que nous avons toute cette connaissance géopolitique aujourd'hui, personne - mais personne - ne peut ne pas connaître ce qui se passe dans ce vaste monde. Alors, s'il vous plaît, ce que j'aimerais, c'est qu'on regarde une fois les choses du côté de l'intégration, du côté de la valeur de la compassion: il n'y en a plus aucune ! On n'est que rationnel, que quantitatif, et ce que je souhaiterais, c'est que chacun d'entre nous puisse être en face...

Le président. C'est terminé, Madame la députée.

Mme Marie-Thérèse Engelberts. Je termine ! ...en face d'une famille ou de personnes complètement exilées. Peut-être que cela vous ferait du bien, ça vous donnerait un peu plus...

Le président. C'est terminé, merci, Madame la députée. (Applaudissements.) Monsieur le député Eric Stauffer, vous avez été mis en cause. Brièvement !

M. Eric Stauffer (HP). Merci, Monsieur le président. Je l'ai dit, la grandeur de l'Europe ne se mesurera qu'à l'aune de l'aide qu'elle fournira à ces pays sur place. Le problème migratoire ne se règle pas à l'arrivée, il se règle au départ ! Vous transmettrez à Mme Haller, Monsieur le président: heureusement qu'il y a les multinationales à Genève qui rapportent un milliard de francs de recettes fiscales au canton, que vous êtes bien contente de pouvoir dépenser ! Le jour où ces multinationales ne seront plus là...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Eric Stauffer. ...eh bien, vous finirez, comme je l'ai dit, par voler l'argent du pauvre pour satisfaire votre ego !

Une voix. Bravo ! (Commentaire de Mme Salika Wenger.)

Le président. C'est terminé. (Le président agite la cloche.) Madame Wenger, s'il vous plaît ! (Commentaires.) Madame Wenger ! J'ai pris note de votre demande, nous traiterons cela à la fin du débat. La parole est à M. le député François Baertschi pour vingt-cinq secondes.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Je vais tenter d'être bref. On a utilisé beaucoup de termes caricaturaux, à propos des multinationales et des marchands de canons: ça n'a rien à voir ! On a parlé également d'Alep: parlons-en, d'Alep ! Qui est responsable de ce drame, quand même ? De ce drame monstrueux, de cette guerre civile ? C'est Hollande ! C'est Obama ! Ce sont vos amis - proches d'une gauche soi-disant démocratique ! C'est eux qui ont foutu le merdier !

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. François Baertschi. Vous transmettrez, Monsieur le président. Et puis, je... (Commentaires.)

Le président. C'est terminé, merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Carlos Medeiros pour une minute trente.

M. Carlos Medeiros (HP). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, la gauche nous sort les larmes avec cette compassion un peu à deux balles, je dirais. Oui, Mesdames et Messieurs, la Suisse en fait beaucoup - vraiment beaucoup - par rapport à l'Europe: elle fait beaucoup et même plus que tout le monde ensemble ! Parce que, par rapport à notre population, par rapport à notre taille, 29% de la population est accueillie - ce sont des chiffres vérifiables. On fait donc beaucoup ! Maintenant, dire que ce sont les multinationales ou ceci ou cela, ce n'est pas ça qui va régler le problème. Moi je tiens quand même à vous dire qu'il y a deux jours, le commissaire européen aux migrations et affaires intérieures est venu dire à la télé que les associations font partie aussi du problème en incitant justement ce flux migratoire.

Le président. Trente secondes, Monsieur le député.

M. Carlos Medeiros. Donc, encore une fois, oui, nous devons accepter certaines personnes qui ont vraiment des problèmes, mais ne confondons pas un flux migratoire économique avec des gens qui ont d'énormes problèmes. C'est ça le problème ! Nous devons séparer les deux. On a des gens qui viennent ici parce qu'ils ont envie d'avoir des conditions économiques plus favorables. Pourquoi pas ? Il y en a d'autres qui ont vraiment des problèmes dans leur pays. C'est ça et il ne faut pas tout confondre !

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons été saisis d'une demande de renvoi en commission. Monsieur Eric Stauffer, je pars du principe que c'est un renvoi à la commission des Droits de l'Homme ? (Commentaires. Rires.)

M. Eric Stauffer. Sécurité ! Judiciaire ! (Commentaires.) Faites votre choix !

Le président. Bien, c'est une demande de renvoi à la commission judiciaire et de la police !

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 798 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 54 non contre 23 oui.

Le président. Je vous fais maintenant voter sur la résolution.

Une voix. Vote nominal !

Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Manifestement. Le vote est ouvert.

Mise aux voix, la proposition de résolution 798 est rejetée par 56 non contre 24 oui (vote nominal).

Vote nominal

PL 11078-B
Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur l'exercice des professions d'architecte et d'ingénieur (LPAI) (L 5 40)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 26 et 27 janvier 2017.
Rapport de majorité de M. Jacques Béné (PLR)
Rapport de première minorité de Mme Lydia Schneider Hausser (S)
Rapport de deuxième minorité de M. Guy Mettan (PDC)
Rapport de troisième minorité de M. Rémy Pagani (EAG)

Premier débat

Le président. Pour le point suivant de notre ordre du jour, nous sommes en catégorie II, cinquante minutes. Le rapporteur de troisième minorité, M. Rémy Pagani, est remplacé par M. Olivier Baud. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Jacques Béné.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je serai assez bref. C'est la deuxième fois que ce projet de loi est débattu en plénière. Pour ce toilettage de la loi, il reste une seule problématique: le nombre d'années de formation en HES, à l'EPFL ou à l'EPFZ, qui est différent en fonction du titre obtenu à la fin, bachelor ou master. Il faut savoir qu'à Genève, la liste des mandataires professionnellement qualifiés est une chose que personne ne remet en question. Que le nombre d'années de pratique professionnelle soit identique pour un bachelor ou un master pose effectivement problème, d'autant plus qu'aujourd'hui, comme vous le savez certainement, la responsabilité des mandataires professionnellement qualifiés est nettement plus importante qu'il y a quelques années, puisque pour la plupart des constructions, quand le chantier est terminé, c'est le mandataire professionnellement qualifié qui émet lui-même, sans intervention de l'Etat, une attestation de conformité. Il est donc nécessaire de s'assurer que les capacités professionnelles de ces mandataires leur permettent véritablement d'émettre ces attestations.

Vous avez reçu sur vos tables des amendements qui seront discutés. L'idée serait de trouver ici un consensus qui n'a pas vraiment été trouvé en commission. Le point essentiel est la problématique de l'année de stage, obligatoire à la fin du bachelor pour pouvoir faire un master à l'EPFL: il faut en effet cette année de stage supplémentaire qui n'existe pas dans les HES. On aurait souhaité que cette année de stage puisse compter dans les années de pratique professionnelle. On se rend bien compte que c'est délicat de discriminer une formation par rapport à une autre, même si, dans le cadre d'un titre HES, il n'y a pas cette année de stage. Nous reviendrons donc sur les amendements et j'espère que nous arriverons à trouver une entente au sein de ce parlement en tout cas pour qu'entre un bachelor et un master, il y ait deux ans d'écart d'expérience professionnelle pour figurer sur la liste des mandataires professionnellement qualifiés, ce qui permettrait de conserver la valorisation des titres et surtout la capacité professionnelle à déposer des autorisations de construire tant pour les bachelors que pour les masters. Je vous remercie.

Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi est en effet un navire au long cours. Il a été déposé en 2013 pour toiletter un article relatif aux qualifications de la présidence de la Chambre des architectes et des ingénieurs. La commission a aussi voulu toiletter les appellations relatives aux formations. Là est apparue une scission: le parti socialiste n'est pas d'accord avec cette discussion et soutient la situation actuelle entre les HES et les EPF. Le conflit dans lequel nous ne voulons pas entrer est celui de la reconnaissance des compétences liées aux filières de formation, soit un risque de concurrence sur les prix entre les professionnels ayant un cursus universitaire EPF et ceux ayant suivi un cursus HES. Ces exigences, qui actuellement mettent au même niveau les REG A et REG B, sont le sésame, les qualifications nécessaires pour l'inscription au tableau cantonal des mandataires professionnellement qualifiés. Je mentionne que Genève fait partie des quelques cantons qui ont un tableau des mandataires alors que plusieurs cantons fonctionnent sans une telle liste. Le conflit actuel, qui a émergé en commission, est donc jusqu'à un certain point genevo-genevois, une genevoiserie ! On est de nouveau un peu dans de la dentelle. Le problème est d'introduire l'exigence d'un master en voulant favoriser les études EPF, alors que les filières HES se sont construites, à l'époque, sur des exigences, des indicateurs qui ne sont pas tombés du ciel: il y a eu une réflexion sur le fait d'obtenir d'abord la maturité professionnelle qui permet ensuite d'entrer dans une HES pour une formation certes plus courte et qui peut s'arrêter au bachelor, ce qui constitue déjà une formation qualifiante importante et exigeante.

De plus, et le Conseil d'Etat l'a aussi relevé, l'introduction de l'exigence voulue par la majorité pour favoriser les études universitaires est contraire à la liberté de commerce et d'industrie. Pour nous, le parti socialiste, elle est aussi contraire à l'égalité de traitement; elle réduirait à néant, tout simplement, tout le réseau et la validité, le sérieux des études HES. Pour cela, Mesdames et Messieurs, nous allons soutenir les amendements déposés ce jour. Pour simplifier, nous retirons les amendements figurant dans le rapport de minorité, dont le premier est identique aux deux premiers amendements distribués. Nous partons donc sur les amendements que tout le monde a reçus aujourd'hui, c'est-à-dire trois articles. Nous les soutiendrons et vous demandons de les soutenir, afin d'en terminer avec ces travaux et de permettre à ces professionnels de travailler correctement.

Le président. Merci, Madame la députée. Je prends acte du fait que vous renoncez à vos amendements tels que figurant dans le rapport et que vous vous ralliez aux amendements notamment présentés par M. François Lefort. Je passe la parole au rapporteur de deuxième minorité, M. le député Guy Mettan.

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Nous avons déjà beaucoup discuté de ce projet de loi à la commission des travaux, le rapporteur de majorité l'a bien expliqué. Il a aussi expliqué pourquoi il est important de garder une rigueur dans la formation d'architecte. Cependant, la rapporteuse de minorité a aussi souligné le risque de discrimination que le projet de loi tel qu'il est sorti de commission pouvait comporter pour la filière HES. A nous, cela paraît très important de pouvoir conserver à cet enseignement genevois la possibilité de former des architectes qualifiés, qui ont la compétence pour déposer des projets. C'est une dimension essentielle. Notre parti, comme nous sommes nombreux autour de cette table à le faire, a toujours soutenu les filières professionnelles; or, la formation des architectes en est une.

Deuxième chose qui nous paraissait un peu discutable dans le projet de loi sorti de commission: le risque de recours que ce texte tel quel aurait suscité de la part de certaines organisations d'architectes, de la part aussi de la direction des HES, parce que, en tout cas aux yeux des experts ou des juristes, il y avait des probabilités de non-conformité avec le droit supérieur, la loi sur les HES et la loi sur la concurrence. Toujours est-il qu'après discussions, je tiens à saluer l'ouverture manifestée par le rapporteur de majorité, qui serait prêt à entrer en matière sur deux amendements sur les trois distribués: le premier, portant sur l'article 4, alinéa 1, lettre a, et le troisième, concernant l'article 9, alinéa 3. Si nous pouvons faire passer ces amendements - et nous renoncerions alors au deuxième - je pense que nous aurions un projet de loi qui serait acceptable et permettrait de préserver une différence, mais positive, entre la formation EPF - master en cinq ans - et la formation HES, sans pénaliser la filière HES. Nous pouvons nous rallier à ce type de décisions, et j'espère que la raison l'emportera et que nous pourrons voter ce projet de loi de manière satisfaisante pour toute la corporation des architectes de Genève.

M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de troisième minorité ad interim. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, «au départ, ce projet de loi n'était qu'une modification mineure de la loi sur l'exercice des professions d'architecte et d'ingénieur concernant le magistrat du pouvoir judiciaire qui est appelé à présider la Chambre des architectes et ingénieurs que cette loi fonde. Or, très rapidement, la commission des travaux s'est penchée plus profondément sur cette loi et a commencé à proposer des remaniements bien plus substantiels liés en particulier à l'évolution des titres de diplômes. En l'état, le rapporteur de minorité n'a pas la conviction que le fruit du travail de la commission des travaux présente une solidité juridique et une cohérence suffisantes en regard de l'évolution des titres de diplômes professionnels conférés en Suisse.»

Mesdames et Messieurs les députés, je ne suis pas en train de lire mon rapport de minorité, mais celui de M. Michel Ducret, le rapporteur de minorité du précédent rapport de commission, déposé le 22 octobre 2013. Aujourd'hui, la situation s'est un peu inversée, d'une certaine manière, quant aux protagonistes, mais n'a pas fondamentalement changé: le projet de loi se propose toujours de faire une distinction selon le type de diplôme obtenu, mais il se propose aussi d'augmenter la durée de l'expérience professionnelle nécessaire pour être inscrit. Or, Mesdames et Messieurs les députés, la jurisprudence du Tribunal fédéral a retenu que la distinction entre architectes ETS, HES ou EPF-université ne reposait pas sur un intérêt public. Il ne peut pas être retenu que les clients potentiels sont exposés à des risques supérieurs de malfaçons ou des risques financiers selon le parcours de formation suivi par l'architecte ou l'ingénieur. Il n'y a donc pas lieu d'admettre une divergence entre les architectes ETS, et donc HES, et les architectes issus de l'Ecole polytechnique fédérale quant à leur nombre d'années d'expérience pour être inscrits au tableau des mandataires. Enfin, ce projet de loi dévalorise clairement la formation duale et la formation de la HES-SO en faveur des Ecoles polytechniques fédérales, qui ne délivrent absolument pas des diplômes de meilleure qualité, mais égale à la formation universitaire. Il y a donc clairement une égalité de traitement, comme l'a relevé la rapporteuse de première minorité. Pour toutes ces raisons, afin de ne pas consacrer une inégalité de traitement... Peut-être qu'un nouveau retour en commission aurait permis un traitement plus rapide qu'en plénière, mais ma foi, vu que nous devons discuter maintenant de ces amendements, qui, d'une certaine manière, réunissent une certaine majorité, il faut maintenir ces trois amendements pour donner une cohérence à ce projet de loi et éviter un recours juridique qui fera perdre encore plus de temps. Je vous remercie.

M. Christian Flury (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi technique... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...vise essentiellement à harmoniser les durées d'étude et de pratique conduisant l'étudiant en ingénierie ou en architecture au titre de MPQ, mandataire professionnellement qualifié, qui lui confère la compétence de signer ses propres plans, pour lesquels il pourra déposer une demande d'autorisation idoine. Avec les nouveaux cursus d'études, ils pourront obtenir dans une haute école spécialisée une certification par un bachelor ou un master. Quant aux écoles polytechniques fédérales, il convient de se rappeler qu'elles ne délivrent pas de bachelor mais que les gens qui en sortent sont automatiquement porteurs d'un master. La Chambre des architectes et ingénieurs du canton de Genève tient à jour le registre des architectes et ingénieurs. Ce registre, que seul le canton de Genève tient à jour - le fameux REG - comporte deux niveaux d'inscription: le REG B où peuvent être inscrits les porteurs de bachelor, et le REG A, pour les porteurs de master. Les architectes et ingénieurs étrangers sont reconnus sur la base des titres obtenus et de leur expérience. Ils sont soumis aux mêmes durées d'études et de pratique que les nôtres, avant reconnaissance définitive.

Quant à la libre circulation des personnes et à la réciprocité avec la France notamment, elles n'ont de valeur que si elles sont, précisément, réciproques. Quitte à en faire tousser certains, nous n'avons pas à rougir lorsque nous apprenons que ce pays - la France - impose à nos ingénieurs, avant qu'ils ne puissent exercer, des années de démarches qui dégoûtent les candidats ainsi que des tracasseries sans fin. Nous avons en Suisse des écoles polytechniques qui figurent parmi les meilleures du monde et sont classées devant celles de nos voisins. Nous ne devons donc pas dérouler le tapis rouge pour favoriser l'arrivée d'architectes ou d'ingénieurs français, nous devons privilégier les nôtres.

Enfin, il est possible pour les inscrits au REG B, en complétant leur formation et en déposant un dossier, d'obtenir la reconnaissance pour être inscrits au REG A. Au fond, les membres de la Chambre des architectes et ingénieurs devraient tous être reconnus et inscrits au REG A, en partant du principe que qui peut le plus peut le moins. Cependant, le Mouvement Citoyens Genevois acceptera le premier et le troisième amendements déposés par notre ami Vert, M. Lefort, et nous voterons ce projet de loi amendé. Je vous remercie.

M. François Lefort (Ve). Cet amendement que j'ai présenté est soutenu, bien sûr, par les rapporteurs de minorité, M. Mettan, Mme Schneider Hausser et M. Baud qui remplace M. Pagani. Nous avons affaire à une histoire assez amusante: ce projet de loi était sorti de commission, lors de la dernière législature, avec une très forte majorité de 14 commissaires contre 1, avec le rapport de minorité de M. Michel Ducret pour le compte du PLR, ou plutôt pour le compte d'une minorité du PLR de l'époque. Curieusement, bien que le travail ait été extrêmement bien fait - un travail honnête et qui permettait de mettre à jour cette loi en fonction des nouveaux titres des diplômes, et qui n'introduisait pas d'inégalité de traitement, elle - le projet de loi a été renvoyé en commission. Nous traitons maintenant les travaux effectués en commission après ce second renvoi, qui ont modifié le travail initial en introduisant une petite inégalité de traitement, peut-être sur la base de mauvaises informations: le diagramme comparant les deux types de formations, EPF et HES, produit par la FAI et qui se trouve en annexe, est faux, en réalité ! Il faut exactement le même temps pour faire un master EPF ou un master HES. Quand on part d'une maturité gymnasiale - et ceci a une importance - on fait trois ans de bachelor EPF, une année de stage professionnel avant le master, on fait le master - cela fait donc six ans - et ensuite, il faut trois ans - c'est-à-dire huit ans au total - pour être mandataire professionnellement qualifié. Pour un étudiant HES, provenant de la maturité gymnasiale, qui s'est inscrit à l'HEPIA, à Genève, il faut, pour être mandataire professionnellement qualifié, faire un an de stage de pratique professionnelle, trois ans de bachelor, ce qui fait un bachelor en quatre ans, suivi d'un master en deux ans, suivi de trois ans d'expérience professionnelle. Mme Schneider Hausser a remarqué qu'il s'agissait d'une problématique avant tout genevoise, surtout articulée d'ailleurs au problème des mandataires professionnellement qualifiés. C'est certain, car pour le reste, pour être, en Suisse, un architecte ou un ingénieur, il faut avoir un diplôme d'une Ecole polytechnique fédérale, d'une université ou d'une HES. Si vous avez un master et l'expérience professionnelle suffisante, vous pouvez être inscrit au REG A, le registre A des professionnels de l'ingénierie et de l'architecture. Si vous avez un bachelor d'une HES, vous êtes inscrit au REG B, pour autant que vous ayez également l'expérience professionnelle. En fait, il ne suffit pas d'avoir un diplôme, il faut être inscrit au registre de cette fondation des professions d'ingénieur et d'architecte, c'est-à-dire avoir les diplômes ou les équivalences, et une expérience professionnelle suffisante. Ceci est important, Mesdames et Messieurs: j'ai mentionné la maturité gymnasiale. Il faut savoir qu'à Genève, 55% des étudiants inscrits en architecture à l'HEPIA sont porteurs d'une maturité gymnasiale contre 34% d'une maturité professionnelle. Ceux-ci ont déjà fait trois ans de CFC plus une maturité professionnelle dans le secteur, ce qui, disons, leur donne une expérience professionnelle d'environ sept ans. 55% de maturités gymnasiales, c'est ce que nous avons à l'HEPIA en architecture: si vous votez le projet de loi tel qu'il est, c'est le message d'une inégalité de traitement que vous allez envoyer à ces étudiants, évidemment; vous allez avantager le diplôme de l'EPF de façon tout à fait inutile, puisque M. Baud vous a rappelé que la jurisprudence fédérale ne reconnaît aucune différence entre les trois types de diplômes. Pour cette raison-là, nous avons proposé ces trois amendements qui ont simplement pour but, raisonnablement, de supprimer toute inégalité de traitement entre master HES et master EPF en architecture. Nous vous serons reconnaissants de voter les trois amendements, pas seulement au choix le premier, le deuxième ou le troisième, mais bien les trois. Je vous remercie.

M. Serge Hiltpold (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi, qui était censé toiletter la loi sur la profession d'architecte, est allé un peu plus en profondeur, car des éléments assez importants devaient être relevés, en tout cas en ce qui concerne les MPQ à Genève. Il ne faut pas prendre les choses à la légère: comme l'indique le titre de l'article 4, qui fait l'objet d'amendements, ce sont les capacités professionnelles - et je crois que c'est le centre du débat - qui garantissent l'égalité en qualité des formations. Dans la philosophie du PLR, et notamment de la majorité - comme l'a exprimé mon collègue Jacques Béné - ce qui est important, c'est que le MPQ, à Genève, établit l'attestation de conformité qu'on appelle communément le permis d'habiter. C'est une délégation de l'Etat au mandataire. Ce mandataire engage sa responsabilité d'architecte, responsabilité qui existe aussi, de facto, en collaboration avec les maîtres d'état que sont les entreprises qui s'engagent sur un certain nombre de normes, et c'est très bien. Pour garantir cette responsabilité, on doit avoir des capacités.

Le PLR entrera en matière sur les amendements, en tout cas sur l'article 4, alinéa 1, lettre a. Il refusera le deuxième amendement, qui vise à limiter la pratique de cinq ans à trois ans en ce qui concerne le bachelor HES. Enfin, il acceptera l'amendement sur l'article 9, alinéa 3, concernant l'inscription au REG A ou au REG B, comme l'indiquent et le préconisent les associations professionnelles, qui ont montré une certaine ouverture d'esprit. On arriverait finalement à un compromis qui paraît le plus équilibré. Il me semble que le plus équilibré dans ce débat est d'avoir une égalité de traitement entre les étudiants des EPF et des HES, afin de garder une qualité du bâti et d'assumer la responsabilité du permis d'habiter que l'Etat donne aux mandataires, et par conséquent à l'acte de bâtir.

M. André Pfeffer (UDC). Mesdames et Messieurs, la liste actuelle et les critères appliqués aux mandataires professionnels posent visiblement peu de problèmes. Genève devrait-elle juger toutes les filières de formation égales, même si cela ne correspond pas à la réalité ? Genève devrait-elle supprimer le tableau cantonal qui donne actuellement une garantie de qualité et d'expérience ? Nous ne le pensons pas et avons comme priorité de favoriser la qualité et le professionnalisme. Les critères pour les mandataires professionnels ne doivent certes pas être rigides et inscrits dans le marbre pour l'éternité, mais le système actuel est globalement un bon compromis entre les diplômés et les praticiens. L'UDC accepte ce projet. Je vous remercie pour votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, j'invite l'assemblée à s'exprimer sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 11078 est adopté en premier débat par 74 oui contre 1 non.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Monsieur Uehlinger, vous souhaitez la parole ? (Remarque.) C'est une erreur, très bien. A l'article 4, alinéa 1, nous sommes saisis de deux amendements déposés par M. Lefort. Je vous lis le premier, qui concerne la lettre a:

«Art. 4, al. 1, lettre a (nouvelle teneur)

1 Justifient de capacités professionnelles suffisantes au sens de la présente loi les professionnels de l'ingénierie, de l'architecture et de l'environnement:

a) titulaires d'un diplôme de master délivré par une école polytechnique fédérale, par une université ou par une haute école spécialisée suisses ou par une haute école étrangère dont les titres sont estimés équivalents, et justifiant d'une pratique suffisante de 3 ans acquise après la fin de la formation professionnelle;»

Monsieur le rapporteur de deuxième minorité, vous avez la parole.

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Je souhaite préciser la position du parti démocrate-chrétien sur les amendements. Suite à nos discussions, notre parti soutiendra ce premier amendement, refusera le deuxième, qui concerne l'article 4, alinéa 1, lettre b, et soutiendra celui portant sur l'article 9, alinéa 3. Ce qui nous paraît essentiel, c'est qu'il n'y ait pas de discrimination dans la formation. Si nous acceptons ces deux amendements, même en refusant le deuxième, l'essentiel est préservé. Pour nous, ce qui compte, c'est qu'on trouve une solution satisfaisante pour l'ensemble de la profession. C'était pour préciser la position de notre parti sur ces trois amendements. Nous renonçons donc à soutenir le deuxième.

Le président. Merci pour ces précisions, Monsieur le député. Monsieur le député Sandro Pistis, sur l'amendement ?

M. Sandro Pistis (MCG). Merci, Monsieur le président. Le groupe MCG soutiendra ce premier amendement, qui trace l'année de stage pour l'obtention du bachelor. Par contre, nous nous opposerons au deuxième amendement, qui réduit la pratique suffisante de cinq à trois ans: on doit pouvoir garder une certaine qualité de formation et une certaine qualité des architectes à Genève; cela limitera aussi certaines formations qui, dans certains pays, sont réduites, et évitera une concurrence déloyale. Quant au troisième amendement, sur l'article 9, après négociation, nous pensons qu'il est tout à fait raisonnable de soutenir tant le REG A que le REG B. Le MCG ne soutiendra donc que le premier et le troisième amendement et s'opposera au fait de réduire la qualité de la formation. Je vous remercie.

Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, bien évidemment, le parti socialiste soutiendra les trois amendements qu'il a cosignés, pour la simple et bonne raison qu'on est quand même en train d'assister à une autoflagellation, voire à un sabordage, quelque part, de nos écoles genevoises. (Remarque.) Mais oui ! Je trouve quand même incroyable... Bien évidemment, il y a la filière maturité, donc collège, EPFL, bachelor, master, avec un stage entre. Nous avons à Genève l'HEPIA, la HES, qui a obtenu une équivalence, avec - M. Lefort l'a relevé - un grand nombre, voire la moitié des étudiants qui ont suivi une filière professionnelle, duale, sur le terrain, qui connaissent le terrain genevois en particulier de l'architecture, de tout le bâtiment. Et là, nous allons leur demander, juste comme ça, pour avoir l'autorisation de s'inscrire sur ce tableau, deux ans de stage de plus. Parfait, entendu ! Dont acte ! Saborder ce qui se passe à Genève, une filière qui avait été reconnue et qui l'est au niveau romand voire suisse, il n'y a que les députés genevois qui peuvent le faire, et je trouve ça simplement incroyable. Je pense que beaucoup d'étudiants genevois vous remercieront, ceux qui n'ont pas les moyens de se payer l'EPFL et tout ce que cela implique.

M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de troisième minorité ad interim. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je le réaffirme ici, il n'a pas été démontré que le canton de Genève subissait une recrudescence de problèmes avec les nouveaux ou les jeunes architectes inscrits au tableau des mandataires. Il n'y a donc aucune raison de rehausser l'exigence de l'expérience professionnelle de trois à cinq ans. Si ces trois amendements ne sont pas votés, ce projet de loi conduira à des aberrations: par exemple, le gagnant d'un concours, ou l'adjudicataire d'un marché de services, qui a des aptitudes selon notre règlement sur les marchés publics, pourrait ne pas être habilité à déposer des plans d'autorisation de construire, car il ne serait pas inscrit au tableau des mandataires en raison des nouvelles exigences. Mesdames et Messieurs les députés, si on veut modifier cette loi de manière correcte, il convient d'être cohérent, de voter ces trois amendements afin d'y établir un semblant de cohérence. Je vous remercie donc de voter ces amendements tels quels.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Je n'avais pas l'intention de reprendre la parole sur ces amendements, mais quand j'entends Mme Schneider Hausser dire qu'on est en train de saboter les HES, j'ai un peu de peine à comprendre ! La situation est très claire: on ne parle plus de différenciation entre HES et EPF, c'est pour ça qu'on a très clairement admis... Je rappelle quand même que le texte tel que sorti de commission a obtenu une majorité. Nous aurions aussi la majorité aujourd'hui au sein de ce parlement pour refuser ces amendements et voter le texte de loi tel qu'il est sorti de commission. Dans un souci de consensus, nous admettons qu'il ne faut plus faire de différenciation entre HES et EPF, mais laissez-nous quand même la possibilité d'en faire une entre bachelor et master, que ce soit EPF ou HES, puisqu'un titulaire de bachelor a entre deux et trois années de formation en moins qu'un titulaire de master. Il est donc logique de transformer ces années de non-formation pour un titulaire de bachelor en lui demandant des années de pratique supplémentaires. C'est là qu'il y a un équilibre et une équité. Pour ces raisons, je vous invite à refuser le deuxième amendement et vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, je vous invite à vous prononcer sur le premier amendement, à l'article 4, alinéa 1, lettre a, que je vous relis:

«Art. 4, al. 1, lettre a (nouvelle teneur)

1 Justifient de capacités professionnelles suffisantes au sens de la présente loi les professionnels de l'ingénierie, de l'architecture et de l'environnement:

a) titulaires d'un diplôme de master délivré par une école polytechnique fédérale, par une université ou par une haute école spécialisée suisses ou par une haute école étrangère dont les titres sont estimés équivalents, et justifiant d'une pratique suffisante de 3 ans acquise après la fin de la formation professionnelle;»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 84 oui contre 1 non.

Le président. Nous sommes saisis d'un deuxième amendement de M. Lefort, à l'article 4, alinéa 1, lettre b. Il consiste à changer la durée mentionnée de «5 ans» en «3 ans». Mesdames et Messieurs, je vous invite à voter...

Une voix. Vote nominal !

Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien, nous passons donc au vote nominal.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 53 non contre 32 oui et 1 abstention (vote nominal).

Vote nominal

Mis aux voix, l'art. 4 (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté.

Le président. A l'article 9, nous sommes saisis de l'amendement que voici, toujours de M. Lefort:

«Art. 9, al. 3 (nouvelle teneur)

3 Les membres désignés sous lettres b à e de l'alinéa 2 doivent être inscrits au REG A ou au REG B et sont choisis parmi les mandataires proposés par les organisations professionnelles intéressées.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 83 oui contre 1 non.

Mis aux voix, l'art. 9, al. 2, lettres a à f, al. 3 et 4 (nouvelle teneur), ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 18, al. 1 (nouvelle teneur) et al. 2 (abrogé), est adopté.

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).

Le président. Le troisième débat est-il demandé ? (Commentaires.) Monsieur le conseiller d'Etat, vous avez la parole.

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, sur le fond, ce projet de loi restreint l'accès à une profession, restreint la garantie constitutionnelle de la liberté de commerce et d'industrie, en mettant des exigences non pas pour exercer directement une décision, mais essentiellement pour pouvoir agir vis-à-vis de l'administration, qui, elle, est la responsable, in fine, des autorisations de construire, des plans d'urbanisme délivrés qui valident - ou non - le travail des mandataires, quelle que soit leur formation, quel que soit leur nombre d'années de pratique. Cette restriction à l'accès à la profession et à la liberté de commerce et d'industrie est délicate. La COMCO, la commission fédérale pour la concurrence, a déjà pris position: pour elle, il faudrait carrément supprimer le tableau des MPQ, et par conséquent, adopter une posture plus libérale, où ce n'est pas tant le diplôme qui compte mais la compétence réelle des mandataires qui est évaluée.

Toujours sur le fond, Genève se singularise une nouvelle fois. Les organisations économiques dénoncent très souvent les «Genfereien» en matière de chicaneries administratives et réglementaires, de règles supplémentaires que Genève se fixe, déjà par rapport aux autres cantons romands. En voilà un bel exemple ! Un bel exemple, de par la volonté de la majorité de fixer des règles qui n'existent pas dans les cantons de Vaud, Fribourg ou Neuchâtel. Est-ce que là-bas les constructions souffrent de problèmes supplémentaires ? Est-ce que les prestations des mandataires, des architectes, dans ces cantons romands, sont moins bonnes que celles fournies à Genève ? Absolument pas. Aucune étude ne le prouve. Ce projet de loi est avant tout, Mesdames et Messieurs, un texte corporatiste; il s'agit d'une profession dont les bureaux existants sont organisés à travers un lobby, la FAI, qui agit auprès de certains parlementaires pour restreindre l'accès aux jeunes bureaux.

Je termine par là sur la question de fond: alors que l'accès à l'emploi est si difficile aujourd'hui, alors que des étudiants qui passent des années à étudier pour leur diplôme arrivent sur le marché de l'emploi et se voient à chaque fois opposer des obligations, une exigence d'années d'expérience professionnelle pour ne serait-ce que décrocher un premier emploi, alors qu'aujourd'hui nous peinons à offrir une place aux jeunes, que souhaite faire la majorité parlementaire ? Elle souhaite restreindre légalement cet accès. Mesdames et Messieurs de la droite, soyons libéraux ! Si un jeune bureau qui a trois ans de pratique dépose un projet... (Remarque.) ...une autorisation de construire valable, peu importe sa formation, peu importe si c'est une formation HES ou EPF ! (Commentaires.)

Une voix. Chut ! (Le président agite la cloche.)

M. Antonio Hodgers. Qu'importe ! Evaluons la qualité des gens ! Ne soyons pas attachés au formalisme, n'utilisons pas la loi comme vous le faites aujourd'hui, Mesdames et Messieurs du PLR, pour régler la concurrence saine et naturelle entre mandataires. (Remarque.) Voilà pour le fond.

Sur la forme, ce texte souffre d'un problème majeur que le Conseil d'Etat n'a de cesse de répéter depuis le début des travaux: il n'est pas conforme au droit supérieur. En plus de la restriction d'accès à la pratique de la profession et de la restriction de la garantie constitutionnelle de la liberté de commerce et d'industrie, ce qui forme déjà un problème en soi, ce projet de loi crée une distinction entre la formation HES et la formation EPF alors que la jurisprudence fédérale, dans des cas similaires, a déjà clairement dit que cette distinction n'est pas légale. En vertu de quoi le Conseil d'Etat unanime, après examen juridique de ce projet de loi, a décidé de ne pas demander le troisième débat. Il ne se fera pas complice d'une loi dont on sait d'ores et déjà qu'elle est illégale. Il appartiendra à la majorité parlementaire d'assumer sa position y compris devant les tribunaux. Nous nous reverrons dans une année pour débattre d'un nouveau projet de loi, une fois que les tribunaux auront cassé celui-ci. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous en restons là, le troisième débat n'ayant pas été demandé.

Le troisième débat est reporté à une session ultérieure.

Le président. Après consultation des membres du Bureau, j'interromps nos travaux ici. Nous nous retrouverons à 14h. Je rappelle aux membres du Bureau que je les attends à la salle Nicolas-Bogueret, merci.

La séance est levée à 11h40.