Séance du vendredi 13 mars 2015 à 20h40
1re législature - 2e année - 3e session - 18e séance

M 2189
Proposition de motion de Mmes et MM. Jean Sanchez, Thierry Cerutti, Marie-Thérèse Engelberts, Pascal Spuhler, Ronald Zacharias, Danièle Magnin, Henry Rappaz, André Python, Jean-François Girardet : Valorisons le travail de la fonction publique !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 13, 14, 27 et 28 mars 2014.

Débat

Le président. Nous passons à la proposition de motion 2189 en catégorie II, trente minutes. Monsieur Sanchez, vous avez la parole.

M. Jean Sanchez (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit d'une proposition de modification administrative relativement simple, qui figure dans les bonnes pratiques en matière de management. A titre d'exemple, imaginez qu'un journaliste rédige un article et que le lendemain, celui-ci soit publié sous le nom du rédacteur en chef; cela illustre un peu ce qui se passe aujourd'hui dans certains services de l'Etat. Hormis la charte graphique, il n'y a pas de ligne rédactionnelle uniforme et les documents ne sont parfois signés que par un chef de service, un secrétaire général ou un conseiller d'Etat, sans la moindre référence aux co-auteurs. Ce n'est pas comme ça qu'on valorise le travail des fonctionnaires, intention qui figurait tout de même dans le discours de Saint-Pierre - faut-il le rappeler ?

Il s'agit également de savoir motiver son personnel. D'ailleurs, nos rapports de commission contiennent tous le nom des différents intervenants, nous sommes ainsi conformes à la loi sur les archives publiques. Ce sont là des données importantes pour les historiens lorsqu'il s'agit de faire des recherches. Enfin, il nous paraît dérangeant, même si on ne peut pas parler de propriété intellectuelle, le fait de passer sous silence le travail des auteurs d'une étude, d'un projet de loi ou de différents rapports. Nous demandons tout simplement que ces références figurent sur les documents émanant de l'administration pour rendre à César ce qui est à César, ou du moins le partager.

M. François Lefort (Ve). Voilà un bon exemple de fausse bonne idée derrière laquelle se cachent en réalité de drôles de pensées. Prétextant d'une inquiétude quant à une meilleure valorisation des efforts de la fonction publique, prétextant d'une empathie soudaine pour les recherches historiques futures, prétextant d'un désir de transparence s'apparentant à une sorte de naturisme politique, cette motion demande à faire figurer en référence tous les noms des fonctionnaires ayant participé à la rédaction ou à la conception des documents émis par l'administration, y compris les projets de discours.

Nous ne sommes pas séduits par cette drôle d'idée, qui livrera les fonctionnaires à toutes les responsabilités et pressions imaginables alors que les seuls auteurs des documents émis par l'administration, y compris les projets de discours, doivent être ceux qui en portent la responsabilité politique, c'est-à-dire les conseillers d'Etat en charge des départements, et non pas les fonctionnaires agissant sous leurs ordres. Ne soyons pas dupes: cette drôle d'idée ne ferait que mettre la responsabilité sur les fonctionnaires au service de l'Etat, et il n'est pas question de les soumettre à toute sorte de pressions sous prétexte de transparence. L'Etat fonctionne bien justement parce que les fonctionnaires travaillent dans l'anonymat, qui leur permet une distanciation vis-à-vis des enjeux politiques. Prôner la transparence à tout prix ne ferait qu'augmenter le stress des fonctionnaires, qui ne seraient alors plus seulement responsables devant leur conseiller d'Etat mais également devant la population entière, et ceci n'est pas possible.

Prôner cette transparence n'a aucune utilité pour l'histoire et encore moins pour le bon fonctionnement de l'Etat et des institutions démocratiques. C'est même exactement le contraire: cela entravera le fonctionnement de l'Etat, et il n'y a aucune raison de désigner des responsables autres que les responsables politiques. Plus qu'une fausse bonne idée, c'est même une idée dangereuse et pernicieuse pour le fonctionnement de nos institutions. Si vous voulez vraiment valoriser les collaborateurs de la fonction publique, Mesdames et Messieurs les auteurs de cette motion, c'est très simple: arrêtez de les attaquer régulièrement dans cette enceinte parlementaire et respectez-les. Cette motion, c'est tout le contraire: c'est un texte irrespectueux de la fonction publique et dont le vrai titre, que l'on peut lire en filigrane, serait plutôt «Punissons les fonctionnaires !» Les Verts ne sont bien sûr pas dupes; nous refuserons cette motion et vous recommandons d'en faire de même.

M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien votera contre cette motion. Il est quand même piquant de constater qu'elle émane d'un groupe qui vient de refuser aux hauts fonctionnaires un quatorzième salaire ou une prime ! (Remarque.) Si on veut valoriser le travail des hauts fonctionnaires... (Remarque.)

Le président. Monsieur Sormanni, s'il vous plaît !

M. Bertrand Buchs. ...on valorise aussi leur salaire, d'accord ? Vous avez décidé de ne plus valoriser le salaire des hauts fonctionnaires, alors ne venez pas maintenant avec l'idée de mettre le nom du fonctionnaire sur un projet de loi ou un discours, ce n'est pas ainsi que les choses fonctionnent à l'Etat. Lorsque vous écrivez un texte, vous êtes souvent aidé par votre assistant parlementaire, n'est-ce pas ? Or est-ce que le nom de celui-ci figure sur les textes que vous publiez ? Non !

Dans ce parlement, nous avons la politesse de remercier dans nos rapports les fonctionnaires qui ont participé aux travaux parce qu'ils nous aident, ils nous amènent quelque chose. Mais c'est nous qui décidons de les remercier, tout comme les conseillers d'Etat remercient les fonctionnaires qui les aident à réaliser leur travail. Il n'est pas nécessaire d'apposer le nom du fonctionnaire sur un texte de loi, d'autant plus que si le texte est rejeté ou qu'il y a un quelconque problème, c'est un stress pour celui-ci: on va le mettre au pilori, on dira que c'est sa faute, qu'il a mal rédigé, etc. Signer des textes n'est pas le rôle du personnel de l'administration, qui est là pour amener des avis techniques sous les ordres des conseillers d'Etat ou des députés. Voilà comment ça marche, et nous ne voterons pas cette motion.

Une voix. Très bien.

M. Benoît Genecand (PLR). Chers collègues, que demande la motion du député Sanchez ? Sur tous les documents et projets de documents émis par l'administration, il faudra faire figurer en référence le nom des fonctionnaires ayant participé à leur conception ou à leur rédaction. On peut tout d'abord se demander, Monsieur Sanchez, ce qu'est un projet de document. Est-ce toute idée qui passe par la tête de quelqu'un sans pour autant arriver à maturité ? Cela risque de faire beaucoup ! Un projet de document est-il réellement émis ? Sinon comment faire pour mettre en référence les fonctionnaires ayant participé à sa conception ou à sa rédaction ?

Laissons ici les projets et les concepts pour nous concentrer sur la demande de voir cité le nom des créateurs et créatrices de documents. Nous imaginons que les motionnaires pensent large: il s'agirait sans doute non seulement de celui ou celle qui a eu l'idée du document mais aussi de celui et plus fréquemment celle qui tape le document sur son ordinateur après l'avoir relu et corrigé. Admettons donc que chaque document de l'administration soit muni d'une généalogie complète des personnes ayant participé à son élaboration, quelles en seraient les conséquences ? Peut-être bien que quelques employés au sein de l'administration en ressortiraient renforcés et motivés, heureux de voir reconnue la paternité d'une instruction de toute beauté ou d'un règlement indispensable; mais combien, plus nombreux, seraient les fonctionnaires embarrassés de devoir assumer personnellement la paternité ou la maternité d'une énième instruction tatillonne ou d'un règlement redondant, sans parler des pratiques administratives de plus en plus fréquentes qui augmentent un tarif ou le calcul d'une taxe ?

Et, plus important encore, mesure-t-on l'efficacité d'une administration à sa production de documents ? A cet égard, comment reconnaître la contribution décisive de celui qui évite la création d'un document ? Devrait-on établir une liste séparée pour mettre en exergue ce pouvoir de renoncer, cette capacité de s'abstenir ? Dans un parlement rempli de députés qui mesurent leur bonheur au nombre de projets de lois, motions, résolutions et questions écrites urgentes ou non qu'ils déposent, seuls ou collectivement, je sens que cette idée d'un bonheur dans la modération ne me vaudra pas beaucoup d'applaudissements ! (Applaudissements.)

M. Alberto Velasco (S). J'ai beaucoup d'estime pour M. Sanchez, c'est vrai, il fut un bon fonctionnaire. Mais là, franchement, ce n'est pas rendre service aux fonctionnaires ! Vous siégez à la commission des finances comme moi, Monsieur, et vous voyez parfois les pauvres employés de l'administration qu'on auditionne en ressortir insultés. J'ai connu une époque où certains ont même pleuré, c'est la vérité. Alors imaginez qu'en plus, les textes qui nous sont envoyés soient signés par les fonctionnaires: mais ils seraient crucifiés, les pauvres, véritablement crucifiés ! Avec l'anonymat, ils ont au moins le conseiller d'Etat devant, on peut s'en prendre à lui. (Remarque. Rires.) C'est le paravent, oui ! Là, vous enlevez le paravent ! Déjà que les conseillers d'Etat ne viennent pas très souvent à la commission des finances; si en plus vous enlevez le paravent, ils n'auront plus rien à faire du tout, ils nous diront: «Ce n'est pas moi qui ai écrit ça, c'est M. Untel, je vous l'enverrai.» Non, ce n'est vraiment pas possible.

Je tiens aussi à dire que quand on lit certains rapports dans ce Grand Conseil, on ferait parfois mieux de ne pas en connaître les auteurs, ça les avantagerait beaucoup ! (L'orateur rit.) On devrait même carrément anonymiser nos rapports, ce serait sans doute mieux pour certains députés, croyez-moi ! Non, restons-en là, Monsieur Sanchez. Franchement, vous avez eu une idée généreuse, mais je ne crois pas que les fonctionnaires aient une âme artistique et rédactionnelle ni souhaitent se présenter comme les auteurs à succès de demain. Non, je pense qu'il faut les laisser comme ils sont, restons-en à la situation actuelle. De toute manière, les conseillers d'Etat peuvent très bien assumer ces textes, n'est-ce pas ? Vous les corrigez même, n'est-ce pas ? (Remarque.) Voilà, merci beaucoup. Vous l'avez compris, les socialistes ne voteront pas cet objet.

M. Pierre Vanek (EAG). Tout a été dit, ou l'essentiel. Vous savez que je ne suis pas forcément partisan de l'organisation militaire d'un certain nombre de secteurs de l'Etat, mais enfin quand même ! La formule originelle de la loi sur la police proposée par le Conseil d'Etat prévoyait une organisation hiérarchique, et il est vrai que les fonctionnaires sont soumis à des chefs, à une hiérarchie et à des ordres venus d'en haut qu'ils exécutent bien ou mal, plus ou moins bien, plus ou moins mal, mais souvent très bien en faisant ce qu'ils peuvent avec ce qu'ils ont. On ne peut pas leur demander d'assumer la responsabilité et de signer des documents qu'ils ne produisent pas de manière indépendante ! Quelqu'un a pris l'exemple du journalisme. Un journaliste prend ses responsabilités, il signe de sa plume et de son nom un article et en assume la responsabilité, y compris légale. Il peut être poursuivi pour ce qu'il a écrit, pour calomnie, pour diffamation, pour ceci ou cela. Il y a donc un degré de responsabilité qu'il assume. On ne peut pas demander à des fonctionnaires de signer des documents et d'en endosser la responsabilité tout en agissant de manière subordonnée dans le cadre d'une organisation administrative et hiérarchique.

La conséquence de ce que vous proposez est intéressante, ça voudrait dire qu'il faudrait adopter un principe d'organisation de l'administration entièrement différent: en offrant aux fonctionnaires la possibilité et l'obligation de signer des documents, il faudrait en même temps leur octroyer la liberté qui va avec, c'est-à-dire celle de produire tel document et pas tel autre, d'accepter ou de refuser... Bref, vous remettez en cause de manière assez fondamentale le fonctionnement de l'administration tel qu'il existe aujourd'hui. Evidemment, on peut procéder à une réflexion sur la remise en cause du caractère hiérarchique de l'administration, on peut proposer de supprimer les chefs, on peut proposer une organisation plus participative et collaborative, on peut prendre des mesures anti-autoritaires telles que celles qui découlent de ce que vous proposez. Ce type de mesures a toute ma sympathie, mais il ne faut pas commencer par la fin, il ne faut pas commencer par la signature, il faut commencer par une réflexion sur la manière dont est appliqué le principe hiérarchique...

Le président. Il vous reste vingt secondes.

M. Pierre Vanek. ...dans l'administration ! Vous l'avez compris: pour des raisons de protection des fonctionnaires soumis à des décisions du Conseil d'Etat qui ne sont pas forcément tout le temps heureuses, ils ont pour le moins droit à l'anonymat...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Pierre Vanek. ...dans l'exécution de ces tâches, et nous pensons qu'il faut le respecter. Nous ne voterons pas cette motion.

M. Thierry Cerutti (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, quand on vous écoute toutes et tous, on constate que vous êtes quand même d'accord sur le fait que cette motion a une raison d'être, vous concédez qu'il serait sain de revaloriser le fonctionnaire. Vous n'utilisez simplement pas le bon outil pour... L'idée n'est pas de mettre au pilori le fonctionnaire mais simplement de revaloriser son travail, ce qui demande une réflexion. Cette motion requiert une réflexion, et vous avez toutes et tous reconnu qu'il y a une réflexion à mener, peut-être une étude à réaliser. En lieu et place de la mettre au bûcher comme vous le faites, sans forcément mener de réflexion, je vous invite simplement à la renvoyer en commission pour l'étudier. Est-il aujourd'hui possible ou non de revaloriser le fonctionnaire dans son travail ?

Naturellement, il ne s'agit pas de dire que le fonctionnaire doit assumer des responsabilités devant la commission des finances parce qu'il a pris telle ou telle décision, comme le mentionnait M. Velasco, vous savez très bien, Monsieur Velasco, qu'un fonctionnaire ne prend aucune décision, ce sont les magistrats en charge de chaque département qui dictent au fonctionnaire ce qu'il doit faire, dire, écrire ou pas. En l'occurrence, ce n'est pas ça qu'on vise, on demande simplement une revalorisation du travail.

Aujourd'hui, certains conseillers d'Etat prennent à leur compte des projets qui ne sont pas les leurs, ils n'ont simplement pas planté un clou dans ces projets et se gargarisent d'en être les auteurs, de les mettre en place, ce qui est simplement malhonnête. Ce qu'on demande, c'est de renvoyer cette motion en commission afin d'étudier la possibilité de revaloriser le travail des employés de l'administration. Ça ne veut pas dire, lorsque la commission se sera concertée sur cette motion, qu'il en ressortira quelque chose, mais ça demande en tout cas une bonne réflexion, une étude. Renvoyer ce texte en commission, ça ne mange pas de pain, ça ne mange pas de foin, et je pense qu'il y a quelque chose à faire. Autant M. Genecand que M. Velasco ou M. Vanek ont évoqué des choses intéressantes. On voit que cette motion vous interroge, vous interpelle. Du moment qu'elle vous interpelle, ça mérite une étude en commission. Merci de la renvoyer en commission, Mesdames et Messieurs !

Le président. Monsieur le député, il y a 24 commissions. A laquelle proposez-vous de la renvoyer ?

M. Thierry Cerutti. Excusez-moi: à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat.

Le président. Merci, j'en prends note. La parole est à M. le député Bernhard Riedweg.

M. Bernhard Riedweg (UDC). Merci, Monsieur le président. En Suisse, par principe, nous ne cultivons pas le culte de la personnalité. Dans le secteur privé, des sociétés anonymes publient de très nombreux articles dans la presse signés par les directeurs généraux ou les présidents de conseils d'administration alors que la plupart de ces textes ont été rédigés par des spécialistes responsables de services et de départements au sein de ces sociétés sous le contrôle du responsable de la communication. Suite au renoncement au taux plancher par la Banque nationale suisse, un article avec pour titre «Une stratégie pour assurer la prospérité de la Suisse» et signé par le directeur général de l'UBS a été publié dans les plus grands journaux de Suisse, dans les trois langues nationales. En réalité, cet article a été écrit par un comité de rédaction regroupant plusieurs spécialistes de la banque. Le nom du vrai auteur n'apparaît pas, car l'une des tâches figurant dans son cahier des charges est justement d'écrire des articles. On peut sans autre comparer cette manière de faire aux publications de l'Etat, et seuls les conseillers d'Etat en charge des départements signent et portent la responsabilité de leur contenu. Le nom d'un conseiller d'Etat est plus crédible que celui de l'un des nombreux fonctionnaires au service du chef du département. Le groupe UDC s'abstiendra sur cette motion. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à Mme la députée Marie-Thérèse Engelberts pour une minute.

Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Merci, Monsieur le président. Je suis assez affligée de constater que certains d'entre vous ont une conception de l'administration extrêmement négative. Vous donnez l'impression qu'on a affaire à des bobets, à des gens qui ne savent pratiquement ni lire ni écrire. Mais c'est scandaleux ! La plupart des personnes... C'est comme dans la recherche: combien de fois des professeurs ont-ils signé des articles sans nommer leurs collaborateurs ? Heureusement, les pratiques changent, donc il vaudrait vraiment la peine qu'au niveau de la direction des administrations, le nom des collaborateurs puisse figurer sur les documents, c'est le moindre des respects. Je trouve vraiment affligeant qu'on ne reconnaisse pas cela et surtout que de nouvelles pratiques ne s'instaurent pas au sein de l'administration. Bien sûr, les ministres sont responsables in fine, mais ils ne sont pas tout seuls !

Le président. Il vous faut conclure.

Mme Marie-Thérèse Engelberts. Je conclurai en disant qu'il serait vraiment souhaitable, au vu de toutes les questions qui ont été soulevées, que cette motion soit renvoyée à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat pour être analysée.

Le président. Je vous remercie, Madame la députée, et cède la parole à M. Roger Deneys, à qui il reste une minute dix.

M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le plus grave danger de cette proposition de motion, c'est qu'elle va nous faire perdre nos dernières illusions ! Il ne faut surtout pas accepter une motion pareille ! Aujourd'hui, quand je lis un texte, un projet de loi ou un communiqué de presse du Conseil d'Etat, je m'imagine que le conseiller d'Etat dont le nom figure au bas de la page a compris le texte qu'il a signé, sait de quoi il parle et assume le contenu politique de sa déclaration ! Et maintenant vous voulez nous priver de cette dernière illusion en indiquant le nom des fonctionnaires qui ont rédigé le texte ! Vous imaginez ? Voilà dix ou douze ans que je me fais avoir dans ce Grand Conseil ! Ce n'est pas possible, Mesdames et Messieurs les députés, c'est tout simplement impossible d'enlever leurs illusions aux députés en mentionnant le nom des fonctionnaires qui ont travaillé ! Les conseillers d'Etat savent très bien ce qu'ils font tous les jours quand ils signent des textes, il faut maintenir le système actuel.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Lefort, il vous reste trente secondes.

M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. J'ai rarement vu le MCG faire un marketing aussi doucereux pour l'un de ses textes, c'est déjà là un signe pernicieux. Il n'y a rien à étudier, non ! (Commentaires.) Comptez leurs secondes ! Suivre votre demande, Mesdames et Messieurs, c'est diluer les responsabilités et donner des responsabilités politiques aux fonctionnaires qui ne les ont pas demandées, c'est les exposer aux pressions et aux vindictes, et ceci n'est pas acceptable. Evidemment, non seulement nous ne voterons pas cette motion mais surtout nous vous demandons de ne pas la renvoyer en commission parce qu'encore une fois, il n'y a là rien à étudier.

M. Bertrand Buchs (PDC). Rapidement, encore un argument: je crois que ce n'est pas au parlement de décider de la façon dont doivent fonctionner les départements de l'Etat ainsi que les relations entre les fonctionnaires et le Conseil d'Etat. On a toujours tendance à vouloir décider à la place du Conseil d'Etat. Les conseillers d'Etat gèrent leur personnel et s'ils veulent remercier un employé qui a fait un travail X ou Y, ils sont assez grands pour le faire. Quant à moi, je vous encourage à le faire au sein de ce parlement comme nous le faisons pour notre part puisque chaque fois qu'on procède à une audition et qu'on écrit un rapport, on remercie le fonctionnaire ou le haut fonctionnaire qui nous a aidés; on le fait, on va continuer à le faire et je vous encourage à le faire aussi. Quand j'ai présenté le rapport de la commission de contrôle de gestion, j'ai remercié le fonctionnaire M. Audria, qui m'a beaucoup aidé; c'est normal, mais c'est moi qui écris le rapport et je le remercie. Alors continuez à le faire au sein du parlement, et ça suffit. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, nous allons procéder au vote. Tout d'abord, nous avons été saisis d'une demande de renvoi en commission, Mesdames et Messieurs, que je vous soumets.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2189 à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat est rejeté par 69 non contre 18 oui et 1 abstention.

Mise aux voix, la proposition de motion 2189 est rejetée par 61 non contre 18 oui et 10 abstentions.