République et canton de Genève

Grand Conseil

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RD 1533
Rapport annuel de la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil (5e année de législature 2018-2023)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.
Rapport de Mme Salika Wenger (EAG)

Débat

La présidente. Nous passons au RD 1533, classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de Mme Salika Wenger. Je ne sais pas qui la remplace, dès lors que le groupe Ensemble à Gauche n'est plus présent dans cette enceinte. (Un instant s'écoule.) Très bien, nous passons au vote. (Remarque.) Ah, pardon ! Il n'y a pas de rapporteur, mais des demandes de prise de parole. Madame Sophie Bobillier, vous pouvez vous exprimer.

Mme Sophie Bobillier (Ve). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, en ma qualité de présidente de la commission des visiteurs officiels, je me permets de prendre la parole au sujet du rapport 2022-2023. En résumé, un certain nombre de préoccupations partagées par les commissaires ressortent du rapport et des travaux de la commission. Celle-ci s'inquiète de la surpopulation carcérale de notre canton et recommande de renforcer, dans le cadre existant, les mesures alternatives à la détention, y compris pour les personnes incarcérées faute d'avoir payé des amendes. Elle se soucie également des conditions de détention spécifiques aux personnes qui présentent des vulnérabilités particulières et recommande qu'une unité spécialisée et dédiée à ces personnes soit créée au sein de l'établissement de Champ-Dollon. Enfin, une attention particulière est portée à la prévention du suicide: Genève déplore un nombre non négligeable de personnes mortes en détention.

La commission a recueilli ces constatations lors de ses nombreuses visites dans les centres de détention et lors de nombreuses auditions, notamment celles de personnes incarcérées. La commission appelle le Conseil d'Etat à être attentif et à remédier à ces problématiques, et elle poursuivra scrupuleusement ses travaux durant cette législature: elle continuera à visiter les établissements de détention et de privation de liberté au sens large et poursuivra ses rencontres, tant avec les autorités concernées qu'avec les personnes détenues, afin d'assurer que les conditions de détention respectent le cadre légal national et international. Elle s'attellera également à la lourde mission consultative pour la mise en oeuvre de la planification pénitentiaire afin que celle-ci réponde aux impératifs d'intérêt public et que des erreurs passées ne soient pas répétées.

Maintenant, au nom du groupe Vert et à titre tout à fait personnel, je souhaite appeler le Conseil d'Etat et notre législatif à travailler main dans la main avec tous les acteurs traitant de la détention et à prêter une oreille attentive à la société civile. Celle-ci est au plus proche des personnes privées de liberté; elle met en lumière le quotidien de ces personnes détenues et relève les failles liées à ce système ainsi que les conditions de détention bien trop souvent inacceptables pour Genève, capitale des droits humains. Trop souvent, par raccourci, ce système choisit l'enfermement dans des conditions inadéquates de personnes vulnérables et qui se trouvent dans un état de précarité, alors que des solutions d'accompagnement efficaces et, in fine, humainement et économiquement intéressantes pour notre société pourraient être mises en oeuvre.

Pour toutes ces raisons, je vous remercie d'adopter le rapport à l'unanimité. Merci. (Applaudissements.)

Mme Celine van Till (PLR). Je ne peux qu'appuyer ce que la présidente de la commission, Mme Bobillier, a relevé. Etant nouvelle dans la commission, je me suis fondée sur mon prédécesseur, et je souhaite mettre l'accent sur plusieurs éléments importants qui permettront, ces prochaines années, de poursuivre les travaux dans la continuité de la législature précédente.

Mme Bobillier a parlé de la planification pénitentiaire votée ce printemps. Nous devrons veiller à ce qu'elle soit mise en oeuvre et à ce que les différents projets qui doivent en découler soient traités avec diligence. Je voudrais faire remarquer que les enjeux dans le domaine carcéral pour notre canton sont aujourd'hui d'importance majeure. Des constats sur les conditions de détention et de travail ont pu être faits d'après ce que la commission, qui est allée sur le terrain, a pu vivre et de ce que j'ai moi-même observé. Les diverses associations concernées ont démontré qu'il est urgent d'intervenir.

On parle surtout de mise aux normes des bâtiments, de traitement des problèmes énergétiques, de la canicule - dont la question s'est encore posée cette année - ou encore de la surpopulation carcérale. Tous ces éléments constituent autant de thèmes qui méritent une attention particulière. La commission a fait certaines recommandations lors de la dernière législature, mais comme elles ont déjà été citées, je ne vais pas revenir dessus.

Je souhaite juste ajouter un mot à propos de la détention des femmes, enjeu auquel on doit continuer de prêter attention. Il convient de veiller au respect et à la protection des femmes incarcérées. Il n'est en effet pas admissible que les femmes détenues à Champ-Dollon soient exposées aux insultes et aux remarques sexistes lors de leur promenade quotidienne, située sous les fenêtres des détenus, des hommes. Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite donc que nous poursuivions nos travaux dans ce sens-là au cours de cette législature. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

Mme Léna Strasser (S). Mesdames et Messieurs les députés, on l'a dit, notre commission est préoccupée par la surpopulation carcérale et s'est réjouie que le rapport annexe à la planification pénitentiaire fasse mention d'un renforcement des mesures alternatives à la détention, ce qui évite d'incarcérer des personnes qui pourraient purger une peine alternative. Pour le groupe socialiste, il est vraiment nécessaire d'accélérer ce virage, la surpopulation carcérale mettant vraiment à mal les conditions de détention. Lors de nos visites, nous avons régulièrement questionné l'emprisonnement des personnes ayant vu leurs amendes non payées converties en peines privatives de liberté. Elles n'ont, a priori, pas à être enfermées et d'autres solutions doivent être trouvées, pour qu'elles ne puissent ni connaître une désaffiliation ni perdre leur autonomie.

De plus, tant l'an passé que cette année, la commission a effectué des visites dans différents lieux de détention en période de canicule. Elle est vraiment consciente des enjeux majeurs, a partagé cette problématique avec les directions et cherche actuellement des solutions dans l'attente de la mise en oeuvre de la planification pénitentiaire. En outre, si aucune recommandation sur le personnel de la détention ne figure dans ce rapport, le groupe socialiste est préoccupé par le manque de personnel, qui a des impacts importants sur l'accès aux ateliers et sur le bon fonctionnement des lieux de détention. Une revalorisation de la profession d'agent de détention est vraiment nécessaire, car un encadrement adéquat des personnes incarcérées permet une meilleure prise en charge et une meilleure réinsertion par la suite.

Enfin, notre groupe sera très attentif à la qualité des infrastructures proposées dans le cadre des projets de lois suivant la planification pénitentiaire. En effet, nous devons moderniser nos établissements de détention, pour peut-être enfermer moins, mais en tout cas enfermer plus dignement. Merci. (Applaudissements.)

M. André Pfeffer (UDC). J'aimerais juste ajouter l'élément suivant à ce qu'on a déjà dit: le rôle de notre commission. Il est de contrôler si derrière les murs de nos prisons l'Etat de droit est appliqué, si derrière les murs de nos prisons la loi est correctement appliquée, si l'administration pénitentiaire effectue son travail et a les moyens de le faire, et si le droit et les devoirs des détenus sont respectés. Ce rapport sur l'activité de l'année dernière montre que le cadre légal est respecté dans nos prisons, dans nos lieux de privation de liberté. Je crois qu'il faut saluer ce rapport. Merci de votre attention.

La présidente. Merci. (Brouhaha.) S'il vous plaît ! La parole revient à M. Pierre Conne pour vingt-deux secondes.

M. Pierre Conne (PLR). Merci, Madame la présidente. Le rapport récent de la Cour des comptes sur les mesures alternatives aux privations de liberté montre qu'à Genève, elles ont atteint le maximum - il y a plus de bracelets de surveillance au SAPEM que de personnes ayant le droit d'en bénéficier - et que le vrai problème, c'est le manque de places. Merci.

M. Patrick Dimier (MCG). Je ne pensais vraiment pas intervenir dans ce débat-là... (Brouhaha.)

La présidente. Excusez-moi. Est-ce que la discussion qui se passe juste derrière vous pourrait cesser ? Merci. Allez-y, Monsieur Dimier.

M. Patrick Dimier. Merci, Madame la présidente. Simplement, je désire poser une réflexion de fond. Est-ce que la privation de liberté est toujours la meilleure solution ? Est-ce que des peines alternatives ne devraient pas plus souvent être prononcées ? De ce point de vue, je pense que le modèle anglais en matière d'infractions routières est tout à fait le modèle à suivre: au lieu de priver les gens de liberté, on leur impose d'aller travailler dans les hôpitaux pour qu'ils voient les dégâts que les infractions routières peuvent provoquer. Merci.

La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, nous votons sur ce rapport.

Mis aux voix, le rapport divers 1533 est approuvé et ses recommandations sont transmises au Conseil d'Etat par 86 oui et 1 abstention (vote nominal).

Vote nominal