Poule à l'épée au Château de Lancy, 1908 (CH AEG Sociétés 26.1)
Fondée en 1862, la Société d'escrime de Genève accompagne un processus de transformation allant des derniers sursauts du geste guerrier à la mise en place de la pratique sportive. Au temps de sa création, Genève a encore ses maîtres d'armes enseignant un savoir-faire qui n'a rien d'anodin dans une société où le duel, déclinant, mais toujours vivace, a encore sa place.
À la fin du XIXe siècle, le journaliste rapporte encore la qualité des "puissantes parades", les "beaux assauts" et les "brillantes passes d'armes". Ces envolées seront bientôt remplacées par les classements et le comptage des points. La discipline se codifie, l'intention, les gestes se transforment, il ne s'agit plus de sauver sa vie, il s'agit de marquer le point. La discipline sportive se met progressivement en place.
Si la Société d'escrime s'impose rapidement comme le pôle de la discipline à Genève, un certain nombre de Maîtres subsistent dans son orbite. Parmi ceux-ci, on compte notamment dès 1890, M. Fouchet, qui tout en ayant sa propre salle, participera à la création du Cercle Saint-Georges en 1898. Ce cercle offrira, pendant près de 25 ans, des escrimeurs de qualité disputant les premières places de nombre de compétitions avec les représentants de la Société d'escrime de Genève. Le Cercle de Saint Georges finit par fusionner avec cette dernière en 1923.
Ce n'est que dans l'entre-deux-guerres que les filières militaires se tarissent, les salles ferment et les maîtres se font rares. L'escrime vit des heures difficiles mais finit sa mue et devient pleinement un sport. Elle conserve néanmoins l'aura militaire et aristocratique de ses origines, un héritage qui va de pair avec le fait de ne pas être un sport populaire; peu d'affiches, des foules réduites, lorsque l'on se présente devant un public, ce dernier est choisi.
Corollaire de l'évolution vers le sport, les soirées réunissant des "tireurs" de différents horizons cèdent progressivement la place à de véritable compétitions: au niveau local, avec des initiatives telles que la Coupe Pictet-de-Rochemont (1898) ou le championnat d'épée du Château de Lancy, aussi au niveau Suisse et internationaux avec notamment l'instauration des jeux olympique en 1896. C'est toute la structure sportive contemporaine, avec son calendrier et ses rendez-vous, qui se met progressivement en place.