Ecusson de la République et du canton de Genève


REPUBLIQUE
ET CANTON
DE GENEVE

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6. Le délit de librairie

A Genève, encadrée par des lois (1560, 1580), la censure des livres remonte à la Réforme. Durant cette période de combat confessionnel se multiplient les imprimés avec l’adresse de la République. Les « Seigneurs Scholarques examinent les manuscrits ou les épreuves composées. Le Petit Conseil délivre l’imprimatur et ordonne le «dépôt légal» à la Bibliothèque de l’Académie. La censure n’évolue guère jusqu’au XVIIIe siècle, âge d’or de l’imprimerie genevoise. Après 1750, des textes de loi (1761, 1766, 1781, 1788) la renforcent. Le Code genevois de 1791 libéralise la librairie jusqu’à la période française.

Parmi 7000 dossiers judiciaires instruits entre 1750 et 1798 émergent 128 actes de censure que motive souvent le procureur général: 102 et 13 interdictions d’imprimés respectivement séditieux et hostiles aux «alliés» de Genève; 12 frappent des imprimés religieux, 14 des libelles diffamatoires ou obscènes. Entre enquêtes judiciaires, expertises typographico-légales et perquisitions d’imprimeries: la police du livre mène à l’autodafé public. Contrairement au texte «diffamatoire» ou «obscène», le pamphlet séditieux est brûlé par le bourreau devant la Maison de ville. Les bûchers culminent entre 1760 et 1771, puis 1777 et 1784. Liée aux troubles politiques de Genève, la censure se durcit en 1765, 1767, 1770, 1777 et 1780. Le feu assure la publicité de l’imprimé dangereux.

 

Règlement sur l’imprimerie et librairie, Aprouvé en Conseil le 28. août 1761

BGE, Ms. fr. 981
BGE, Ms. fr. 981, folio 94v°-95 (photo Nicolas Crispini)


Règlement sur les imprimeurs approuvé au Magnifique Conseil des Deux-Cent, le 22 avril 1788, 4 pages
Déclaration des presses, monopole éditorial des imprimeurs patentés, dépôt légal, permission d’imprimer donnée par le scholarque ou la Compagnie des pasteurs: le contrôle étatique de l’imprimerie et de la librairie, souvent plus théorique que pratique, vise à prohiber la fabrication occulte d’ouvrages dangereux ou non conformes à l’orthodoxie protestante.

AEG, Bibliothèque, Girod 158/27
AEG, Bibliothèque, Girod 158/27

 

Pièce à conviction (libelle intitulé Atténuation complette de l’exploit) lacérée en Conseil par sentence criminelle
Diffamatoire pour une personne, l’imprimé devenu illicite est confisqué et discrètement lacéré en Petit Conseil pour éviter le tapage publicitaire de la censure.

AEG, P.C. 1re série 13452
AEG, P.C. 1re série 13452 («impression d’un factum»), 1780

 

Rapport («verbal») de perquisition chez l’imprimeur Grasset
Menée par l’auditeur, l’enquête policière se déploie rapidement dans les imprimeries, ateliers, librairies et douanes de la cité pour identifier l’origine d’un imprimé suspect.

AEG, P.C. 1re série 13440
AEG, P.C. 1re série 13440 («livre impie»), 1780, folio 6

 

Pièce à conviction: [Baron d’HOLBACH], Histoire critique de Jésus-Christ ou Analyse raisonnée des Evangiles, Amsterdam, 1778
Parfois, la censure fonctionne de manière peu spectaculaire lorsque les huissiers confisquent chez un imprimeur un ouvrage impie ou obscène. Cinquante exemplaires du livre matérialiste du Baron d’Holbach sont saisis chez l’imprimeur Gabriel Grasset avec des textes obscènes, libertins et mondains. Grasset devra notamment payer une amende de 500 florins (équivalence: 250 journées de salaire pour le travail d’un maçon).

AEG, P.C. 1re série 13440
AEG, P.C. 1re série 13440 («livre impie»), 1780

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