Des criminels dont les juges commuent la peine sont envoyés aux galères depuis la fin du Moyen Age dans les Etats méditerranéens (Espagne, Gênes, Venise). Autour de 1550, les cours de justice commencent de prononcer directement la peine des galères et l’intègrent au système judiciaire. Au XVIIe siècle, les tribunaux criminels de France et des Etats voisins (Genève notamment) fournissent, par leurs sentences, les hommes de rame dont la monarchie française a besoin pour développer sa flotte des galères (40 galères à Marseille à la fin du siècle). Supprimées en France en 1748, les galères se muent en bagne, ou en «galères de terre», avec le transfert de la chiourme aux arsenaux de Toulon et de Brest.
A partir de 1750, le bagne répond aux besoins de la politique pénale des juges et des magistrats au moment où s’affirme le mouvement de réforme pénale. La peine des galères offre une alternative autant à la peine capitale qu’au bannissement des criminels. Dans la République, comme ailleurs en Europe, la peine des galères est censée répondre, dans les dernières décennies de l’Ancien Régime, aux attentes d’une nouvelle économie pénale qui se veut préventive, utilitaire et corrective. La justice genevoise alimente ainsi la chaîne des forçats, «théâtre ambulant» qui sillonne la France depuis le début du XVIIe siècle.
Convention entre Genève et la France sur les frais de remise des forçats condamnés aux galères (bagne)
En 1782, alors qu’elles déplorent l’absence d’une «maison de force» sur leur territoire, les autorités de la République signent un concordat avec la France. Celui-ci prévoit le transfert des forçats aux prisons de Lyon ou de Besançon, par où transite la chaîne des galériens.
AEG, R.C. 283, 21 octobre 1782, folio 414b
Dessin de la galère La Réale
Les condamnés aux galères, toujours masculins à cause de l’effort physique que le châtiment suppose, sont marqués au fer chaud des lettres GAL sur l’épaule. Selon l’Ordonnance criminelle de 1670, les galères à perpétuité sont situées au deuxième rang de l’échelle des peines, après la mort. Entre 1685 et 1715, le taux de mortalité parmi la chiourme dépasse les 51%.
Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, volume de planches VII, Marine, planche II, Paris, Le Breton, 1769
Signalement et extrait de sentence accompagnant la remise aux officiers royaux d’un forçat condamné pour vol avec effraction
Entre 1685 et 1738, les juges de la République prononcent la peine des galères à trente et une reprises, «à temps» et à perpétuité. Vingt condamnations aux galères sont encore prononcées dans les années 1780.
AEG, Jur. Pen. H 1, 29 avril 1785