Plans et vues anciens (1718-1945)
Dans la recherche déterministe visant à expliquer la Genève moderne, l'histoire et la situation géographique ont très souvent été opposées. Ainsi, de nombreux chercheurs décrivent plutôt Genève comme «fille de l'histoire»; s'ils soulignent l'influence de la Réforme sur les contacts internationaux et les activités économiques de la «Rome protestante», ils négligent cependant l'importance de Genève comme «capitale» d'un vaste diocèse. En effet, entre le VIIe siècle et 1533, l'évêque de Genève, vassal direct de l'Empire, règne sur un territoire qui comprendra la Haute-Savoie, le Valromey, la Michaille, le Pays de Gex, et qui s'étend au nord jusqu'à l'Aubonne (VD).
La grande Regio genevensis de l'évêché médiéval (d'après Louis Blondel)
Les défenseurs d'une vision, disons, «géographique», soulignent d'une part la situation enclavée dans un cercle montagneux, qui conditionne le tracé des voies de circulation; d'autre part la position de Genève comme carrefour, lieu de convergence des grandes artères reliant le nord et le sud de l'Europe ; et, enfin, sa valeur «charnière». C'est effectivement par une ligne tirée entre Genève et Cherbourg que Le Roy-Ladurie sépare la France riche du nord et la pauvre, au sud.
Pour rallier ces deux visions et souligner encore le caractère «axial» de Genève, rappelons qu'elle est l'espace protestant le plus méridional, et qu'elle se situe au carrefour des climats alpin et atlantique.
Enfin, les études de MM. Binz et Zumkeller ont affirmé plus précisément encore l'attachement traditionnel de Genève au sud et à la Méditerranée; selon eux, Genève est une véritable «porte du sud». Parmi leurs nombreux arguments, quelques-uns sont agricoles: à Genève, l'assolement est biennal et la campagne faite de bocages, comme le montrent les vues anciennes, et si les haies vives ont bien failli disparaître, c'est essentiellement lors des chantiers de remaniements parcellaires du XXe siècle. Au-delà d'Aubonne, par contre, nous entrons dans le Diocèse de Lausanne et trouvons à la fois assolement triennal et culture de grands champs de type «openfield» nordique.
1. Plan de Genève par Micheli du Crest, 1718, montrant la cité et sa «banlieue champêtre», faite de bocages. Dessin et aquarelle (collection Dumur, AP 247/V/36 a) [non reproduit]
2. L'importance et le caractère massif des fortifications apparaissent nettement sur le plan et la vue de Genève - prise depuis le Bois de la Bâtie - de Nicolas Tassin, extraits des «Plans et profilz de toutes les principales villes et lieux considérables de France...», c. 1634 (collection Dumur, AP 247/V/53 et AP 247/I/44)
3. Vue de Genève par Mathieu Merian, pour la «Topographia Helvetiae», 1642. Les parcelles cultivées et closes de haies commencent tout de suite au pied des fortifications. La campagne ressemble à «un jardin de plaisir bien planté» (collection Dumur, AP 247/XII/31) [non reproduit]
4. La carte de la Ville de Genève et environ, par P. Mayer, indique précisément le bâti, qui commence à se densifier le long des routes de Gex, St-Julien et Annemasse. Elle fait aussi la distinction entre les prés, les bois, les parcelles maraîchères, les vignes et les vergers. Levée en 1822, cette carte a été publiée en 1826, par J.-R. Mayer (Militaire N 19.3) [non reproduit]
5. Plan de Genève et environ, par Orell Füssli, Zürich, 1945. Cette «carte scolaire» de 1945 permet de voir l'expansion de la cité et l'empiètement du bâti sur des terres qui étaient longtemps restées agricoles (PR 70) [non reproduit]