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Décisions | Chambre de surveillance

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C/6578/2009

DAS/189/2020 du 17.11.2020 sur DTAE/2421/2020 ( PAE ) , REJETE

Normes : CC.404.al1
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6578/2009-CS DAS/189/2020

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MARDI 17 NOVEMBRE 2020

 

Recours (C/6578/2009-CS) formé en date du 26 juin 2020 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), comparant par Me Damien BONVALLAT, avocat, en l'Etude duquel elle élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 19 novembre 2020 à :

 

- Madame A______
c/o Me Damien BONVALLAT, avocat
Rue Joseph-Girard 20, case postale 1611, 1227 Carouge.

- Maître B______
______ Genève.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 

 


EN FAIT

A.                a. Par ordonnance du 14 août 2009, le Tribunal tutélaire (désormais le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, ci-après: le Tribunal de protection) a désigné C______ aux fonctions de curatrice de sa soeur, A______, née le ______ 1935, originaire de ______ (Saint-Gall), aux fins d'administrer ses biens, d'encaisser ses revenus et ses rentes, de pourvoir à leur gestion et de la représenter à l'égard de ses créanciers; C______ avait pris l'engagement d'exercer son mandat à titre gratuit, ce dont il lui a été donné acte. A______, qui souffrait d'un état dépressif assorti d'un syndrome de type Diogène, ne s'était pas opposée à cette mesure de protection.

b. Par ordonnance du 2 septembre 2011, le Tribunal tutélaire a prononcé la mainlevée de la mesure de curatelle instituée en faveur de A______, à la demande de cette dernière, et a relevé la curatrice de ses fonctions.

c. Par courrier du 17 décembre 2018, D______, avocat, a signalé au Tribunal de protection la situation de A______. Il a exposé que celle-ci avait sollicité son aide à plusieurs reprises alors qu'elle se trouvait dans une situation de détresse et de souffrance. C______, soeur de A______, gérait l'intégralité de ses affaires, les deux filles de l'intéressée étant domiciliées en Angleterre et faisant confiance à leur tante. A______ avait été installée dans un appartement à ______ [GE], sombre et encombré, alors qu'elle occupait précédemment un logement appartenant à son frère, E______, dont le contrat de bail n'avait pas été résilié. E______ réclamait par conséquent plus de 5'000 fr. de loyer, montant auquel s'ajoutaient des arriérés pour plus de 5'000 fr. également. A______ avait en outre signé, le 9 août 2014, des attestations relatives à des remboursements de prêts que ses deux filles lui auraient octroyés respectivement en 83'198 fr. et en 34'242 fr., dont elle déclarait n'avoir aucun souvenir, tout en précisant que c'était en réalité elle qui aidait financièrement ses filles, afin qu'elles puissent acquérir un logement en Angleterre. A______ ignorait tout de sa fortune et de ses revenus, sa soeur lui remettant 100 fr. par semaine pour ses besoins courants. Elle avait rédigé un courrier remis à D______, dans lequel elle indiquait avoir besoin de quelqu'un d'extérieur à la famille pour gérer ses affaires, espérant ainsi retrouver une relation normale avec ses filles et déclarant que la situation actuelle avec son frère et sa soeur lui était insupportable. Elle était "presque en désespoir" et téléphonait souvent à [l'association] G______.

Dans un nouveau courrier du 4 janvier 2019 adressé au Tribunal de protection, D______ précisait que A______ affirmait être manipulée par sa famille, qui lui reprochait d'avoir approché un avocat, qu'elle n'avait au demeurant pas les moyens de mandater formellement.

La procédure contient par ailleurs deux photographies de l'appartement de A______, qui apparaît fortement encombré.

d. Par décision DTAE/176/2019 du 14 janvier 2019, le Tribunal de protection a désigné B______, avocate, aux fonctions de curatrice d'office de A______, son mandat étant limité à sa représentation dans la procédure civile pendante devant cette juridiction.

e. Par courrier du 30 janvier 2019, B______ informait le Tribunal de protection de ce que A______ bénéficiait d'un suivi médical auprès de l'IMAD, cette institution assurant une aide pour le ménage, les repas et les soins personnels. L'intéressée s'était plainte de ne pas disposer de suffisamment d'argent et d'être dépassée par les questions financières et administratives. Elle ignorait le montant de sa fortune et de la rente perçue à la suite du décès de son époux. Selon B______, elle présentait quelques difficultés cognitives. Il existait enfin un doute sérieux concernant la nature des relations entretenues par l'intéressée et sa famille, notamment sa soeur, qui gérait ses affaires et son argent.

f. Le Tribunal de protection a tenu une audience le 5 février 2019, lors de laquelle A______, bien que son transport ait été organisé, n'était pas présente. B______ a indiqué s'être entretenue avec elle et avoir relevé qu'elle ne se plaignait pas de son lieu de vie, mais uniquement du montant de l'argent de poche qu'elle recevait de sa soeur.

A l'issue de l'audience, le Tribunal de protection a décidé d'interpeller le médecin traitant de l'intéressée ainsi que l'IMAD et d'entendre C______.

g. Dans un courrier du 5 mars 2019, l'IMAD a confirmé l'aide apportée à A______. Celle-ci semblait être en conflit avec son frère.

h. Dans un courrier du 13 mai 2019, le Dr F______, gériatre, a indiqué qu'en l'état et après en avoir discuté avec A______, celle-ci ne nécessitait pas l'instauration d'une nouvelle mesure de curatelle. L'intéressée avait renouvelé sa confiance à sa soeur, qui s'occupait chaque semaine de ses affaires et était opposée à une nouvelle procédure de mise sous curatelle, soutenue en cela par ses deux filles. A______ lui avait fait l'effet d'une personne sensée, possédant sa capacité de discernement, même si elle était ponctuellement affectée de troubles cognitifs.

i. Le Tribunal de protection a tenu une nouvelle audience le 18 juin 2019.

A______ a expliqué avoir consulté D______, avocat, dont l'étude se trouvait dans son immeuble et lui avoir exposé différents problèmes qui la préoccupaient. Il y avait eu, selon elle, une "certaine confusion dans la perception de sa situation".

C______ a expliqué, pour sa part, que lorsque la mesure de curatelle avait été levée, elle avait néanmoins continué de soutenir sa soeur sur le plan administratif; elle était au bénéfice d'une procuration sur ses comptes et lui rendait visite tous les week-ends. Par le passé, A______ était redevable de loyers à l'égard de son frère E______, qui avaient toutefois été réglés. Elle a confirmé que les deux filles de A______ avaient prêté de l'argent à cette dernière, afin de lui permettre d'acquérir un bien immobilier dans la région genevoise, ce qu'elle n'avait finalement pas fait; les sommes empruntées avaient depuis lors été remboursées. C______ estimait pour sa part que les affaires de sa soeur étaient sous contrôle. Elle percevait des rentes à hauteur d'environ 4'500 fr. par mois et sa fortune était de l'ordre de 95'000 fr., à laquelle s'ajoutait une somme de 50'000 fr. que A______ avait prêtée en 2018 à l'une de ses filles.

A l'issue de l'audience, le Tribunal de protection a sollicité de C______ la production de pièces complémentaires concernant la situation financière et sociale de l'intéressée.

j. Avant que la cause ne soit mise en délibération, la curatrice de A______ a formulé des observations par courrier du 20 janvier 2020. Elle a relevé que la situation financière de l'intéressée demeurait floue et incomplète. Celle-ci estimait nécessaire d'être aidée, en l'occurrence par sa soeur, pour toutes les questions financières, mais elle refusait catégoriquement une mesure de curatelle. Le gérant de l'immeuble dans lequel elle vivait lui demandait régulièrement de ranger les extérieurs, en raison de son comportement de type Diogène. Selon B______, une mesure de curatelle n'aurait sans doute pas eu pour effet d'apporter un meilleur soutien à A______.

k. Par ordonnance non motivée du 18 février 2020, le Tribunal de protection a dit qu'il n'y avait pas lieu d'instituer une mesure de protection en faveur de A______ et a laissé les frais de la procédure à la charge de l'Etat.

B. a. Le 5 mai 2020, B______ a adressé son time-sheet au Tribunal de protection, faisant état d'un total de sept heures d'activité, sollicitant par ailleurs la relève de son mandat.

b. Par décision DTAE/2421/2020 du 11 mai 2020, le Tribunal de protection a relevé B______ de ses fonctions de curatrice d'office de A______ pour la période allant du 14 janvier 2019 au 28 février 2020 et arrêté ses honoraires à la somme de 1'400 fr. (7 heures d'activité à 200 fr./h) en vertu du tarif applicable selon le règlement fixant la rémunération des curateurs (RRC), l'a mise à la charge de A______ et a précisé que l'activité déployée en qualité de curateur n'était pas soumise à TVA (art. 7 RRC).

c. Le 26 juin 2020, A______ a formé recours contre cette décision, reçue le 28 mai 2020, concluant à son annulation. Préalablement, elle a conclu à ce que la note d'honoraires de la curatrice lui soit transmise, les frais devant être laissés à la charge de l'Etat.

La recourante a allégué avoir été surprise par le nombre d'heures facturées par B______, dont elle ignorait le détail. Son droit d'être entendue avait été violé.

d. Dans ses observations du 4 août 2020, B______ a déclaré s'en rapporter à justice s'agissant de la recevabilité du recours et a conclu à son rejet. Elle s'est pour le surplus référée à sa note d'honoraires détaillée du 5 mai 2020.

e. Le Tribunal de protection a persisté dans les termes de la décision contestée.

f. Par pli du 4 septembre 2020, le greffe de la Chambre de surveillance a adressé à la recourante une copie du time-sheet de B______ du 5 mai 202 et lui a imparti un délai de 20 jours pour formuler toutes observations utiles.

A la demande du conseil de la recourante et par avis du 25 septembre 2020, ledit délai a été prolongé au 5 octobre 2020.

g. Le 6 octobre 2020, la recourante a adressé ses observations à la Chambre de surveillance, datées du 5 octobre 2020. Elle a déclaré admettre le time-sheet de B______. Elle avait toutefois constaté que la démarche entreprise par D______, avocat, qu'elle avait consulté "pour un tout autre sujet", avait entraîné des inconvénients et des frais importants. Les frais de la curatrice devaient par conséquent être mis à la charge de D______ ou à celle de l'Etat. Elle a en outre sollicité l'allocation de dépens.

EN DROIT

1.                  1.1 Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte peuvent faire l'objet dans les trente jours d'un recours écrit et motivé devant le juge compétent, à savoir à Genève la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 et 3 et 450b CC; 53 al. 1 et 2 LaCC).

Le recours doit être dûment motivé et interjeté par écrit auprès du juge (art. 450 al. 3 CC).

Dans le cas d'espèce, le recours formé par la personne concernée par la décision litigieuse, dans le délai et les formes prescrits par la loi, est recevable.

1.2 Les actes doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai soit au tribunal soit à l'attention de ce dernier, à la poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 143 al. 1 CPC).

En l'espèce, la Chambre de surveillance avait fixé à la recourante un délai au 5 octobre 2020 pour faire valoir ses observations concernant le time-sheet de la curatrice, dont elle lui avait transmis une copie. Or, si les déterminations de la recourante portent la date du 5 octobre 2020, elles n'ont toutefois été adressées à la Chambre de surveillance que le 6 octobre 2020, selon le tampon de la poste, et sont par conséquent hors délai. Cela étant, la recourante a renoncé à contester la note d'honoraires de la curatrice et pour le surplus, lesdites observations ne contiennent aucun élément susceptible d'exercer une influence sur l'issue du litige.

1.3 La Chambre de surveillance examine la cause librement en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC).

2. La recourante reproche au Tribunal de protection d'avoir violé son droit d'être entendue.

2.1 Le droit d'être entendu est une garantie de caractère formel, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours au fond. Toutefois, une violation - pas particulièrement grave - du droit d'être entendu peut exceptionnellement être guérie si l'intéressé peut s'exprimer devant une instance de recours ayant libre pouvoir d'examen en fait comme en droit. Même en cas de violation grave du droit d'être entendu, la cause peut ne pas être renvoyée à l'instance précédente, si et dans la mesure où ce renvoi constitue une démarche purement formaliste qui conduirait à un retard inutile, incompatible avec l'intérêt de la partie concernée à un jugement rapide de la cause (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1, JdT 2010 I 255).

2.2 Dans le cas d'espèce, il n'est pas contesté que le Tribunal n'a pas, préalablement à la prise de la décision querellée, interpellé la recourante pour solliciter sa détermination. Cela étant, la Chambre de surveillance, qui dispose d'un pouvoir de cognition complet, a transmis à la recourante le time-sheet de la curatrice, lui donnant par ailleurs la possibilité de faire valoir ses arguments. Ainsi, la violation du droit d'être entendu commise par l'instance précédente a été réparée en appel.

Ce premier grief doit être rejeté.

3.                  3.1.1 Dans le cadre de l'instruction d'une cause portant sur l'instauration éventuelle d'une mesure de protection,l'autorité de protection de l'adulte ordonne la représentation de la personne concernée dans la procédure et désigne curateur une personne expérimentée en matière d'assistance et dans le domaine juridique (art. 449a CC).

3.1.2 Aux termes de l'art. 404 al. 1 CC, le curateur a droit à une rémunération appropriée et au remboursement des frais justifiés; ces sommes sont prélevées sur les biens de la personne concernée. Selon l'alinéa 2 de cette disposition, l'autorité de protection fixe la rémunération, en tenant compte en particulier de l'étendue et de la complexité des tâches confiées au curateur.

Selon l'art. 9 al. 2 du Règlement sur la rémunération des curateurs (E 105.15), le tarif à la charge de la personne concernée est fixé à 200 fr. pour un curateur avocat chef d'étude pour la gestion courante des affaires du pupille et de 200 à 450 fr. pour son activité juridique.

3.2.1 En l'espèce, seule la question de la mise des frais de la curatrice à la charge de la recourante est litigieuse, cette dernière ne contestant plus, en tant que telle, la note d'honoraires.

3.2.2 Comme cela a été relevé ci-dessus, le mandat confié à la curatrice a été exercé dans le seul intérêt de la recourante. Il ne saurait par ailleurs être reproché au Tribunal de protection d'avoir ouvert une procédure sur la base des informations inquiétantes portées à sa connaissance concernant la situation personnelle de la recourante, qui pouvaient laisser craindre l'existence d'un éventuel conflit d'intérêts avec les membres de sa famille et la nécessité de prononcer une mesure de protection. Au vu de ce qui précède, rien ne justifie que l'Etat de Genève assume les honoraires de la curatrice.

Il en va de même s'agissant de l'avocat D______, qui s'est contenté d'informer le Tribunal de protection de la situation de détresse dans laquelle semblait se trouver la recourante et ce sur la base des explications fournies par cette dernière et des plaintes qu'elle formulait.

Il appartient dès lors à la recourante d'assumer les frais et honoraires de la curatrice. Le recours, à la limite de la témérité, est infondé et sera rejeté.

4.             Les frais de la procédure, arrêtés à 400 fr., seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 67A RTFMC) et compensés avec l'avance de frais de même montant, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens pour la procédure de recours, la curatrice n'en ayant pas sollicité.

* * * * *

PAR CES MOTIFS

La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre la décision DTAE/2421/2020 rendue le 11 mai 2020 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/6578/2009.

Au fond :

Le rejette.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 400 fr.

Les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.