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Décisions | Chambre de surveillance

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C/16621/2019

DAS/176/2020 du 20.10.2020 sur DJP/451/2019 ( AJP ) , ADMIS

Recours TF déposé le 27.11.2020, rendu le 27.07.2021, CONFIRME, 5A_998/2020
Normes : CC.580.al1; CC.580.al2; CC.576; LDIP.86.al1; LDIP.88; LDIP.20.al1.leta
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16621/2019 DAS/176/2020

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 20 OCTOBRE 2020


Appels (C/16621/2019) formés les 30 septembre et 14 octobre 2019 par Madame A______, domiciliée ______ (Etats Unis) et par Monsieur B______, domicilié ______ (Etats-Unis), comparant tous deux par Mes Daniel TUNIK et Lorenzo FREI, avocats, en l'Etude desquels ils élisent domicile, d'une part, et le 14 octobre 2019 par Madame C______, domiciliée c/o AA______ SA, ______ [GE], par Madame D______, domiciliée ______ (Vaud), par Monsieur E______, domicilié ______(France) et par Monsieur F______, domicilié ______ (Chine), comparant tous quatre par Mes Olivier METZGER et Guerric CANONICA, avocats, en l'Etude desquels ils élisent domicile, d'autre part.

* * * * *

Arrêt communiqué par plis recommandés du greffier
du 27 octobre 2020 à :

- Madame A______
Monsieur B______
c/o Mes Daniel TUNIK et Lorenzo FREI, avocats
Route de Chêne 30, case postale 615, 1211 Genève 6.

- Madame C______
Madame D______
Monsieur E______
Monsieur F______
c/o Mes Olivier METZGER et Guerric CANONICA, avocats
Rue Pierre-Fatio 15, case postale 3782, 1211 Genève 3.

- Madame G______
c/o Me Frédérique BENSAHEL, avocate
Rue du 31 Décembre 47, case postale 6120, 1211 Genève 6.

- Maître H______
curatrice de représentation de la mineure I______
______, ______.

- Maître R______
______, ______.

- Maître O______
______, ______.

- JUSTICE DE PAIX.

 


EN FAIT

A.                a) J______, né le ______ 1942 à K______ (France), de nationalité française, est décédé à K______ le ______ 2019.

L'acte de décès indique qu'il était domicilié de son vivant 1______, L______ (Chine).

b) Le 18 juillet 2019, son épouse, G______, et sa fille mineure, I______, née le ______ 2005, domiciliées chemin 2______ [no.] ______ à Genève, ont sollicité de la Justice de paix qu'elle constate que bien que le de cujus ait été officiellement domicilié à L______ (Chine), son "domicile effectif" se situait en réalité à Genève et, qu'en conséquence, elle constate l'ouverture de la succession à Genève, restitue, le cas échéant prolonge, le délai d'un mois pour requérir le bénéfice d'inventaire ainsi que le délai de trois mois pour répudier la succession.

c) Par décision DJP/414/2019 du 7 août 2019, la Justice de paix s'est déclarée compétente pour connaître de la succession de J______, a restitué aux héritiers légaux, à compter de la notification de la décision, le délai pour répudier la succession, et dans la même mesure, le délai pour solliciter le bénéfice d'inventaire et mis les frais à la charge de la succession.

En substance, la Justice de paix, bien que le de cujus ait été officiellement domicilié de son vivant à L______, a déduit des pièces produites par sa veuve et sa fille mineure, à savoir des extraits d'agenda, de passeport et de correspondances que celui-ci ne résidait pas à L______. Il y restait un temps limité et était hébergé à l'hôtel, de sorte qu'il n'avait pas réellement constitué de domicile à L______. La structure de son entreprise incorporée officiellement dans un territoire peu fiscalisé (Ile de Man au Royaume-Uni) corroborait de plus la constitution d'un domicile fictif à L______, à des fins essentiellement financières. Cela ne signifiait cependant pas nécessairement que le de cujus s'était constitué un domicile à Genève, «ce d'autant que l'intéressé n'y avait jamais vécu et que sa famille n'y résidait plus non plus depuis le 1er septembre 2010». Cependant, il y avait lieu de constater que le défunt, comme sa famille, «était très régulièrement présent à Genève durant les années précédant son décès». Le passeport du de cujus, quoiqu'indiquant un domicile à L______, avait été établi par le Consulat de France à Genève; l'agenda du défunt indiquait une présence essentiellement sociale à Genève; «toute l'activité liée à sa personne», notamment la détention d'un véhicule et le suivi médical se déroulait à Genève. Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, il avait été rendu suffisamment vraisemblable que le centre de vie du défunt se situait à Genève, où il avait, si ce n'est son domicile, du moins sa résidence habituelle. La Justice de paix était ainsi compétente à raison du lieu pour prendre les mesures de sûretés en matière de dévolution successorale. Elle considérait que l'ouverture de la succession à Genève constituait un juste motif de restitution du délai de répudiation et de celui permettant de solliciter le bénéfice d'inventaire.

Cette décision a été notifiée le 8 août 2019 à G______ et à I______.

d) Par courrier du 16 août 2019 adressé à la Justice de paix, G______ et I______ ont accusé réception de la décision précitée et requis le bénéfice d'inventaire. Elles ont indiqué vouloir apporter des informations complémentaires, à savoir que les héritiers de J______ étaient, non seulement elles-mêmes, mais également ses deux autres enfants, A______ et B______, domiciliés aux Etats-Unis. Elles relevaient au surplus que contrairement à ce qu'avait retenu la Justice de paix, J______ avait laissé des dispositions testamentaires, datant de 1985 et de 2012, qu'elles communiquaient en annexe à leur courrier, tout en précisant qu'elles entendaient les contester.

Etaient joints à ce courrier un testament olographe du 28 septembre 1985 de J______ et un testament dactylographié du 10 septembre 2012, signé et paraphé par ce dernier, révoquant toutes dispositions testamentaires antérieures. Il désignait dans ce dernier document C______, E______, F______ et D______ comme exécuteurs testamentaires. Il déclarait léguer la propriété de différents biens à son épouse et ses enfants (montres, bijoux, biens situés dans ses bureaux, voitures, etc.) et placer le reste, soit l'essentiel de ses biens, dont notamment un chalet à N______ (France), dans un trust géré par les exécuteurs testamentaires précités dont les bénéficiaires étaient son épouse et ses trois enfants. Il précisait à la clause 18 de ce testament "Ce testament sera interprété conformément aux lois de la Région administrative de L______ et je déclare par la présente que mon domicile est situé dans la Région administrative de L______". Il déclarait, par ailleurs, vouloir être inhumé à K______.

e) Par plis du 29 août 2019 adressés aux exécuteurs testamentaires désignés, la Justice de paix a indiqué qu'elle détenait des dispositions testamentaires de J______ et sollicitait les originaux de ces dernières afin de pouvoir les transmettre à tous les intéressés.

f) Par courrier du 3 septembre 2019 adressé à la Justice de paix, C______ a précisé qu'une demande de confirmation de leur nomination en qualité d'exécuteurs testamentaires était en cours, l'original du testament de J______ ayant été déposé au Tribunal de L______. Elle précisait que la loi de L______ s'appliquait à la succession et qu'elle informerait la Justice de paix dès que les exécuteurs testamentaires recevraient le "Probate" des tribunaux de L______.

g) Par décision DJP/451/2019 rendue le 11 septembre 2019, la Justice de paix a commis O______, notaire, aux fins de dresser l'inventaire de la succession de feu J______.

h) La Justice de paix a notifié, en date du 12 septembre 2019, la décision DJP/414/2019 du 7 août 2019 aux autres héritiers légaux du défunt, soit à B______ à P______ (Etats-Unis), et à A______ à AB______ (Etats-Unis), ainsi qu'aux exécuteurs testamentaires désignés par feu J______, à savoir C______ à Genève, E______ à Q______ (France), D______ à R______ (Vaud) et F______ à L______ (Chine) et, en date du 13 septembre 2019, la décision DJP/451/2019 du 11 septembre 2019, aux quatre héritiers légaux, aux exécuteurs testamentaires précités et à O______.

i) Par ordonnance DTAE/5731/2019 du 12 septembre 2019, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant a instauré une curatelle de représentation de la mineure I______, aux fins de la représenter dans la succession de feu son père J______.

j) Par décision DJP/473/2019 du 2 octobre 2019, la Justice de paix a suspendu les pouvoirs de C______, D______, E______ et F______ de leur fonction d'exécuteurs testamentaires (ch. 1 du dispositif), ordonné l'administration d'office de la succession de J______ (ch. 2), nommé R______, avocate, aux fonctions d'administratrice d'office (ch. 3), dit que R______ ne procédera qu'aux actes administratifs et conservatoires qui seront nécessaires (ch. 4), dit que l'administratrice procédera seule aux paiements étroitement liés à la gestion courante de la succession, à l'exception de tout autre acte de disposition qui ne pourra s'effectuer qu'avec l'accord préalable du juge de paix (ch. 5), prié l'administratrice de dresser un état des actifs et passifs (ch. 6) et fixé un émolument de décision de 250 fr. mis à charge de la succession (ch. 7).

B.                 a) Par acte du 30 septembre 2019, A______ et B______ ont formé appel des décisions DJP/414/2019 et DJP/451/2019. Ils ont conclu préalablement à l'annulation de ces deux décisions et cela fait, à ce que les conclusions du 18 juillet 2019 déposées par G______ et I______ en constatation de l'ouverture de la succession de J______ à Genève et en bénéfice d'inventaire soient déclarées irrecevables, alléguant que le défunt n'était pas domicilié à Genève au moment de son décès.

Ils ont produit un chargé de 38 pièces.

b) Par courrier du 21 novembre 2019, R______ s'en est rapportée à justice quant au bienfondé des deux appels.

c) C______, D______, E______ et F______ ont, quant à eux, appuyé l'appel formé par A______ et B______.

d) Le 28 novembre 2019, la mineure I______, représentée par sa curatrice H______, a conclu au déboutement de A______ et B______ de toutes leurs conclusions et à la confirmation des décisions DJP/414/2019 et DJP/451/2019 (de même qu'à la confirmation de la DJP/473/2019), au déboutement de toutes autres ou contraires conclusions, sous suite de frais et dépens comprenant une indemnité équitable à titre de participation aux honoraires de la curatrice de la mineure. A titre subsidiaire, elle a conclu au renvoi des causes à la Justice de paix pour complément d'instruction.

Elle a produit un chargé de 32 pièces.

e) Par réponse du 28 novembre 2019, G______ et I______, représentée par sa curatrice, ont conclu à la confirmation des décisions DJP/414/2019 du 7 août 2019, DJP/451/2019 du 11 septembre 2019 et DJP/473/2019 du 2 octobre 2019 et au déboutement de A______ et B______ de toutes leurs conclusions, sous suite de frais et dépens.

Elles ont produit 64 pièces.

f) Par plis du greffe du 3 décembre 2019, les parties ont été avisées que la cause serait mise en délibération dans un délai de dix jours.

g) A______ et B______ ont répliqué et persisté dans leurs conclusions.

Ils ont déposé un bordereau de pièces complémentaires.

h) G______ a dupliqué et persisté dans ses conclusions.

Elle a déposé 5 pièces nouvelles.

i) La mineure I______ a dupliqué le 23 décembre 2019 et persisté dans ses conclusions.

C.                a) Par acte du 14 octobre 2019, C______, E______, F______ et D______ ont formé appel de la décision DJP/473/2019 rendue par la Justice de paix le 2 octobre 2019. Principalement, ils ont conclu à la nullité de la décision, subsidiairement à l'annulation de la décision, plus subsidiairement au renvoi de la cause à la Justice de paix, G______ et I______ devant être condamnées en tous les frais et dépens. Ils ont préalablement sollicité l'effet suspensif.

Ils ont déposé un chargé de 47 pièces.

b) Par décision DAS/216/2019 du 7 novembre 2019, la Cour a rejeté la requête d'octroi de l'effet suspensif aux appels formés par C______, E______, F______ et D______, d'une part et par A______ et B______, d'autre part (cf. appel infra sous lettre D).

c) R______ s'est rapportée à justice sur l'appel formé par les exécuteurs testamentaires désignés par le de cujus.

d) A______ et B______ ont appuyé l'appel formé par les exécuteurs testamentaires.

e) La mineure I______, représentée par sa curatrice, a conclu au déboutement des appelants de toutes leurs conclusions et à la confirmation de la décision DJP/473/2019, sous suite de frais et dépens.

Elle a déposé un chargé de 32 pièces.

f) Par réponse du 28 novembre 2019, G______ a conclu à la confirmation de la décision DJP/473/2019 du 2 octobre 2019, au déboutement des appelants de toutes leurs conclusions et à leur condamnation en tous les frais et dépens de l'appel.

Elle a produit un chargé de 64 pièces.

g) Par plis du greffe du 4 décembre 2019, les parties ont été avisées de ce que la cause serait mise en délibération dans un délai de dix jours.

h) C______, E______, F______ et D______ ont répliqué le 16 décembre 2019, persistant dans leurs conclusions.

Ils ont déposé un chargé de 6 pièces complémentaires.

i) I______ a dupliqué le 23 décembre 2019, persistant dans ses conclusions.

j) G______ a dupliqué le 27 décembre 2019, persistant également dans ses conclusions.

Elle a déposé un chargé de 5 pièces nouvelles.

D.                a) Par acte du 14 octobre 2019, A______ et B______ ont également formé appel contre la décision DJP/473/2019 du 2 octobre 2019. Ils ont conclu à la jonction de leur appel à celui déposé le 30 septembre 2019 contre les décisions DJP/414/2019 et DJP/451/2019 rendues respectivement le 7 août 2019 et 11 septembre 2019 et à l'annulation de la décision DJP/473/2019. Cela fait, ils ont conclu à ce que soit déclarée irrecevable l'opposition faite par G______ et I______ à la délivrance d'un certificat d'héritier selon leur déclaration du 25 septembre 2019. Subsidiairement, ils ont conclu au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour qu'elle leur accorde un délai pour s'exprimer sur la compétence de la Justice de paix de Genève s'agissant de la succession de J______, sous suite de frais et dépens.

Ils ont produit un chargé de 2 pièces.

b) R______ s'est rapportée à justice.

c) C______, E______, F______ et D______ ont appuyé les conclusions de l'appel.

d) La mineure I______, représentée par sa curatrice, a conclu au déboutement des appelants de toutes leurs conclusions et à la confirmation de la décision DJP/473/2019, sous suite de frais et dépens.

Elle a déposé un chargé de 32 pièces.

e) Par mémoire de réponse du 28 novembre 2019, G______ a conclu à la confirmation de la décision DJP/473 2019 du 2 octobre 2019.

f) Par plis du greffe du 4 décembre 2019, les parties ont été avisées de ce que la cause serait mise en délibération dans un délai de dix jours.

g) A______ et B______ ont répliqué, persistant dans leurs conclusions.

h) I______ a dupliqué le 23 décembre 2019, persistant dans ses conclusions.

i) G______ a dupliqué le 23 décembre 2019, persistant dans ses conclusions.

E.                 Les faits pertinents suivants résultent encore de la procédure au vu des pièces produites :

a) J______ et G______, tous deux de nationalité française, se sont mariés le ______ 2010 à AC______ (Genève). Une fille, I______, est née de leur union, avant mariage, soit le ______ 2005 à AD______ (France). L'extrait de mariage produit indique que l'époux était domicilié à L______.

b) J______ est le père de deux autres enfants, nés d'une précédente union, soit A______ et B______, domiciliés aux Etats-Unis, dont l'existence était inconnue de la Justice de paix lorsqu'elle a rendu sa décision du 7 août 2019. Ces derniers sont actifs depuis plusieurs années pour la marque de ______ "T______", fondée en 1983 par J______.

c) J______ n'a jamais été domicilié légalement à Genève. G______ et I______ ont quitté Genève, où elles étaient domiciliées, pour L______ en 2010. Elles ont été à nouveau enregistrées à l'Office cantonal de population et des migrations (OCPM) de Genève le 10 mai 2019 en provenance de U______ (Espagne), soit après le décès de J______. Elles indiquent qu'elles étaient domiciliées jusqu'en mai 2019 à Monaco.

d) Un contrat de bail pour un appartement de 155 m2 situé dans l'immeuble V______ sis [no.] ______ impasse 3______ à Monaco a été signé le 1er juin 2015 par la Société T______, représentée par C______, dès le 1er juin 2015 pour un loyer annuel de 144'000 euros. Il est précisé que l'appartement sera principalement occupé par G______.

e) L'enfant I______ a été scolarisée entre septembre 2015 et juin 2019 à W______ [école privée à Monaco], selon attestation du directeur de cet établissement établie le 16 octobre 2019.

f) J______, avant de créer sa propre marque, travaillait pour la maison X______ et a occupé le poste de Directeur général et Président de la marque X______ pour le marché asiatique. Il a été enregistré dès 1977 comme résident à L______. Il a créé en 1983 sa propre marque qu'il a également développée sur ce marché. Sa marque dispose de 195 boutiques et 3'800 points de vente à travers le monde. La ______ [marchandise] est confectionnée en Suisse et en Allemagne et les ______ sont [fabriqués] à la main en Suisse. J______ a créé la FONDATION T______ en Asie (organisation caritative agréée, dédiée à la promotion de l'art contemporain offrant aux jeunes artistes une plate-forme pour leurs travaux). La marque T______ disposait de deux bureaux, l'un à Genève, dédié à la production et l'autre à L______, destiné à la commercialisation sur le marché asiatique. Il ressort des documents produits que J______ a toujours beaucoup voyagé à travers le monde pour développer sa marque. Grand amateur de courses automobiles, il possédait divers véhicules de course et de collection et pratiquait ce sport notamment sur le circuit automobile proche de K______ où il est décédé.

g) J______ précisait sur tous les documents officiels qu'il était domicilié à L______ (carte d'identité française, testament, enregistrement de ses fonctions auprès des diverses sociétés de la marque, documents divers, etc.). Différents documents émanant de l'Immigration Department de L______ attestent de sa présence sur le territoire de L______ et précisent son adresse en ce lieu, laquelle a varié, depuis 1988. Des factures de gaz, d'eau et d'électricité concernant différents appartements à L______ ont été versées à la procédure, de même qu'un avenant du 1er juillet 2016 à un contrat de bail conclu en 2013 pour un logement sis à L______, par lequel B______ est devenu co-titulaire du bail conclu initialement par son père. Le 13 septembre 2016, J______ a sollicité la naturalisation chinoise et les autorités L______ ont accepté le 7 mars 2018, sur le principe, sa demande. Certains de ses effets personnels (garde-robe complète) ont été retrouvés, après son décès, au Y______, hôtel de luxe cinq étoiles qu'il fréquentait à L______.

h) J______, "de France à L______", a été inscrit au Registre du Commerce comme directeur de la société T______ SA, dont le siège est situé [no.] ______ rue 4______ à Genève, jusqu'au 1er février 1996. D______ est administratrice de cette société.

J______, "de France à L______", a été inscrit au Registre du commerce comme administrateur de la succursale de Genève de la société T______ INTERNATIONAL LTD, société mère inscrite à l'Ile de Man (Royaume-Uni), dont le siège est rue 4______ [no.] ______ à Genève. C______ est administratrice avec signature individuelle et A______ administratrice sans signature.

La filiale asiatique de la marque T______ (FAR EAST) LTD se situait dans le quartier Z______ de L______.

i) Le ______ 2019, C______ a adressé un courriel à G______, à ses enfants et aux autres exécuteurs testamentaires, en leur annexant le testament de J______ du 10 septembre 2012. Elle précisait que dès qu'elle aurait reçu l'original du certificat de décès de J______, elle pourrait adresser à F______ (avocat et exécuteur testamentaire) à L______ ledit certificat ainsi que le testament, en vue d'initier la demande d'homologation aux autorités locales. Les exécuteurs testamentaires avaient tous accepté leur mission. Elle précisait qu'ils allaient dresser l'inventaire des biens appartenant personnellement à J______, dont le chalet de N______ (France), certaines voitures, les comptes bancaires, les actions d'une SCI (française) et sollicitait que les héritiers indiquent l'existence d'autres biens éventuels. Une réunion était fixée le 18 mars 2019 pour une réunion du Conseil d'administration de T______ INTERNATIONAL HOLDINGS au bureau de Genève. Elle rappelait que les "intérêts commerciaux" du groupe T______ INTERNATIONAL étaient tous détenus par le "trustee d'un trust discrétionnaire irrévocable". Elle était membre du conseil d'administration de "la société Trustee". Ces droits ne faisaient ainsi pas partie de la succession et n'étaient pas soumis à la procédure d'homologation du testament.

j) G______ n'a pas remis l'original du certificat de décès de J______ aux exécuteurs testamentaires, en raison d'une nécessité, selon elle, d'en obtenir une version "internationale" préalable. E______, frère du défunt et exécuteur testamentaire, a obtenu un original de l'extrait de l'acte de décès et l'a remis à C______, laquelle a pu l'envoyer à F______ le 15 avril 2019.

k) Le 12 septembre 2019, une demande d'homologation du testament du 10 septembre 2012 a été déposée au Probate Registry in the High Court of the L______ Administration Region (Registre des homologations auprès de la Haute Cour de la région administrative de L______).


 

EN DROIT

1.                  1.1 Les décisions du juge de paix, qui relèvent de la juridiction gracieuse et sont soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. e CPC), sont susceptibles d'un appel auprès de la Chambre civile de la Cour de justice (art. 120 al. 2 LOJ) dans le délai de dix jours (art. 314 al. 1 CPC) si la valeur litigieuse est égale ou supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Ces décisions sont de nature pécuniaire (arrêts du Tribunal fédéral 5A_797/2017 du 22 mars 2018 consid. 1; 5A_725/2010 du 12 mai 2011 consid. 1.2).

1.2 En l'espèce, la valeur litigieuse de la succession est ignorée, de même que l'est l'existence de biens à Genève ayant appartenu à titre personnel au de cujus. Ce dernier ayant été le dirigeant d'une entreprise de ______, la succession devrait selon toute vraisemblance dépasser le montant de 10'000 fr. ci-dessus mentionné, de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

Interjeté en temps utile et selon la forme prescrite (art. 311 al. 1 CPC), par des héritiers légaux du défunt, l'appel du 30 septembre 2019 sera déclaré recevable. De même, l'appel du 14 octobre 2019 interjeté par ces mêmes héritiers légaux, et celui formé par les exécuteurs testamentaires contre la décision du 2 octobre 2019 suspendant leurs pouvoirs, seront déclarés recevables, les premiers agissant en leur qualité d'héritiers légaux et les seconds étant directement visés par la décision querellée.

Les appels formés qui visent des décisions différentes seront traités dans le même arrêt, par souci de cohérence, A______ et B______ étant dénommés les appelants n° 1 et C______, D______, E______ et F______, étant dénommés les appelants n° 2.

G______ sera dénommée l'intimée n° 1 et I______, l'intimée n° 2.

1.3 La présente cause relève de la juridiction gracieuse, la procédure sommaire est applicable (art. 248 let. e CPC). La cognition du juge, qui revoit la cause en fait et en droit (art. 310 CPC), est ainsi limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (HOHL, Procédure civile, tome II, 2ème éd., 2010, n. 1072 et 1554 et ss, p. 198 et 282).

Le juge établit les faits d'office (maxime inquisitoire, art. 255 let. b CPC). Les moyens de preuve sont limités à ceux qui sont immédiatement disponibles (HOHL, op. cit., n. 1556, p. 283).

1.4 Les parties ont produit des pièces en appel.

1.4.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte au stade de l'appel que s'ils sont produits sans retard (let. a) et qu'ils ne pouvaient l'être devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

L'admissibilité des moyens de preuve qui existaient avant la fin des débats principaux de première instance est ainsi largement limitée en appel, dès lors qu'ils sont irrecevables lorsqu'en faisant preuve de la diligence requise, ils auraient déjà pu être produits dans la procédure de première instance (ATF
144 III 349 consid. 4.2.1; 143 III 43 consid. 4.1, arrêt du Tribunal fédéral 5A_1006/2017 du 5 février 2018 consid. 3.3).

1.4.2 En l'espèce, les appelants n° 1, enfants majeurs du de cujus, ont produit à l'appui de leur appel contre les décisions DJP/414/2019 et DJP/451/2019 un chargé de 38 pièces. L'ensemble des faits invoqués et des pièces produites à l'appui devra être déclaré recevable dès lors que les appelants n° 1 n'ont pas pu participer à la procédure de première instance, la Justice de paix ayant ignoré leur existence et ne les ayant pas interpellés avant de rendre ces deux décisions. La Cour de justice, ne renverra cependant pas pour ce motif la procédure à la Justice de paix, dès lors qu'elle dispose d'un plein pouvoir de cognition et que les appelants n° 1 ont pu faire valoir devant elle l'ensemble de leurs moyens. Il ne peut cependant leur être reproché de ne pas avoir produit leurs allégués et pièces avant ce stade de la procédure, ce qui les rend admissibles. Il en est de même des faits et des pièces produites dans leur réplique.

S'agissant des pièces produites par les intimées n°1 et 2 à l'appui de leur réponse et de leur duplique, étant donné que la compétence des autorités genevoises n'a pas été discutée par les parties devant la Justice de paix, pour les raisons sus-évoquées, par souci d'égalité de traitement, elles seront également toutes déclarées recevables.

La recevabilité des pièces produites par les appelants n° 1 et les appelants n° 2 à l'appui de leur appel respectif du 14 octobre 2019 contre la décision DJP/473/2019 du 2 octobre 2019 peut demeurer indécise, de même que celle de la recevabilité des pièces produites par les intimées, compte tenu de ce qui suit.

2.                  Les appelants n°1 contestent la compétence ratione loci de la Justice de paix pour "connaître de la succession" du de cujus, et partant rendre les décisions DJP/414/2019 et DJP/541/2019, lesquelles sont basées sur une présentation volontairement lacunaire des faits par les intimées. Les appelants n° 1 considèrent que le de cujus était domicilié à L______, tandis que les intimées n° 1 et n° 2 allèguent que son domicile se situait à Genève.

La Justice de paix a examiné, et admis, sa compétence ratione loci suite à la demande de restitution du délai pour répudier et pour requérir le bénéfice d'inventaire formée par les intimées n°1 et n°2 le 18 juillet 2019.

2.1 La présente cause présente des liens d'extranéité au vu notamment du lieu du décès du de cujus et de sa nationalité étrangère. Partant, la loi fédérale sur le droit international privé du 18 décembre 1987 (LDIP-RS 291) s'applique, sous réserve des traités internationaux.

Aucun traité international en matière de succession n'a été signé entre la Suisse et L______. Pareillement, aucun traité international n'a été conclu avec la Principauté de Monaco ou la France en matière successorale.

La compétence des autorités suisses en matière de succession ayant un caractère international est ainsi régie par les art. 86 ss LDIP.

2.1.1 Aux termes de l'art. 86 al. 1 LDIP, les autorités judiciaires ou administratives suisses du dernier domicile du défunt sont compétentes pour prendre les mesures nécessaires au règlement de la succession et connaître des litiges successoraux.

La succession d'une personne qui avait son dernier domicile en Suisse est régie par le droit suisse (art. 90 al. 1 LDIP), tandis que la succession d'une personne qui a eu son dernier domicile à l'étranger est régie par le droit que désignent les règles de droit international privé de l'Etat dans lequel le défunt était domicilié (art. 91 al. 1 LDIP).

2.1.2 L'art. 88 LDIP prévoit une compétence subsidiaire au lieu de situation de biens en Suisse, lorsque les autorités étrangères ne s'en occupent pas.

En vertu de cette disposition, si un étranger, domicilié à l'étranger à son décès, laisse des biens en Suisse, les autorités judiciaires ou administratives suisse du lieu de situation sont compétentes pour régler la part de succession sise en Suisse, dans la mesure où les autorités étrangères ne s'en occupent pas (art. 88 al. 1 LDIP).

L'art. 88 LDIP est également applicable lorsque le de cujus n'a ni domicile ni résidence habituelle à l'étranger ou si le domicile respectivement la résidence habituelle ne peut pas (plus) être établi (RAINER KÜNZLE, in Zürcher Kommentar zum IPRG, Commentaire de la LDIP, 5ème éd., 2016, n. 1 ad art. 88 LDIP; SCHNYDER/LIATOWITSCH, in Basler Kommentar IPRG, 3ème éd., 2013, n. 6 ad art. 88 LDIP).

2.1.3 Le domicile est déterminé selon les critères de l'art. 20 al. 1 let. a LDIP. Une personne physique a ainsi son domicile ai lieu ou dans l'Etat dans lequel elle réside avec l'intention de s'y établir, ce qui suppose qu'elle fasse du lieu en question le centre de ses intérêts personnels, sociaux et professionnels (ATF
136 II 405 consid. 4.3; 127 V 237 consid. 1). Cette définition du domicile comporte deux éléments : l'un objectif, la présence physique en un lieu donné, l'autre subjectif, l'intention d'y demeurer durablement (ATF 137 II 122 consid. 3.6; 137 III 593 consid. 3.5; 136 II 405 consid. 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_812/2015 du 6 septembre 2016 consid. 5.1.2). Pour déterminer le domicile d'une personne, il faut tenir compte de l'ensemble de ses conditions de vie (arrêt du Tribunal fédéral 4A_588/2017 du 6 avril 2018 consid. 3.2.1).

Lorsqu'une personne n'a nulle part de domicile, la résidence habituelle est déterminante (art. 20 al. 2 LDIP). La notion de résidence habituelle d'une personne physique, telle que définie à l'art. 20 al. 1 let. b LDIP, est le lieu dans lequel cette personne vit pendant une certaine durée, même si cette durée est de prime abord limitée. L'accent est ainsi mis sur la présence de la personne physique au lieu ou dans le pays de séjour (arrêt du Tribunal fédéral 5A_812/2015 du 6 septembre 2016 consid. 5.1.2 et les références citées).

Les dispositions du Code civil suisse relatives au domicile et à la résidence ne sont pas applicables (art. 20 al. 2 in fine LDIP).

2.1.4 Celui qui invoque l'existence d'un domicile déterminé ou d'une résidence habituelle doit le prouver (art. 8 CC). Lorsque se pose la question de la compétence du juge, celui-ci doit en principe établir les faits d'office (STAEHELIN, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, Art. 1-456 ZGB, n. 28 ad art. 23 CC).

2.1.5 Aux termes de l'art. 580 al. 1 CC, l'héritier qui a la faculté de répudier peut réclamer le bénéfice d'inventaire. Il doit présenter sa requête à l'autorité compétente dans le délai d'un mois, les formes à observer étant celles de la répudiation (art. 580 al. 2 CC). La brièveté du délai est justifiée par le fait que le bénéfice d'inventaire n'implique aucun risque pour le requérant ainsi que par l'intérêt des créanciers du défunt à ne pas rester trop longtemps dans l'incertitude quant à l'acceptation ou la répudiation de la succession (arrêt 5P_155/2001 du 24 juillet 2001 consid. 2b). Le point de départ et le calcul du délai sont soumis aux règles applicables au délai de répudiation (arrêt du Tribunal fédéral 5A_184/2012 du 6 juillet 2012 consid. 2.1; arrêt 5P_155/2001 du 24 juillet 2001 consid. 2b/aa; STEINAUER, Le droit des successions, 2015, 2ème éd., n.1014a). Il s'agit d'un délai de péremption. Une prorogation du délai est cependant possible, par application analogique de l'art. 576 CC.

2.1.6 La répudiation d'une succession doit intervenir dans un délai de trois mois, faute de quoi l'héritier acquiert purement et simplement la succession (art. 567 al. 1 et 571 al. 1 CC). Pour chaque héritier légal, le délai court dès le moment où il a connu le décès du de cujus et sa qualité d'héritier. Normalement les choses vont de pair et c'est pourquoi la loi présume que le délai court dès la connaissance du décès, relativement facile à établir. Mais l'héritier peut prouver qu'il n'a réalisé que plus tard qu'il succéderait au de cujus (STEINAUER, op. cit., n. 972).

Le délai de trois mois de l'art. 567 al. 1 CC est un délai de péremption. L'autorité compétente peut cependant, pour de justes motifs, accorder une prolongation de délai ou fixer un nouveau délai aux héritiers légaux et institués pour répudier la succession. Cette deuxième alternative offre ainsi la possibilité aux héritiers de solliciter une restitution du délai de répudiation même après l'échéance du délai légal. Encore faut-il qu'il existe des justes motifs à l'appui de la demande de prolongation, voire de restitution, du délai pour répudier.

Constitue un juste motif le fait que l'héritier soit domicilié dans un pays avec lequel les communications sont difficiles, des tensions au sein de la communauté héréditaire qui empêchent un héritier d'avoir une vision précise de l'état de celle-ci (par exemple, en raison de l'existence d'actions en justice encore pendantes ou l'absence de contacts entre les héritiers du de cujus depuis de nombreuses années), la situation personnelle d'un héritier (maladie, grand âge, etc.), la grande complexité de la succession (en particulier quand les biens sont situés dans plusieurs Etats), voire le fait qu'une dette importante dont on ignorait l'existence est tardivement signalée aux héritiers (STEINAUER, op. cit., n. 975a, p. 513).

2.2.1 En l'espèce, la Justice de paix, indépendamment de la question de la résidence habituelle du de cujus à Genève, aurait dû rejeter la requête des intimées n°1 et n°2 visant à la restitution des délais pour répudier et solliciter l'inventaire de la succession. En effet, celles-ci, épouse et fille mineure du de cujus, n'ont pas prétendu avoir ignoré la date du décès de ce dernier, intervenu le 27 février 2019, date qu'elles sont présumées connaître et qui ouvre le délai de trois mois pour répudier la succession, respectivement d'un mois pour solliciter l'inventaire de ladite succession (qui, s'il est admis, prolonge le délai pour répudier). Elles n'ont également fait valoir aucun juste motif à l'appui de la demande de restitution du délai de répudiation, respectivement du délai pour requérir l'inventaire de la succession, sollicitée le 18 juillet 2019, le délai légal étant échu à cette date pour formuler leur demande. Le simple fait que ces dernières aient soutenu que le de cujus n'était prétendument pas domicilié à L______, contrairement à la mention figurant sur l'acte de décès, mais résidait à Genève, ne constituait pas un motif de restitution du délai de répudiation, ni du délai pour solliciter l'inventaire de la succession, dès lors qu'elles ne pouvaient prétendre ignorer ce fait qu'elles invoquaient. Pour cette raison déjà, la Justice de paix aurait dû rejeter la requête en restitution du délai de répudiation et du délai pour requérir l'inventaire de la succession qui lui était soumise.

2.2.2 La compétence ratione loci des autorités genevoises ne pouvait de toute manière pas être retenue. En effet, le de cujus n'était pas domicilié officiellement à Genève et était inconnu de l'administration fiscale genevoise au moment de son décès, les pièces remises par les intimées n° 1 et n° 2 à la Justice de paix, soit des relevés d'agenda, des SMS de rendez-vous, des photographies, un contrat de bail à Genève et un contrat de leasing au nom de sociétés, n'étant pas suffisantes pour admettre la compétence ratione loci des autorités genevoises prima facie. Le simple fait que le de cujus développait une vie sociale soutenue en cette ville, corroborée par un nombre important de photographies versées à la procédure, ne suffisait pas pour admettre qu'il avait établi sa résidence à Genève. Genève est en effet une ville de prestige incontournable dans le monde de l'horlogerie et de nombreux événements s'y déroulent, de sorte qu'il n'est pas inusuel que les représentants de marques de luxe, tel le de cujus, assistent régulièrement à des réceptions ou manifestations en cette ville. La société-mère, représentante de la marque T______, inscrite à l'Ile de Man (Royaume-Uni), disposait d'une succursale à Genève, ce qui semble également habituel pour le type d'activité poursuivie par dite société, mais également à L______. La Justice de paix a déduit de l'examen du passeport du de cujus qu'il se rendait peu à L______ et a considéré, au vu des explications que lui fournissait sa veuve, que sa résidence habituelle n'était pas à L______ mais à Genève. Cependant, cette dernière a omis de préciser qu'elle-même et sa fille demeuraient, jusqu'en mai 2019 (date postérieure au décès du de cujus), à Monaco, où l'enfant était scolarisée. Aucun élément du dossier soumis à la Cour ne permet de retenir que le de cujus avait sa résidence habituelle à Genève et exerçait une activité professionnelle régulière dans la succursale de la société portant son nom à Genève. Certes, il logeait depuis août 2018, lorsqu'il séjournait à Genève, dans un appartement sis [no.] ______ chemin 2______ et disposait d'un véhicule de fonction. Cependant, tant le contrat de bail que le leasing du véhicule sont au nom de la Société T______ INTERNATIONAL LTD, respectivement T______ SA, et non à son nom propre. Il ne peut rien être déduit de la location par ces sociétés de ce logement, ni du véhicule, dès lors qu'il est fréquent que l'administrateur d'une succursale d'une société étrangère de prestige puisse bénéficier d'un logement et d'un véhicule mis à disposition par la société lors de ses visites, ce qui ne crée encore pas une résidence habituelle pour ce dernier. Si certes, le de cujus semblait également consulter des médecins à Genève, là encore, cela ne signifie pas qu'il y résidait. Ainsi, aucune assurance maladie obligatoire ou complémentaire n'a été versée à la procédure, élément qui aurait permis de considérer que le de cujus s'était installé à Genève. Qui plus est, l'épouse du de cujus vivait à Monaco jusqu'au mois de mai 2019 et l'enfant mineure du couple était scolarisée à W______ [école privée à Monaco], selon attestation du directeur de cet établissement du 16 octobre 2019 et ce, sur toute la période de septembre 2015 à juin 2019. Il est ainsi beaucoup plus probable qu'à la date de son décès, survenu le 27 février 2019 à K______, le de cujus résidait également à Monaco, ville dans laquelle sa fille était scolarisée depuis plus de trois ans, et non à L______ ou à Genève. Le fait que les intimées n° 1 et n° 2 n'aient sollicité les autorités genevoises que le 19 juillet 2019 (soit après écoulement du délai pour requérir un inventaire et pour répudier), deux mois après leur emménagement à Genève, annoncé le 10 mai 2019 à l'OCP (en ayant déclaré pour une raison inconnue qu'elles arrivaient de U______ en Espagne alors que la mineure était encore scolarisée à Monaco), corrobore le fait que le de cujus n'était pas résident à Genève au moment de son décès. Elles auraient en effet, si tel était le cas, agi dans le délai légal pour requérir le bénéfice d'inventaire et solliciter une prolongation du délai pour répudier. L'idée d'interpeller la Justice de paix n'a été formée par les intimées qu'après leur arrivée à Genève et surtout, après que l'une des exécutrices testamentaires ait informé (en ______ 2019) l'intimée n° 1 de l'existence du testament du de cujus et des démarches entreprises auprès des tribunaux de L______ pour s'occuper de la succession (information que l'intimée n° 1 s'est gardée de fournir à la Justice de paix, à l'instar de l'existence d'autres héritiers légaux), afin d'ouvrir artificiellement la succession du de cujus à Genève. L'intimée n° 1 n'a d'ailleurs jamais prétendu qu'elle ignorait que le de cujus fût domicilié légalement à L______, pour des raisons sans doute inhérentes à sa situation patrimoniale, voire à la situation patrimoniale du couple. Si certes, il est possible que les époux J______ aient élaboré le projet de s'installer à Genève à la rentrée scolaire 2019, ils n'étaient ni domiciliés, ni résidents en cette ville à la date du décès de J______, de sorte que la Justice de paix n'était pas compétente pour rendre des décisions dans le cadre de la succession de ce dernier.

Par ailleurs, la situation a cela de particulier que le défunt n'a jamais voulu que son domicile officiel soit à Genève, ni même à Monaco, mais a toujours indiqué qu'il était à L______. Cela ressort notamment des informations figurant sur le passeport du de cujus et son testament du 10 septembre 2012, dans le cadre duquel il a opté pour la constitution d'un trust, mais également notamment de ses démarches pour acquérir la nationalité chinoise en 2016/2018. A cet égard, peu importe que sa résidence habituelle ait par la suite changé et qu'elle n'ait plus été à L______, mais plus probablement à Monaco auprès de son épouse et de sa fille mineure, question de compétence entre les autorités de ces pays qu'il n'appartient pas à la Cour de trancher, la seule question à résoudre étant de déterminer si le de cujus avait sa résidence habituelle à Genève, ce à quoi il doit être répondu par la négative.

2.2.3 Il reste à examiner s'il existe une compétence subsidiaire des autorités genevoises en vertu de l'art. 88 al. 1 LDIP. Les parties à la procédure n'allèguent pas l'existence de biens situés en Suisse appartenant au de cujus. Par ailleurs, rien ne permet de retenir que les autorités étrangères ne s'en occuperaient pas, si de tels biens existaient. En effet, la loi à L______ prévoit deux options, soit établir un testament désignant un exécuteur testamentaire, soit ne pas faire de testament et s'en référer à la loi pour désigner l'administrateur de la succession. Le de cujus, au fait de ces dispositions, a opté pour la rédaction d'un testament, désignant son épouse et ses trois enfants comme légataires de biens déterminés, pour la constitution d'un trust dont ils seraient bénéficiaires pour le surplus, et a nommé plusieurs exécuteurs testamentaires, soit les appelants n° 2. Dans pareil cas, les exécuteurs testamentaires désignés par le de cujus peuvent ainsi faire valoir leur titre en déposant une requête auprès du Probate Registry à L______ habilitant le ou les exécuteurs testamentaires ou administrateurs à représenter et gérer la succession au moyen du Grant of Representation qu'ils obtiennent. Il s'agit précisément de la procédure initiée par les exécuteurs testamentaires auprès des autorités L______ compétentes en date du 12 septembre 2019, décrite à la Justice de paix par ces derniers, avant que cette dernière suspende leurs pouvoirs par décision du même jour.

En conséquence, et faute pour les intimées n°1 et n°2 d'avoir allégué l'existence de biens personnels du de cujus sur territoire genevois et, cas échéant, l'absence de prise en charge par les autorités étrangères de ces biens, aucune compétence résiduelle des autorités genevoises ne peut être retenue sur la base de l'art. 88 al. 1 LDIP.

2.2.4 La compétence ratione loci des autorités genevoises n'étant pas admise, c'est à tort que la Justice de paix a rendu les décisions DJP/414/2019 (ordonnant les restitution du délai pour requérir l'inventaire et pour répudier la succession), DJP/451/2019 (de nomination d'un exécuteur testamentaire) et DJP/473/2019 (de suspension des exécuteurs testamentaires désignés par le de cujus), sans qu'il soit besoin d'examiner plus avant les griefs formés à l'encontre de cette dernière décision par les appelants n° 1 et n° 2.

Ces décisions seront en conséquence annulées.

3.                  La procédure d'appel n'est pas gratuite (art. 19 et 22 a contrario LaCC).

Il sera fait masse des frais d'appel qui seront arrêtés à 4'000 fr. et mis, conjointement et solidairement, à la charge des intimées n° 1 et n° 2 qui succombent dans le cadre des trois appels (art. 106 al. CPC). Les avances de frais de 1'500 fr. effectuées par les appelants demeureront acquises à l'Etat de Genève et les intimées seront donc, conjointement et solidairement, condamnées à verser la somme de 1'000 fr. à A______ et B______, pris conjointement et solidairement, et 500 fr. à C______, E______, D______ et F______, également pris conjointement et solidairement. Elles seront en outre condamnées à verser 2'500 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Les intimées n° 1 et n° 2 seront également condamnées, conjointement et solidairement, à verser une somme de 4'000 fr. à A______ et B______, pris conjointement et solidairement, et une somme de 2'000 fr. à C______, E______, D______ et F______, pris conjointement et solidairement, à titre de dépens d'appel (art. 85, 88, 90 RTFMC et 23 al. 1 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevables les appels formés les 30 septembre et 14 octobre 2019 par A______ et B______ contre les décisions DJP/414/2019, DJP/451/2019 et DJP/473/2019 rendues respectivement les 7 août, 11 septembre et 2 octobre 2019 par la Justice de paix, ainsi que l'appel formé le 14 octobre 2019 par C______, E______, D______ et F______ contre la décision DJP/473/2019 rendue le 2 octobre 2019 par la Justice de paix dans la cause C/16621/2019.

Au fond :

Annule les décisions DJP/414/2019, DJP/451/2019 et DJP/473/2019.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais:

Arrête les frais judiciaires des appels à 4'000 fr., les met à la charge de G______ et de I______, et dit qu'ils sont partiellement compensés avec les avances fournies.

Condamne G______ et I______, prises conjointement et solidairement, à verser la somme de 1'000 fr. à A______ et à B______, pris conjointement et solidairement.

Condamne G______ et I______, prises conjointement et solidairement, à verser la somme de 500 fr. à C______, E______, D______ et F______, pris conjointement et solidairement.

Condamne G______ et I______, prises conjointement et solidairement, à verser 2'500 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire à titre de solde de frais.

Condamne G______ et I______, prises conjointement et solidairement, à verser la somme de 4'000 fr. à A______ et B______ à titre de dépens d'appel.

Condamne G______ et I______, prises conjointement et solidairement, à verser la somme de 2'000 fr. à C______, E______, D______ et F______, pris conjointement et solidairement, à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.