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Décisions | Chambre de surveillance

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C/1355/2013

DAS/133/2020 du 26.08.2020 sur DTAE/1220/2020 ( PAE ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1355/2013-CS DAS/133/2020

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MERCREDI 26 AOÛT 2020

 

Recours (C/1355/2013-CS) formé en date du 3 avril 2020 par Madame A______, domiciliée ______, comparant par Me Tatiana GURBANOV, avocate, en l'Etude de laquelle elle élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 8 septembre 2020 à :

- MadameA______
c/o Me Tatiana GURBANOV, avocate,

Rue du Rhône 118, CP 3558, 1211 Genève 3.

- MonsieurB______
c/o Me Corinne CORMINBOEUF HARARI, avocate,

Rue du Rhône 100, CP 3403, 1211 Genève 3.

- Madame C______
Monsieur D______
- SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Case postale 75, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance DTAE/1220/2020 du 28 janvier 2020, communiquée aux parties pour notification le 2 mars 2020, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : le Tribunal de protection) a attribué à A______ et à B______ l'autorité parentale conjointe sur leurs enfants mineurs E______, né le ______ 2012 et F______, née le ______ 2013 (ch. 1 du dispositif), confié à B______ la garde sur les mineurs (ch. 2), confirmé les modalités du droit de visite de A______ sur les enfants, telles que fixées par la Chambre de surveillance de la Cour le 7 novembre 2019 (DAS/217/2019) et invité les curatrices à préaviser en temps opportun toute adaptation des relations personnelles (ch. 3), maintenu les curatelles d'organisation et de surveillance des relations personnelles et prononcé la mainlevée de la curatelle d'organisation, de surveillance et de financement du lieu de placement (ch. 4 et 5), ordonné la continuation par E______ de son suivi pédopsychiatrique et ordonné à A______ de poursuivre, de façon régulière et suivie, son suivi thérapeutique individuel (ch. 6 et 7), ordonné la mise en oeuvre d'une thérapie familiale (ch. 8), réparti entre chaque parent la bonification pour tâches éducatives (ch. 9), fixé un émolument de décision de 600 fr. mis à charge des parties à raison de la moitié chacune (ch. 10) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 11).

En substance, le Tribunal de protection a retenu que la garde des enfants, qui étaient déjà placés chez leur père, pouvait lui être confiée, celui-ci étant adéquat. L'institution de l'autorité parentale conjointe sur les mineurs était, par ailleurs, conforme à leur intérêt. Le Tribunal de protection, considérant la récente décision rendue le 7 novembre 2019 par la Chambre de surveillance, a reconduit les modalités des relations personnelles entre les enfants et la mère, fixées par cette dernière, les curateurs conservant la possibilité de faire des propositions d'élargissement.

B. a) Par acte (de 45 pages) expédié le 3 avril 2020 à l'adresse de la Chambre de surveillance, A______ a recouru contre les chiffres 2 et 3 du dispositif de cette ordonnance. Elle conclut principalement à ce que la garde des enfants soit confiée aux deux parents, alternativement, une semaine sur deux. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation des chiffres 2 et 3 du dispositif de l'ordonnance et au renvoi de la cause au Tribunal de protection. Plus subsidiairement encore, elle conclut à l'annulation du seul chiffre 3 du dispositif de l'ordonnance et à l'octroi en sa faveur d'un droit de visite sur les enfants d'une semaine sur deux et de la moitié des vacances scolaires. Pour le surplus, elle requiert diverses mesures d'instruction.

Essentiellement, la recourante revient sur le retrait de garde prononcé antérieurement, sollicite à nouveau le prononcé de la garde alternée, reprochant au Tribunal de protection de ne pas avoir examiné si la mise en place d'une garde alternée s'inscrivait dans l'intérêt des mineurs. Elle reproche enfin au Tribunal de protection de ne pas avoir élargi les relations personnelles entre elle-même et les enfants, alors que des éléments au dossier le permettaient. En date du 14 avril 2020, elle a produit un nouveau certificat médical la concernant.

b) Par courrier du 27 avril 2020, le Tribunal de protection a indiqué ne pas souhaiter reconsidérer sa décision.

c) Par mémoire réponse expédié le 22 mai 2020 à l'adresse de la Cour, B______ a conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens. En substance, il relève d'une part, que l'ordonnance précédente du Tribunal de protection, confirmée sous réserve des modalités du droit de visite de la recourante par l'arrêt de la Cour (DAS/217/2019) du 7 novembre 2019, rentrera en force lorsque le Tribunal fédéral aura statué sur le recours déposé par la recourante contre ce dernier. Il ne se justifie dès lors plus de revenir sur les faits antérieurs aux fins de réexaminer les questions tranchées. D'autre part, il relève que l'arrêt de la Cour précédent avait déjà élargi les relations personnelles de la recourante, telles qu'elles avaient été réservées dans la première décision du Tribunal de protection. Ces modalités avaient encore été élargies depuis lors par une ordonnance du Tribunal de protection du 30 avril 2020 postérieure au dépôt du recours. Le droit de visite s'exerçant, en l'état, un week-end sur deux du vendredi 16h00 au lundi suivant 8h00, sans passage au Point Rencontre.

d) Par courrier du 18 juin 2020, le Tribunal de protection a fait tenir à la Chambre de surveillance son ordonnance du 30 avril 2020 (DTAE/2134/2020), par laquelle lesdites modalités de droit de visite ont été modifiées en faveur de la recourante.

e) Par arrêt du 15 juin 2020, le Tribunal fédéral a déclaré que le recours de la mère des enfants, recourante dans la présente procédure, contre la décision de la Chambre de surveillance du 7 novembre 2019, était devenu sans objet et a rayé la cause de son rôle.

f) En date du 25 juin 2020, la recourante a répliqué persistant dans ses conclusions et produisant diverses pièces, notamment un extrait du carnet scolaire de l'enfant E______ du mois de septembre 2019 duquel il ressort qu'il est turbulent.

g) Par acte déposé au greffe de la Cour le 8 juillet 2020, B______ a dupliqué déposant les bulletins scolaires de fin d'année des deux enfants, desquels il ressort que leurs objectifs ont été atteints et qu'ils disposent l'un et l'autre de compétences remarquables, respectivement d'excellents résultats, le comportement de l'enfant E______ ayant très favorablement évolué en cours d'année.

C. Les faits pertinents suivants résultent en outre de la procédure :

a) Le Tribunal de protection connaît de la situation du mineur E______ depuis début janvier 2013 déjà et il n'a cessé depuis lors d'être saisi de la situation dudit mineur, ainsi que de celle de sa soeur, F______. Les enfants font l'un et l'autre l'objet de curatelles diverses depuis 2013, respectivement, 2014. Les parents, non mariés, se sont séparés en 2014. Les enfants vivaient avec leur mère. Les relations personnelles entre les enfants et le père étaient aléatoires du fait de l'un comme de l'autre des parents. Une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles a été prononcée le 11 mai 2016, l'exercice du droit de visite étant régulièrement perturbé par la recourante.

b) En date du 18 décembre 2017, des médecins rattachés à l'Office médico-pédagogique ont signalé la situation des enfants au Tribunal de protection et sollicité une expertise familiale. Ils mettaient en évidence un conflit de loyauté délétère pour le développement psychique des enfants. Malgré le suivi mis en place, la situation n'était pas apaisée et le conflit parental restait au premier plan.

c) Le Tribunal de protection a ordonné l'expertise en question le 18 avril 2018.

Par rapport du 29 janvier 2019, les experts ont conclu à un fonctionnement psychologique de la recourante caractérisé par une tendance au clivage et à la projection, ainsi qu'une difficulté à tenir compte d'autrui. La recourante n'était plus adéquate dans son rôle de parent dans les moments où elle était envahie de ses propres angoisses, auxquelles elle exposait les enfants. Elle faisait une surconsommation de consultations médicales, dans le but d'apaiser ses propres craintes. Elle ne s'adaptait pas au niveau de développement de ses enfants et favorisait un attachement non sécurisant des enfants avec leur père, dont elle remettait en cause constamment les capacités; elle ne parvenait pas à calmer leurs angoisses et à leur offrir une sécurité psychique suffisante. Elle n'avait pas collaboré de manière satisfaisante avec les experts. Il ressort du rapport que la recourante était assaillie d'angoisses envahissantes et incontrôlées avec une mise en échec de tous les soutiens prodigués jusqu'alors.

Les experts ont posé le diagnostic de trouble de la personnalité sans précision pour A______, caractérisé par des difficultés affectives, ne lui permettant pas de tenir compte d'autrui et de divers éléments de la réalité, restant centrée sur ses propres vécus et angoisses.

d) Le Tribunal de protection a entendu les experts lors de son audience du 1er avril 2019, lesquels ont persisté dans leur rapport. Ils ont fait état de l'urgence à procéder au changement de garde préconisé, estimant qu'un délai d'attente ne pouvait être que dommageable aux enfants, les maintenant dans une incertitude incompatible avec leurs intérêts. Ils ont confirmé que la collaboration de la recourante à l'expertise n'avait pas été complète, celle-ci s'étant refusée notamment à indiquer le nom de son thérapeute personnel ou les causes ayant motivé la délivrance d'une rente de l'Assurance-invalidité.

En audience, les experts ont également confirmé avoir été frappés par la souffrance importante ressentie par les enfants et notamment par leur attitude de retrait, de repli et d'inhibition. La capacité de la recourante à se remettre en question était quasiment nulle, celle-ci ayant énormément de difficultés à comprendre les symptômes manifestés par les enfants. Etant coupée de ses propres émotions, elle était incapable de les rassurer. Ni la médiation parentale, ni le suivi thérapeutique de la recourante n'avaient permis d'assurer aux enfants un bon développement. Ces mesures étant devenues insuffisantes, il était impératif de sortir les enfants du giron de leur mère, sous peine d'augmenter les risques de développement de traits psychotiques et de troubles de la personnalité chez eux, voire de passages à des actes hétéro ou auto-agressifs.

Quant au père, les experts le décrivent comme collaborant, adéquat avec les enfants et manifestant de bonnes compétences parentales. Il n'alimente pas le conflit de loyauté, aucun diagnostic psychiatrique n'étant relevé à son égard.

Quant aux enfants, l'aîné est habité d'une anxiété persistante qui le conduit à s'isoler massivement. Il souffre d'une énurésie nocturne et de conduite d'opposition en lien avec le stress ressenti issu du conflit parental. Il est diagnostiqué comme souffrant d'un trouble mixte des conduites et des émotions.

Quant à la cadette, elle a un bon développement général mais est hyper- mature et "parentifiée". Elle souffre d'angoisse de séparation et se préoccupe de manière persistante pour sa mère. Elle souffre d'un trouble réactionnel de l'attachement de l'enfance.

Les experts confirmaient recommander que, pour mettre un terme au phénomène d'aliénation parentale chez les enfants, il était nécessaire de les sortir de l'emprise de leur mère et de confier leur garde et l'autorité parentale au père.

La curatrice des enfants, également entendue lors de l'audience du Tribunal de protection, a insisté sur la nécessité d'une décision rapide, dans le sens préconisé par les experts.

Suite à quoi la décision du 1er avril 2019, confirmée par la Chambre de surveillance le 7 novembre 2019 (DAS/217/2019), a été rendue.

e) En date du 28 janvier 2020, le Tribunal de protection a tenu une audience lors de laquelle les parties ont exprimé leurs volontés de se voir confier l'autorité parentale conjointe. Elles se sont en outre déclarées d'accord sur la mise en oeuvre d'une thérapie familiale. A l'issue de cette audience, l'ordonnance querellée a été rendue.

EN DROIT

1. 1.1 Interjeté auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 53 al. 1 LaCC), dans les délai et forme utiles (art. 450 al. 3 CC applicable par renvoi de l'art. 314 al. 1 CC) par une personne qui dispose de la qualité pour recourir (art. 450 al. 2 ch. 1 CC; art. 35 let. b LaCC) à l'encontre d'une décision rendue par le Tribunal de protection, le recours est recevable.

1.2 La Chambre de surveillance revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 al. 1 et 3; art. 450 al. 1 CC).

2. La recourante conclut préalablement à l'ordonnance des diverses mesures probatoires, soit notamment la comparution personnelle des parties, la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise, ainsi que l'audition de témoins.

Comme déjà rappelé dans l'arrêt précédent, selon l'art. 53 al. 5 LaCC, il n'y a en principe pas de débats devant la Chambre de surveillance de la Cour de justice.

Il n'y a pas lieu de déroger à ce principe dans le cas d'espèce, dans la mesure où la Cour s'estime suffisamment renseignée sur la base du dossier complet en sa possession qui, comme c'était le cas précédemment déjà, contient de nombreux rapports d'évaluation du Service de protection des mineurs, les procès-verbaux d'auditions du Tribunal de protection, les multiples pièces déposées par les parties, ainsi que l'expertise ordonnée par le Tribunal de protection antérieurement. Par ailleurs, les parties ont déposé à la présente procédure de recours de nombreuses pièces, recevables au vu des maximes rappelées ci-dessus, qui seront en tant que de besoin prises en considération.

Par conséquent, la Chambre de céans dispose de tous les éléments indispensables pour statuer, de sorte que les conclusions préalables de la recourante seront rejetées.

3. La Cour ne reviendra pas sur le grief relatif à l'éventuelle violation du droit d'être entendue de la recourante, déjà tranché dans le cadre du précédent arrêt, et soulevé dans le présent recours sans élément nouveau par rapport à la situation antérieure. Le dossier est complet et les droits des parties ont été sauvegardés comme déjà rappelé précédemment.

La Chambre de céans ne reviendra pas non plus sur la question de la décision ayant conduit au retrait de la garde des enfants à la recourante. Cette question a été définitivement tranchée dans l'arrêt précédent, vu l'issue de la procédure de recours par-devant le Tribunal fédéral.

4. Il ne reste à examiner par conséquent que la question de l'étendue du droit de visite de la recourante. A son tour, la Chambre de surveillance doute de l'intérêt encore actuel de la recourante à ce que cette question soit tranchée. En effet, moins d'un mois après le dépôt du recours, le Tribunal de protection a rendu une nouvelle ordonnance le 30 avril 2020 (DTAE/2184/2020) élargissant encore les modalités du droit de visite de la recourante, en ce sens que celle-ci bénéficie d'un droit de visite d'un week-end sur deux du vendredi 16h00 au lundi 8h00, le
1er mai 2020, les passages des enfants ayant lieu d'entente entre les parents et les curateurs. Cette ordonnance n'a fait l'objet d'aucun recours. Elle est en force.

En tant qu'elle argumente que la décision attaquée viole les dispositions de l'art. 273 CC, son recours doit par conséquent être rejeté.

Par ailleurs, la Cour relève que l'amélioration partielle de la situation de la recourante, et de manière générale des relations familiales, a conduit les autorités compétentes, depuis le retrait de garde, à élargir régulièrement, la dernière fois par décision du 30 avril 2020 du Tribunal de protection, le droit aux relations personnelles de la recourante et ce, dans l'intérêt des enfants jusqu'à aboutir à ce qu'elle bénéficie à l'heure actuelle d'un droit de visite quasi usuel (hormis les périodes de vacances). Au vu des circonstances globales générales et de l'ensemble de l'historique du dossier, il est par contre tout-à-fait prématuré d'envisager une garde alternée telle que la requiert la recourante.

La Cour constate en effet, qu'alors que l'évolution, notamment comportementale des enfants, était inquiétante avant la décision de retrait de garde, l'octroi de la garde au père, moyennant la réserve de relations personnelles d'abord restreinte, puis étendue comme rappelé plus haut en faveur de la recourante, a permis une modification fondamentale du comportement, notamment de l'enfant E______, en particulier dans le milieu scolaire. Cela confirme la stabilité retrouvée par les enfants du fait de la réglementation adoptée. Dès lors, et pour autant que le recours sur ce point ait encore un objet, il doit être rejeté. L'ordonnance, modifiée par la décision ultérieure du 30 avril 2020, correspond en tous points à l'intérêt actuel des enfants.

5. Dans la mesure où elle succombe en totalité, la recourante supportera les frais de la procédure de recours fixée à 400 fr. Ils seront compensés par l'avance de frais.

Des dépens à hauteur de 400 fr. seront octroyés à B______ qui le requiert, mis à charge de la recourante.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours déposé le 3 avril 2020 par A______ contre l'ordonnance DTAE/1220/2020 rendue le 28 janvier 2020 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/1355/2013.

Au fond :

Le rejette.

Sur les frais :

Arrête les frais à 400 fr., les met à la charge de A______ et les compense partiellement avec l'avance versée par cette dernière en 400 fr.

Condamne A______ au paiement à B______ de dépens d'un montant de 400 fr.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Paola CAMPOMAGNANI et Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005
(LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.