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Décisions | Chambre de surveillance

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C/22816/2010

DAS/107/2020 du 03.07.2020 sur DTAE/1102/2020 ( PAE ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/22816/2010-C S DAS/107/2020

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU VENDREDI 3 JUILLET 2020

Recours (C/22816/2010-CS) formés en date du 26 février 2020 par la mineure A______, domiciliée ______, représentée par sa curatrice de représentation Me B______, avocate, en l'Etude de laquelle elle élit domicile, d'une part,

en date du 27 mars 2020 par Madame C______, domiciliée ______, comparant par Me Sandy ZAECH, avocate, en l'Etude de laquelle elle élit domicile, d'autre part,

et en date du 27 mars 2020 par Madame D______, Messieurs E______, F______, G______ et H______, comparant tous cinq par Me Aude LONGET-CORNUZ, avocate, en l'Etude de laquelle ils élisent domicile, d'autre part.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 6 juillet 2020 à :

- MademoiselleA______
c/o Me B______, avocate
______, ______.

- MadameC______
c/o Me Sandy ZAECH, avocate
Rue de Saint Victor 4, 1206 Genève.

- Monsieur I______
c/o Me Manuel MOURO, avocat
Rue Joseph-Girard 20, case postale 1611, 1227 Carouge.

./..

 

- Madame D______
Messieurs E______, F______, G______ et H______
c/o Me Aude LONGET-CORNUZ, avocate
Rue Verdaine 13, case postale 3231, 1211 Genève 3.

- Madame J______
Monsieur K______
SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Case postale 75, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A. a) C______ - alors encore mariée à L______ - et I______ ont commencé à se fréquenter dans le courant de l'année 2005.

Le ______ 2009, C______ a donné naissance à une fille, A______. Le père biologique de l'enfant était I______, mais L______ a, de par la loi, été considéré comme le père de l'enfant, étant encore marié à C______ au moment de la naissance, bien que séparé de cette dernière.

Le 9 février 2012, le Tribunal de première instance a constaté que L______ n'était pas le père de l'enfant A______.

Le 28 mars 2012, le Tribunal tutélaire (actuellement, Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, ci-après : Tribunal de protection) a officiellement reconnu I______ comme étant le père biologique et légal de l'enfant A______.

b) Le 25 janvier 2012, C______ a déposé plainte pénale auprès du Ministère public, accusant I______ d'attouchements sexuels sur l'enfant A______.

c) Le 3 mai 2012, I______ a requis le Tribunal tutélaire pour tenter de renouer contact avec sa fille, C______ lui refusant tout contact depuis octobre 2011.

d) Par ordonnance du 20 décembre 2012, le Tribunal de protection a, statuant sur mesures provisionnelles, rejeté la requête de I______ tendant à la fixation d'un droit de visite sur l'enfant A______ et, sur le fond, instauré une curatelle ad hoc aux fins d'assurer le suivi du traitement pédopsychiatrique de l'enfant A______, désigné un employé du Service de protection des mineurs comme curateur et limité l'autorité parentale de C______ sur l'enfant en conséquence.

e) Par ordonnance du 27 juin 2013, le Tribunal de protection a ordonné une première expertise psychiatrique familiale.

Le rapport d'expertise du 5 février 2014 préconisait la reprise du droit de visite du père, la continuation de la psychothérapie déjà entamée par C______ et la mise en place d'une guidance parentale pour accompagner C______ dans son rôle de mère et l'aider à se différencier de sa fille. Il était également préconisé que l'enfant A______ cesse le suivi psychothérapeutique entamé avec la Dresse M______ et le poursuive avec un pédopsychiatre de la Guidance infantile.

C______ possédait, à l'époque du rapport, des compétences éducatives suffisantes pour offrir un cadre de vie à l'enfant A______. Toutefois, elle avait des difficultés à pouvoir faciliter l'accès à l'autre parent, tant sur le plan physique que sur le plan psychique, et ne pouvait tolérer que sa fille se différencie d'elle et côtoie son père. Elle avait un trouble de la personnalité avec des traits anxieux et borderline, et présentait une forte anxiété et une instabilité émotionnelle en raison d'événements de son passé (notamment maltraitances physique et psychique de la part de son père et violence sexuelle); elle tentait de réparer au travers de sa fille lesdits traumatismes de son propre passé. Si C______ n'arrivait pas à accepter la réinstauration progressive du droit de visite, les relations père-fille seraient durablement compromises, ce qui pourrait amener à reconsidérer l'attribution du droit de garde à la mère.

L'enfant A______ était prise dans un conflit de loyauté aliénant, consécutif aux difficultés de ses parents et à celles de sa mère à la voir comme un individu séparé d'elle. Cette situation entravait une différenciation et autonomisation nécessaires à son développement psychoaffectif. Si aucune mesure n'était prise, elle risquait, à terme, de développer un trouble des émotions avec répercussion sur son fonctionnement global, ainsi qu'un trouble de l'identité. Pour ces raisons, les experts préconisaient que mère et fille aient des espaces de parole différenciés. Par conséquent, le suivi thérapeutique entamé par la mineure auprès de la Dresse M______, laquelle assurait également celui de C______, n'était pas compatible avec la recommandation précitée.

f) Par ordonnance du 28 mars 2014, le Tribunal de protection a suivi les recommandations des experts et notamment fixé les modalités de reprise des relations personnelles entre la mineure et son père, pris acte de l'engagement de C______ de mettre en place un suivi psychothérapeutique individuel, ordonné un suivi de guidance parentale portant sur le lien mère-fille et donné acte à la mère de son engagement d'organiser et de veiller au suivi thérapeutique en faveur de sa fille auprès de la Guidance infantile, la curatelle ad hoc d'ores et déjà instaurée à cette fin étant maintenue.

g) Par requête déposée le 30 juin 2015, I______ a conclu à l'instauration de l'autorité parentale conjointe, à laquelle C______ s'est opposée dans ses écritures du 31 août 2015.

h) Par rapport du 14 septembre 2015, le Service de protection des mineurs (ci-après : SPMi) a informé le Tribunal de protection de l'évolution de l'exercice du droit de visite depuis le 24 février 2015. La pédopsychiatre de la mineure, la Dresse N______, ainsi que la thérapeute de C______ et I______, la Dresse O______, avaient fait part au SPMi de leurs grandes inquiétudes quant à l'évolution de A______, l'enfant montrant des troubles, crises et maladies, depuis l'augmentation du rythme du droit de visite.

i) Le 9 décembre 2015, le Tribunal de protection a désigné B______, avocate, comme curatrice de l'enfant A______ afin de la représenter dans la présente procédure.

j) Par courrier du 23 février 2016, la Dresse N______ a informé le Tribunal de son inquiétude quant à l'opposition grandissante de la mineure à participer aux séances de thérapie, étant continuellement exposée au conflit parental et piégée dans un conflit de loyauté. Depuis janvier 2016, en accord avec la thérapeute précitée, la mère accompagnait sa fille aux séances afin de remobiliser cette dernière dans le processus thérapeutique, ce qui réduisait toutefois les bienfaits dudit processus.

k) Par courrier du 23 février 2016, C______ a rappelé qu'elle contestait le diagnostic posé par l'expertise du 5 février 2014 et maintenu sa conclusion précédente tendant à l'audition d'un médecin.

Elle a produit un certificat médical établi par le Dr P______, psychiatre, le 6 février 2016, après une séance individuelle de deux heures. En substance, celui-ci concluait notamment que C______ était un sujet cliniquement inoffensif, psychologiquement autonome, bien identifié à elle-même et à son propre rôle, en mesure d'échanger de l'affection d'une manière sûre et capable d'une relation réaliste, fluide et harmonieuse avec la réalité externe.

l) Lors de l'audience du 25 février 2016, le Tribunal de protection a entendu la Dresse O______, laquelle a déclaré qu'il était nécessaire de trouver un autre mode d'accompagnement de l'enfant A______ vers son père, au regard de l'opposition grandissante que celle-là exprimait vis-à-vis de celui-ci et du suivi pédo-psychiatrique avec la Dresse N______. Elle estimait qu'il n'y avait pas de défaut de collaboration de la part de la mère tel qu'envisagé par l'expertise du 5 février 2014 et qu'il ne se justifiait pas de préconiser l'ouverture d'une instruction en retrait de garde. De plus, une telle solution constituait un risque trop grand d'effondrement pour l'enfant.

C______ et I______ se sont déclarés d'accord de participer à des séances conjointes de thérapie familiale.

m) Par ordonnance du 25 février 2016, le Tribunal de protection a notamment réduit l'étendue du droit de visite, celui-ci s'exerçant dorénavant en alternance avec les séances de thérapie familiale, ordonné un suivi thérapeutique familial des deux parents, avec inclusion de la mineure, selon appréciation du thérapeute et suspendu le suivi thérapeutique en faveur de la mineure, décision confirmée par arrêt de la Cour du 8 décembre 2016, sous réserve de l'invite au curateur ad hoc en charge d'assurer le suivi du traitement pédopsychiatrique de l'enfant de mettre un terme à la thérapie entamée par cette dernière auprès de la Dresse N______ et de trouver un nouveau pédopsychiatre.

n) Le 20 mars 2017, la procédure pénale déposée par C______ contre le père de l'enfant a été classée par le Ministère public.

o) Par ordonnance du 29 mai 2018, le Tribunal de protection a, sur mesures provisionnelles, maintenu les modalités du droit aux relations personnelles de I______ sur sa fille telles que fixées dans son ordonnance du 25 février 2016, soit une heure trente à quinzaine en Point rencontre, en alternance avec les séances de thérapie familiale. Préparatoirement, le Tribunal de protection ordonnait en outre l'exécution d'un complément d'expertise familiale.

p) En date du 18 juin 2018, le Tribunal de protection a entendu la Dresse O______, thérapeute de C______, ayant reçu la mineure à cinq ou six reprises. La situation de l'enfant l'avait inquiétée. C______ quant à elle avait intégré le fait qu'elle devait permettre au père de l'enfant de prendre sa place. La perspective d'un retrait de garde stressait la mère et perturbait énormément l'enfant. Cette dernière avait très peur de "perdre" sa mère.

Le Tribunal de protection a procédé lors de la même audience à l'audition de deux intervenants dans le cadre de la thérapie familiale débutée en juin 2017. L'un d'eux a déclaré avoir été interloqué par l'absence d'évolution dans la relation des parties depuis l'expertise effectuée en 2014. L'enfant A______ est décrite comme touchante et intelligente. L'opposition de l'enfant rendait l'éventualité d'entretiens père-fille impossible.

Dans un rapport relatif à la période du 12 juillet 2017 au 11 juillet 2018, le Point rencontre exposait que les visites entre le père et sa fille se déroulaient toujours dans un climat de tensions plus ou moins fortes. L'enfant exprimait souvent son souhait de ne pas voir son père et le fait de ne pas être entendue sur ce point. La question devait être posée du bien-fondé desdites rencontres.

Le 30 octobre 2018, le Tribunal de protection a entendu l'enfant. Celle-ci a en substance rappelé son opposition aux rencontres avec son père et a adressé à ce dernier divers griefs. Elle a en outre relaté sa peur de se voir placée en foyer.

q) En date du 14 novembre 2019, les experts requis par le Tribunal de protection ont rendu leur rapport d'expertise, qui diagnostique chez la mère un trouble mixte de la personnalité avec notamment des traits anxieux nécessitant une psychothérapie individuelle jamais mise en oeuvre, chez le père un épisode dépressif moyen et un jeu pathologique nécessitant également une psychothérapie individuelle et un suivi psychiatrique et chez l'enfant, à haut potentiel, un trouble émotionnel, notamment.

S'agissant des compétences parentales, le père n'avait jamais eu l'occasion de s'occuper des besoins de base de l'enfant. Il était compréhensif et tolérant mais ses troubles psychiatriques le rendaient parfois peu adéquat notamment dans ses propos. La mère était capable de répondre aux besoins de base de l'enfant mais ne la protégeait pas de ses propres angoisses et n'était pas capable de lui fournir un équilibre émotionnel, notamment quant à l'image du père.

L'expertise propose le prononcé d'un retrait de la garde de l'enfant à la mère et le placement en foyer, moyennant un droit de visite en faveur de la mère, mais l'absence de droit de visite en faveur du père durant trois à six mois. Un "travail de coparentalité serait utile ".

S'agissant spécifiquement de la mère, l'expertise retient qu'elle gère sa propre école de ______ de manière stable depuis trente ans et sa propre entreprise de ______. Elle soutient ses six enfants dans leurs études. Elle apporte les besoins de base à l'enfant, gère le quotidien, amène sa fille à de nombreuses activités, à ses rendez-vous et respecte les horaires scolaires. Elle est soucieuse d'apporter un environnement sécurisant et bienveillant à l'enfant. Elle est une mère aimante, une tendresse et une complicité entre les deux étant apparues évidentes aux experts. Elle se montre toutefois peu adaptée à se mettre au niveau de développement de l'enfant, mais elle évolue. Son comportement apparaît inadéquat à l'égard du père qu'elle critique et en qui elle n'a aucune confiance.

S'agissant du père, le rapport retient un état dépressif et des traits paranoïaques, une tristesse lorsqu'il évoque sa fille, une impulsivité et une certaine confusion. Il travaille de manière stable. Il n'a jamais eu sa fille chez lui depuis 2014 de sorte qu'il n'a pas eu l'occasion de s'en occuper. Il admet les capacités parentales de la mère de l'enfant mais considère qu'elle est aliénante.

Quant à l'enfant, elle est décrite comme présentant de grandes ressources, sensible et curieuse. Elle a un niveau élevé de capacité d'attention et de concentration. Elle a des difficultés à gérer les échecs et la critique. Elle présente un trouble émotionnel de l'enfance dans le cadre du conflit parental (anxiétés, phobies, énurésie, etc). Son comportement est qualifié d'inquiétant tant s'agissant des troubles somatiques que des symptômes majeurs d'anxiété qu'elle montre avec une angoisse de séparation à (sic) la figure maternelle. Son état est décrit comme la conséquence de l'évolution de la situation dans un système environnemental défavorable. Elle est très attachée et loyale à sa mère, mais s'approprie ses angoisses. Elle manque d'une vraie différentiation individuelle. Elle refuse tout contact avec son père, le dénigre et se montre agressive à son égard. Elle montre des difficultés grandissantes dans son développement psychique qui se manifestent avec sa souffrance et ses troubles psychosomatiques. Elle a besoin "d'être dégagée du rôle de défenseur de son combat mais aussi du rôle qu'elle porte inconsciemment de porte-parole et de vengeur de sa mère". Il est primordial qu'elle puisse avoir un suivi psychothérapeutique individuel. "Finalement, A______, comme tout enfant, a un grand besoin de stabilité affective, mais sa fragilité émotionnelle et son haut potentiel font qu'elle est plus sensible aux changements, une psychothérapie soutenue et régulière est donc vitale dans le cas d'un placement". Malgré ce constat, le rapport conclut qu'il est important pour elle de pouvoir se détacher de sa mère, avec le placement dans un lieu neutre et à l'aide d'une psychothérapie individuelle régulière et soutenue pour travailler le choc de la séparation, ses angoisses et sa souffrance psychique. "L'éloignement de l'enfant de son milieu constitue une mesure de protection et d'éducation qui a comme but de stimuler un "reset" psychique de l'enfant et reconstituer autour d'elle des liens familiaux équitables, fiables, persistants et bienveillants".

r) Par rapport du 7 janvier 2020, le Service de protection des mineurs a préconisé l'arrêt des rencontres de la fille et de son père en Point rencontre au vu de l'échec de celles-ci, attesté par le Point rencontre lui-même, au profit d'un "travail de fond". Ces visites apportaient souffrance tant à la fille qu'au père, se déroulant mal. L'enseignante de l'enfant a fait part au SPMi du fait que celle-ci était une excellente élève hypersensible. Elle a fait part également de ses soucis relativement aux enfants fréquentant son école qui étaient placés en foyer.

s) Le Tribunal de protection a procédé à l'audition des experts lors de son audience du 13 janvier 2020. Celles-ci ont confirmé le besoin d'un placement de l'enfant tout en préconisant qu'un délai à fin juin 2020 pour l'exécution du placement soit envisagé, les thérapeutes de la Consultation psychothérapeutique pour famille et couple des HUG (COUFAM) étant défavorables au prononcé d'un placement immédiat. Elles ont également confirmé que les intervenants dans cette cause étaient majoritairement opposés au prononcé d'un placement. Selon elles toutefois, celui-ci était nécessaire dans la mesure où l'état psychologique et somatique de l'enfant était grave et "qu'il n'est pas normal que cette mineure soit dans une telle opposition par rapport à son père". L'environnement dans lequel elle évolue ne lui permet pas de se forger une autre vision de son père. En parallèle, il fallait que l'enfant puisse se "remobiliser" de sorte que la suspension totale des relations avec le père et quasi totale ("sinon cela aurait été trop dur") avec sa mère a été préconisée.

Les experts ont encore exposé qu'il était tout à fait possible que les symptômes de l'enfant s'aggravent dans un premier temps en cas de placement. Elles ont relevé que le conflit de loyauté était installé chez l'enfant et que malgré "tous les suivis imaginables", il sera très difficile de changer cela. Le but du travail à effectuer sur l'enfant est d'essayer de changer la perception qu'elle a de son père du fait de ce qui lui a été inculqué par sa mère et la famille de celle-ci. Il existe, selon les experts, un risque énorme que l'enfant développe à l'adolescence une personnalité paranoïaque en cas d'absence de placement, sans qu'il soit évidemment possible de dire si ce dernier aura l'effet escompté. Cette mesure devait être vue comme une chance pour la mineure de changer de perspective. La mère devait en outre comprendre qu'elle avait échoué dans son rôle de protection de sa fille.

A l'issue de l'audience, la curatrice de l'enfant et la mère se sont opposées au placement, le père s'en rapportant à justice, ne souhaitant pas "faire partie du processus de placement". Le SPMi ne s'y est pas opposé.

t) Par ordonnance du 21 février 2020 (DTAE/1102/2020), le Tribunal de protection a, notamment, retiré à C______ la garde et le droit de déterminer le lieu de résidence de A______ (ch. 1 du dispositif), ordonné le placement de l'enfant au Foyer Q______ (ch. 2), réservé à la mère un droit de visite sur l'enfant à raison d'une rencontre par semaine en présence d'un thérapeute, dans un premier temps (ch. 6), suspendu le droit de visite du père (ch. 7), invité le curateur à préaviser la reprise de ces visites (ch. 8), instauré une curatelle d'organisation, de surveillance et de financement du placement, notamment (ch. 9), maintenu diverses curatelles et suivis en cours (ch. 10 à 13), ordonné un suivi de la mère (ch. 14 et 15), l'ordonnance étant déclarée immédiatement exécutoire (ch. 16), les parties étant déboutées de toutes leurs conclusions, les frais étant mis à leur charge par moitié chacune (ch. 17 et 18).

u) Par acte déposé au greffe de la Cour le 26 février 2020, l'enfant A______, par l'entremise de sa curatrice de représentation, a formé recours contre ladite ordonnance, concluant sur mesures superprovisionnelles à la restitution de l'effet suspensif au recours et à la constatation que le placement prévu le jour du dépôt du recours était illégal à défaut de notification aux parties de l'ordonnance en question.

Par décision du jour-même, le président de la Chambre de surveillance a restitué l'effet suspensif au recours.

v) Par acte de recours complémentaire déposé le 27 mars 2020 à la Cour, l'enfant A______ a conclu principalement à l'annulation des ch. 1, 2, 6, 9 et 10 de l'ordonnance querellée. Préalablement, elle a conclu à être autorisée à compléter son mémoire après l'obtention d'attestations médicales, à ce qu'une décision préalable soit rendue sur la suspension des visites en Point rencontre, notamment et à ce qu'une audience soit convoquée.

En substance, elle soutient que l'ordonnance viole les art. 6 et 8 CEDH, 29 al. 2 Cst féd et 310 CC. Elle remet en cause le bien-fondé des conclusions de l'expertise ordonnée par le Tribunal de protection et soutient que le temps d'un éventuel placement est passé, que les intervenants au dossier sont majoritairement opposés à un placement, hormis les experts, que le développement de l'enfant est positif comme l'atteste sa maîtresse d'école notamment, que les conditions au prononcé d'un placement ne sont pas réalisées et que ses effets seraient délétères pour la stabilité morale de l'enfant.

Par recours du 27 mars 2020, C______ a conclu à l'annulation des ch. 1, 2, 6, 9, 17 et 18 du dispositif de l'ordonnance attaquée. Elle sollicite une contre-expertise et l'audition de divers témoins. Elle conclut en outre au maintien du suivi thérapeutique familial, à la modification de la thérapie individuelle de l'enfant, à sa libération du coût de l'expertise judiciaire et à la confirmation de l'ordonnance pour le surplus.

En substance, elle fait grief au Tribunal de protection d'avoir violé son droit d'être entendue et son droit à la preuve en renonçant à ordonner des mesures d'instruction requises. Elle conteste en outre la compétence des experts mis en oeuvre par le Tribunal de protection, aucune d'entre elles n'ayant de formation en psychiatrie de l'adulte, et s'en prend au contenu de l'expertise et à la méthode des experts. Elle considère enfin que le placement viole le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Par recours du 27 mars 2020, D______, F______, G______, E______ et H______, demi-frères et soeur de A______, ont recouru contre l'ordonnance du Tribunal de protection, concluant à l'annulation des chiffres 1, 2, 6, et 9 de son dispositif. Préalablement, ils requièrent diverses mesures d'instruction.

En substance, ils exposent la qualité pour recourir. Ils font valoir que l'ordonnance attaquée viole les principes de subsidiarité, complémentarité et proportionnalité de l'art 310 CC, en tant qu'elle prononce un retrait de garde qui n'a pas lieu d'être. Les conditions d'un tel retrait ne sont pas remplies. L'évolution de l'enfant est positive par ailleurs. L'expertise a été rendue il y a plusieurs mois et n'est plus d'actualité. Le Tribunal de protection a commis en outre un excès de son pouvoir d'appréciation en ne retenant que les conclusions de l'expertise, dont ils remettent en cause la qualité, et le bien-fondé des constatations, respectivement des conclusions. Enfin, la décision est inopportune.

w) En date du 8 avril 2020, le SPMi a formulé à l'adresse de la Chambre de surveillance des observations dans lesquelles il dit s'interroger sur la possibilité d'aboutissement d'un placement sans adhésion de l'enfant, tout en maintenant son préavis antérieur visant le prononcé d'un tel placement. Ledit service estime l'environnement familial délétère au bon développement de la mineure.

x) Le 14 avril 2020, le Tribunal de protection a formulé des observations aux trois recours, n'entendant pas faire usage de la possibilité de reconsidérer sa décision.

En date du 1er mai 2020, la curatrice de l'enfant a déposé des observations sur les recours des autres parties, s'opposant à une contre-expertise, mais non le cas échéant à un complément, maintenant pour le surplus ses conclusions antérieures.

La mère de l'enfant a quant à elle, en date du 4 mai 2020, appuyé les conclusions de la curatrice et persisté dans ses propres conclusions.

Le 25 mai 2020, la curatrice de l'enfant a fait part de ses observations sur le préavis du SPMi. L'évolution de l'enfant apparaît positive. Le placement n'a pas lieu d'être.

Par déterminations du 25 mai 2020 I______, père de l'enfant, s'est déterminé sur les recours. Il a conclu à la confirmation de l'ordonnance attaquée et à ce que son exécution immédiate soit ordonnée, l'effet suspensif octroyé devant être à nouveau retiré. Le placement serait la "planche de salut" de l'enfant. L'enfant va mal, l'ultima ratio qu'est le placement est nécessaire pour permettre à l'enfant de mener une vie propre, indépendante de sa mère.

Le 5 juin 2020, la curatrice de l'enfant a conclu à l'irrecevabilité des déterminations de I______, celui-ci n'ayant pas fait usage de son droit de répondre dans les délais octroyés.

Le même jour, D______, F______, G______, E______ et H______ ont conclu de même, ainsi que le 8 juin 2020, C______.

Par courrier du 12 juin 2020, I______ déclare vouloir continuer ses efforts pour renouer des relations apaisées avec sa fille, "avec ou sans placement".

y) La cause a été gardée à juger à l'issue des échanges d'écritures.

EN DROIT

1. 1.1 Les dispositions de la procédure devant l'autorité de protection de l'adulte sont applicables par analogie pour les mesures de protection de l'enfant (art. 314 al. 1 CC).

Les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 CC et 53 al. 1 LaCC).

En l'occurrence, les recours interjetés par l'enfant et par sa mère, personnes ayant qualité indiscutable pour recourir, dans le délai utile de trente jours et suivant la forme prescrite, sont recevables (art. 450 al. 2 et 3 et 450b CC; art. 41 LaCC).

Le recours interjeté par les demi-frères et soeur de l'enfant concernée par la procédure, interjeté dans le délai et les formes prévus par la loi, en tant qu'ils sont des personnes proches, est également recevable (art. 450 al. 2 ch. 2 CC). Quoiqu'il en soit, il poursuit le même but que les deux précédents.

1.2 Par souci de simplification, les trois recours seront tranchés dans la même décision (art. 125 CPC).

1.3 La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC). Elle établit les faits d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 al. 1 et 3 CC).

En ce sens les conclusions visant l'irrecevabilité de la détermination du père de l'enfant doivent être rejetées. L'écriture, produite avant que la cause ait été gardée à juger, fait partie du dossier.

2. Les recourants sollicitent diverses mesures d'instruction complémentaires.

2.1 Selon l'art. 53 al. 5 LaCC, il n'y a en principe pas de débats devant la Chambre de surveillance de la Cour.

2.2 En l'espèce, il n'y a pas lieu de déroger à ce principe, ce d'autant que dans le cas présent le dossier contient tous les éléments nécessaires pour statuer. La Cour s'estime dès lors parfaitement et suffisamment renseignée par tous les éléments au dossier sans avoir besoin que celui-ci soit complété.

3. La recourante C______, qui se plaint d'une violation de son droit d'être entendue, reproche au Tribunal de protection de ne pas avoir procédé à l'administration de diverses preuves requises par elle et de ne pas avoir ordonné la contre-expertise sollicitée.

3.1.1 Le droit d'être entendu est une garantie de caractère formel, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours au fond (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1,
JdT 2010 I 255).

Le droit d'être entendu ne confère pas au justiciable un droit absolu à ce qu'une expertise requise soit effectuée, dans la mesure où l'autorité peut mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui permettent de se forger une conviction et que, procédant d'une façon non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient plus l'amener à modifier son opinion (arrêts du Tribunal fédéral 5A_304/2014 du 13 octobre 2014 consid. 3.3 à 3.5; 4A_683/2010 du 22 novembre 2011 consid. 3.1).

3.1.2 Dans le domaine de la protection de l'adulte et de l'enfant, l'autorité de protection applique les maximes d'office et inquisitoire illimitées (art. 446 CC). Elle établit les faits et applique le droit d'office, procède à la recherche et à l'administration des preuves nécessaires et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 36 al. 2 LaCC). Elle peut en tout temps ordonner un complément d'enquête (art. 36 al. 6 LaCC).

Ce n'est que si le juge éprouve des doutes sur des points essentiels d'une expertise qu'il lui incombe de les dissiper en ordonnant un complément d'expertise, voire une contre-expertise (arrêt du Tribunal fédéral 5A_839/2008 du 2 mars 2009 consid. 3.2). Le caractère concluant d'une expertise doit notamment être considéré comme douteux lorsque des faits importants, soigneusement détaillés, ou des indices, entament sérieusement le pouvoir de persuasion de l'expertise (arrêt du Tribunal fédéral 4A_612/2015 du 9 mai 2016 consid. 3.3). Le fait de se fonder sur une expertise non concluante, respectivement de renoncer à l'administration de preuves supplémentaires nécessaires peut constituer une appréciation arbitraire des preuves (ATF 138 III 193 consid. 4.3.1).

Une contre-expertise ne saurait être ordonnée au seul motif qu'une partie critique l'opinion de l'expert (DAS/20/2015 du 29 janvier 2015 consid. 3.1; ACJC/777/2012 du 25 mai 2012 consid. 6.3).

Le tribunal établit sa conviction par une libre appréciation des preuves administrées (art. 157 CPC).

3.2 En l'espèce, il s'agit tout d'abord de remarquer que la curatrice de l'enfant, également recourante par ailleurs, s'oppose à la mise sur pied d'une contre-expertise, estimant que l'enfant avait "assez donné". La Cour partage d'emblée ce point de vue dans la mesure où l'accumulation d'avis médicaux et d'avis d'experts au dossier est déjà susceptible de renforcer le sentiment d'épuisement moral de l'enfant, et ne fait qu'alimenter la confusion qui ressort de la lecture de la procédure surchargée.

Par ailleurs, si l'expertise peut dans son approche et dans ses conclusions, comme on le verra infra, prêter le flanc à la critique, point n'est besoin d'en ordonner une autre pour permettre le cas échéant au juge de s'en écarter, but sous-jacent visé par la conclusion en question.

Le grief doit être rejeté.

La Cour n'ordonnera pas davantage elle-même une telle contre-expertise à ce stade, par identité de motifs.

4. Tous les recourants contestent l'ordonnance en tant qu'elle ordonne le retrait de la garde de l'enfant à sa mère et son placement immédiat dans un foyer.

4.1 Lorsqu'elle ne peut éviter autrement que le développement d'un mineur ne soit compromis, l'autorité de protection de l'enfant retire ce dernier aux père et mère et le place de façon appropriée (art. 310 al. 1 CC). Le droit de garde passe ainsi au Tribunal de protection, qui détermine alors le lieu de résidence du mineur et choisit son encadrement.

Le danger doit être tel qu'il soit impossible de le prévenir par les mesures moins énergiques prévues aux art. 307 et 308 CC. La cause du retrait réside dans le fait que le développement corporel, intellectuel ou moral de l'enfant n'est pas assez protégé ou encouragé dans le milieu dans lequel il vit. Les raisons de cette mise en danger du développement importent peu : elles peuvent être liées au milieu dans lequel évolue le mineur ou résider dans le comportement inadéquat de celui-ci, des parents ou d'autres personnes de l'entourage (arrêt du Tribunal fédéral 5A_535/2012 du 21 juin 2012 consid. 3.1).

A l'instar de toute mesure de protection de l'enfant, le retrait du droit de garde est régi par les principes de subsidiarité, de complémentarité et de proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 5A_858/2008 du 15 avril 2009 consid. 4.2).

Les mesures qui permettent le maintien de la communauté familiale doivent par conséquent rester prioritaires. Il n'est toutefois pas nécessaire que toutes les mesures "ambulatoires" aient été tentées en vain; il suffit qu'on puisse raisonnablement admettre, au regard de l'ensemble des circonstances, que ces mesures, même combinées entre elles, ne permettront pas d'éviter la mise en danger. Il n'est pas nécessaire non plus que l'enfant ait déjà subi une atteinte effective à son développement : une menace sérieuse de mise en danger suffit (P. MEIER, Commentaire romand, Code civil I, 2010, ad art. 310, n° 14). Les carences graves dans l'exercice du droit de garde qui sont susceptibles de justifier un retrait de ce droit, si d'autres mesures moins incisives ne permettent pas d'atteindre le but de protection suivi, sont notamment la maltraitance physique et/ou psychologique ainsi que l'inaptitude ou la négligence grave dans l'éducation et la prise en charge, quelles qu'en soient les causes (P. MEIER, idem, n° 17).

La Cour de céans a déjà eu l'occasion de rappeler que si le retrait de garde est une ultima ratio, le placement d'un enfant en foyer en constitue une également, qui ne doit être ordonné que lorsqu'aucune mesure de protection moins incisive n'est envisageable (p. ex. DAS/45/2020 c.2.2.1; DAS 242/2019; DAS 153/2019).

4.2 Dans le cas d'espèce, le Tribunal de protection retient le constat des experts selon lequel l'enfant va particulièrement mal, souffrant d'un conflit de loyauté ancré, d'énurésie et d'autres problèmes somatiques et est en danger psychologique chez sa mère, ne pouvant développer une personnalité propre indépendante, du fait de cette dernière. De ce fait, faisant sien l'avis des experts, il estime nécessaire de déplacer le lieu de vie de l'enfant dans un lieu "neutre", de manière à lui permettre de construire sa propre personnalité. Selon le Tribunal de protection, il n'existe pas d'autre mesure appropriée pour protéger l'enfant.

Les recourants contestent cette position. En particulier, la curatrice de représentation de l'enfant dit s'opposer "farouchement" à une telle interprétation de la situation, faisant valoir notamment que l'une des causes du stress permanent de l'enfant et d'une partie de ses problèmes somatiques est la surmédicalisation de son cas et le fait d'être contrainte à voir son père, ce qu'elle ne souhaite pas, alors qu'elle aurait besoin de stabilité et d'insouciance. Elle fait en outre valoir le fait que si certains avis médicaux et les experts ont qualifié son état de grave, ses maîtresses d'école la considèrent comme une enfant joyeuse, pleine de vie, riant aux éclats et très douée.

Tout d'abord, il ressort du dossier que si, certes, l'enfant est prise depuis sa tendre enfance dans un conflit de loyauté qui provient de la mésentente exacerbée de ses parents et a, à ce jour, connu des problèmes somatiques, la situation de celle-ci n'est pas décrite par plusieurs intervenants tiers comme aussi préoccupante que décrite par les experts.

En particulier, il ressort de la procédure que l'enfant qui vit chez sa mère depuis sa naissance suit une scolarité normale, voire brillante, comme l'atteste sa maîtresse de classe. En outre, il ressort également du dossier que si l'enfant paraît parfois triste et mélancolique, le poids des obligations auxquelles elle est soumise et le conflit entre ses parents en sont les causes, ce qui se comprend aisément pour une enfant de onze ans.

Pour le surplus, personne, ni le pédiatre de l'enfant, ni les intervenants du SPMi, ni les divers thérapeutes ou les enseignants, n'expose que l'enfant subirait auprès de sa mère un danger physique quelconque, une absence de soins quotidiens ou d'affection. Il ressort par contre de la procédure que la perspective d'une séparation potentielle avec son environnement constitue pour l'enfant un stress supplémentaire délétère pour son équilibre.

Certes et depuis de nombreuses années, diverses mesures de protection ont été tentées pour mettre l'enfant à l'abri du conflit parental, en vain. Il en écoule, notamment comme le retient le SPMi, que ce conflit est actuellement ancré et cristallisé en elle. Les experts n'ont pas dit autre chose lors de leur audition par le Tribunal de protection.

A ce stade l'on ne peut que constater avec la curatrice de représentation que l'enfant a "assez donné" de sorte que peut se poser la question du trop-plein ressenti du fait des multiples interventions de tiers subies, dont il doit être retenu qu'elles sont un facteur de stress supplémentaire pour l'enfant, susceptible d'en dégrader l'état de santé.

Personne ne conteste, en théorie, que l'intérêt de l'enfant prime dans les questions relatives à sa protection. Cela étant la Cour est d'avis que les mesures prononcées ne vont pas dans le sens permettant de créer une stabilité, notamment affective et morale chez l'enfant, nécessaire à son épanouissement, et que la couper par la force de son milieu quotidien, de ses habitudes, de ses camarades et de la partie de sa famille avec laquelle elle a passé son enfance, est inopportun à permettre la sauvegarde dudit intérêt, de sorte qu'elles sont, dans les faits contraires à celui-ci.

Les termes-mêmes contenus dans l'expertise, relatifs à l'expérimentation que devrait constituer pour l'enfant son placement, sont par ailleurs révélateurs. Il s'agit d'effectuer un test pour "stimuler un reset psychique" de celle-ci, qui correspond plus à un essai clinique qu'à la réelle volonté de prise en compte de l'intérêt d'un enfant. Selon les experts par ailleurs, cet essai de "reset" mental que constituerait le placement proposé serait à ce point déstabilisateur pour la mineure, ce qui fait déjà douter de sa pertinence, que la mise sur pied d'un suivi individuel immédiat et parallèle de l'enfant est décrit comme "vital" pour lui permettre d'encaisser le choc émotionnel de la séparation. La Cour a une autre conception du bien de l'enfant que le fait de mettre potentiellement sa "vie" en danger pour tenter un "reset".

En outre, la Cour relève que, quand bien même ils s'en défendent, les experts focalisent leur analyse sur la nécessité de rétablir une relation entre l'enfant et son père, relation rendue mauvaise notamment par l'attitude de la mère à son égard. Cela dit, il s'agit de rappeler que si, en principe, une relation saine avec ses deux parents favorise l'équilibre et la construction personnelle de l'enfant, l'existence d'une telle relation, pour elle-même, n'est pas un but en soit, en particulier lorsqu'elle entre, pour des raisons diverses, en contradiction avec l'intérêt de l'enfant et son bon développement. Dans le cas présent, il doit être admis que la contrainte des relations entre l'enfant et le père s'est avérée contreproductive, participant à l'état somatique et psychique de la mineure.

De plus, alors qu'ils recommandent un placement en foyer de l'enfant, de manière à tenter un "reset", en particulier concernant la capacité de la mineure à s'investir dans la relation avec son père, sans garantie d'obtenir le résultat escompté, comme les experts le relèvent eux-mêmes, ceux-ci proposent simultanément la suspension des relations personnelles avec lui. Cette recommandation tend à démontrer que la préoccupation sous-jacente n'est pas tant le bien de l'enfant que la relation de celle-ci avec son père que l'on souhaite à tout prix contraindre, mais en constatant que cette relation problématique doit être interrompue sur une durée de plusieurs mois pour permettre l'apaisement de l'enfant.

Par conséquent, en tant qu'il a suivi la trame de ce raisonnement, le Tribunal de protection n'a pas prononcé une mesure de protection opportune ou proportionnée. En retirant la garde de l'enfant pour de mauvais motifs à sa mère, il n'a pas tenu compte de l'intérêt de l'enfant à conserver la stabilité, ses relations affectives, de son lieu de vie, de sa scolarité et de son quotidien, sans pression externe et à un apaisement général, dont le début semble avoir été récemment constaté, avant de pouvoir envisager de construire une nouvelle relation paternelle.

Dans ce but, c'est bien une suspension des relations contraintes avec son père qui doit être tentée, celle-ci ayant d'ailleurs été prononcée par le Tribunal de protection et qui sera confirmée, plutôt qu'un déracinement de l'enfant avec une coupure générale des relations parentales.

Le retrait à la mère de la garde de l'enfant et son placement, disproportionnés et inopportuns, sont donc annulés et les recours admis en conséquence. Les chiffres 1, 2, 6 et 9 du dispositif de l'ordonnance attaquée sont annulés.

5. La curatrice de l'enfant a conclu en outre à l'annulation du ch. 10 du dispositif de l'ordonnance relatif au maintien de la curatelle d'organisation du droit de visite (du père). Certes, dans la mesure où l'ordonnance prononce, à juste titre comme retenu plus haut, la suspension du droit de visite du père sur la mineure, prescription qui ne fait pas l'objet d'un recours, ladite curatelle n'a momentanément plus d'objet. Cela étant, et dans la mesure où il n'est pas exclu, dans un laps de temps plus ou moins long selon l'évolution de l'enfant, que les relations entre eux puissent reprendre, il apparaît en l'état prématuré de la supprimer.

L'ordonnance sera dès lors confirmée sur ce point.

6. La recourante C______ conteste enfin le ch. 18 du dispositif de ladite ordonnance qui met à sa charge la moitié des frais d'expertise de 10'000 fr. Dans la mesure où elle succombe partiellement dans certaines de ses conclusions en première instance et au vu de l'ensemble de la procédure et des responsabilités procédurales des parties, ainsi qu'en application de l'art 107 al. 1 lit. c CPC, cette décision n'est pas critiquable.

L'ordonnance sera confirmée sur ce point également.

7. En résumé et en définitive, les chiffres 1, 2, 6 et 9 du dispositif de l'ordonnance attaquée seront annulés, le chiffre 16 l'étant déjà, l'ordonnance étant confirmée pour le surplus.

8. La procédure, qui porte essentiellement sur des mesures de protection de l'enfant (art. 307 ss CC), est gratuite (art. 81 LaCC).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevables les recours formés respectivement les 26 février et 27 mars 2020
par  A______, représentée par sa curatrice de représentation B______, par C______ et par D______, E______, F______, G______ et H______, contre l'ordonnance
DTAE/1102/2020 rendue le 21 février 2020 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/22816/2010.

Au fond :

Annule les chiffres 1, 2, 6 et 9 du dispositif de ladite ordonnance.

Confirme l'ordonnance attaquée pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.